Cour d'appel de Montpellier, 2° chambre, 28 mai 2019, n° 16/07329

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 2° ch., 28 mai 2019, n° 16/07329
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 16/07329
Décision précédente : Tribunal de commerce de Rodez, 5 septembre 2016, N° 2015471
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2° chambre

ARRET DU 28 MAI 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 16/07329 – N° Portalis DBVK-V-B7A-M3CG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 SEPTEMBRE 2016

TRIBUNAL DE COMMERCE DE RODEZ

N° RG 2015 471

APPELANTE :

SOCIETE CJD SASU sous l’enseigne '8 A HUIT’ au capital de 2 000.00 euros inscrite au RCS de TOULOUSE sous le numéro 750 844 995 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis

[…]

[…]

[…]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES, SENMARTIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Aude DARDAILLON, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Marie-Laurence GINESTA, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

INTIMEE :

SA U PROXIMITE SUD OUEST

Z A de Veuzac

[…]

Représentée par Me Audrey VALAYER, avocat au barreau d’AVEYRON

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 Mars 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 AVRIL 2019, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre

Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller

Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Hélène ALBESA

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

— signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, greffier.

* * * *

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

La société U Proximité Sud-Ouest (UPSO) est une société anonyme coopérative de commerçants détaillants à capital variable qui a pour objet d’améliorer, par l’effort commun de ses associés, les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leur activité commerciale.

Selon ses statuts, la société UPSO peut notamment assurer, directement ou indirectement pour le compte de ses associés, la fourniture en totalité ou en partie des marchandises, denrées ou services, destinés à la revente à leur clientèle et à l’équipement de leur profession, 90 % des achats de la société devant être effectués auprès de système U centrale régionale Sud.

La SASU CJD est exploitante d’une épicerie, située à Colomiers ( 31).

Elle a adhéré à la société coopérative UPSO dans le cadre de la signature le 26 mars 2012 avec cette dernière de plusieurs contrats :

— un contrat de partenariat correspondant à « la mise au concept de son commerce alimentaire sous l’enseigne UTILE » par lequel elle s’engageait à respecter l’enseigne, à réaliser ses achats à la société UPSO et à suivre la politique de l’enseigne.

— un contrat de sous-sous-licence non exclusive de la marque UTILE, lui concédant l’utilisation de la marque « Utile » pour un usage à titre d’enseigne du magasin et pour un usage au titre de la communication notamment publicitaire dans son domaine d’activité (avec en annexe 2 I 1.2 un taux de coopération – c’est-à-dire le montant des achats auprès de la coopérative- devant être supérieur à 70%),

— un contrat de location-maintenance d’un matériel informatique et de la licence d’utilisation des programmes de ce matériel.

Par lettre recommandée du 27 juin 2013, avec effet au 27 décembre suivant dans le cadre d’un préavis de six mois, la SASU CJD a fait part à la SA UPSO de sa décision de résilier la convention

de sous-sous-licence et l’accord de partenariat pour trois motifs [marge annoncée (35 %) impossible à atteindre (22 %), livraison de produits avec des conditionnements inadaptés au magasin et prélèvement de 6,5 % du chiffre d’affaires décidé unilatéralement].

Saisi par acte délivré le 23 mars 2015 par la SASU CJD en remboursement de cotisations indues et en indemnisation, le tribunal de commerce de Rodez, par jugement du 6 septembre 2016, a :

« - (…) dit qu’UPSO a respecté les conventions conclues avec la SASU CJD,

- dit que les décisions du conseil d’administration d’UPSO sont opposables à la SASU CJD,

- débouté la SASU CJD de l’ensemble de ses prétentions,

- condamné la SASU CJD à payer à UPSO la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

- dit n’y avoir pas lieu à exécution provisoire,

- condamné la SASU CJD aux entiers dépens (…) ».

Par déclaration reçue le 6 octobre 2016, la SASU CJD a régulièrement relevé appel de ce jugement en vue de sa réformation.

La SASU CJD demande à la cour, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 10 avril 2017, de :

« - rejeter toutes conclusions contraires comme nulles et en tout cas mal fondées (…),

- dire et juger recevable et bien fondé son appel,

- vu les anciens articles 1134 et 1147 du code civil applicables à l’espèce, vu les articles L. 225-1 et suivants et L.442-6 et suivants du code de commerce,

- réformer le jugement entrepris,

- constater la mauvaise exécution, par la SA U Proximité Sud Ouest, des conventions conclues entre les parties,

- constater que la société SA U Proximité Sud Ouest a engagé sa responsabilité contractuelle,

- condamner la SA U Proximité Sud Ouest au paiement des sommes de :

' 63 051,72 euros au titre du préjudice économique direct

' 65 100,76 euros au titre du préjudice économique indirect

' 10 000 euros au titre du préjudice moral,

- vu l’appel incident de la SA UPSO, (…) débouter la société SA UPSO de son appel incident et de sa demande indemnitaire,

- (…) condamner la société SA UPSO au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code d procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’appel et de première instance, dont distraction (…) ».

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

— les facturations de la cotisation dite cotisation U et de frais de préparation (désignés par la suite comme frais de transport aval) ont été établies en violation de l’ancien article 1134 du code civil et, au surplus, de l’article L. 442-6 du code de commerce (qui est applicable, indépendamment de la nature coopérative de la société UPSO),

— les dispositions contractuelles liant les parties n’envisagent nullement le montant des prestations facturées, ni les modalités de fixation d’un tel montant laissant à son cocontractant le pouvoir de fixer unilatéralement ces éléments et créant à ce titre un grave déséquilibre dans leurs relations,

— le conseil d’administration n’avait pas le pouvoir de fixer les montants des cotisations contestées, fixation ayant ainsi un caractère potestatif, indépendamment du caractère régulier ou pas. Elle n’a jamais été convoquée à une assemblée générale pour envisager la moindre contestation,

— elle a subi un préjudice économique direct découlant des frais supportés indûment et un préjudice économique indirect résultant du changement d’enseigne.

Formant appel incident, la SA U Proximité Sud Ouest sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 29 mai 2017 :

« - vu les articles 1134 et 1147 du code civil, vu les articles R225-67 et suivants du code de commerce, vu les articles L 225-98 et suivants du code de commerce, vu les pièces versées aux débats,

- rejetant toutes conclusions contraires,

- statuant ce que de droit sur la recevabilité en la forme de l’appel interjeté par la SASU CJD du jugement rendu par le tribunal de commerce de Rodez en date du 6 septembre 2016, au fond l’en débouter,

- principalement,

- confirmer partiellement le jugement en ce qu’il :

- dit qu’UPSO a respecté les conventions conclues avec la SASU CJD,

- dit que les décisions du conseil d’administration d’UPSO sont opposables à la SASU CJD,

- débouté la SASU CJD de l’ensemble de ses prétentions,

- condamné la SASU CJD à payer à UPSO la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SASU CJD aux entiers dépens, outre leur liquidation (…)

- accueillant en la forme son appel incident et au fond y faisant droit,

- infirmer le jugement déféré en ce qu’il n’a pas fait droit à sa demande reconventionnelle au titre de son préjudice moral et, en conséquence, condamner la SASU CJD à lui porter et payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral,

- subsidiairement,

- réduire dans de très amples proportions les sommes sollicitées par la SASU CJD au titre de son prétendu préjudice direct,

- dire et juger que les préjudices indirects allégués par la SASU CJD sont injustifiés et sans lien nécessaire avec le préjudice direct, ne lui sont pas imputables et résultent de la résiliation à son initiative de la relation contractuelle ayant existé avec celle-ci,

- partant, la débouter de ses demandes indemnitaires à ce titre,

- en tout état de cause, condamner la SASU CJD au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens de l’appel dont distraction (…). »

Elle expose en substance que :

— la société CJD a été destinataire de l’ensemble des documents régissant leurs relations contractuelles et a été informée de l’évolution de la facturation en 2013,

— les cotisations institutionnelles sont prévues dans le contrat de sous-sous-licence de marque, elles correspondent à un service rendu (faisant obstacle à toute application des dispositions de l’article L.442-6 du code de commerce) et leur montant est déterminé par le conseil d’administration de la coopérative, qui en présente les évolutions en assemblée générale ordinaire,

— la facturation des frais de transport aval résulte des statuts (titre I art.2), des conditions générales de vente (chap.6) et le coût de transport aval est facturé en pied de facture lors de chaque commande/livraison au magasin à raison d’un pourcentage du montant total de la valeur de la marchandise facturée. Les modalités de facturation, décidées par le conseil d’administration de la coopérative, sont transmises par correspondance interne et sont évoquées à l’occasion de chaque assemblée générale annuelle,

— le coût des transports aval et des cotisations institutionnelles U a été décidé par délibérations du conseil d’administration et validé par les assemblées générales ordinaires afférentes. La société CJD, bien que régulièrement convoquée, n’a pas participé à ces assemblées générales,

— elle ne justifie d’aucun préjudice tandis que la présente procédure s’inscrit dans une collusion manifeste avec deux autres anciens associés (SARL Trentin et SARL Antoine) sur le même département visant à la discréditer en portant atteinte à son image de marque et à sa réputation (procédures pendantes devant la cour).

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 19 mars 2019.

Bien que régulièrement autorisées lors l’audience de plaidoiries du 9 avril 2019, les parties n’ont déposé aucune note en délibéré relative à la fin de non-recevoir, tirée du défaut de pouvoir juridictionnel de la cour en application de l’article L. 442-6 du code de commerce, soulevée d’office.

MOTIFS de la DECISION :

— sur la procédure

Les dernières conclusions de la société CJD, déposées et notifiées par voie électronique le 22 mars 2019, soit après l’ordonnance de clôture, suite à la constitution en lieu et place d’un nouvel d’avocat,

sont irrecevables en application de l’article 784 alinéa 1 du code de procédure civile.

— sur la cotisation institutionnelle et la demande de remboursement

L’annexe 3 au contrat de sous sous-licence de marques conclu, le 26 mars 2012, entre la société UPSO et la société CJD prévoit, au point 5. 1, intitulé « cotisation institutionnelle », qu’en contrepartie de l’effort engagé par le groupement dans la recherche, le packaging, le développement des produits qui portent les valeurs de l’enseigne et représentant le savoir-faire du groupement, dont bénéficie l’ensemble des commerçants associés au sein de la société coopérative, une cotisation institutionnelle est prélevée par système U et qu’elle sera répartie aux points de vente « Utile » et facturée mensuellement.

La société CJD soutient que si le principe de la cotisation figure au contrat-cadre (le contrat de sous sous-licence de marque), la fixation de ce montant est laissée à la discrétion de la société UPSO le rendant totalement potestatif en violation de l’ancien article 1134 du code civil et qu’au surplus, cette cotisation crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l’article L. 442-6 du code de commerce.

Elle prétend que la fixation du taux de la cotisation U mensuelle ne pouvait être décidée par le conseil d’administration de la coopérative, mais par l’assemblée générale ordinaire des associés.

La société UPSO fait valoir que cette cotisation, prélevée sur chaque magasin sous la forme d’un pourcentage de son chiffre d’affaires d’achats, vise à couvrir les coûts fixes et variables de la centrale nationale et/ou de la centrale régionale qui profitent à l’ensemble des commerçants détaillants regroupés au sein de la coopérative, tant au niveau commercial (négociations avec les fournisseurs, accords de coopération commerciale, négociations promotionnelles…) qu’au niveau fonctionnel (communication, réalisation de documents promotionnels, gestion financière, gestion informatique, hygiène, qualité, sécurité, environnement…).

Elle précise que les décisions du conseil d’administration, qui fixe chaque année lesdites cotisations sont conformes aux statuts.

Elle conteste tout déséquilibre dans les relations contractuelles au sens de l’article L. 442-6 du code de commerce, les cotisations étant en adéquation avec les services rendus par la coopérative.

Une fin de non-recevoir sanctionnant l’absence de pouvoir juridictionnel de la présente cour au profit de la cour d’appel de Paris, seule investie du pouvoir de statuer sur les recours formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l’application de l’article L. 442-6 du code de commerce, les demandes de la société CJD fondées sur ces dispositions seront déclarées irrecevables et ne seront examinées que sur le fondement des principes généraux relatifs à l’effet des contrats entre les parties et au devoir de loyauté pesant sur celles-ci dans leur formation et exécution.

Le jugement sera complété de ce chef.

La loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947, portant statut de la coopération, définit dans son article 1er la coopérative comme étant une société constituée par plusieurs personnes volontairement réunies en vue de satisfaire leurs besoins économiques ou sociaux par leur effort commun et la mise en place des moyens nécessaires.

Elle dispose dans son article 7 que les statuts des coopératives déterminent notamment le siège de la société, son mode d’administration, en particulier les décisions réservées à l’assemblée générale, les pouvoirs des administrateurs ou gérants, les modalités du contrôle exercé sur les opérations au nom des associés, les formes à observer en cas de modification des statuts ou de dissolution.

La société UPSO, constituée sous la forme d’une société anonyme, est régie par ses statuts et par les dispositions du code de commerce, qui lui sont applicables, notamment les articles L. 225-17 et suivants relatifs à la direction et l’administration des sociétés anonymes.

En l’occurrence, l’article 23 des statuts de la société UPSO, qui ne fait que reprendre les dispositions de l’article L. 225-35 du code de commerce, énonce notamment : « le conseil d’administration détermine les orientations de l’activité de la société et veille à leur mise en 'uvre ; il les exerce dans la limite de l’objet social, et sous réserve de ceux expressément attribués par la loi aux assemblées d’associés. Il se saisit de toutes questions intéressant la bonne marche de la société et règle, par ses délibérations, les affaires qui la concernent. (…) Tous actes d’administration et même de disposition qui ne sont pas expressément réservés à l’assemblée générale par la loi et par les présents statuts sont de sa compétence. »

Les articles L. 225-96 et L. 225-97 du code de commerce déterminent les pouvoirs dévolus à l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires et l’article L. 225-98 énonce que l’assemblée générale ordinaire prend toutes les décisions autres que celles visées aux deux articles précédents, sachant qu’en vertu de l’article L. 225-35 du même code, sous réserve des pouvoirs expressément attribués aux assemblées d’actionnaires et dans la limite de l’objet social, le conseil d’administration se saisit de toute question intéressant la bonne marche de la société et règle par ses délibérations les affaires qui la concernent.

Or, les statuts de la société UPSO confèrent à l’assemblée ordinaire l’approbation des comptes annuels, l’affectation des résultats, les augmentations ou diminutions de capital, la transformation en parts sociales de tout ou partie des ristournes et l’approbation du règlement intérieur, qui détermine, dans le cadre des statuts, les règles régissant les rapports entre la société et les associés (article 38) ; quant à l’assemblée extraordinaire, elle délibère sur les modifications des statuts, la prorogation ou la dissolution de la société (article 33).

Ainsi, le conseil d’administration, habilité à régler toute question intéressant la bonne marche de la société, pouvait valablement déterminer, par ses délibérations, le montant de la cotisation institutionnelle dont le principe avait été prévu dans les contrats de sous sous-licence de marques conclus avec chacun des membres coopérateurs, pouvoir qui n’était pas expressément réservé à l’assemblée ordinaire des associés.

C’est donc vainement que la société CJD prétend que les cotisations U, prélevées au titre des exercices 2012 et 2013, l’ont été sans fondement contractuel, alors que l’obligation, contractuellement prévue, était certaine en son principe et que son montant a été déterminé par les délibérations du conseil d’administration, conformément aux pouvoirs dévolus à celui-ci.

En l’espèce, les délibérations prises le conseil d’administration les 11 octobre 2012, 15 novembre 2012, 6 et 24 janvier 2013 ont été adoptées lors des assemblées générales ordinaires UPSO des 15 avril 2013 et 14 avril 2014, qui ont approuvé les comptes des exercices clos le 31 décembre précédant, entérinant ainsi les coûts de la coopérative sur la base des rapports de gestion établis par le conseil d’administration.

La cotisation U ou cotisation d’enseigne a ainsi été fixée, sur la base de budgets prévisionnels incluant les coûts du groupement, à 6,20 % du chiffre d’affaires d’achats de chaque magasin, notamment ceux du groupe « Utile 1 » (volume d’achats supérieur à 400 000 euros) et « Utile 2 » (volume d’achats compris entre 150 000 euros et 400 000 euros).

La société CJD ne peut prétendre ne pas avoir été régulièrement convoquée en conformité de l’article 29 des statuts (selon lequel les convocations sont faites par avis dans un journal d’annonces légales 15 jours francs au moins à l’avance, insertion complétée par l’expédition d’une lettre simple à chacun des associés), puisqu’il est produit aux débats la lettre de convocation datée du 22 mars 2013 avec

l’ordre du jour correspondant pour l’assemblée générale ordinaire du 15 avril 2013 ainsi que l’avis de convocation publié le 26 mars 2013 dans le journal « la dépêche du Midi » Aveyron et ce en application de l’article R. 225-67 du code de commerce. Elle ne soutient pas davantage avoir été empêchée d’user de son droit de consultation.

Le jugement entrepris sera dès lors être confirmé en ce qu’il a retenu que la société UPSO a respecté les conventions et que les délibérations du conseil d’administration de la société UPSO étaient opposables à la société CJD et rejeté la demande de celle-ci tendant au remboursement de la somme de 15 870,92 euros correspondant à la partie de son «préjudice économique direct» concernant la cotisation institutionnelle.

— sur la facturation des frais de transport d’aval et la demande de remboursement

L’article 2 des statuts de la société UPSO dispose que la société peut notamment exercer directement ou indirectement pour le compte de ses associés l’activité consistant à h) effectuer des opérations de transport et/ou de commissionnaire de transport dans le cadre de ses activités ci-dessus définies.

En outre, les conditions générales de vente, dont la société CJD a eu connaissance lors de son adhésion à la coopérative prévoit, à l’article 4, intitulé « prix », que les prix des commandes s’entendent départ entrepôt et qu’en cas de modification sensible des données économiques, notamment des coûts de main-d''uvre, de matières ou des transports, la société se réserve le droit de réviser les prix.

Le coût des transports aval, comme des cotisations institutionnelles U, a été décidé par délibérations du conseil d’administration de la société UPSO des 11 octobre 2012, 15 novembre 2012 et 24 janvier 2013, modifié lors du conseil d’administration du 6 juin 2013 et a été validé par les assemblées générales ordinaires des 15 avril 2013 et 14 avril 2014.

Le montant de la participation des membres coopérateurs aux frais de transport, exprimé en pourcentage du chiffre d’affaires facturé, a été déterminé par le conseil d’administration de la société UPSO par référence au coût réel du transport (le type et la nature de marchandises – alimentaires ou non, frais… -, le type de camion, le kilométrage et le temps de route et les ruptures de charges
-nombre d’arrêts -) de l’année précédente et revalorisé à compter de janvier 2013 pour tenir compte en particulier de l’augmentation des prestations du transporteur et du nombre de tournées à effectuer.

Il entrait dans les pouvoirs du conseil d’administration, comme pour la cotisation institutionnelle, de fixer la charge des frais de transport dus par les membres coopérateurs, ce qu’il a fait en opérant une distinction entre les magasins du groupe « Utile 1 » réalisant le volume d’achats supérieur 400 000 euros, auxquels a été appliqué un taux de 6,06 % en 2013, et les magasins du groupe « Utile 2 » réalisant un volume d’achats compris entre 150 000 euros et 400 000 euros, auxquels a été appliqué un taux de 8,64 % en 2013.

Contrairement à ce qu’elle soutient, la société CJD ne pouvait ignorer que les frais de transport des marchandises en provenance de la centrale d’achats devaient être assumés par elle, comme par chacun des membres coopérateurs, en pourcentage du montant du chiffre d’affaires facturé, déterminé par le conseil d’administration, comme cela a été appliqué depuis le début des relations contractuelles, le magasin bénéficiant de plusieurs livraisons par semaine depuis le dépôt situé à Villefranche de Rouergue.

La société CJD n’a élevé aucune protestation, ni réserve, à la réception des factures, qui lui ont été adressées à compter du mois de mai 2012 mentionnant en pied de facture les « frais de préparation », puis à compter de janvier 2013 le « transport aval 8,64 % », avec l’indication du montant dû jusqu’à un courriel du 14 janvier 2013, dans lequel elle interroge la société UPSO sur le montant des frais de transport aval (anciennement frais de préparation), qui ont été portés, selon elle, à 9,98 %.

Cette correspondance est concomitante à la lettre d’information adressée par la société UPSO à l’ensemble des associés afin de présenter la nouvelle méthodologie de facturation tandis que selon le courriel en réponse du même jour de la société UPSO, par l’intermédiaire de son directeur général, cette nouvelle facturation ne traduit pas une augmentation des charges pesant sur le magasin (2012 : 31,83 % et 2013 : 31,74 %).

Dans sa lettre de résiliation du 27 juin 2013, la société CJD reproche à la société UPSO de lui avoir fait miroiter une marge de 33 % non conforme à la réalité, des livraisons inadaptées à la taille du magasin avec des produits portant des dates de péremption trop brèves et lui oppose un « prélèvement de 6,5% du chiffre d’affaires depuis le 1er janvier 2013 » sans concertation.

Toutefois ce pourcentage n’est pas explicité et ne correspond ni à la cotisation U (6,20 %), ni aux frais de transport (8,64 %) tandis que la société CJD ne soutient pas qu’elle a réalisé un chiffre d’affaires facturé supérieur à 400 000 euros, lui permettant de prétendre à une facturation des frais de transport à hauteur de 6,06 % (groupe Utile 1).

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de la société CJD tendant au remboursement de la somme de 47 180,80 euros correspondant à la partie de son « préjudice économique direct » concernant les frais de transport.

— sur le préjudice économique indirect et le préjudice moral de la société CJD

La société CJD sollicite l’allocation d’une indemnisation au titre du changement d’enseigne dans le cadre de frais de réinstallation et de transformation du magasin, du coût des produits U devenus invendables à compter du 1er janvier 2014 et de la différence de prix entre les produits achetés auprès de la société UPSO et revendus aux prix pratiqués par sa nouvelle enseigne.

Elle réclame également la réparation de son préjudice moral au titre de l’atteinte à son image de marque et à sa réputation du fait de « l’exécution anarchique par UPSO de ses obligations contractuelles l’ayant acculée sous un poids de charges et de prélèvements arbitraires ».

Toutefois, ces demandes au titre de la réparation d’un préjudice économique découlent du changement d’enseigne librement choisi par la société CJD et étant elle-même à l’origine de ce qu’elle qualifie de préjudice, sa demande d’indemnisation ne pourra prospérer.

De même, elle n’étaye sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral d’aucun élément justificatif autre que ses demandes indemnitaires précédemment analysées et rejetées, alors, au demeurant, qu’elle a pu intégrer un autre réseau commercial sans difficulté apparente. Cette demande sera donc également rejetée.

Le jugement sera confirmé également de ce chef.

— sur le préjudice moral de la société UPSO

La société UPSO ne démontre pas en l’absence de la moindre pièce justificative que la présente procédure, bien qu’engagée en mars 2015 parallèlement à celles de deux autres anciens coopérateurs situés également en Haute-Garonne (alors que la résiliation des relations contractuelles était acquise depuis janvier 2014) de façon manifestement concertée, l’a discréditée en portant atteinte à son image de marque et à sa réputation.

Sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral sera donc rejetée.

Le jugement sera complété de ce chef au regard de l’effet dévolutif de l’appel, en ce qu’il a omis de statuer sur cette demande.

Succombant sur son appel, la société CJD sera condamnée aux dépens.

Au vu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la société CJD, dont la propre demande sur ce fondement ne pourra prospérer, sera condamnée à payer à la société UPSO la somme de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement,

Déclare irrecevables les conclusions de la SASU CJD, déposées et notifiées par voie électronique le 22 mars 2019,

Déclare irrecevables les demandes de la SASU CJD fondées sur les dispositions de l’article L.442-6 du code de commerce ;

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Rodez du 6 septembre 2016 dans toutes ses dispositions,

Réparant l’omission de statuer et y ajoutant,

Rejette la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral formée par la société coopérative à forme anonyme U Proximité Sud-Ouest (UPSO),

Condamne la SASU CJD à payer à la société coopérative à forme anonyme U Proximité Sud-Ouest (UPSO) la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de la SASU CJD fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SASU CJD aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

le greffier le président

ACB

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