Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 15 février 2022, n° 21/02909

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°


N° RG 21/02909 – N° Portalis DBVH-V-B7F-IEFX


YRD/ID


CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

21 juillet 2021


RG :R 21/00039


X


C/


S.A.S. TRANSDEV NIMES MOBILITE

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2022

APPELANT :

Monsieur Y X

né le […] à […]

[…]

[…]


Représenté par Me Céline QUOIREZ de la SELARL CELINE QUOIREZ, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

S.A.S. TRANSDEV NIMES MOBILITE

[…]

[…]


Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES


Représentée par Me Anne laure PERIES de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER


Affaire fixée en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Mme Joëlle TORMOS, Conseillère

Mme Marie-Lucie GODARD, Vice présidente placée

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :


À l’audience publique du 15 Décembre 2021, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 Février 2022


Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :


A r r ê t c o n t r a d i c t o i r e , p r o n o n c é p u b l i q u e m e n t e t s i g n é p a r M o n s i e u r Y v e s ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 15 Février 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. Y X a été engagé à compter du 10 avril 2010 en qualité de conducteur receveur de bus par la société Transdev Nîmes Mobilité.


Le 4 février 2021, M. Y X a été victime d’un accident du travail.


La société Transdev Nîmes Mobilité avait émis des réserves lors de la déclaration de l’accident de travail.


Le 6 mai 2021, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie refusait la prise en charge dudit accident.


Contestant le bien fondé de cette décision, M. X a saisi la formation de référé du le conseil de prud’hommes de Nîmes pour obtenir l’enregistrement vidéo de son accident et 1.000,00 euros de provision à valoir sur le préjudice dû à la résistance abusive de l’employeur laquelle, par ordonnance contradictoire du 21 juillet 2021, a :


Vu les dispositions des articles R1455-5 et R1455-8 du Code du Travail,


- dit qu’il n’y a pas lieu à référé,


- condamné M. Y X à une amende civile de 120.00 euros au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile,
- débouté la société Transdev Nîmes Mobilité de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700,


- mis les dépens à la charge du demandeur.


Par acte du 28 juillet 2021, M. Y X a régulièrement interjeté appel de cette décision.


L’affaire a été appelée à bref délai à l’audience du 15 décembre 2021.


Aux termes de ses dernières conclusions en date du 16 août 2021, M. Y X demande à la cour de :

Vu le Règlement général de la protection des données,

Vu les articles R 1455- et R 1455-7 du Code de travail,


- infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé et le condamné au paiement d’une amende civile de 120 euros,


La réformant :


- dire et juger qu’il était en droit d’obtenir copie de l’enregistrement vidéo du bus qu’il conduisait le 4 février 2021,


- dire que le refus opposé à cette remise par la société Transdev Mobilités constituait un trouble manifestement illicite,


- lui allouer la somme de 1000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice résultant de la résistance abusive de la société Trasndev,


- condamner la SAS Transdev Nîmes Mobilités à régler lui la somme de 3000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.


Il soutient que :


- selon la loi du 20 juin 2018 un dispositif vidéo permettant l’enregistrement vidéo du salarié sur le lieu de travail constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de la RGPD,

le droit d’accès du salarié implique celui de s’en faire remettre une copie,


- les parties ont en effet été convoquées par le greffe du conseil de prud’hommes le 7 juin 2021 et ce n’est qu’à réception de cette convocation que l’employeur a enfin transmis l’enregistrement vidéo sollicité,


- le refus opposé par l’employeur n’a pas permis une prise en charge de l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels et est à l’origine d’une perte de revenus.


En l’état de ses dernières écritures en date du 15 septembre 2021, la SAS Transdev Nîmes Mobilité demande à la Cour de :


- confirmer dans toutes ses dispositions l’ordonnance rendue par la formation des référés du conseil de prud’hommes de Nîmes le 21 juillet 2021, à savoir en ce qu’elle a :

'- dit qu’il n’y a pas lieu à référé ; - condamné M. Y X à une amende civile de 120 euros au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile ;

- débouté la société Transdev Nimes Mobilite de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 code de procédure civile ;

- mis les dépens à la charge du demandeur'


Par conséquent :


A titre principal :


- constater l’incompétence de la formation des référés pour connaitre des demandes de M. Y X;


- dire n’y avoir lieu à référé


- renvoyer M. Y X à mieux se pourvoir ;


- condamner M. Y X à une amende civile de 120 euros au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile ;


A titre subsidiaire :


- constater le caractère infondé des demandes de M. Y X;


- débouter M. Y X de l’ensemble de ses demandes ;


En tout état de cause:


- condamner M. Y X à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.


Elle fait valoir que :


- le requérant ne remplit aucune des conditions de recours à la formation des référés en l’espèce, en effet la demande du requérant ne concerne pas un litige sur le contrat de travail mais un litige avec la CPAM,


- l’enregistrement vidéo du bus a été librement visionné par M. X dès le 8 avril 2021,


- M. X était informé dès le 22 avril 2021 qu’il était conservé pour les besoins de la procédure en cours


- M. X était informé dès le 22 avril 2021 que la déléguée à la protection des données se tenait à sa disposition,


- cet enregistrement a bien été adressé au Conseil de M. X le 17 juin 2021,


- M. X ne peut se prévaloir d’aucun préjudice car rien ne démontre que la communication à la CPAM de l’enregistrement litigieux l’aurait amenée à rendre une décision de prise en charge.


Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande en référé


Selon l’article R1455-5 du code du travail « Dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. »


L’article R1455-6 poursuit « La formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »


Et l’article R1455-7 complète « Dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire. »


En l’espèce, l’urgence de faire reconnaître par la Caisse primaire d’assurance maladie le caractère professionnel de l’accident par lui subi autorisait M. X à saisir la formation de référé pour obtenir la communication de l’enregistrement vidéo de cet accident.

Sur les demandes de M. X


Le règlement général de protection des données (RGPD), texte réglementaire européen qui encadre le traitement des données de manière égalitaire sur tout le territoire de l’Union Européenne, est entré en application le 25 mai 2018 et a pour objectifs de renforcer les droits des personnes, responsabiliser les acteurs traitant des données et de crédibiliser la régulation grâce à une coopération renforcée entre les autorités de protection des données.


Le traitement de données peut consister en un enregistrement s’agissant d’une donnée personnelle décrite par la CNIL comme « toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable ».


Chaque personne qui fait l’objet d’une collecte de données personnelles, doit être informée de son droit d’obtenir gratuitement une copie des données la concernant.


En effet l’article 15 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement Européen et du conseil du 27 avril 2016 prévoit que «le responsable du traitement fournit une copie des données à caractère personnel faisant l’objet d’un traitement» ce que rappelle l’article 49 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

M. X a justement saisi la formation de référé pour obtenir copie de l’enregistrement vidéo de l’ accident du travail dont il prétend avoir été victime après l’avoir vainement réclamé à son employeur par courriers de son conseil des 9 avril 2021 et 29 avril 2021.


Ce n’est que par l’effet d’une procédure prud’homale que l’employeur a accédé aux demandes de M. X, celui-ci ayant saisi la formation de référé le 7 juin 2021 alors que la transmission de l’enregistrement vidéo au conseil du salarié n’est intervenue que le 17 juin 2021.


L’action de M. X était donc parfaitement fondée. L’ordonnance déférée est en voie de réformation.


La résistance abusive opposée par la SAS Transdev Nîmes Mobilité a causé un préjudice à M. X qui sera réparé par l’octroi d’une indemnité de 500,00 euros.
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner la SAS Transdev Nîmes Mobilité à payer à M. X la somme de 1.500,00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort


- Infirme l’ordonnance déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,


- Dit que M. X était en droit d’obtenir copie de l’enregistrement vidéo du bus qu’il conduisait le 4 février 2021,


- Dit que le refus opposé à cette remise par la société Transdev Mobilité constituait un trouble manifestement illicite,


- Condamne la SAS Transdev Nîmes Mobilité à payer à M. X la somme de 500,00 euros à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice résultant de la résistance abusive de la société Trasndev,


- Condamne la SAS Transdev Nîmes Mobilité à payer à M. X la somme de 1.500,00 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,


- Condamne la SAS Transdev Nîmes Mobilité aux dépens de première instance et d’appel.


Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Madame DELOR, Greffière.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Nîmes, 5ème chambre sociale ph, 15 février 2022, n° 21/02909