Cour d'appel de Papeete, 7 juillet 2016, n° 13/00283

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Papeete, 7 juill. 2016, n° 13/00283
Juridiction : Cour d'appel de Papeete
Numéro(s) : 13/00283
Sur renvoi de : Cour de cassation de Paris, 30 octobre 2012, N° 1220F@-@D

Sur les parties

Texte intégral

N° 249/add

GR


Copie exécutoire

délivrée à :

— Me Vergier,

le 18.07.2016.

Copies authentiques

délivrées à :

— Me Piriou,

— Me Outin,

le 18.07.2016.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 7 juillet 2016

RG 13/00283 ;

Décision déférée à la Cour : arrêt n°1220 F-D de la Cour de Cassation de Paris du 31 octobre 2012 ;

Sur requête en reprise d’instance après cassation déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 17 mai 2013 ;

Appelants :

Monsieur AH-AI Z, né le XXX à XXX

de nationalité française, technicien, demeurant résidence XXX

Madame M A épouse Z, née le XXX à XXX, employée de société, demeurant résidence XXX

Représentés par Me AH-François CARLOT, plaidant, avocat au barreau de Lyon, et Me AH-Michel VERGIER, postulant, avocat au barreau de XXX

Intimés :

Madame S X épouse F, de nationalité française, médecin XXX

Représentée par Me AI PIRIOU, avocat au barreau de XXX

Monsieur K B, de nationalité française, médecin XXX

Représenté par Me Q FABRE, plaidant, avocat au barreau de Paris, et Me Marc OUTIN, postulant, avocat au barreau de XXX

Ordonnance de clôture du 22 janvier 2016 ;

Composition de la Cour :

Vu l’article R 312-9 du code de l’organisation judiciaire.

Dit que l’affaire, dont ni la nature ni la complexité ne justifient le renvoi en audience solennelle, sera jugée, en audience ordinaire publique du 28 avril 2016, devant M. BLASER et M. PANNETIER, présidents de chambre, M. RIPOLL, conseiller, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme AB-AC ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé publiquement ce jour par M. BLASER, président, en présence de Mme AB-AC, greffier, lesquels ont signé la minute.

A R R E T,

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Le XXX, M A, compagne de AH-AI Z, âgée de 26 ans, a donné naissance à une fille, D, atteinte d’une anomalie chromosomique dite trisomie 21. La grossesse avait été suivie depuis octobre 1999 par le docteur S X-F, gynécologue, et, à compter de la 33e semaine, par le docteur K B, obstétricien, qui a procédé à l’accouchement.

Le 11 décembre 2000, à 14 semaines d’aménorrhée, S X-F avait prescrit un test HT 21, autrement appelé « tritest », test sanguin proposé en vue de dépister certains risques de malformations et notamment l’éventualité de donner naissance à un enfant trisomique. Le prélèvement sanguin en vue de cet examen doit être pratiqué avant la 18e semaine. Le lendemain ou le surlendemain de cette échéance, M A s’était rendue au laboratoire E pour le faire réaliser. Le laboratoire E avait transmis ce prélèvement au laboratoire du CHT de Mamao qui, n’étant pas équipé du logiciel permettant d’analyser les prélèvements faits hors délai, l’avait adressé au laboratoire CERBA à Paris, qui en dispose.

Le test avait mis en évidence un risque accru de 1/110 de donner naissance à un enfant atteint de trisomie 21. Dans un tel cas, on propose à la mère de confirmer le test par amniocentèse, remboursée par l’assurance sociale à compter d’un risque de 1/250, et, en cas de trisomie avérée, on propose aux parents d’interrompre la grossesse.

Mais les résultats de ce test, bien qu’ayant été reçus par le laboratoire de Mamao, n’ont été transmis ni au médecin du laboratoire, ni à S X-F, ni à la patiente.

Désigné en référé, le professeur C a conclu le 6 février 2001 que le résultat du tritest aurait dû conduire à proposer une amniocentèse et une interruption de grossesse. Il a estimé que le défaut de dépistage anténatal ne pouvait être imputé à S X-F, qui n’avait pas été informée par le laboratoire du caractère tardif du prélèvement, de son envoi en France métropolitaine, et qui n’aurait pas reçu le résultat du test pratiqué, pas plus qu’à K B, qui a pris en charge la grossesse au-delà du terme habituel de diagnostic sérologique de risque de la trisomie 21 f’tale.

Les consorts A-Z ont dirigé leur action, tant personnellement qu’ès qualités d’administrateurs légaux de leur fille mineure D, contre les deux médecins gynécologues, pour les voir juger responsables de l’absence de diagnostic de la trisomie 21 qui a privé les parents de la chance de demander une amniocentèse et une interruption thérapeutique de grossesse.

Par jugement du 30 avril 2007, le tribunal civil de première instance de Papeete a :

Débouté AH-AI Z et M A de l’ensemble de leurs prétentions ;

Débouté K B de sa demande reconventionnelle ;

Condamné les consorts Z-A à payer à S X-F et à K B la somme de 200 000 F CFP au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens.

AH-AI Z et M A épouse Z en ont relevé appel par requête enregistrée au greffe le 9 juillet 2007.

Ils ont demandé, sur le fondement du droit commun, que leur soit allouée une indemnité de 50 000 € pour chacun d’eux en réparation de leur préjudice moral, et que leur préjudice matériel soit réservé dans l’attente de la consolidation de l’état de D. Subsidiairement, dans le cas où la cour estimerait que l’article L114-5 du code de l’action sociale et de la famille est applicable, de juger que les docteurs S X-F et K B ont commis des fautes caractérisées à l’égard des parents de D, et d’accorder à ce titre 50 000 € en réparation de leur préjudice moral et 50 000 € à titre de provision à valoir sur le préjudice matériel de l’enfant. Ils ont également demandé 50 000 € pour frais et honoraires.

S X-F a conclu à la confirmation du jugement. Subsidiairement, elle a fait valoir que la perte de chance alléguée par M A n’était pas démontrée. Elle a demandé que les époux Z soient condamnés à lui payer 200 000 F CFP pour frais et honoraires.

K B a demandé la confirmation du jugement déféré et de condamner les appelants à lui payer 660 000 F CFP sur le fondement de l’article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française.

Par arrêt du 12 mai 2011, la cour a :

Confirmé le jugement déféré dans toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a condamné M A et AH-AI Z à payer à chacun des intimés une certaine somme pour frais et honoraires ;

Dit qu’il n’y a pas lieu, en première instance et en appel, de faire application de l’article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française en faveur des intimés ;

Condamné les appelants aux dépens comprenant les frais d’expertise.

Sur un pourvoi formé par les époux Z personnellement et ès qualités d’administrateurs légaux de leur fille mineure D Z, la Cour de cassation, 1re chambre civile, a, par arrêt du 31 octobre 2012 :

Cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 mai 2011, entre les parties, par la cour d’appel de XXX remis en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d’appel de Papeete autrement composée ;

Condamné Mme X-F et M. B aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, l’arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé.

Les époux Z ont repris l’instance d’appel par requête enregistrée au greffe le 17 mai 2013 et par exploit portant signification de celle-ci délivré le 22 mai 2013 à K B et à S X épouse F.

Il est demandé à la cour :

1° par les époux AH-AI Z et M A, tant personnellement qu’agissant en qualité d’administrateurs légaux de leur fille mineure D Z, appelants, dans leur requête et dans leurs conclusions visées le 19 décembre 2014, de :

réformer le jugement entrepris ;

dire et juger que l’action en référé-expertise du 22 juin 2000 ayant abouti à l’ordonnance de référé du 2 août 2000 vaut action en justice ;

subsidiairement, dire et juger que la loi du 4 mars 2002 ne pouvait porter atteinte à leur créance acquise ;

déclarer les dispositions de l’article 1 de la loi du 4 mars 2002, l’article 1er de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, devenu l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles, inapplicables à l’instance qu’ils ont engagée ;

dire et juger que les docteurs X-F et B ont commis une faute dans l’élaboration de leur diagnostic en ne se préoccupant pas du résultat du tritest ordonné le 19 décembre 2000 qui aurait dû conduire à une amniocentèse ;

dire et juger, au surplus, que les docteurs X-F et B ont commis une faute dans leur obligation d’information, en ne portant pas à la connaissance de leur patiente le résultat du tritest qui avait été ordonné pour détecter une éventuelle anomalie chromosomique ;

dire et juger que l’intensité et la gravité des fautes commises par les médecins dans l’exécution de leur contrat avec la patiente ont empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap ;

dire et juger que les docteurs X-F et B seront tenus solidairement à réparation de l’ensemble des préjudices subis par l’enfant D et ses parents ;

condamner in solidum les docteurs X-F et B à payer à chacun des époux Z-A, personnellement, la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

réserver le préjudice matériel et économique des époux Z-A ;

surseoir à statuer sur l’indemnisation du préjudice de l’enfant D ;

ordonner une expertise médicale à l’effet, notamment, d’examiner l’enfant D, de décrire son état actuel résultant de la trisomie 21, de fixer la date de consolidation prévisible, et d’évaluer son préjudice médico-légal ainsi que les charges particulières liées à son handicap ;

condamner solidairement les docteurs X-F et B à payer aux époux Z-A ès qualités d’administrateurs légaux de l’enfant D une provision de 50 000 € à valoir sur l’indemnisation de son préjudice ;

condamner in solidum les docteurs X-F et B à payer aux époux Z-A, tant personnellement qu’ès qualités, la somme de 50 000 € en application de l’article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française ;

condamner in solidum les intimés aux dépens de première instance et d’appel avec distraction ;

2° par K B, intimé, dans ses conclusions visées le 31 juillet 2013, de :

confirmer le jugement entrepris ;

dire et juger que la preuve n’est pas rapportée qu’il aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

à défaut, dire et juger que les appelants ne prouvent pas l’existence d’un lien causal direct et certain entre un prétendu manquement de sa part et une perte de chance réelle et sérieuse d’avoir pu bénéficier d’une interruption médicale de grossesse avant le terme de 38 semaines d’aménorrhée auquel est née spontanément l’enfant ;

à défaut, sur les préjudices :

dire et juger que les appelants ne démontrent pas l’existence d’un lien de causalité direct entre l’absence de dépistage de la trisomie 21 dont était atteint le f’tus et les préjudices subis par l’enfant, qui résultent uniquement de la maladie génétique dont elle est porteuse ;

dire et juger également que ne saurait être inclus dans le préjudice personnel des époux Z-A, y compris dans leur préjudice moral, les charges particulières

découlant tout au long de la vie de l’enfant et du handicap de ce dernier, s’agissant là d’un préjudice personnel subi par l’enfant lui-même ;

dire et juger également que les appelants ne rapportent pas la preuve qui leur incombe que la faute qu’ils lui reprochent ait entraîné une quelconque perte de chance pour Mme A de pouvoir bénéficier d’une interruption médicale de grossesse et d’éviter la naissance d’un enfant handicapé ;

dans tous les cas :

rejeter l’intégralité des demandes des appelants formulées à son encontre ;

les condamner aux dépens avec distraction et à lui payer une somme de 4 000 € en remboursement de ses débours non compris dans les dépens ;

3° par S X-V, intimée, dans ses conclusions visées le 25 avril 2014 et le 29 octobre 2015, de :

dire et juger applicables à la présente instance les dispositions de l’article 1er de la loi du 4 mars 2002, ou à défaut les critères posés par l’arrêt Perruche ;

dire et juger que les appelants ne rapportent pas la preuve d’une faute simple ou caractérisée de sa part ;

en conséquence, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes ;

à titre subsidiaire, dire et juger qu’elle n’a pas commis de faute et débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes ;

à titre plus subsidiaire :

constater que Mme A épouse Z n’a nullement manifesté de façon non équivoque son souhait de recourir à une interruption de grossesse pour raisons médicales en cas de risques avérés ;

en conséquence, dire et juger que seul est indemnisable le préjudice découlant de la perte d’une chance de recourir à une interruption médicale de grossesse ;

débouter les appelants de leurs demandes plus amples ou contraires ;

condamner les appelants aux dépens avec distraction et au paiement de la somme de 330 000 F CFP au titre des frais irrépétibles d’appel.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2016.

Les moyens et arguments des parties, aux écritures desquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé, sont résumés dans les motifs qui suivent.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’appel a été interjeté dans les formes et délais légaux. Sa recevabilité n’est pas discutée.

Pour rejeter les demandes faites par les époux Z en leur nom et en qualité d’administrateurs légaux de leur fille mineure D à l’encontre des Drs X-V et B, le jugement dont appel a retenu que :

L’article 1er de la loi du 4 mars 2002 disposait que :

Nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance.

La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l’acte fautif a provoqué directement le handicap ou l’a aggravé, ou n’a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l’atténuer.

Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice.

Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l’enfant, de ce handicap.

La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale.

Ces dispositions étaient applicables au litige, l’instance ayant été engagée après leur promulgation.

Les époux Z n’étaient donc pas fondés à demander réparation pour leur préjudice économique, ni pour le compte de leur fille D, dont le handicap ne résulte pas directement d’une faute médicale, mais est inhérent à son patrimoine génétique.

Seul leur préjudice moral était indemnisable, à condition de rapporter la preuve d’une faute caractérisée des médecins.

Il résultait des éléments réunis par l’expert désigné en référé que ni le Dr X-F, ni le Dr B n’avait commis de faute caractérisée dans le suivi médical de la grossesse de M A.

Selon l’expert :

La succession des événements ayant conduit à sa non-information du résultat du test prescrit par le Dr X-F n’avait pas été imputable à cette dernière. Elle n’était informée par le laboratoire que des résultats à risque. En raison de son caractère aléatoire, un tritest ne suffit pas à poser un diagnostic. Dans la mesure où tous les autres paramètres étaient normaux, on ne pouvait reprocher au praticien de n’avoir pas recherché auprès du laboratoire du CHT de Mamao à connaître son résultat.

Le délai pour pratiquer un tritest était expiré quand le Dr B est intervenu. Le praticien n’avait aucun élément de nature à évoquer une malformation du f’tus.

Le tribunal a également retenu que la mise en cause du Dr B n’avait pas été abusive.

Dans son arrêt confirmatif (sauf en ce qui concerne les frais irrépétibles) du 12 mai 2011, la cour a considéré que :

Les dispositions de l’article 1er de la loi du 4 mars 2002 s’appliquaient à l’instance qui a été engagée après sa promulgation. Le référé ayant donné lieu à l’ordonnance du 2 août 2000 constituait une instance distincte qui avait pris fin.

Les époux Z ne pouvaient donc pas solliciter l’indemnisation du préjudice économique qu’ils prétendaient subir du fait de la naissance d’D, pas plus que du préjudice subi par cette dernière, ces deux chefs de demandes devant être satisfaits par la représentation nationale.

Leur préjudice moral ne pouvait être indemnisé qu’à la condition de rapporter la preuve que les Drs X-F et B avaient commis des fautes caractérisées, entraînant pour eux une perte de chance d’éviter la naissance d’un enfant trisomique. Or, l’expert avait été catégorique dans ses conclusions négatives. Tout au plus pourrait-on reprocher à S X-F une certaine légèreté ou négligence, mais il ne s’agissait pas d’une faute caractérisée au sens de la loi du 4 mars 2002. Aucun reproche ne pouvait être fait à K B.

La cassation a été prononcée pour violation des articles 2 du code civil et L114-5 du code de l’action sociale et des familles, au motif que la cour d’appel avait fait application du second de ces textes alors que, s’agissant d’un dommage survenu antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles n’était pas applicable, indépendamment de la date de l’introduction de la demande en justice.

Cela étant exposé :

I – Sur l’application de l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles :

I – 1 Les époux Z font valoir que, contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, les dispositions de la loi du 4 mars 2002 ne sont pas applicables au litige, en raison :

De ce que leur action a été introduite antérieurement à sa promulgation, par leur assignation en référé-expertise du 22 juin 2000 ;

De ce que ces dispositions, en ce qu’elles ont institué une indemnisation forfaitaire, sont, à les supposer applicables aux instances en cours, contraires aux dispositions de l’article 1er du protocole n° 1 à la Convention européenne des droits de l’homme et de la sauvegarde des libertés qui protègent le droit de propriété et par conséquent les droits de créance acquis ;

De ce qu’il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui a été appliquée en l’espèce, que, s’agissant d’un dommage survenu antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles n’est pas applicable, indépendamment de la date de l’introduction de la demande en justice.

Les époux Z en concluent que la jurisprudence en la matière de la Cour de cassation, dite Perruche, élaborée antérieurement à la promulgation de la loi du 4 mars 2002, est applicable au présent litige.

I – 2 K B conclut que, dans son arrêt du 31 octobre 2012, la Cour de cassation s’est prononcée uniquement sur la question de l’application dans le temps de l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles, et qu’il sera développé que la jurisprudence dite Perruche, dès lors applicable, mais très contestable, n’a pas lieu d’emporter la conviction de la cour.

I – 3 S X-V demande que la cour ne se range pas à l’arrêt de cassation, mais qu’elle applique au litige les dispositions de la loi du 4 mars 2002. Elle fait valoir que la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière est critiquable, en ce qu’elle se livre à une interprétation extensive et contradictoire d’une décision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2010 (qui a déclaré inconstitutionnelle la disposition rendant ce texte applicable aux instances en cours) pour en déduire, contrairement à la jurisprudence du Conseil d’État, que la loi du 4 mars 2002 n’est pas applicable aux situations nées antérieurement à la promulgation de celle-ci, quand bien même l’instance aurait été engagée postérieurement. S X-V ajoute que tel est bien le cas en l’espèce, le référé- expertise ayant constitué selon elle une instance distincte de la présente action au fond.

Sur ce :

La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 a, dans son article 1er, rendu applicable en Polynésie française, institué un régime spécial de réparation du préjudice d’une personne handicapée et des parents de celle-ci lorsque ce handicap est dû à une faute médicale.

La loi du 4 mars 2002 a été rendue applicable aux instances en cours, à l’exception de celles où il a été irrévocablement statué sur le principe de l’indemnisation (art. 1-I). Ces dispositions transitoires ont été transposées dans l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 (art. 2-II-2°).

Or, aux termes de l’article 2 du Code civil, la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif.

Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a déclaré cette disposition transitoire contraire à la Constitution, aux motifs que :

Si le législateur peut modifier rétroactivement une règle de droit ou valider un acte administratif ou de droit privé, c’est à la condition de poursuivre un but d’intérêt général suffisant et de respecter tant les décisions de justice ayant force de chose jugée que le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions ; qu’en outre, l’acte modifié ou validé ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle ; qu’enfin, la portée de la modification ou de la validation doit être strictement définie.

Si les motifs d’intérêt général – tenant au droit d’agir en justice de l’enfant né atteint d’un handicap, aux conditions d’engagement de la responsabilité des professionnels et établissements de santé à l’égard des parents, ainsi qu’aux préjudices indemnisables lorsque cette responsabilité est engagée – pouvaient justifier que les nouvelles règles fussent rendues applicables aux instances à venir relatives aux situations juridiques nées antérieurement, ils ne pouvaient justifier des modifications aussi importantes aux droits des personnes qui avaient, antérieurement à cette date, engagé une procédure en vue d’obtenir la réparation de leur préjudice (Cons. Const. Déc. n° 2010-2 QPC du 11 juin 2010).

La première chambre civile de la Cour de cassation juge, depuis un arrêt du 15 décembre 2011, que les dispositions de l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles résultant de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, ne sont pas applicables aux dommages survenus antérieurement à l’entrée en vigueur de celle-ci, indépendamment de la date d’introduction de la demande en justice, aux motifs que :

Si l’autorité absolue que la Constitution confère à une décision du Conseil constitutionnel s’attache non seulement à son dispositif mais aussi à ses motifs, c’est à la condition que ceux-ci soient le support nécessaire de celui-là.

Faute de mention d’une quelconque limitation du champ de l’abrogation prononcée par la décision 2012-2 QPC du 11 juin 2010, soit dans le dispositif, soit dans des motifs clairs et précis qui en seraient indissociables, il ne peut être affirmé qu’une telle déclaration d’inconstitutionnalité n’aurait effet que dans une mesure limitée, incompatible avec la décision de la cour d’appel de refuser d’appliquer au litige les dispositions de l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles (Civ. 1re 15 déc. 2011 BC 2011 I n° 216).

Il résulte en effet de la décision n° 2010-2 QPC du 11 juin 2010 que les dispositions précitées, qui rendaient le nouveau régime d’indemnisation applicable aux instances en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, ont été abrogées sans aucune réserve d’interprétation.

Certes, ces dispositions transitoires étaient encore en vigueur lorsqu’a été prononcé le jugement dont appel. Mais la force obligatoire de la déclaration de leur inconstitutionnalité s’impose à la cour.

Le jugement sera donc infirmé pour avoir statué en application des dispositions de l’article 1er de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002.

Les demandes faites par les époux Z, personnellement et ès qualités d’administrateurs légaux de leur enfant mineure D, doivent par suite être examinées au regard des règles de droit commun qui sont applicables à ce dommage, dès lors que celui-ci est survenu avant l’entrée en vigueur des dispositions insérées dans l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles, et cela, indépendamment de la date d’introduction de leur action en justice.

Ainsi, notamment :

La responsabilité du médecin ne peut être engagée que s’il est démontré qu’il a commis une faute, et que cette faute a causé le dommage.

La faute est caractérisée lorsque le médecin n’a pas donné au patient des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science. La gravité de la faute n’influe pas sur sa qualification, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une simple erreur.

L’obligation du médecin est de moyens.

Il suffit que, parmi les causes dont la conjonction a occasionné le dommage, se trouve une faute du médecin pour que celui-ci soit tenu de réparer l’intégralité du dommage ' sauf son action récursoire contre les tiers dont l’activité fautive aurait concouru à la réalisation du préjudice.

Le médecin peut s’exonérer en établissant l’existence d’une cause étrangère : cas de force majeure, faute de la victime ou fait d’un tiers, dès lors qu’elle a été irrésistible, imprévisible et extérieure.

Il appartient au médecin de prouver la bonne exécution de son obligation d’information du patient sur la nature des investigations, interventions ou traitements envisagés, ainsi que sur les risques pouvant en découler.

Le dommage constitue un préjudice réparable lorsqu’il est certain, personnel et direct. Lorsque la victime a été privée d’une espérance future dont il est impossible de savoir, de par le fait dommageable, si elle se serait réalisée, cette perte de chance doit être réparée.

En cas de réalisation fautive d’un acte de diagnostic prénatal suivie de la naissance d’un enfant porteur d’un handicap non décelé, les parents, qui ont de ce fait été privés de la possibilité de recourir à l’interruption de grossesse, ont droit à être indemnisés de leurs différents préjudices, moral, et matériel lié à la prise en charge de l’enfant handicapé.

L’enfant né handicapé lui-même peut demander la réparation du préjudice résultant de son handicap si ce dernier est en relation de causalité directe avec les fautes commises par le médecin dans l’exécution du contrat formé avec la mère et qui ont empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse.

II – Sur les demandes des époux Z d’indemnisation du préjudice personnel de leur fille D :

II – 1 Les époux Z, agissant en qualité d’administrateurs légaux de leur fille mineure D, fondent leurs demandes de ce chef sur la jurisprudence exprimée dans l’arrêt de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation du 17 novembre 2000 (Perruche), ainsi rapportée : Il résulte des articles 1165 et 1382 du code civil que dès lors que les fautes commises par le médecin et le laboratoire dans l’exécution des contrats formés avec la mère avaient empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap, ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par les fautes retenues.

Ils imputent aux docteurs X-F et B des fautes certaines dans leur obligation de diagnostic et dans leur obligation d’information. Selon les appelants :

S’il n’est pas contestable que l’obligation du médecin à l’égard de ses patients est une obligation de moyens, celui-ci reste également soumis à une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne le suivi des analyses indispensables au bon déroulement d’une grossesse qu’il a pu ordonner. Cette obligation est exprimée tant par le code de déontologie médicale (art. 32 & 33) que par une jurisprudence constante.

En sa qualité de médecin prescripteur, le Dr X-F n’a pas rempli son obligation de résultat de s’inquiéter du résultat de l’examen qu’il avait pourtant proposé et prescrit lui-même le 11 décembre 1999, à la demande de Mme A, afin de détecter un risque de trisomie, pouvant conduire à une amniocentèse. Cet examen, purement facultatif, avait précisément pour objet de permettre à celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap. Il incombait donc au praticien de lui en communiquer le résultat afin de lui permettre de manifester son choix.

La carence du Dr X-F à cet égard est fautive. Alors qu’il a reçu sa patiente en consultation les 8 et 26 janvier, 12 février, 10 mars et 8 avril 2000, ce médecin, lorsqu’il a constaté, en ouvrant son dossier, le retard pris dans la transmission des résultats, n’a pas, comme il l’aurait dû, questionné Mme A afin de savoir si les prélèvements prescrits avaient bien été réalisés, ni questionné le laboratoire E, le CHT de MAMAO, voire le laboratoire PASTEUR-CERBA, afin de pallier tout aléa ou toute erreur de transmission, toujours possible.

Le Dr X-F a commis une faute professionnelle encore plus grave en interprétant l’absence de résultat du test prescrit comme un résultat favorable. Il a ainsi commis une faute grave dans l’établissement de son diagnostic.

Il ne peut être retenu, comme l’a fait le premier juge, que le Dr X-F n’aurait pas eu à s’enquérir du résultat du test en raison du caractère faillible de celui-ci et de ce que tous les autres paramètres étaient normaux.

Le Dr B a pris en charge le suivi de la grossesse de Mme A à compter du 19 avril 2000. Tenu à la même obligation de diagnostic, il avait l’obligation de résultat de prendre connaissance de l’entier dossier de la patiente.

La prescription ordonnée par le Dr X-F avait été mentionnée dans le dossier médical. Le Dr B devait donc également à son tour s’inquiéter de l’absence de résultat de l’examen ordonné le 11 décembre 1999 par son prédécesseur. Il lui suffisait de questionner sa cliente. Un simple appel au laboratoire E lui aurait permis également de découvrir l’erreur de classement et d’ordonner immédiatement l’amniocentèse qui s’imposait au vu du résultat alarmant du test.

L’absence des résultats de cet examen n’a donc pas permis aux deux médecins de prodiguer à leur patiente les soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science nécessaires à leur diagnostic que Mme A était en droit d’attendre, alors qu’une amniocentèse était nécessaire.

Les Drs X-F et B ont également manqué à leur obligation d’information.

Destinée à permettre au malade de décider lui-même de sa conduite, celle-ci est exprimée dans le code de déontologie médicale (art. 35), dans la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine du Conseil de l’Europe du 4 avril 1997 et dans la Charte européenne des droits fondamentaux du 18 décembre 2000.

Il résulte ainsi d’une jurisprudence constante qu’hormis les cas d’urgence, d’impossibilité ou de refus du patient d’être informé, le médecin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés, même si ces risques sont minimes ou exceptionnels.

C’est au médecin qu’il appartient de rapporter la preuve de l’accomplissement de son devoir de conseil.

Le Dr X-F avait l’impérieux devoir de répondre à l’interrogation de sa cliente en lui donnant le résultat des tests génétiques qu’il avait lui-même prescrits.

Son successeur, le Dr B, était tenu de la même obligation et devait s’inquiéter de l’absence au dossier du résultat de ces tests.

L’absence d’information sur le résultat du test a donc privé Mme A de la possibilité d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse en connaissance de cause, alors que le test avait été précisément ordonné pour répondre à sa demande.

Le formulaire de consentement de la femme enceinte en vue du diagnostic prénatal in utero de l’analyse mentionnée à l’article R162-16.7 du code de la santé publique contient la déclaration de celle-ci que « le résultat de l’examen exprimé en taux de risque me sera rendu et expliqué par le médecin ou par la sage-femme qui me l’a présenté ». Le Dr X-F avait donc un devoir d’information renforcé sur ce point.

Le Dr X-F n’est pas fondé à tenter de s’exonérer de sa responsabilité en faisant valoir que Mme A n’aurait pas respecté les indications qui lui avaient été données de faire réaliser ce test entre le 15 décembre 1999 et le 4 janvier 2000 pour être interprétable en Polynésie. En effet, cette indication ne figure ni sur l’ordonnance, ni sur le document d’information remis à Mme A par le prescripteur. Ce dernier ne justifie pas avoir attiré son attention sur la nécessité de respecter cette période. Le dépassement de celle-ci conduisait à réaliser l’analyse dans un laboratoire de métropole, ce qui ne dispensait bien évidemment pas le praticien de s’inquiéter de son résultat. Réalisé le 5 janvier 2000, le prélèvement permettait des résultats tout à fait exploitables.

L’expert C a d’autre part relevé que le Dr X-F n’avait établi aucun compte-rendu d’échographie.

Quant au Dr B, il ne saurait tenter de s’exonérer en soutenant que s’il s’était aperçu de l’absence de ce test lors de la prise en charge de la patiente le 19 avril 2000, cette dernière n’aurait pas eu le temps d’exercer son choix en temps utile, compte tenu de l’accouchement le 27 mai suivant. À cette date, Mme A avait encore la possibilité, au vu des résultats du test, de demander que soit pratiquée une amniocentèse, puis de faire pratiquer une interruption de grossesse, toujours possible à la 33e semaine.

D’autre part, le Dr B, qui a consulté Mme A à trois reprises, n’a pas établi de compte-rendu de ses échographies.

Les Drs X-F et B devront donc être déclarés solidairement responsables du dommage qui est résulté de leur faute, tant à l’égard de l’enfant que des parents, du fait de la violation de leur obligation de diagnostic et de soin, à charge pour eux d’exercer éventuellement leur recours contre les laboratoires qu’ils estimeraient responsables d’un défaut de transmission.

Quant au préjudice indemnisable, les époux Z concluent que :

S’agissant d’une responsabilité civile, le principe est celui de la réparation intégrale du dommage afin de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit.

L’assemblée plénière de la Cour de cassation a jugé que, dès lors que les fautes commises par un médecin et un laboratoire dans l’exécution des contrats formés avec une femme enceinte avaient empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap, ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap, et causé par les fautes retenues (Ass. plén. 17 nov. 2000, Perruche).

Trois arrêts du 13 juillet 2001 ont retenu que l’enfant né handicapé peut demander la réparation du préjudice résultant de son handicap si ce dernier est en relation de causalité directe avec les fautes commises par le médecin dans l’exécution du contrat formé avec sa mère et qui ont empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse ; dans le cas d’une interruption pour motif thérapeutique, il doit être établi que les conditions médicales prescrites par l’article L2213-1 du code de la santé publique étaient réunies.

En demandant à son médecin de lui prescrire un tritest, lequel n’était pas un examen de routine, et n’avait aucun caractère systématique, Mme A avait manifesté son intention d’envisager éventuellement une interruption de grossesse au cas où son résultat aurait mis en évidence une anomalie.

Du fait des fautes successives des deux praticiens, elle a été privée incontestablement de la possibilité d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap. Si ce résultat avait été connu en temps utile, et notamment à 33 semaines de grossesse, une amniocentèse pouvait encore être pratiquée, et une interruption de grossesse pour motif thérapeutique était possible.

Il en est résulté, non une perte de chance, mais un préjudice direct, actuel et certain, résultant de la perte de possibilité pour Mme A de faire le choix d’interrompre sa grossesse. Sa décision de demander la prescription d’un examen anténatal montre qu’elle n’avait pas renoncé à exercer ce choix.

Alors âgée de 11 mois, l’enfant n’était pas consolidée lorsque le Pr. C l’a examinée. Son handicap s’aggrave avec l’âge et l’empêche déjà de poursuivre une scolarité normale. Une expertise médicale est nécessaire pour déterminer son état actuel résultant de la trisomie 21, de fixer la date de consolidation prévisible, et d’évaluer le préjudice médico-légal ainsi que les charges particulières découlant de son handicap.

Une provision d’un montant de 50 000 € à valoir sur l’indemnisation de ce préjudice est demandée.

II – 2 K B conclut qu’il n’a commis aucune faute, et que les faits qui lui sont reprochés sont, en tout état de cause, sans lien avec le handicap de l’enfant.

Selon lui :

La responsabilité médicale est fondée sur la démonstration d’une faute, le médecin n’étant tenu qu’à une obligation de moyens et non de résultat. C’est la règle qu’exprime l’article L1142-1 du code de la santé publique.

Le rapport d’expertise du Pr. C a conclu que :

La prise en charge de la grossesse de Mme A, hors la question de l’analyse du dépistage anténatal en litige, avait été correctement réalisée par les Drs X et B et ne pouvait faire l’objet d’aucune critique.

L’absence de dépistage anténatal de la trisomie 21 chez Mme A était, par contre certainement la conséquence d’une erreur dans la prise en charge du diagnostic anténatal.

Le Dr B ne pouvait en être considéré comme responsable. Il a pris tardivement le relais de surveillance d’une grossesse, à un terme auquel le dépistage sérologique de la trisomie 21 n’était plus d’actualité. Il aurait bien sûr pu lui aussi se préoccuper de l’absence de résultat d’un test figurant habituellement dans les dossiers que lui transmet le Dr X. Sachant ce test prescrit et prélevé, il ne pouvait lui non plus soupçonner un défaut de transmission des résultats par le laboratoire. Lors de son échographie f’tale du troisième trimestre, le Dr B n’a d’ailleurs pas dépisté de malformations ni d’anomalie morphologique du f’tus qui l’aurait alerté sur l’éventualité d’une trisomie.

K B fait ainsi valoir qu’il ne pouvait imaginer un seul instant ce qu’avait été le parcours invraisemblable du résultat d’examen du tritest, qu’il n’avait au demeurant pas prescrit lui-même.

Il fait également valoir que l’expert a noté que la discussion sur l’opportunité de la prescription du test de la trisomie 21, non obligatoire, n’avait plus lieu d’être à sept mois et demi de grossesse.

Subsidiairement, K B soutient encore que :

La prétendue faute qui lui est reprochée n’a entraîné aucune perte de chance pour Mme A de pouvoir bénéficier d’une interruption médicale de grossesse et d’éviter ainsi de donner naissance à un enfant porteur d’un handicap congénital.

En effet, compte tenu du terme auquel il a pris en charge la patiente (33 semaines d’aménorrhée, soit 7 mois de grossesse), du délai nécessaire à la réalisation de l’amniocentèse ' auquel se serait ajoutées 3 à 4 semaines pour la mise en culture et l’obtention des résultats ' et du délai de mise en 'uvre de la procédure spécifique prévue à l’article L2213-1 du code de la santé publique pour les interruptions thérapeutiques de grossesse, le stade de celle-ci aurait alors été au minimum de 38 semaines d’aménorrhée, et Mme A aurait donc très certainement accouché avant que l’interruption de grossesse ne soit pratiquée (l’accouchement ayant effectivement eu lieu à 38 semaines). On peut légitimement penser que Mme A n’aurait pas pris la décision d’avorter si l’information lui était parvenue seulement quelques jours avant la naissance.

Dès lors, le lien causal direct et certain entre les griefs formulés par les requérants et la perte de chance qu’ils invoquent fait défaut.

Également à titre subsidiaire, K B conclut encore que :

Nonobstant la jurisprudence dite Perruche, il est évident qu’il n’existe pas de lien de causalité direct entre une erreur de diagnostic reprochée au médecin et le handicap résultant d’une pathologie anténatale qui préexistait aux examens.

Il n’existe pas non plus de dommage subi par l’enfant en lien de causalité avec la faute du médecin, puisque si le médecin avait agi comme il aurait dû le faire et si la mère, comme elle le prétend, avait interrompu sa grossesse, cet enfant n’aurait jamais vu le jour.

La jurisprudence dite Perruche a été justement très critiquée des points de vue juridique, éthique, de santé publique et sociétal. Une loi du 11 février 2005 est venue améliorer la prise en charge du handicap, dont l’insuffisance était un des motifs de cette jurisprudence, y compris à l’égard des enfants handicapés qui ne relèvent pas, comme en l’espèce, de la loi du 4 mars 2002. Ni la représentation nationale, ni d’autres juridictions étrangères (Royaume-Uni, États-Unis, Allemagne, Australie) n’ont retenu l’indemnisation du « préjudice d’être né ».

II – 3 S X-V conclut que, même s’il n’est pas fait application des dispositions de la loi du 4 mars 2002, sa responsabilité n’est pas engagée.

Selon elle :

Il ressort clairement du rapport d’expertise du Pr. C qu’elle n’avait nullement une obligation de résultat de s’inquiéter des conclusions du test.

L’absence d’information particulière en provenance du CHT Mamao signifiait que le résultat du test était normal.

La circonstance qu’elle n’ait pas été alertée résulte de la double défaillance du CHT, qui ne l’a informée ni de l’envoi du prélèvement au laboratoire CERBA, ni du résultat anormal de l’analyse faite par celui-ci ; et du laboratoire CERBA, qui n’a transmis le résulta du test qu’au CHT, au lieu de le faire parvenir au médecin prescripteur – comme le prévoit la charte de qualité à laquelle ce laboratoire a adhéré.

Aucune faute de diagnostic ne peut donc être imputée à S X-V.

Elle n’a pas non plus manqué à son obligation d’information.

Mme A n’est pas fondée à se prévaloir d’un devoir d’information renforcé, faute pour elle de démontrer que l’article R162-7 CSP est applicable, et ce d’autant plus qu’il n’y a pas eu de résultat à rendre ou à expliquer, faute de leur transmission.

S X-V ignorait que le prélèvement en vue du test qu’elle avait prescrit avait été effectué au-delà des 18 semaines, et donc que les analyses seraient faites en métropole et non au CHT Mamao.

Même si aucun document ou ordonnance n’indique qu’elle avait précisé à sa patiente que le prélèvement devait être fait entre le 15 décembre 1999 et le 4 janvier 2000, l’expert a retenu que cette information avait été donnée à Mme A selon ses propres déclarations.

Le laboratoire CERBA n’a respecté aucune des obligations d’information de la patiente et du médecin prescripteur figurant dans la charte de qualité à laquelle il avait adhéré.

Les échographies pratiquées mensuellement n’ont jamais révélé le moindre signe de trisomie.

Le jugement doit ainsi être confirmé.

Les appelants font preuve d’un acharnement procédural à l’encontre des médecins, alors que les fautes du laboratoire et du CHT sont manifestes et qu’ils auraient dû saisir le tribunal administratif.

Les époux Z n’établissent pas non plus l’existence d’un lien de causalité entre l’absence de dépistage de la trisomie et l’impossibilité d’exercer une interruption de grossesse pour motif thérapeutique et le handicap de l’enfant.

Le tribunal a exactement retenu que ce dernier n’est pas directement dû à une faute médicale, mais qu’il est inhérent à son patrimoine génétique.

Il résulte d’une jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 1re 8 juill. 2008) que l’indemnisation intégrale du préjudice corporel causé par le handicap de l’enfant et des charges particulières qui en découlent, qui n’est pas une simple perte de chance, n’est due que si la mère avait manifesté son intention d’effectuer une interruption de grossesse pour motif médical.

Tel n’est pas le cas en l’espèce. Il ne résulte d’aucun élément objectif que Mme A ait fait connaître aux deux gynécologues successivement en charge de son suivi son intention de mettre un terme à sa grossesse dans l’hypothèse où serait révélée l’existence d’une possible anomalie chromosomique. La seule circonstance qu’elle se soit soumise à l’examen anténatal qu’elle dit avoir demandé ne suffit pas à établir cette intention.

Le seul préjudice indemnisable est ainsi la perte d’une chance de recourir à une interruption de grossesse.

Sur ce :

Il résulte en particulier des opérations d’expertise contradictoirement menées par le Pr C, expert désigné en référé, que :

Âgée de 26 ans, M A était en bonne santé. Elle avait subi en 1997 une fausse couche précoce. Elle ne connaissait pas dans sa famille ou dans celle de son conjoint d’enfant atteint d’une malformation congénitale.

M A a consulté le Dr X pour des visites anténatales les 15 octobre, 8 novembre et 11 décembre 1999 et les 8 janvier, 26 janvier, 12 février, 10 mars et 8 avril 2000. Les examens cliniques obstétricaux étaient normaux. Les prélèvements sanguins obligatoires de grossesse ont été prescrits et ont été normaux. Chaque visite a été complétée par une échographie de routine, sans compte-rendu écrit. Le Dr X a établi le 8 janvier 2000 un compte-rendu détaillé d’une échographie de morphologie f’tale, qui était normale, sans malformation f’tale décelable.

La fin de la grossesse a été suivie par le Dr B du fait qu’il est également obstétricien. Il a pratiqué une échographie de contrôle le jour du début de son intervention, le 19 avril 2000. Il n’a relevé aucune anomalie. Les visites suivantes ont eu lieu les 13 et 26 mai 2000. L’accouchement a eu lieu à la clinique Cardella le XXX au terme d’un travail normal. C’est alors qu’a été constatée la trisomie 21 d’D.

Le test de dépistage sérologique de la trisomie 21, test dit HT 21, indicateur du risque de mongolisme, avait été prescrit à Mme A par le Dr X le 11 décembre 1999 lors de la visite du troisième mois. La prescription indiquait précisément que, pour être interprétable normalement, ce prélèvement devait être effectué entre le 15 décembre 1999 et le 4 janvier 2000, soit avant la fin de la 18e semaine, selon la réglementation en vigueur. Or, pour des raisons d’empêchement personnel, Mme A n’a fait pratiquer ce prélèvement par le laboratoire E que le 6 janvier 2000.

Le laboratoire E ne réalise jamais lui-même les dosages du test HT 21. Il les adresse toujours au laboratoire de biochimie du CHT de Mamao, ce qui fut fait dès le 6 janvier 2000. Le laboratoire de biochimie du CHT de Mamao ne pratique lui-même les dosages du test HT 21 que dans les strictes limites chronologiques des termes de grossesse prescrits par le code de la santé publique, soit entre 14 et 18 semaines. Le risque de trisomie 21 du f’tus se calcule en effet non seulement à partir des concentrations dans le sérum des hormones dosées, mais aussi en tenant compte de l’âge de la mère et du terme précis de la grossesse. Ce calcul est effectué par ordinateur sur un logiciel qui filtre très précisément les termes inclus entre 14 et 18 semaines. Au-delà de 18 semaines, le calcul de risque de trisomie 21 exige un logiciel plus complexe dont ne dispose pas le laboratoire de biochimie du CHT de Mamao. Les prélèvements sont alors adressés au laboratoire du CERBA à Paris qui lui possède le logiciel adapté.

Lorsque le test HT 21 est prélevé après 18 semaines, le laboratoire de Mamao se charge de l’expédier au laboratoire du CERBA. Au préalable, le médecin biologiste qui a reçu le prélèvement, en l’espèce Mme Q Y, s’assure auprès du médecin prescripteur, par téléphone, de son choix quant à la destination du prélèvement : soit l’annuler car en-dehors des délais réglementaires, soit maintenir la prescription et donc l’adresser à Paris. Or, le Dr X déclare que cette demande ne lui a pas été adressée par le Dr Y, ce que confirme Mme C. P, chef du laboratoire de biochimie du CHT de Mamao.

Le prélèvement est malgré tout envoyé à Paris et techniqué par le laboratoire du CERBA. Le résultat indique un risque de trisomie 21 estimé à 1/110, donc indiscutablement supérieur au risque seuil de 1/250 retenu en France pour plancher, et certainement par conséquent justifiable d’une proposition de prélèvement de liquide amniotique, une amniocentèse, pour analyse des chromosomes du f’tus.

Édité le 21 janvier 2000 par le laboratoire du CERBA, ce résultat est aussitôt transmis par fax, puis par courrier, au laboratoire de biochimie du CHT de Mamao. L’imprimé indique qu’un double du résultat, ou de sa disponibilité, est adressé au médecin prescripteur, le Dr X, et à la patiente, Mme A. Or, toutes deux déclarent qu’elles n’ont ni l’une, ni l’autre reçu de courrier du laboratoire CERBA.

En réalité, le résultat a été transmis exclusivement au laboratoire de biochimie du CHT de Mamao. Quand un tel résultat revient du CERBA au laboratoire du CHT, il est réceptionné par le surveillant du laboratoire de biochimie qui en fait une copie pour ses archives et qui en adresse une copie à la secrétaire du laboratoire. La secrétaire du laboratoire normalement le transmet au médecin biologiste responsable du dossier, ici en principe le Dr Y, puis au médecin prescripteur et à la patiente.

Dans le cas présent et pour des raisons mal expliquées, peut-être de facturation, la secrétaire a transmis le résultat du dosage de Mme A à sa collègue secrétaire des prélèvements extérieurs de l’hôpital et exclusivement à elle. Ni l’une ni l’autre secrétaire ne se sont ensuite inquiétées du sort de ces documents.

Ces résultats ne sont donc jamais parvenus ni au Dr Y, la biologiste du laboratoire, ni au Dr X, et encore moins à Mme A.

Le Dr X est habituellement directement informé par le CHT de Mamao en cas de résultat indicateur de risque de trisomie 21. Elle a considéré le résultat du test comme normal et rassurant. Elle n’a pas proposé à Mme A l’amniocentèse qui par l’analyse des chromosomes du f’tus est seule en mesure d’affirmer en toute certitude la réalité du mongolisme.

Faute de retour du dépistage sérologique HT 21 et donc faute d’amniocentèse, il n’a pas été proposé à Mme A, si tel avait été son choix, de procéder à une interruption médicale de la grossesse. Il n’existe en effet aucun traitement, notamment pas anténatal, de la trisomie 21.

De plus, les échographies f’tales faites à 18 et 33 semaines n’ayant pas mis en évidence les malformations, souvent seulement minimes, parfois suggestives de trisomie 21, l’amniocentèse n’a jamais pu ultérieurement être proposée à’ Mme A. L’interruption

médicale de la grossesse n’a donc jamais été même envisagée.

Le Pr. C a conclu son rapport comme suit :

D Z est atteinte d’une trisomie 21 constitutionnelle ayant échappé au diagnostic anténatal.

Même si le prélèvement réalisé par Mme A s’est trouvé au-delà des délais réglementaires prescrits par le Dr X, ses résultats étaient scientifiquement valides et auraient dû conduire à proposer une amniocentèse et une interruption médicale de la grossesse.

Le défaut de dépistage anténatal ne peut être imputé au Dr S X qui a correctement prescrit le test sérologique mais qui n’a été informée ni du caractère tardif de son prélèvement ni de son envoi au laboratoire du CERBA à Paris, et qui n’a pas reçu, comme elle l’aurait dû, le résultat du test pratiqué.

Le défaut de dépistage anténatal ne peut pas non plus être reproché au Dr K B qui n’a pris en charge la grossesse que tardivement, au-delà du terme habituel de diagnostic sérologique de risque de la trisomie 21 f’tale.

À sept mois et demi de vie, l’état de D n’est pas actuellement consolidé, et ne le sera pas avant l’âge de l’adolescence. Ses préjudices ne sont donc pas évaluables en l’état. Le retentissement de la trisomie 21 sur son développement est aujourd’hui très peu sensible mais il est plus que probable que l’évolution se fera malheureusement en aggravation avec accentuation d’un retard intellectuel et sans doute psychomoteur qui justifiera ultérieurement l’assistance d’une institution spécialisée.

Des constatations et des conclusions de l’expertise du Pr C, des pièces et documents produits par les parties, de leurs moyens et arguments, et des débats, la cour tire les conclusions suivantes.

Le dommage dont la réparation est demandée résulte de ce qu’D Z n’a pu, et ne peut espérer mener, une existence considérée comme normale du fait de l’altération de sa condition physiologique par l’affection congénitale dénommée trisomie 21, dite mongolisme.

Il s’agit d’une affection causée par une anomalie chromosomique congénitale provoquée par la présence d’un chromosome surnuméraire pour la 21e paire.

L’existence de ce handicap n’a été décelée qu’après l’accouchement de la mère.

La trisomie 21 n’est pas curable. La survenance du dommage dont la réparation est demandée n’aurait pu être empêchée que par une interruption, naturelle ou volontaire, de la grossesse de la mère.

Aucun élément ne permet d’établir qu’une interruption naturelle de la grossesse aurait pu survenir, ni qu’une fausse couche aurait été empêchée par le fait d’un tiers.

La trisomie 21 est une anomalie qui, lorsque les parents le souhaitent, donne lieu, en application des dispositions légales et réglementaires applicables, y compris en Polynésie française, à la délivrance d’une attestation permettant de procéder à une interruption de grossesse.

Ni les médecins traitants, S X-V puis K B, ni M A et son époux AH-AI Z n’ont eu de motif de demander celle-ci.

En effet, seul un diagnostic prénatal de la trisomie 21 l’aurait permis, et il n’en a pas été fait.

Comme le relate le Pr C dans son rapport, le diagnostic anténatal de la trisomie 21, tel qu’il était pratiqué à l’époque des faits, se fonde sur l’analyse des chromosomes du f’tus, le caryotype. Cette analyse est faite au moyen de la culture de cellules f’tales après ponction du liquide amniotique (amniocentèse). Elle s’effectue à partir de trois mois jusqu’au terme de la grossesse, mais les risques d’échec de la culture s’accroissent lorsqu’on progresse vers le terme.

Ainsi que l’indique aussi le Pr C, le recours à l’amniocentèse était limité par les conditions posées par la réglementation au remboursement de cet examen par les assurances sociales : mère âgée de plus de 38 ans, anomalies chromosomiques parentales, antécédents de caryotype anormal dans le couple, anomalies révélées par l’échographie, grossesse à risque de trisomie 21 f’tal égal ou supérieur à 1/250 estimé après dosage d’au moins deux marqueurs sériques maternels.

Dès lors, il était conforme aux bonnes pratiques du diagnostic prénatal et des données acquises de la science médicale de n’envisager la réalisation d’une amniocentèse qu’au vu des résultats préliminaires de ce dosage. C’était l’objet du test dit HT 21 (ou tritest) prescrit par le Dr X-V le 11 décembre 1999, lors de la visite du troisième mois de grossesse.

Aucun des éléments soumis à la cour ne permet de contredire les constatations et les conclusions du Pr. C selon lesquelles le prélèvement en vue de ce test HT 21 a été prescrit par S X-V à M A comme devant être effectué entre le 15 décembre 1999 et le 4 janvier 1999, soit avant la fin de la 18e semaine de grossesse, mais que, pour des raisons de convenance personnelle, C. A ne s’y est soumise que le 6 janvier 2000.

Mais ce retard de deux jours dans la réalisation du prélèvement ne constitue pas une cause étrangère de nature à exonérer le médecin prescripteur de son éventuelle responsabilité.

En effet, le Pr. C a retenu que, même avec ce retard, les résultats du prélèvement étaient scientifiquement valides et auraient dû conduire à proposer une amniocentèse et une interruption médicale de grossesse.

Il résulte des constatations faites par le Pr C, qu’aucun autre élément soumis à la cour ne permet de démentir, que l’information du Dr X du résultat de ce test, en l’espèce alarmant (risque de trisomie 21 de 1/110 pour une norme de 1/250), était subordonnée à une série de diligences qui ont toutes été méconnues :

Défaut de demande du médecin biologiste du laboratoire du CHT de Mamao au médecin prescripteur sur la suite à donner au test du fait de ce que le prélèvement avait été fait hors délai.

Défaut d’envoi effectif du résultat du test par le laboratoire CERBA au Dr X et à M A.

Défaut de communication du résultat du test envoyé par le laboratoire CERBA au laboratoire du CHT de Mamao au médecin biologiste de ce dernier.

Mais ces dysfonctionnements n’ont pu avoir pour conséquence le défaut de prescription d’une amniocentèse par le Dr X que parce que le protocole en vigueur entre cette dernière et le laboratoire de biochimie du CHT de Mamao prévoyait que celui-ci n’informait le médecin prescripteur qu’en cas de résultat du test HT 21 indicateur d’un risque de trisomie 21. C’est pourquoi le Dr X a considéré que l’absence de résultat du test HT 21 qu’elle avait prescrit signifiait que celui-ci était normal.

Quoique le Pr C ait conclu que, dans ces conditions, le défaut de dépistage anténatal ne pouvait être imputé au Dr X, la cour ne fait pas sienne cette appréciation. Au demeurant, l’expert a lui-même relevé que le Dr X ne s’était pas inquiétée de l’absence de résultat du test qu’elle avait prescrit le 11 décembre 1999.

Or, S X-V était tenue d’une obligation d’informer M A du résultat du test HT 21 qu’elle avait prescrit, afin de permettre en temps utile le diagnostic de la trisomie 21, puis une interruption de grossesse si tel était le souhait des parents.

Le devoir d’information du médecin est formulé en ces termes par l’article 35 du code de déontologie médicale : le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose.

Cette obligation d’information n’est nullement de résultat. Elle procède de l’obligation du médecin prescripteur de donner à son patient des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science. Ces derniers comprennent ainsi l’information nécessaire pour que la femme enceinte soit en mesure d’apprécier la nécessité de compléter le diagnostic prénatal par une amniocentèse, en vue de pouvoir exercer effectivement son droit de demander l’interruption de sa grossesse dans le cas, comme en l’espèce, de révélation qu’il existait une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

L’information du patient incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences. Il résulte des opérations d’expertise que cette information était organisée tant au laboratoire CERBA qu’au laboratoire de biochimie du CHT de Mamao, mais que l’envoi du résultat du test HT 21 au Dr X et à Mme A n’a pas été fait.

En faisant reposer l’information de sa patiente, et la sienne propre, sur les aléas de la communication du résultat du test HT 21 qu’elle avait prescrit par le laboratoire de biochimie du CHT de Mamao, S X-V s’est privée, et a privé M A, d’une information déterminante quant à l’élaboration du diagnostic anténatal de la trisomie 21 qu’elle avait elle-même entrepris en ordonnant ce test à la demande de la patiente.

L’article 34 du code de déontologie médicale dispose que le médecin doit s’efforcer d’obtenir la bonne exécution de ses prescriptions. L’article 64 prévoit que, lorsque plusieurs médecins collaborent à l’examen ou au traitement d’un malade, ils doivent se tenir mutuellement informés, et que chacun des praticiens assume ses responsabilités personnelles et veille à l’information du malade. L’intervention des médecins biologistes des laboratoires chargés du tritest n’exonérait donc pas le Dr X de son obligation d’en demander le résultat afin de pouvoir en informer Mme A.

Les époux Z font justement valoir que cet examen, qui avait été expressément demandé par la patiente et qui n’a aucun caractère systématique, avait précisément pour objet de lui permettre d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap. Ils concluent à bon droit que le Dr X a encore commis une faute en interprétant l’absence du test prescrit comme un résultat favorable.

En effet, le médecin prescripteur n’est pas fondé à exciper de sa propre carence à s’inquiéter, en l’absence de toute réponse, des résultats d’un examen biologique qu’il a ordonné, ni à se prévaloir en ce cas d’une cause étrangère qui serait l’erreur ou la négligence du ou des laboratoires chargés de cet examen. Son défaut de surveillance, en méconnaissance de son devoir d’obligation et de diligence à l’égard du patient, n’est ni une cause qui lui est extérieure, ni un élément imprévisible ou insurmontable. Il n’importe que l’examen ait été pratiqué, du fait d’un retard de la patiente dans l’opération du prélèvement, par un laboratoire extérieur à la Polynésie française, puisqu’il aurait suffi à S X-V de prendre l’attache du laboratoire biochimique du CHT de Mamao, lequel avait reçu en temps utile le résultat du test transmis par le laboratoire CERBA.

L’insuffisante fiabilité du test HT 21 pour l’établissement d’un diagnostic de la trisomie 21 est précisément le motif de ce qu’il doit être complété par une amniocentèse en cas de doute.

L’absence de ce résultat aurait dû alarmer K B lorsqu’il a, comme il avait été convenu entre le Dr X et Mme A dès le début de la grossesse, repris le suivi de celle-ci à l’approche du terme, en sa qualité d’obstétricien. En effet, les autres résultats, notamment d’échographie, étaient normaux. Le Pr C a rappelé que l’échographie n’est de loin pas infaillible pour dépister le mongolisme foetal. L’absence de compte-rendu d’échographie n’a pas d’incidence à cet égard, aucun autre praticien n’ayant succédé au Dr B dans le suivi de cette grossesse.

Mais la cour ne fait pas siennes les conclusions du Pr C selon lesquelles le défaut de dépistage anténatal ne pourrait pas être reproché au Dr B qui n’a pris en charge la grossesse que tardivement, au-delà du terme habituel de diagnostic sérologique de risque de la trisomie 21.

Comme l’exprime l’article 64 précité du code de déontologie médicale, l’intervention de plusieurs médecins ne dispense pas chacun d’eux de son obligation personnelle de veiller à l’information du patient.

Il ne résultait pas du dossier médical transmis par le Dr X au Dr B que le résultat du test HT 21 prescrit par celle-ci avait été communiqué. Pas plus que S X-V n’était fondée à asseoir son diagnostic sur le défaut de réponse du laboratoire, K B n’était-il diligent et attentif lorsqu’il négligeait la carence de son prédécesseur, ou d’un laboratoire, telle qu’elle apparaissait dans le dossier médical par le fait de l’absence de réponse au test demandé plus de trois mois auparavant. Là encore, son obligation n’était pas de résultat, mais de moyens, c’est-à-dire s’assurer du résultat de l’examen qui avait été prescrit pour établir un diagnostic anténatal de la trisomie 21.

Les époux Z font justement valoir que si la patiente avait eu connaissance de l’absence de résultat du test HT 21 lors de sa première visite au Dr B le 19 avril 2000, elle s’en serait immédiatement inquiétée et aurait exigé qu’une amniocentèse soit réalisée en urgence.

Cette vigilance d’K B était d’autant plus nécessaire qu’ainsi que l’a documenté le Pr C dans son rapport, un diagnostic par caryotype de trisomie 21 du f’tus est une indication indiscutable d’interruption médicale de la grossesse si les parents le souhaitent, laquelle peut légalement se pratiquer jusqu’au terme ultime de la grossesse.

Selon une jurisprudence de la Cour de cassation antérieure à la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ' loi non applicable en l’espèce comme il a été dit – l’enfant né handicapé peut demander la réparation du préjudice résultant de son handicap si ce dernier est en relation de causalité directe avec les fautes commises par le médecin dans l’exécution du contrat formé avec la mère et qui ont empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse (Cass. Ass. plén. 17 nov. 2000 B. n° 9 ; 28 nov. 2001 B. n° 16).

Il ne peut être opposé aux époux Z qu’ils ne rapporteraient pas la preuve de la volonté de la mère d’interrompre sa grossesse en cas de diagnostic d’une malformation congénitale. En effet, les fautes des Drs X et B ont privé celle-ci de l’information qui lui aurait permis de prendre une telle décision, information qu’elle avait demandée, par la prescription du test HT 21, mais dont le résultat alarmant ne lui a jamais été communiqué.

L’intention de M A d’interrompre sa grossesse en cas de diagnostic de la trisomie 21 résulte ainsi clairement de sa demande expresse de procéder au tritest malgré que sa grossesse ne soit pas considérée comme étant à risques. Il est possible de recourir à un avortement thérapeutique pendant toute la durée de la grossesse dès lors que se révèle une affection telle que la trisomie 21, qui est considérée comme une affection incurable d’une particulière gravité.

C’est donc par pure supposition qu’K B conclut qu’on peut légitimement penser que Mme A n’aurait pas pris la décision d’avorter si l’information lui était parvenue seulement quelques jours avant la naissance. Le fait est qu’elle n’a pas eu cette information.

Contrairement à ce que soutiennent les intimés, il existe un lien de causalité direct entre leurs fautes personnelles et le préjudice subi par l’enfant D. En ne s’inquiétant pas du résultat du tritest, sous la supposition qu’une non-réponse du laboratoire signifiait qu’il était négatif, les Drs X et B ne sont pas allés au terme de l’investigation du diagnostic de trisomie 21 demandée par M A. Celle-ci a, de leur fait, été privée de l’exercice de son choix d’interrompre sa grossesse pour motif thérapeutique. La naissance d’D, atteinte d’une affection incurable, en a été la conséquence. Le préjudice de l’enfant est constitué par ce handicap qui l’affecte dans son développement et dans ses conditions de vie, altérant son existence même. Il est totalement distinct de la simple perte de chance de recourir à une interruption de grossesse.

S X-V et K B seront par conséquent déclarés responsables in solidum du préjudice subi par l’enfant trisomique D Z depuis la naissance de celle-ci, le 27 mai 2001.

Il résulte de l’expertise du Pr. C, qu’actualisent des bilans orthophonique et pédagogique de l’enfant à la rentrée scolaire 2014, que l’état de celle-ci ne sera pas consolidé avant l’adolescence. Avant dire droit sur la réparation de son préjudice, une expertise sera donc ordonnée dans les termes du dispositif de l’arrêt.

Il sera enjoint aux époux AH-AI Z et M A d’appeler en cause les organismes sociaux et tout tiers payeur.

Le bilan orthophonique indique notamment qu’D poursuivait sa scolarité à domicile et que sa capacité d’attention/concentration s’était nettement améliorée ; qu’elle est une enfant très éveillée, mais qu’elle est encore perdue dans le temps social et vécu, maîtrisant la litanie des jours mais pas celle des mois ; que la compréhension d’un récit oral met en relief ses difficultés mnésiques et attentionnelles ; et qu’à 14 ans, le retard dans l’approche implicite de la lecture est révélateur.

Le bilan pédagogique souligne les progrès réalisés depuis la scolarisation à domicile, des facilités en calcul, mais pas en lecture, et une motivation pour l’apprentissage.

Ces éléments d’appréciation montrent l’intérêt, à ce stade, d’une prise en charge individuelle qui excède les coûts habituels d’éducation, mais n’autorise malgré tout que des apprentissages limités. Ils permettent de faire droit à la demande de provision qui est faite à hauteur de 50 000 €, soit 5 966 587 F CFP.

III – Sur les demandes des époux Z de réparation de leur préjudice moral et de réserver leur préjudice matériel et économique :

Pour demander également l’indemnisation de leur préjudice personnel, les époux Z se réfèrent à un arrêt de la Cour de cassation aux termes duquel, dès lors que la faute commise par un médecin dans l’exécution de son contrat avec sa patiente empêche celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap, les parents et l’enfant peuvent demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par la faute retenue (Civ. 1re 8 juill. 2008).

Reprenant les arguments exposés au soutien de leur demande d’indemnisation du préjudice de l’enfant, les époux Z fondent leur propre demande sur l’article 1147 du code civil.

Selon eux, leur préjudice se décompose en un préjudice moral, du fait de la perte de possibilité d’interrompre la grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant né d’un handicap, et en un préjudice économique personnel, qui devrait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l’enfant, de ce handicap.

Il est demandé 50 000 € pour chaque parent du premier chef, et de réserver le second.

Subsidiairement, en cas d’application des dispositions de l’article L114-5 du code de l’action sociale et des familles, les époux Z demandent à être personnellement indemnisés du même montant.

Outre ses autres moyens précédemment relatés, K B conclut que la demande des époux Z d’être indemnisés des charges particulières découlant tout au long de la vie de l’enfant du handicap subi par celui-ci est irrecevable, s’agissant d’un préjudice strictement personnel à l’enfant.

Il conclut également au rejet de leur demande d’indemnisation de leur préjudice moral, à défaut pour eux de démontrer l’existence d’un préjudice imputable à la faute, tout autant non établie, qu’ils lui imputent.

S X-V conclut au débouté de ces demandes.

Sur ce :

Pour les motifs qui précèdent, S X-V et K B seront déclarés responsables in solidum du préjudice personnellement subi par les époux AH-AI Z et M A en raison de la trisomie non diagnostiquée de leur enfant D Z née le XXX.

Mais le préjudice des parents ne se confond pas avec celui de leur enfant née handicapée.

Il est d’abord constitué par l’indemnisation du préjudice causé par le manquement des Drs X et B à leurs obligations dans le suivi anténatal de M A, comme il a été dit. Les parents, ayant été privés de la possibilité de demander un avortement thérapeutique, que le résultat du tritest demandé par la mère aurait, après une amniocentèse de vérification, permis d’envisager, ont dû subir l’épreuve morale d’apprendre que leur petite fille est trisomique.

Les éléments d’appréciation dont dispose la cour permettent de faire droit à la demande des époux Z de ce chef pour un montant de 2 000 000 F CFP chacun.

Le préjudice des parents réside ensuite dans l’aggravation matérielle et économique des charges de leur obligation d’entretien et d’éducation d’une enfant handicapée, par rapport à celles qui incombent aux parents d’un enfant qui n’est pas atteint d’une affection congénitale incurable.

Il sera fait droit à la demande des époux Z de réserver leur demande de ce chef.

Il sera fait application des dispositions de l’article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française au bénéfice des appelants.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 30 avril 2007 par le tribunal civil de première instance de XXX

Statuant à nouveau :

Déclare recevable l’action engagée par les époux AH-AI Z et M A en leur nom personnel et ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure D Z ;

Dit que les dispositions de l’article L111-4 du code de l’action sociale et des familles ne sont pas applicables au litige ;

Déclare S X-V et K B responsables in solidum du préjudice personnellement subi par l’enfant trisomique D Z depuis la naissance de celle-ci, le 27 mai 2001 ;

Avant dire droit sur l’indemnisation du préjudice personnel de l’enfant D Z, désigne Monsieur le Dr I J, expert inscrit sur la liste de la cour, avec mission de :

les parties et leurs conseils entendus ou appelés ;

prendre connaissance des pièces produites et de tous documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission; entendre tout sachant; se faire remettre et consulter tous dossiers et documents médicaux ;

examiner l’enfant D Z, née le XXX à XXX

décrire son état actuel résultant de la trisomie 21 dont elle est atteinte ;

fixer la date de consolidation de son état ;

se prononcer, le cas échéant, sur les modalités des aides techniques et de l’assistance de tierces personnes, sur l’aménagement éventuel du logement, sur la capacité d’D à exercer une activité professionnelle ;

évaluer le montant des frais médicaux, pharmaceutiques, paramédicaux, d’hospitalisation, d’appareillage et de transports nécessités par le handicap d’D et par l’évolution prévisible de celui-ci ;

évaluer le montant des frais de scolarité et d’éducation physique et intellectuelle engagés et prévisibles du fait du handicap d’D ;

décrire les souffrances physiques et psychiques endurées par D sur une échelle de 7 degrés ;

évaluer son préjudice esthétique sur une échelle de 7 degrés ;

dire s’il existe ou existera un préjudice sexuel, une impossibilité de procréer, ou un préjudice d’établissement ;

décrire le préjudice d’agrément résultant de l’impossibilité de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ;

indiquer si l’état d’D nécessite une mesure de protection judiciaire ;

de manière générale, recueillir et récapituler tous éléments permettant d’évaluer le préjudice personnel d’D selon la classification suivante :

I – préjudices patrimoniaux :

I – 1 avant consolidation : dépenses de santé, pertes de gains professionnels actuels, frais divers (assistance tierces personnes) ;

I – 2 après consolidation : dépenses de santé futures ; frais de logement adapté ; frais de véhicule adapté ; assistance tierces personnes ; perte de gains professionnels futurs ; incidence professionnelle ; préjudice scolaire, universitaire ou de formation ;

II – préjudices extrapatrimoniaux :

II – 1 avant consolidation : déficit fonctionnel temporaire ; souffrances endurées ; préjudice esthétique temporaire ;

II – 2 préjudices permanents : déficit fonctionnel permanent ; préjudice d’agrément ; préjudice esthétique permanent ; préjudice sexuel ; préjudice d’établissement ; préjudices permanents exceptionnels ;

II – 3 préjudices liés à des pathologies évolutives ;

recenser les indemnités, prises en charges et aides accordées par des tiers payeurs : caisses de sécurité sociale, employeurs, collectivités ou établissements publics, mutuelles ou assureurs ;

établir et communiquer aux parties un pré rapport ; recevoir leurs dires et y répondre ;

s’adjoindre s’il y a lieu un sapiteur dans un domaine qui ne relève pas de sa compétence ; en ce cas, annexer son rapport de manière séparée au sien ;

Fixe à 250 000 F CFP le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui sera versée par les époux AH-AI Z et M A au greffe de la juridiction dans les soixante jours du prononcé de l’arrêt ;

Dit que l’expert devra déposer son rapport dans les huit mois suivant l’acceptation de sa mission;

Dit que les opérations d’expertise seront surveillées par tout magistrat chargé du contrôle des expertises ;

Dit qu’après avoir pris connaissance de la procédure et déterminé les opérations nécessaires et leur calendrier, l’expert devra apprécier le montant prévisible des frais de l’expertise et, s’il se révèle que ces derniers seront nettement supérieurs au montant de la provision, en donner aussitôt avis pour qu’il soit statué sur un éventuel supplément de consignation après avoir recueilli les observations des parties; dit qu’il sera tenu compte de l’accomplissement de cette diligence pour la justification de l’accomplissement de la mission de l’expert et la fixation de sa rémunération ;

Fait injonction aux époux AH-AI Z et M A, personnellement et ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure D Z, d’appeler en cause les organismes sociaux et tout tiers payeur ;

Condamne in solidum S X-V et K B à payer aux époux AH-AI Z et M A ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure D Z la somme de 5 966 587 F CFP à titre de provision sur l’indemnisation du préjudice personnel de celle-ci ;

Déclare S X-V et K B responsables in solidum du préjudice personnellement subi par les époux AH-AI Z et M A en raison de la trisomie 21 non diagnostiquée de leur enfant D Z née le XXX ;

Condamne in solidum S X-V et K B à payer à chacun des époux AH-AI Z et M A la somme de 2 000 000 F CFP en réparation de son préjudice moral ;

Réserve le préjudice matériel et économique personnel des époux AH-AI Z et M A ;

Condamne in solidum S X-V et K B à payer aux époux AH-AI Z et M A personnellement et ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure D Z la somme de 700 000 F CFP en application des dispositions de l’article 407 du Code de procédure civile de la Polynésie française devant le tribunal et devant la cour ;

Renvoie l’affaire à l’audience des mises en état du 20 janvier 2017 à 8h 30 ;

Réserve les dépens.

Prononcé à Papeete, le 7 juillet 2016.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. AB-AC signé : R. BLASER

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Cour d'appel de Papeete, 7 juillet 2016, n° 13/00283