Cour d'appel d'Orléans, 18 décembre 2019, 19/035061

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

PREMIÈRE PRÉSIDENCE

Ordonnance de référé du 18 décembre 2019

numéro 49/2019

No RG 19/03506

No Portalis DBVN-V-B7D-GBUU

Exp + grosses le 18 décembre 2019 à :

Me Delphine BOURILLON

Me Françoise DEVIERS

Le dix-huit décembre deux mille dix-neuf,

Nous, Florence Peybernès, première présidente de la cour d’appel d’Orléans, assistée de Martine Schweitzer, directrice du greffe,

Statuant en référé dans la cause opposant :

I – SARL Maisons CPR

[…]

[…]

— représentée par Me Delphine Bourillon, avocat au barreau d’Orléans,

demanderesse, suivant exploit de Me J…, huissier de justice à Orléans, en date du 8 novembre 2019.

d’une part

II – SARL MCJ

[…]

[…]

— représenté par Me Françoise DEVIERS, avocat au barreau d’Orléans

d’autre partPage 2

Après avoir entendu les conseils des parties à notre audience publique du 4 décembre 2019, il leur a été indiqué que l’ordonnance serait prononcée, par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2019.

Avons, ce jour, rendu l’ordonnance suivante :

Par jugement du 24 octobre 2019, le tribunal de commerce d’Orléans a condamné la SARL Maisons CPR à payer à la SARL MCJ les sommes suivantes:

– 22634,94 € au titre des retenues de garantie avec intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2018,

– 47114,14 € au titre des factures de travaux non réglées avec intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2018.

Le tribunal de commerce a en outre condamné la SARL MCJ à payer à la SARL Maisons CPR les sommes suivantes:

–116,86 € hors taxes au titre de litiges du chantier Le Guen,

– 517,52 € TTC au titre des frais de gestion.

Le tribunal a ordonné la compensation entre les parties des sommes dues et condamné la SARL Maisons CPR à payer à la SARL MCJ une indemnité de procédure de 3000€.

Le tribunal a ordonné l’exécution provisoire de la décision.

La SARL Maisons CPR a formé appel de ce jugement le 7 novembre 2019.

Par acte d’ huissier daté du 8 novembre 2019, la SARL Maisons CPR a fait assigner en référé devant le premier président de la cour d’appel d’Orléans la SARL MCJ afin d’obtenir, au visa des articles 521 et 523 du code de procédure civile, l’autorisation de consigner les causes du jugement entre les mains de la CARPA, soit la somme de 69114,70 €, sauf, subsidiairement, à obtenir l’autorisation de consigner celle de 46479,76 €.

La SARL Maisons CPR sollicite en outre la condamnation de la SARL MCJ à lui verser une indemnité de procédure de 1500€ et à supporter les entiers dépens.

À l’appui de ses demandes, la SARL Maisons CPR expose qu’elle exerce depuis plus de 27 années dans le secteur de la construction de maisons individuelles tandis que la SARL MCJ est une entreprise générale de bâtiment spécialisée dans les travaux de maçonnerie et de gros œuvre.

La SARL Maisons CPR expose qu’elle recourt au service de la SARL MCJ dans le cadre de la sous-traitance dont les conditions générales ont été ratifiées par contrat du 1er janvier 2011.

Page 3

La SARL Maisons CPR soutient que depuis septembre 2016, elle déplore de graves manquements de son sous-traitant à la fois sur la qualité de la construction des ouvrages et sur le respect des délais.

Elle a donc décidé de ne régler que les sommes qu’elle estimait devoir à son sous-traitant.

Le jugement du 24 octobre 2019 du tribunal de commerce l’a pourtant condamnée à verser à la SARL MCJ plusieurs sommes représentant près de 70000€ mais elle reproche au premier juge d’avoir méconnu l’étendue du manquement du sous-traitant à son obligation de résultat qui lui impose de livrer un ouvrage conforme aux règles de l’art et exempt de vices.

La SARL Maisons CPR reproche en outre au premier juge d’avoir prononcé une condamnation sous le bénéfice de l’exécution provisoire alors même qu’il a reconnu pour l’un des chantiers un manquement de la sous-traitance mais en ne retenant qu’une somme dérisoire et alors qu’elle-même dispose sur la SARL MCJ d’une créance de plus de 56000€.

La SARL Maisons CPR demande donc l’autorisation de consigner le montant des condamnations d’autant que la situation économique et financière de la SARL MCJ, qui dépose ses comptes auprès du tribunal de commerce sous couvert de confidentialité, est totalement inconnue et accentue les craintes de ne pouvoir obtenir le remboursement des sommes réglées le cas échéant.

La SARL Maisons CPR ajoute qu’en application de l’article 3 des conditions générales du contrat de sous-traitance, les retenues de garantie sont facturées mais ne sont dues qu’à l’issue du délai d’un an de la réception sans réserve et que la plupart des retenues de garantie n’étaient pas exigibles aux dates de ces réclamations ou au moment de la procédure de première instance, certaines l’étant devenues au fur et à mesure de l’avancement de la procédure.

La SARL Maisons CPR reproche encore au tribunal d’avoir appliqué des intérêts sur ces sommes à compter du mois d’octobre 2018 alors que ces sommes n’étaient pas encore exigibles.

*L’affaire a été appelée à l’audience du 4 décembre 2019.

*

À cette date, la SARL Maisons CPR a maintenu ses demandes.

Par conclusions déposées et soutenues à l’audience du 4 décembre 2019, la SARL MCJ a demandé au premier président de débouter la SARL Maisons CPR de l’ensemble de ses demandes et de la condamner à lui verser une indemnité de procédure de 1500€ et à supporter les dépens.

Elle indique qu’elle a travaillé durant sept ans à partir de janvier 2010 en sous-traitance de lots de maçonnerie pour la SARL Maisons CPR, constructeur de maisons individuelles, au rythme de 10 chantiers par mois.

Page 4

Elle ajoute qu’à compter du mois de mars 2017 elle a indiqué à la SARL Maisons CPR qu’elle n’entendait plus travailler pour elle sur de nouveaux chantiers mais qu’elle terminerait les chantiers déjà engagés.

Elle date de cette annonce les difficultés qu’elle a rencontrées depuis pour être réglée.

La SARL MCJ rappelle le dispositif du jugement du 24 octobre 2019 prononcé par le tribunal de commerce d’Orléans ainsi que la demande de consignation du montant des condamnations présentée par la SARL Maisons CPR.

Elle rappelle que le pouvoir accordé au premier président de la cour d’appel par l’article 521 du code de procédure civile est un pouvoir discrétionnaire.

Elle souligne que la SARL Maisons CPR justifie avoir versé les sommes auxquelles elle est condamnée sur le compte CARPA de son avocat, ce qui démontre qu’elle est en capacité de régler les sommes mises à sa charge.

Elle en déduit que la demande aux fins d’être autorisé à consigner ne pourra qu’être rejetée.

Pour ce qui concerne sa propre solvabilité, elle rappelle qu’elle existe depuis 15 ans, que la Banque de France la classe en cotation G4, que son expert-comptable atteste de ses résultats bénéficiaires et de sa trésorerie solide de 2013 à 2019.

*

Dans ses dernières écritures, la SARL Maisons CPR soutient que face à l’empressement tout à fait injustifié pour une entreprise qui dispose d’une telle trésorerie et face aux menaces d’exécution, elle est de parfaite bonne foi à procéder à la consignation pour éviter toute exécution qui aurait pu être dramatique pour le fonctionnement de l’entreprise.

La SARL Maisons CPR ajoute que la capacité de l’une et de l’autre aujourd’hui n’est certainement pas une donnée acquise pour l’avenir, alors que le secteur de la maison individuelle subit d’importantes fluctuations souvent à la baisse et que les annonces pour 2020, date de l’issue probable de ce dossier, ne sont pas très favorables.

Elle ajoute que le montant communiqué pour la trésorerie en fin de résultat ne permet pas non plus de confirmer que la SARL MCJ sera nécessairement en mesure de rembourser les sommes auxquelles elle pourrait être condamnée puisqu’il s’agit de sommes immédiatement mobilisables pour une entreprise à un instant précis et qui correspondent à sa situation à très court terme.

Elle ajoute qu’au regard des difficultés rencontrées par la SARL Maisons CPR, confortée par les avis très négatifs publiés sur Internet par les clients de la SARL MCJ confirmant l’absence de qualité de ses prestations, il existe des craintes d’autant plus légitimes et que la mesure de consignation est destinée à protéger les deux parties des risques existants.

Page 5

MOTIFS

Selon l’article 521 du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

En l’espèce, la SARL MCJ justifie, et alors que la preuve d’un risque de non représentation des sommes versées en cas d’infirmation de la décision par la cour d’appel, pèse sur la SARL Maisons CPR, que sa cotation par la Banque de France est de G4 ce qui signifie qu’elle réalise un chiffre d’affaires annuel compris entre 1,5 et 7,5 millions d’euros et que sa capacité à honorer ses engagements financiers à un horizon de trois ans est qualifiée de correcte.

La SARL MCJ verse également aux débats l’attestation de son expert comptable selon laquelle elle a réalisé un résultat positif sans discontinuité depuis 2014 et que sa trésorerie actuelle est de 471 000 €, en constante progression.

Ces pièces sont suffisantes pour écarter tout risque de non représentation des fonds pour le cas où le jugement du tribunal de commerce d’Orléans serait infirmé.

Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande de consignation formée par la SARL Maisons CPR.

La SARL Maisons CPR, dont les demandes sont rejetées, devra supporter les dépens et participer aux frais de défense qu’elle a contraint la SARL MCJ à engager.

PAR CES MOTIFS

Nous, première présidente, statuant publiquement, après débats en audience publique, par ordonnance contradictoire et en dernier ressort,

Vu l’article 521 du code de procédure civile,

Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire attachée aux condamnations prononcées par le tribunal de commerce d’Orléans le 24 octobre 2019,

Condamnons la SARL Maisons CPR à supporter les entiers dépens et à verser à la SARL MCJ une indemnité de procédure de 1000€.

La directrice du greffe, La première présidente,

Martine Schweitzer Florence Peybernès

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