Confirmation 16 mai 2019
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Sur la décision
| Référence : | CA Orléans, ch. com., 16 mai 2019, n° 18/00982 |
|---|---|
| Juridiction : | Cour d'appel d'Orléans |
| Numéro(s) : | 18/00982 |
| Décision précédente : | Tribunal de grande instance de Montargis, 20 décembre 2017 |
| Dispositif : | Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée |
Sur les parties
| Président : | Elisabeth HOURS, président |
|---|---|
| Avocat(s) : | |
| Cabinet(s) : | |
| Parties : | Société SCAF DES TERRES ET BOIS, Société SCI DE MARCHAIS EN BURLY |
Texte intégral
COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 16/05/2019
ARRÊT du : 16 MAI 2019
N° : 206 – 19
N° RG 18/00982 – N° Portalis DBVN-V-B7C-FVIV
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 21 Décembre 2017
PARTIES EN CAUSE
APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265213837046493
- Monsieur J Y D’Z
né le […] à […]
[…]
[…]
Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL – FIRKOWSKI, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me O-Hubert PORTEJOIE, membre de la SCP PORTEJOIE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
- Monsieur O-P Y D’Z
né le […] à […]
[…]
[…]
Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL – FIRKOWSKI, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me O-Hubert PORTEJOIE, membre de la SCP PORTEJOIE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
- Madame L-K Y D’Z
née le […] à […]
[…]
[…]
Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL – FIRKOWSKI, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me O-Hubert PORTEJOIE, membre de la SCP PORTEJOIE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
- Madame D Y D’Z épouse X
née le […] à […]
[…]
[…]
Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL – FIRKOWSKI, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me O-Hubert PORTEJOIE, membre de la SCP PORTEJOIE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
D’UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265230134057427
Madame G A
née le […] à […]
[…]
[…]
Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me Marc PERROT, membre de la SCP PIRO ET PERROT, avocat au barreau de PARIS,
—
Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265230133818710
SCI DE MARCHAIS EN BURLY
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
Marchais Creux '
Dampierre en Burly
45570 OUZOUER-SUR-LOIRE
Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me David TAVERNIER, membre de la SELARL JOFFRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,
La Société SCAF DES TERRES ET BOIS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
[…]
[…]
Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d’ORLEANS et pour avocat plaidant Me David TAVERNIER, membre de la SELARL JOFFRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,
D’AUTRE PART
DÉCLARATION D’APPEL en date du : 10 Avril 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 24 Janvier 2019
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l’audience publique du 14 MARS 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur O-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l’article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur O-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur O-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Madame L-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé le 16 MAI 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE :
La SCI DE MARCHAIS EN BURLY (la SCI) est propriétaire d’un domaine de 330 hectares sis à Dampierre-en-Burly et Nevoy qu’elle administre et exploite en territoire de chasse.
Son capital social, divisé en 1.500 parts, était initialement réparti entre les époux Y d’Z/A et leurs trois enfants, à proportion de 963 parts à G A épouse Y d’Z, 263 parts à son mari de l’époque O-P Y d’Z qui était gérant minoritaire, 92 parts à L-K Y d’Z, 92 parts à D Y d’Z épouse X, et 90 parts à J-M Y d’Z.
À la suite de dissensions entre les associés et du divorce de Madame A et de Monsieur Y d’Z, un mandataire ad hoc a été désigné en février 2005 pour convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour la révocation du gérant.
Madame A est devenue gérante le 13 octobre 2005.
Le 13 avril 2015, elle a cédé ses 963 parts à la SCAF TERRES ET BOIS et remis sa démission de ses fonctions de gérante. Une assemblée générale des associés a été convoquée pour le 5 mai 2015 afin de constater cette démission, délibérer sur la candidature aux fonctions de co-gérants de B, C et H I, mettre à jour les statuts pour tenir compte de la nouvelle répartition du capital et approuver les comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2014.
Les consorts Y d’Z ont alors saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Montargis pour voir constater la nullité de la cession et des délibérations soumises à l’assemblée générale.
Par ordonnance du 9 juillet 2015, ce magistrat a dit n’y avoir lieu à référé et a renvoyé les demandeurs à se pourvoir devant le tribunal de grande instance de Montargis où était pendante une instance aux mêmes fins.
En effet L-K, D, J-M et O-P Y D’Z avaient saisi cette juridiction en lui demandant de :
— constater que la cession de parts sociales intervenue le 13 avril 2015 entre Madame A et la SCAF DES TERRES ET BOIS aurait dû être notifiée à la totalité des associés de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et agréee par ces derniers,
— déclarer et/ou ordonner que la cession des parts sociales réalisée entre Madame A et la SCAF est nulle et non avenue et inopposable à la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et aux demandeurs,
— A titre subsidiaire, constater qu’à la date de l’assignation, la cession de parts sociales intervenue n’a pas été notifiée et/ou agréée par la totalité des associés de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et de la dire nulle et non avenue et inopposable à la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et aux demandeurs,
— A titre plus subsidiaire, constater que l’agrément qui a été donné sans informer les autres associés par la gérante Mme G A, en faveur de la cession de ses
propres parts sociales à un tiers, est abusif, contraire à l’intérêt social et constater que la cession est nulle et non avenue et inopposable à la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et aux demandeurs,
— En tout état de cause donner acte de ce que tous les associés de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY, et notamment les demandeurs, ont, pour une durée illimitée, la libre et pleine jouissance des biens immobiliers appartenant à la société et, notamment, de la grande maison d’habitation,
— Donner acte de ce que L-K et D Y D’Z sont également bénéficiaires d’un bail ayant pour objet la grande maison d’habitation,
— Donner acte de ce que tous les associés de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY, et notamment les demandeurs, bénéficient, en application de l’article 10 III de la loi du 31 décembre 1975, d’un droit de préemption en cas de cession des parts de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY propriétaire de l’immeuble dont ils sont occupants de bonne foi et/ou locataires,
— Constater que ce droit de préemption n’a pas été respecté et, en conséquence, déclarer et/ou ordonner que la cession de parts sociales intervenue est nulle et non avenue et inopposable à la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et aux demandeurs,
— Constater que, de la nullité de la cession et de son inopposabilité à la SCI DE MARCHAIS EN
BURLY, découle aussi la nullité des assemblées générales convoquées pour le 5 mai 2015 et visant à désigner des cogérants qui sont l’émanation du cessionnaire des parts et à modifier les statuts avec la mention de ce cessionnaire des parts,
— A titre encore plus subsidiaire, de condamner Mme A au paiement de dommages et intérêts à hauteur de 780.685 euros du fait de sa mauvaise foi dans les négociations, soit le prix d’une part sociale vendue aux nouveaux acquéreurs multiplié par les 537 parts des consorts Y D’Z et à leur verser une indemnité de procédure de 15.000 euros.
Par jugement du 1er décembre 2015, confirmé par arrêt de cette cour du 24 octobre 2016, le tribunal d’instance de Montargis a ordonné l’expulsion des consorts O-P, L-K, D et J-M Y d’Z de l’ensemble des biens immobiliers appartenant à la société.
O-P, L-K, D et J-M Y d’Z ont par ailleurs saisi, par acte du 11 janvier 2016, le président du tribunal de grande instance de Montargis, statuant en référé, d’une action fondée sur les articles 808 et 809, alinéa 1er, du code de procédure civile, 1839 du code civil et 20 des statuts de la société, tendant à voir constater que la formalité du 10 août 2015 par laquelle la SCI a déposé et fait publier les statuts mis à jour est intervenue alors qu’aucune modification des statuts n’avait été approuvée par l’assemblée générale extraordinaire, et voir ordonner en conséquence à la SCI d’avoir à procéder à toutes formalités destinées à faire apparaître qu’aucune modification des statuts n’est intervenue et que les statuts en vigueur sont toujours ceux déposés le 30 octobre 2002 sous le numéro 1579.
Par ordonnance du 19 mai 2016, confirmée par arrêt de cette cour, le juge des référés a dit que les défendeurs n’étaient pas dépourvus d’intérêt à agir, a déclaré leur demande recevable mais les en a déboutés en mettant à leur charge les dépens de l’instance et une indemnité de procédure.
Par jugement en date du 21 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Montargis a débouté les consorts Y Q de leurs demandes sus exposées et les a condamnés à payer, d’une part à Madame A, d’autre part à la SCl DE MARCHAIS EN BURLY et enfin à la SCAF DES TERRES ET BOlS la somme de 2. 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les consorts Y Q ont relevé appel de cette décision par déclarations en date du 21 février et du 10 avril 2018 et les dossiers ont été joints par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 2 mai 2018.
Ils en poursuivent l’infirmation en demandant à la cour de déclarer nulle, non avenue et inopposable à la SCI et à eux-mêmes la cession de parts sociales intervenue le 13 avril 2015 entre Madame E et la SCAF DES TERRES ET BOlS. A titre subsidiaire, et si la cession de parts intervenue devait être considérée comme valable ils réclament condamnation de Madame E à leur payer la somme de 780.685 euros à titre de dommages et intérêts. Ils réclament enfin condamnation solidaire de Madame A et de la SCAF DES TERRES ET BOIS à payer à chacun d’eux une indemnité de procédure de 2.000 euros ainsi qu’à supporter les dépens.
Ils font valoir que la cession réalisée est nulle en l’absence de notification à tous les autres associés et d’agrément de leur part et en l’absence de notification régulière à la gérante. (I)
A titre subsidiaire, ils soutiennent que Madame A, en sa qualité de gérante, et se trouvant en conflits d’intérêts, ne pouvait pas agréer cette cession. (II)
A titre encore plus subsidiaire, ils prétendent que l’agrément qui a été donné par Madame A, en sa qualité de gérante, est abusif, contraire à l’intérêt social et donc nul et de nul effet.
(III)
Ils font valoir que les associés de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY ont, pour une durée illimitée, la libre et pleine jouissance des biens immobiliers appartenant à la SCI et notamment de la grande maison d’habitation et bénéficiaient en tout état de cause, d’un droit de préemption dont la violation entraîne également la nullité de la cession de parts. (IV)
Ils soutiennent également que de la nullité de la cession et de son inopposabilité à la SCI découle en conséquence la nullité des assemblées convoquées pour le 5 mai 2015. (V).
Si la cession de parts intervenue devait être considérée comme valable et opposable, ils affirment que Madame A doit être sanctionnée pour sa mauvaise foi dans le cadre de la négociation qui aurait dû conduire à la cession des parts sociales au profit des associés (VI).
Après avoir rappelé qu’ils ont toujours utilisé les biens immobiliers dépendant de la SCI comme une demeure familiale, pour les vacances et les week end, ils exposent qu’en raison de la situation conflictuelle, entièrement imputable à Madame A, ils ont proposé à cette dernière dès l’année 2009 de lui racheter ses parts sociales ; que Madame A a refusé et a continué d’utiliser les biens immobiliers appartenant à la SCI ; qu’elle leur a cependant fait connaître le 23 février 2015, qu’elle souhaitait dorénavant vendre ses parts sociales pour un prix global de 2.000.000 euros ; qu’un accord verbal est intervenu le 10 avril 2015 sur la vente des parts de Madame A au profit de ses enfants moyennant le prix de 1.300.000 euros, devant être financé par un emprunt bancaire et par des contributions familiales ; que Madame A a finalement refusé cette cession et les a informés le 17 avril 2015 que la cession de ses parts sociales était intervenue le 13 avril 2015 au profit de la SCAF DES TERRES ET BOlS moyennant le prix de1.400.000 euros ; que Monsieur B I, Monsieur C I et Monsieur H I sont devenus cogérants de la SCI qui a obtenu leur expulsion des lieux qu’ils occupaient.
I/ Ils font valoir que les statuts contiennent la clause suivante : 'Les parts d’intérêt pourront être cédées soit entre associés, soit aux étrangers. Dans ce dernier cas, la cession sera soumise aux conditions du paragraphe suivant : A cet effet, toute cession devra être notifiée par le cédant à la société, par lettre recommandée indiquant les nom, prénoms, profession, nationalité et domicile du cessionnaire et le nombre de parts dont la cession est envisagée. Dans les 15 jours de cette notification, la gérance statuera à la majorité de ses membres sur l’acceptation ou le refus de la cession proposée.' ; que le tribunal a retenu que la notification de la cession était prévue exclusivement à la gérance, avec acceptation ou refus de celle-ci dans les 15 jours et non pas par les associés alors qu’en application de l’article 1156 du code civil, cette disposition doit être interprétée de façon à tenir compte de la commune intention des parties ; qu’en effet la SCI a depuis l’origine été administrée par un seul gérant et qu’il était donc incohérent de prévoir que l’agrément devrait être donné à la majorité de la gérance, que l’article 14 des statuts, qui énumère les pouvoirs du gérant, ne fait nulle référence au pouvoir d’agréer les cessions de parts sociales et que les précédentes cessions de parts ont été agréées par la totalité des associés. Et ils soutiennent qu’en conséquence l’article 1861 du code civil qui énonce que dans le silence des statuts, les parts sociales ne peuvent être cédées qu’avec l’agrément de tous les associés, doit recevoir application. Ils soulignent par ailleurs que la notification de la cession faite à la gérante n’est pas régulière puisque n’y a pas été joint le projet de cession et que la demande d’agrément ne comprend pas les conditions essentielles (notamment le prix) de la cession envisagée.
II/ Ils soutiennent par ailleurs que Madame A, qui cédait ses propres parts, se trouvait dans un conflit d’intérêts pour agréer la cession en sa qualité de gérante et que même en l’absence de dispositions légales sur ce point elle n’aurait pas dû procéder seule à cet agrément.
III/ Ils prétendent que même si à l’origine, l’objet social de la SCI n’excluait pas expressément la
cession de parts à un tiers, dans les faits, cette société a acquis au fil des ans un caractère familial, excluant, de fait, une cession de parts à une entité étrangère à la famille ; que dans un tel contexte d’utilisation des biens en famille, il est évident que la cession des parts sociales à un tiers étranger à la société et à la famille est préjudiciable à la SCI et source d’inévitables conflits entre les associés, ce qui compromet le bon fonctionnement de la société ; que, bien que le gérant est tenu d’agir dans le seul intérêt de cette dernière, Madame A a délibérément et malicieusement agi contre l’intérêt de la SCI, dans le seul but de léser les autres membres de la famille qui étaient ses associés, en raison de dissensions existantes entre eux; qu’un tel agrément abusif et contraire à l’intérêt social est donc nul et ne peut pas consentir la cession valable de parts sociales précitées ; que l’article 1849 du code civil limite les pouvoirs du gérant à l’objet de la société dans lequel la vente ou la cession n’est pas prévue ; que le projet de cession de la majorité des parts équivaut à une vente de l’immeuble appartenant à la société, une telle vente n’étant pas prévue dans l’objet de la société et le gérant n’ayant pas pouvoir de passer un tel acte sans modification des statuts.
Ils font également valoir que la décision d’agrément relève aussi d’un abus de majorité susceptible d’entraîner la nullité de la décision. Ils soulignent que la cession porte directement atteinte aux associés minoritaires dans la mesure où la valeur de leurs parts est réduite à néant et qu’ils n’ont plus aucun moyen de jouir de leur patrimoine familial ni d’avoir la possibilité de céder leurs parts à leur tour.
IV/ Ils rappellent que suivant convention de mise à disposition en date du 30 mai 1998, il avait été convenu que : 'La maison étant assez grande, tous les associés bénéficient de la jouissance gratuite de la grande maison d’habitation de la SCI' et ils affirment qu’ils ont toujours pleinement satisfait aux obligations d’entretien de la maison et des pelouses ainsi qu’au paiement des frais de chauffage et de téléphone. Ils font valoir que, même si Madame A avait dénoncé cette convention par courrier du 5 juillet 2010, ils avaient immédiatement contesté cette dénonciation qui n’a pas été suivie de la moindre mise en demeure ou procédure judiciaire et qui n’a pas empêché qu’ils continuent à utiliser la maison ; qu’au surplus cette dénonciation ne pouvaient pas concerner L-K et D Y Q qui bénéficiaient de la jouissance de l’immeuble contre paiement des frais d’occupation de l’immeuble et de la réalisation de travaux d’entretien, ce qui doit s’analyser comme un bail.
Ils soutiennent que la lettre, signifiée par huissier de justice le 17 avril 2015 par laquelle la SCI les met en demeure de libérer les lieux et de restituer les clés, n’a aucun fondement ;qu’en leur qualité de locataires et d’occupants de bonne foi, ils bénéficiaient d’un droit de préemption, l’article 10 III de la loi du 31 décembre 1975 étendant l’application d’un tel droit aux « ventes de parts ou actions des sociétés dont l’objet est la division d’un immeuble par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance temps complet ''.
VI/ Ils fustigent enfin la mauvaise foi de Madame A qui leur a volontairement caché son intention de céder ses parts, alors même que la SCI est une société où l’affectio societatis est primordiale et où les associés avaient la possibilité de se porter acquéreur à proportion du nombre de parts qu’ils détenaient antérieurement. Ils indiquent à nouveau qu’ils ne peuvent plus jouir de l’immeuble ni du droit de chasse et que leurs parts ont perdu toute valeur, ce qui justifie, selon eux, l’octroi des dommages et intérêts qu’ils réclament.
Madame A, la SCI DE MARCHAIS EN BURLY et la SCAF DES TERRES ET BOIS sollicitent la confirmation de la décision déférée, le rejet des demandes formées à leur encontre et 'la condamnation solidaire de chacun des consorts Y d’Z à verser 2.000 euros à Madame A’ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les dépens.
Elles rappellent que la SCI a été créée le 30 décembre 1982, afin d’administrer et exploiter un domaine de chasse de 330 hectares et ses dépendances dont elle est propriétaire et une maison
principale de 800 mètres carrés ; que l’acquisition de ce bien et la réfection du toit de la maison n’ont été rendus possibles que grâce aux fonds propres apportés par Madame A, associée majoritaire ; qu’en raison de graves dissensions avec son époux cette dernière a présenté une demande de divorce le 20 mai 1998 et que, dix jours plus tard, O-P Y d’Z, alors gérant, a consenti à tous les associés de l’époque un droit de jouissance à titre gratuit de la maison et loué pour un prix dérisoire à certains de ses associés, à savoir ses enfants, le droit exclusif de chasse et de passage sur la propriété. Elles soulignent que Madame A a été désignée gérante le 13 octobre 2005 à l’issue d’une assemblée générale qui n’a jamais été contestée ; que ce n’est que quelques années plus tard qu’elle a connu le droit de jouissance qui avait été consenti aux associés par l’ancien gérant qui lui avait caché cette décision ; que la SCI a donc décidé de faire cesser cette occupation sans contrepartie et a refusé de renouveler le bail de chasse. Et elles soulignent que les appelants n’ont donc plus aucun droit à occuper la maison ou la propriété.
Elles font valoir que le climat de tension régnant entre les associés a conduit Madame A a décider de se retirer de la société et à céder ses parts sociales. Madame A conteste absolument que son ex époux ou ses enfants aient proposé de lui racheter ces parts au prix qu’elle souhaitait et aient obtenu un financement pour ce faire et elle fait valoir qu’en l’absence de tout accord et au regard des contre propositions insuffisantes qui lui étaient faites elle a, le 13 avril 2015, cédé l’intégralité de ses 963 parts sociales à la SCAF TERRES ET BOIS et remis sa démission de ses fonctions de gérante à l’issue de l’assemblée générale des associés. Elle précise que ses anciens associés ayant clamé qu’ils contesteraient toute cession de parts, plusieurs candidats ont renoncé à les acquérir et elle a dû les céder au-dessous de leur valeur ; que sa bonne foi ne peut être suspectée puisqu’elle a été victime des agissements des appelants et que c’est elle qui a subi un préjudice. Elle affirme qu’afin d’éviter tout conflit, elle a demandé aux appelants de prendre contact avec l’agent immobilier en charge de la vente de ses parts, ce qu’ils n’ont jamais fait, et elle fait valoir qu’aucun accord n’est jamais intervenu avec eux. Et elle souligne que, si les appelants font valoir qu’ils ne peuvent plus occuper la maison, ni chasser sur le terrain, telle a été, alors qu’elle était associée majoritaire sa propre situation depuis 1998, date à compter de laquelle ses enfants ont obtenu le bénéfice d’un bail de chasse léonin et la jouissance gratuite de la maison. Elle souligne enfin que la situation des consorts Y d’Z ne s’est pas modifiée puisqu’ils étaient en conflit avec la gérance majoritaire bien avant la cession de parts et que ce conflit perdure.
Les intimées font ensuite valoir que la procédure de cession de parts a été scrupuleusement respectée ; que ce n’est que dans le silence des statuts que la cession de parts sociales d’une société civile doit être agréée par tous les associés, auxquels le projet de cession doit être notifié ; que tel n’est pas le cas en l’espèce puisque les statuts prévoyaient un agrément par la gérance ; que le fait que les cessions précédentes aient été agréées par l’ensemble des associés est insusceptible de modifier ces dispositions statutaires puisque seule une délibération prise à l’unanimité des associés réunis en assemblée générale régulièrement convoquée peut emporter modification des statuts; qu’enfin en matière d’agrément, seule l’identité du cessionnaire potentiel revêt un intérêt, puisque l’agrément s’attache à la personne du cessionnaire et non aux conditions d’acquisition des parts sociales ; qu’en tout état de cause, le fait que le prix de cession n’ait pas été mentionné est indifférent, seule la société étant recevable à contester la validité de la cession et non les autres associés dont le consentement à la cession n’était pas requis.
Elles soutiennent qu’il n’existait aucun conflit d’intérêts entre ses fonctions de gérante et sa qualité de cessionnaire et soulignent que la procédure d’agrément prévue aux statuts s’applique indifféremment que le cédant soit ou non également le gérant de la société, sans que cette circonstance, ni la loi, ni les statuts, ni les tribunaux ne prévoyant que, dans une telle hypothèse, seule l’assemblée des associés serait compétente pour agréer la cession des parts du gérant associé.
Elles précisent que la décision d’agrément de la cession n’est pas contraire à l’intérêt social et n’en a pas excédé l’objet, l’argumentation des appelants procédant d’une confusion entre leurs intérêts personnels et l’intérêt social. Et elles rappellent que l’objet social porte sur « la propriété,
l’administration et l’exploitation civile de tous immeubles ruraux ou à usage d’habitation, l’aménagement, la transformation et l’amélioration, suivant les règles agricoles, forestières et de l’hygiène '. Elles soulignent que la cession n’équivaut pas à une vente de l’immeuble mais seulement à la vente de la majorité des titres de la société.
Elles soutiennent par ailleurs que l’argument d’un abus de majorité est dépourvu de tout fondement puisque Madame A a pris sa décision en dehors de toute assemblée ès qualités de gérante de la SCI et non en qualité d’associée, et elle fait valoir que les appelants ont conservé la pleine jouissance de leur bien, c’est-à-dire de leurs parts sociales, la propriété appartenant quant à elle à la SCI.
Enfin, elles précisent que la cession dont il est demandé la nullité ne concerne pas la maison ou la propriété, mais des parts sociales non soumises à un droit de préemption. Elles ajoutent qu’elles ont découvert que O-P Y d’Z se prétendait exploitant agricole sur la propriété alors qu’il n’est titulaire d’aucun bail rural ; que les consorts Y d’Z ne peuvent évoquer les dispositions de l’article 10 III de la loi du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation puisqu’ils ne sont titulaires d’aucun bail et que la vente des parts n’a pas pour objet « la division d’un immeuble par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance à temps complet », qu’enfin quels qu’aient pu être les droits consentis aux appelants par l’ancien gérant, ils ont été résiliés par le courrier adressé par la SCI le 5 juillet 2010 ainsi qu’il a été définitivement jugé.
Et elles concluent qu’en l’absence de toute irrégularité, les appelants ne peuvent se prévaloir de la nullité des assemblées générales qu’ils critiquent.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :
Attendu qu’il sera tout d’abord relevé que les appelants, qui ont qualité pour former des demandes en leur nom, en sont dépourvus pour en présenter au nom de la SCI qu’ils n’ont pas pouvoir de représenter ;
Que nul ne plaidant pas procureur, ils sont donc irrecevables à solliciter que la cession intervenue soit déclarée inopposable à la SCI ;
I / En ce qui concerne l’obligation de soumettre la cession à l’agrément de tous les associés :
Attendu que les statuts de la SCI ne font nulle part mention de ce qu’elle présente un caractère familial essentiel pour tous les associés ;
Qu’au contraire ils prévoient que les parts sociales pourront être cédées, soit entre associés, soit à des personnes non associées désignées dans les statuts comme 'étrangers’ ;
Qu’ayant ainsi envisagé que les parts sociales puissent être cédées à d’autres personnes que des membres de la famille Y D’Z, déjà tous associés au sein de la SCI, les associés ont convenu qu’en cas de cession à un ou des ' étrangers' 'toute cession devra être notifiée par le cédant à la société, par lettre recommandée indiquant les nom, prénoms, profession, nationalité et domicile du cessionnaire et le nombre de parts dont la cession est envisagée. Dans les 15 jours de cette notification, la gérance statuera à la majorité de ses membres sur l’acceptation ou le refus de la cession proposée.' ;
Que ces statuts imposaient dès lors exclusivement la notification de la cession à la seule gérance, avec acceptation ou refus de celle-ci dans les 15 jours, et non pas une notification aux associés ;
Que les appelants n’exposent pas et justifient encore moins pourquoi ces dispositions devraient être
écartées pour faire application d’une commune intention des parties de faire agréer les cessions par tous les associés qui n’est aucunement établie en l’espèce ;
Que la clause des statuts est en effet claire et non susceptible d’interprétation ;
Que, si la SCI a, depuis l’origine, été administrée par un seul gérant, cette situation aurait pu se modifier et les associés décider d’une cogérance, et qu’il n’était donc aucunement incohérent de prévoir que l’agrément devrait être donné à la majorité de la gérance ;
Que l’article 14 des statuts, qui énumère les pouvoirs du gérant, n’avait pas à faire référence au pouvoir du gérant d’agréer les cessions de parts sociales puisqu’un tel agrément ne ressortait pas des pouvoirs du gérant d’engager la société à l’égard des tiers ;
Qu’enfin, si les précédentes cessions de parts ont été agréées par la totalité des associés, cela ressortait de la seule volonté du gérant de procéder ainsi mais qu’il aurait pu décider de s’en tenir aux statuts et d’agréer seul ces cessions ;
Que les dispositions de l’article 1861 du code civil qui énonce que les parts sociales ne peuvent être cédées qu’avec l’agrément de tous les associés ne peuvent donc trouver application puisque ce texte précise expressément qu’il ne règle les cessions que 'dans le silence des statuts', ce qui n’a pas été fait ;
Attendu que les consorts Y D’Z font par ailleurs valoir que la notification de la cession faite à la gérante n’est pas régulière puisque n’y a pas été joint le projet de cession et que la demande d’agrément ne comprend pas les conditions essentielles (notamment le prix) de la cession envisagée ;
Mais attendu que cette argumentation va, là encore, à l’encontre des statuts qui ne prévoient qu’une notification 'par lettre recommandée indiquant les nom, prénoms, profession, nationalité et domicile du cessionnaire et le nombre de parts dont la cession est envisagée' ;
Que la SCAF et la SCI produisent sous le numéro 22 de leurs pièces communiquées, la lettre recommandée adressée à Madame A qui fait part de la cession de 963 parts sociales à la SCAF DES TERRES ET BOIS ayant son siège social 84 avenue du président Wilson […], inscrite au RCS de Bobigny sous le numéro 523 421 857 et représentée par son gérant Monsieur B I;
Que cette notification est régulière, aucune disposition de la loi ou des statuts n’imposant à la cessionnaire de faire connaître le prix de cession qui ne concerne pas ses associés ou de communiquer le projet de cession ;
II/ En ce qui concerne l’existence d’un conflit d’intérêts :
Attendu que les appelants soutiennent ensuite que Madame A ne pouvait d’une part être cessionnaire, d’autre part agréer seule la cession de ses propres parts en raison de l’existence d’un conflit d’intérêts ;
Qu’ils ne contestent cependant pas qu’aucune disposition légale n’empêchait la gérante de procéder à l’agrément de la cession de ses propres parts et qu’aucune disposition statutaire ne prévoyait, en cas de cession des parts du gérant, de dérogation à la procédure d’agrément prévue ;
Que la notion de conflit d’intérêts n’est pas définie par la loi française et qu’elle concerne le plus souvent un conflit entre la mission d’un agent public et ses intérêts privés ;
Qu’il peut être compris de l’argumentation des appelants que Madame A se serait servie de ses fonctions de gérante pour agréer frauduleusement la cession dans son seul intérêt alors qu’elle n’aurait pu obtenir cet agrément si elle avait soumis la cession à l’accord des associés ;
Mais attendu que ce raisonnement se heurte à la situation de fait dans laquelle se trouvaient les associés de la SCI puisque Madame A, qui disposait de 963 des 1.500 parts composant le capital social, était associée majoritaire et que, si la cession avait été soumise à l’agrément des associés, cet agrément aurait tout autant été obtenu, la candidate à la cession ne pouvant être empêchée de céder par ses associés minoritaires ;
Que n’est dès lors aucunement démontrée l’existence d’un conflit d’intérêts empêchant Madame A de procéder à l’agrément à la cession en sa qualité de gérante étant observé qu’un tel conflit d’intérêts ne pouvait en tout état de cause exister en présence de la clause autorisant le gérant à agréer la cession de ses propres parts (Cass. 3e Civ., 17 janvier 1996, n° 93-16.371) ;
III sur le caractère abusif et contraire à l’intérêt social de l’agrément donné par Madame A :
Attendu que les consorts Y D’Z prétendent que la société avait acquis au fil des ans un caractère familial, excluant, de fait, une cession de parts à une entité étrangère à la famille ; qu’une telle cession était en effet nécessairement source d’inévitables conflits entre les associés, ce qui pouvait compromettre le bon fonctionnement de la société ; que Madame A a donc délibérément et malicieusement agi contre l’intérêt de la SCI, dans le seul but de léser les autres membres de la famille en raison de dissensions ; que son agrément est abusif et contraire à l’intérêt social ;
Mais attendu que, si tel était le cas, il leur appartenait de procéder à une modification des statuts permettant de limiter les possibilités de cession de parts sociales et de consacrer le caractère familial de la SCI, ce qu’ils n’ont pas fait ;
Que c’est à raison que Madame A fait observer que, bien qu’ayant elle-même apporté la majorité des fonds ayant permis de créer la SCI et d’acquérir un bien immobilier, elle a été privée depuis 1998 de la jouissance de ce bien en raison du bail de chasse passé par le précédent gérant et de sa décision de laisser libre accès à l’immeuble aux autres associés avec lesquels elle était en dissension ;
Que, bien qu’elle ait dénoncé ce libre accès dès le 5 juillet 2010, les membres de sa famille n’ont tenu aucun compte de cette dénonciation et ont continué d’user librement de la 'grande maison’ sans qu’elle puisse envisager, en raison de leurs liens de famille, de diligenter la procédure d’expulsion qui a été engagée et menée à bien par la SCI après la cession de ses parts, les décisions rendues démontrant l’occupation illicite de cet immeuble à laquelle Madame A a été confrontée ;
Que la cour n’a pas à prendre partie sur l’origine des dissensions familiales mais ne peut que constater qu’elles étaient particulièrement profondes et anciennes, ce qui n’a pas entraîné la disparition de la SCI, et qu’elles empêchent les appelants de soutenir sérieusement que la cession des parts d’une associée avec laquelle existaient des fortes tensions créerait des risques de dissensions entre les associés ;
Que le désir de nuire de Madame A n’est pas démontré dès lors qu’il peut être compris qu’elle ait souhaité se retirer d’une société dans laquelle elle était en conflit avec tous les autres associés, dont plusieurs étaient ses propres enfants ;
Attendu que les appelants prétendent ensuite que l’article 1849 du code civil limite les pouvoirs du gérant à l’objet de la société dans lequel en l’espèce la vente ou la cession n’est pas prévue ; que le
projet de cession de la majorité des parts équivaut à une vente de l’immeuble appartenant à la société, une telle vente n’étant pas prévue dans l’objet de la société et le gérant n’ayant pas pouvoir de passer un tel acte sans modification des statuts ;
Mais attendu que si une SCI a pour objet l’acquisition et la gestion de biens immobiliers, elle ne peut être tenue d’en rester propriétaire à perpétuité et que la possibilité de vendre ces biens est nécessairement implicitement contenue dans son objet social ;
Qu’en tout état de cause, c’est sans aucune pertinence que les appelants prétendent que la cession de parts entraîne la vente de l’immeuble puisqu’ils restent propriétaires de celui-ci à hauteur de leurs propres parts sociales ;
Que les statuts prévoient expressément la possibilité de céder partie des parts sociales sans que l’immeuble ne soit lui-même vendu et que cette argumentation est inopérante ;
Attendu que les consorts Y D’Z font également valoir que la décision d’agrément relève d’un abus de majorité susceptible d’entraîner la nullité de la décision et affirment que la cession porte directement atteinte aux associés minoritaires dans la mesure où la valeur de leurs parts est réduite à néant et qu’ils n’ont plus aucun moyen de jouir de leur patrimoine familial ni d’avoir la possibilité de céder leurs parts à leur tour ;
Mais attendu que la décision d’agrément n’a pas été prise en assemblée générale et ne ressort donc pas d’un vote des associés, ce qui empêche de prétendre à l’existence d’un abus de majorité qui n’aurait pu être caractérisé que lors de la désignation de Madame A en qualité de gérante, décision qui n’a pas été contestée en son temps par les associés minoritaires ;
IV sur l’existence d’un droit de préemption :
Attendu que les consorts Y D’Z font valoir que les associés de la SCI DE MARCHAIS EN BURLY ont, pour une durée illimitée, la libre et pleine jouissance des biens immobiliers appartenant à la SCI et notamment de la grande maison d’habitation et bénéficiaient en tout état de cause, d’un droit de préemption dont la violation entraîne également la nullité de la cession de parts ;
Mais attendu que par jugement en date du 1er décembre 2015, confirmé par arrêt de cette cour en date du 24 octobre 2016, le tribunal d’instance de Montargis a ordonné l’expulsion des consorts O-P, L-K, D et J-M Y d’Z de l’ensemble des biens immobiliers appartenant à la société en retenant, dans le dispositif qui a autorité de la chose jugée que le courrier adressé par la gérante le 5 juillet 2010 avait révoqué régulièrement la convention de jouissance gratuite de l’immeuble par tous les associés ;
Que l’autorité de la chose jugée empêche tous les consorts Y D’Z, y compris L-K et D qui n’ont pas obtenu alors la reconnaissance de l’existence d’un bail consenti à leur profit, de soutenir qu’à la date de la cession des parts ils avaient la jouissance régulière de la grande maison et bénéficiaient d’un droit de préemption ;
Attendu par ailleurs que ne sont pas applicables au litige les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 relatif aux« ventes de parts ou actions des sociétés dont l’objet est la division d’un immeuble par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance temps complet '', la SCI n’ayant pas pour objet d’attribuer aux associés la propriété d’une fraction de l’immeuble ou sa jouissance par fractions de temps ;
Qu’il n’existe dès lors aucune cause d’annulation de la cession des parts sociales de Madame A au profit de la SCAF DES TERRES ET BOIS ;
V/ sur la nullité des assemblées convoquées pour le 5 mai 2015 :
Attendu que la nullité de la cession n’ayant pas été prononcée, les délibérations qui ont pu être adoptées sur le fondement de cette cession ne sont pas frappées de nullité;
Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes tendant à voir prononcer tant la nullité de la cession que celle des assemblées du 5 mai 2015 ;
VI/ sur la demande subsidiaire en paiement de dommages et intérêts :
Attendu que les consorts Y D’Z font valoir que Madame A leur a volontairement caché son intention de céder ses parts, alors même que la SCI est une société où l’affectio societatis est primordiale et où les associés avaient la possibilité de se porter acquéreurs à proportion du nombre de parts qu’ils détenaient antérieurement et ils font à nouveau valoir qu’ils ne peuvent plus jouir de l’immeuble ni du droit de chasse ; qu’ils prétendent que leurs parts ont perdu toute valeur, ce qui justifie, selon eux, l’octroi des dommages et intérêts qu’ils réclament ;
Mais attendu qu’il ressort des pièces concordantes communiquées par les parties devant la cour que les appelants étaient parfaitement informés de la décision de Madame A de céder ses parts ainsi qu’il résulte de leur courrier adressé à celle-ci le 10 janvier 2015 (leur pièce n°20) ;
Que Madame A a répondu à ce courrier le 23 février 2015 en indiquant que le prix souhaité était de deux millions d’euros et en leur indiquant le nom et l’adresse de l’agence immobilière en charge de la vente (pièce n°21 des appelants) ;
Que O-P Y D’Z a expressément fait connaître le 3 mars 2015 ( pièce n°22) qu’il n’était pas intéressé tandis que les enfants Y d’Z ont manifesté leur intention d’acquérir (pièce n°23) tout en faisant part de leurs difficultés pour réunir la somme demandée ;
Qu’aucune pièce du dossier ne démontre l’existence d’une proposition chiffrée d’achat émanant des enfants Y D’Z ni l’accord de Madame A sur une proposition précise ;
Qu’un tel accord ne peut résulter d’un courrier adressé par J Y D’Z à Maître F, notaire, le 11 avril 2015 (inexactement daté de 2014) ( pièce n°25) puisque ce dernier, après avoir, sur la foi de ce courrier, pris contact avec Madame A a fait connaître à J Y D’Z le 21 avril 2015 que Madame A lui avait téléphoniquement indiqué le 17 avril 2015 qu’elle n’était pas intéressée par la cession de ses parts sociales à son profit ou à celui de ses soeurs ( pièce n°34);
Qu’il convient de relever que Madame A avait vendu ses parts dès le 13 avril précédent et qu’en l’absence de toute justification d’une proposition chiffrée d’achat transmise à Madame A par ses enfants et, a fortiori de toute démonstration d’un accord sur le prix proposé, il n’est pas démontré que la gérante a persuadé ses associés qu’elle allait leur céder ses parts ;
Attendu par ailleurs qu’il a été définitivement jugé que l’autorisation de jouissance des biens avait été valablement révoquée en 2010, ce qui empêche les consorts Y D’Z de prétendre que la cession intervenue leur a fait perdre cette jouissance ;
Attendu enfin que les appelants ne produisent aucune pièce démontrant que leurs parts auraient perdu toute valeur ;
Qu’ils ont donc été à raison déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts ;
V Sur les autres demandes formées par les parties :
Attendu que les appelants, succombant en toutes leurs prétentions, supporteront les dépens de la procédure d’appel ;
Que ni la SCI ni la SCAF des TERRES ET BOIS n’ont sollicité paiement d’une indemnité de procédure ;
Que Madame A a quant à elle réclamé 'condamnation solidaire de chacun des consorts Y d’Z à lui verser 2.000 euros', ce qui doit être entendu comme la demande tendant à la condamnation solidaire des quatre appelants à verser la somme de 8.000 euros ;
Qu’une condamnation solidaire ne pouvant être prononcée, les appelants seront condamnés in solidum à verser la somme de 3.000 euros ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE in solidum L-K, D, J-M et O-P Y D’Z à payer à Madame G A la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum L-K, D, J-M et O-P Y D’Z aux dépens d’appel.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame L-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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