Cour d'appel d'Orléans, 18 décembre 2014, n° 14/00597

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Orléans, 18 déc. 2014, n° 14/00597
Juridiction : Cour d'appel d'Orléans
Numéro(s) : 14/00597
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Orléans, 29 janvier 2014

Texte intégral

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 18/12/2014

Me Estelle GARNIER

SELARL LUGUET DA COSTA

ARRÊT du : 18 DECEMBRE 2014

N° : 477 – 14 N° RG : 14/00597

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d’ORLEANS en date du 30 Janvier 2014

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscaL dématérialisé N°: 1265134444895639

La SARL DEMEURES TERRE ET Y

XXX

XXX

représentée par Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d’ORLÉANS,

assistée de Me Gilbert ABOUKRAT de la SCP ABOUKRAT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,

D’UNE PART

INTIMÉE : – Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265143836611791

La SARL CONSEILS ET MISE EN RELATIONS (C.M. R)

Société à Responsabilité Limitée, exerçant sous le nom commercial C.M. R., au capital de 1.000 €, immatriculée au RCS d’ORLEANS sous le numéro B 538 985 201, dont le siège social est situé XXX, représentée par son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social.

XXX

XXX

représentée par Me Arthur DA COSTA de la SELARL LUGUET DA COSTA, avocat au barreau d’ORLÉANS,

assistée de Me Ludovic BOUCHET, avocat au barreau de CRETEIL

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL en date du : 14 Février 2014.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 23 octobre 2014.

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l’audience publique du 20 NOVEMBRE 2014, à 14 heures, devant Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre, par application de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :

Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité,

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller,

Monsieur Thierry MONGE, Conseiller.

Greffier :

Madame Anne-Chantal PELLÉ, Greffier lors des débats et du prononcé.

Prononcé le 18 DECEMBRE 2014 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Par contrat en date du 2 décembre 2011 que les parties ont entendu expressément soumettre aux dispositions des articles L 134 ' 1 et suivants du code de commerce régissant les rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, la société Demeures Terre et Y a confié à la société Conseils et Mise en Relations la commercialisation de maisons individuelles.

Il était prévu une période d’essai de douze mois à l’expiration de laquelle le contrat serait réputé à durée indéterminée.

Par lettre du 12 juin 2012, la société Demeures Terre et Y a notifié à la société Conseils et Mise en Relations sa décision de mettre un terme aux relations contractuelles à l’issue du préavis d’un mois prévu au contrat.

C’est dans ces conditions que la société Conseils et Mise en Relations qui considérait la rupture abusive et se plaignait en outre de commissions restées impayées, a saisi, le 20 mars 2013 le tribunal de commerce d’Orléans, lequel, par jugement en date du 30 janvier 2014, a dit que le contrat du 2 décembre 2011 ne constituait pas un contrat d’agent commercial au sens des articles L 134 ' 1 et suivants du code de commerce et a condamné la société Demeures Terre et Y à payer à la société Conseils et Mise en Relations la somme TTC de 34'728,78 euros au titre des commissions, celle de 52'500 euros au titre du préjudice subi et celle de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour requalifier le contrat d’agence commerciale en mandat d’intérêt commun, les premiers juges ont relevé, à la lecture des articles 5 ' 3 et 5 ' 6 du contrat, que la société Conseils et Mise en Relations n’avait aucun pouvoir réel de négociation et que son rôle se limitait à un pouvoir de présentation des clients potentiels et à la constitution des différents dossiers, administratif, technique et financier.

S’agissant des commissions, ils ont considéré que la société Conseils et Mise en Relations ne pouvait y prétendre sur le chantier Z, dès lors que celui-ci ne s’était pas réalisé.

S’agissant des affaires Perrouin et X pour lesquelles la société Demeures Terre et Y s’opposait au paiement de commissions au motif qu’elle n’avait pas validé les dossiers, ils ont considéré qu’il s’agissait d’une condition potestative et, comme telle, nulle, tandis qu’il n’était pas démontré que les deux chantiers n’eussent pas été réalisés.

Enfin, tout en considérant que la rupture des relations contractuelles ne présentait pas de caractère abusif, ils ont sanctionné, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, la man’uvre dolosive de la société Demeures Terre et Y qui avait consisté à faire croire à la société Conseils et Mise en Relations qu’elle signait un contrat avec le statut particulier d’agent commercial, alors que la réalité juridique se révélait toute autre, ainsi que la rupture d’un contrat de mandat d’intérêt commun.

La société Demeures Terre et Y a régulièrement interjeté appel de cette décision le 14 février 2014.

Reprochant aux premiers juges d’avoir dénaturé le contrat en refusant de faire application du statut des agents commerciaux, elle a soutenu que la stipulation d’une période d’essai dans un contrat d’agence commerciale n’était pas interdite, que la rupture du contrat pendant cette période n’était subordonnée à aucun préalable de négociation et n’avait pas à être motivée, qu’elle n’était pas abusive et qu’elle ne saurait donner lieu au versement d’une quelconque indemnité.

S’agissant des commissions, elle a approuvé les premiers juges de les avoir refusées sur le dossier Z, mais a en revanche contesté le versement de commissions dans les dossiers Perrouin et X, alors qu’elle les avait refusés comme elle en avait le droit, contestant sur ce point la référence par le tribunal à une condition potestative.

Elle a conclu, en conséquence, à l’infirmation du jugement entrepris et au débouté de la société Conseils et Mise en Relations de toutes ses demandes.

Elle a sollicité une somme de 15'000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Conseils et Mise en Relations a, de son côté, critiqué la requalification du contrat par les premiers juges et sa motivation, affirmant qu’elle avait un réel pouvoir de négociation, contrairement à ce qu’avait retenu le tribunal.

Elle a ensuite fait valoir que le dossier Z avait été validé par la société Demeures Terre et Y, que les dossiers Perrouin et X avaient été traités et que la décision de la société Demeures Terre et Y de les écarter ne répondait à aucune raison valable.

Elle a estimé enfin qu’elle avait droit à l’indemnité compensatrice prévue à l’article L 134 ' 12 du code de commerce et que, de plus, la rupture ayant été abusive, elle pouvait prétendre à l’indemnisation du préjudice résultant de la perte de commissions jusqu’à la date conventionnellement prévue de la cessation du contrat.

Elle a conclu, en conséquence, à l’infirmation partielle du jugement entrepris en ce qu’il lui avait refusé une commission sur le dossier Z et insuffisamment indemnisé son préjudice.

Elle a sollicité une somme de 13'352,32 euros sur le dossier Z, une somme de 217'425,39 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préjudice subi du fait de la rupture du contrat d’agence commerciale, ainsi qu’une somme de 289'900,60 euros à titre de réparation pour le préjudice subi du fait de la rupture abusive du contrat d’agence commerciale ou subsidiairement du contrat ayant lié les parties.

Elle a enfin réclamé une somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 octobre 2014.

La société Conseils et Mise en Relations en a sollicité la révocation, ainsi que le rejet des débats des pièces visées dans les dernières écritures de la société Demeures Terre et Y signifiées le 17 octobre 2014.

La société Demeures Terre et Y s’est opposée à cette demande.

SUR CE,

Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture et de rejet de pièces des débats :

Attendu que les conclusions de la société Demeures Terre et Y du 17 octobre 2014 répliquaient aux conclusions de la société Conseils et Mise en Relations du 1er octobre 2014,signifiées la veille du jour où il était prévu de longue date de clôturer l’instruction de l’affaire ;

Que la société Demeures Terre et Y a obtenu un report de la clôture au 23 octobre 2014 et reconclu six jours plus tôt ;

Que ses conclusions ne contiennent aucun moyen, aucune argumentation nouveaux auxquels la société Conseils et Mise en Relations n’ait pas pu répondre dans le laps de temps qui lui restait avant la clôture ;

Qu’il n’y a dès lors pas lieu de révoquer l’ordonnance de clôture ;

Attendu que, s’agissant des pièces figurant au bordereau annexé aux conclusions de l’appelante du 17 octobre 2014, numérotées de 1 à 29 , les vingt-trois premières ont été régulièrement communiquées le 21 juillet 2014 ainsi qu’en attestent les accusés de réception du Réseau privé virtuel des avocats, il n’existe pas de pièce n° 24, les pièces 25 à 27 concernent une décision de jurisprudence , un article de doctrine et un texte de loi tous publiés, la pièce n° 28 n’a aucun intérêt et la pièce n° 29 est connue depuis la première instance puisqu’elle avait fondé la décision des premiers juges de ne pas allouer de commissions à la société Conseils et Mise en Relations pour le dossier Z ;

Qu’il n’y a dès lors pas lieu de rejeter ces pièces des débats ;

Sur la qualification du contrat :

Attendu que le contrat a été expressément qualifié de contrat d’agence commerciale par les parties et qu’aucune ne remet en cause cette qualification devant la cour ;

Qu’ainsi, la société Demeures Terre et Y, qui pourtant soutenait le contraire devant les premiers juges qui l’ont suivie, admet aujourd’hui que la société Conseils et Mise en Relations disposait d’un réel pouvoir de négociation ;

Qu’il convient dès lors d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié le contrat en mandat d’intérêt commun ;

Sur l’indemnité compensatrice et l’indemnité pour rupture abusive :

Attendu que le statut des agents commerciaux, qui suppose pour son application que la convention soit définitivement conclue, n’interdit pas une période d’essai ;

Attendu que les parties avaient convenu de faire précéder l’exécution du contrat d’une période d’essai de douze mois, à laquelle elles pouvaient mettre fin à tout moment moyennant le respect d’un préavis de quinze jours le premier mois et d’un mois les mois suivants ;

Que, dans ce cas, l’indemnité compensatrice prévue par l’article L 134 ' 12 du code de commerce, n’est pas due ;

Attendu que la dénonciation du contrat en période d’essai n’a pas à être motivée ou, si elle l’est, ne doit pas caractériser un abus de droit ;

Qu’en l’espèce, la société Demeures Terre et Y a motivé la rupture essentiellement par le très faible nombre de ventes réalisées par la société Conseils et Mise en Relations en cinq mois d’activité ;

Que ce fait n’est pas contesté par la société Conseils et Mise en Relations, laquelle tente seulement, sans en apporter la preuve, d’en faire peser la responsabilité sur la société Demeures Terre et Y ;

Qu’il est de fait qu’alors que l’objectif prévu au contrat était de réaliser vingt-cinq ventes par an, la société Conseils et Mise en Relations n’en avait réalisé qu’une seule en cinq mois ;

Que la société Demeures Terre et Y pouvait dès lors légitimement avoir des doutes sur la capacité de la société Conseils et Mise en Relations à exécuter le contrat d’agence commerciale ;

Que la société Demeures Terre et Y, qui n’avait pas spécialement à lui adresser en période d’essai la mise en demeure préalable prévue à l’article 9 du contrat, a pu régulièrement mettre un terme à la période d’essai après avoir respecté le préavis contractuel d’un mois ;

Qu’il convient dès lors de débouter la société Conseils et Mise en Relations de ses demandes d’indemnités ;

Sur les commissions :

' Vente Z :

Attendu que, selon l’article 8 du contrat, le mandataire avait droit à des commissions sur les ventes « acceptées » par le mandant ;

Qu’à aucun moment, il n’y est précisé que la vente doit être effectivement réalisée ;

Qu’en l’espèce, la société Demeures Terre et Y a confirmé à la société Conseils et Mise en Relations, par courrier en date du 17 septembre 2012, que le dossier Z était « validé » ;

Qu’elle justifiait seulement son refus de payer la commission par le fait que le client n’avait pas donné suite, tout en tentant, sans en apporter la preuve, d’en faire peser la responsabilité sur la société Conseils et Mise en Relations, étant au surplus observé que Monsieur Z a dénoncé son contrat le 11 septembre 2012, alors que la société Demeures Terre et Y avait mis fin à la période d’essai trois mois plus tôt ;

Que la « validation » du dossier vaut « acceptation » de la vente, que la société Conseils et Mise en Relations a exécuté sa prestation sans faute prouvée de sa part et qu’il n’existe dès lors aucun motif de lui refuser sa commission ;

Que le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef et que la société Demeures Terre et Y paiera à la société Conseils et Mise en Relations la somme de 13'352,32 euros ;

' Ventes X et Perrouin :

Attendu que si la validation des dossiers de vente n’est pas soumise à une condition potestative, en ce qu’elle ne peut pas dépendre du bon vouloir de la société Demeures Terre et Y, il appartient à celle-ci de justifier du caractère réel et sérieux de son refus ;

Attendu qu’en l’espèce, dans son courrier du 17 septembre 2012, la société Demeures Terre et Y a expliqué que 'les dossiers X et Perrouin ont bien été validés sur l’aspect technique par Monsieur C D. Cependant les éléments financiers et administratifs n’ont pas reçu de validation de notre part. Ni le directeur commercial, Monsieur A B, ni votre gestionnaire Madame E D, n’ont apposé leur signature sur la fiche de validation';

Que s’il s’agit uniquement de signatures manquantes de préposés de la société Conseils et Mise en Relations , qu’il suffisait à la société Demeures Terre et Y de demander, puisque la société Conseils et Mise en Relations n’était plus son agent commercial en septembre 2012, le motif apparaît fallacieux ;

Qu’au demeurant, la société Demeures Terre et Y ne le reprend pas dans ses conclusions, expliquant son refus 'par l’inadéquation des dossiers à (ses) exigences financières et administratives';

Que ce motif qui n’est pas plus explicité, est donc inopérant et ne l’autorisait pas à refuser de valider les dossiers ;

Que les premiers juges seront donc approuvés de l’avoir condamnée à payer les commissions de la société Conseils et Mise en Relations ;

Sur l’article 700 et les dépens :

Attendu que, dès lors qu’il n’est fait droit que partiellement aux prétentions des parties, l’équité commande de ne pas allouer d’indemnités de procédure et chacune conservera à sa charge les dépens qu’elle a exposés ;

PAR CES MOTIFS,

DIT n’y avoir lieu à révocation de l’ordonnance de clôture, ni à rejet des débats des pièces de la société Demeures Terre et Y ;

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Demeures Terre et Y au paiement de la somme de 34'728,78 euros au titre des commissions dues sur les dossiers X et Perrouin ;

L’INFIRME pour le surplus ;

STATUANT À NOUVEAU,

DIT n’y avoir lieu à requalification du contrat d’agence commerciale du 2 décembre 2011 ;

CONDAMNE la société Demeures Terre et Y à payer à la société Conseils et Mise en Relations la somme de treize mille trois cent cinquante-deux euros trente-deux centimes (13'352,32 euros) au titre de la commission due sur le dossier Z .

DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes ;

DIT que chacune conservera à sa charge les dépens de première instance et d’appel qu’elle a exposés.

Arrêt signé par Monsieur Alain RAFFEJEAUD, président de chambre et Madame Anne-Chantal PELLÉ, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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