Cour d'appel de Paris, 15 septembre 1998, n° 96/19766

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 15 sept. 1998, n° 96/19766
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 96/19766
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 18 juin 1996

Sur les parties

Texte intégral

Cour d’appel de Paris,

2e ch. A, 15 septembre 1998

A c/ Epx X Arrêt RG n° 96/19766 (extraits)

La Cour statue sur l’appel relevé par M. C A, avocat, du jugement rendu le 19 juin 1996 par le Tribunal de grande ins tance de Paris qui a déclaré recevable la deman de présentée par les époux X et prononcé sa condamnation à leur payer la somme de 120000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 8000 F sur le fondement de l’art. 700 NCPC.

Référence expresse étant faite à cette déci sion pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, les éléments suivants seront rappelés : Selon ordonnance sur requête déposée par Me C A, avocat, la Sté Camionex a été autorisée le 15 juill. 1985 par le président du Tribunal de grande instance de Nanterre à prendre une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire sur l’immeuble appartenant à M. Y, pour garantie de sa créance éva luée à 165 000 F cette inscription a été publiée le 6 sept. 1985. Le 6 nov. 1985, M. Y a été condamné par le Tribunal de commerce de Nanterre à payer à la Sté Camionex la somme de 151065 F en principal outre les intérêts et 3000 F au titre de l’art. 700 NCPC.

Avant ce ing



Avant ce jugement, Mes Scholer et Z, notaires, avaient vendu le 18 sept. 1985 l’im meuble de M. Y et distribué le prix de 400 000 F à des tiers. La Sté Camionex ayant fait assigner les notaires en réparation de son préjudice, un jugement rendu le 7 févr. 1990 par le Tribunal de grande instance de Nanterre les

a condamnés à lui payer la somme de 165 000 F avec exécution provisoire. Ce jugement a cepen dant été infirmé par la Cour d’appel de Versailles qui a rejeté les demandes de la Sté Camionex au motif que l’inscription du 6 sept. 1985 avait perdu rétroactivement son effet, l’inscription définitive d’hypothèque n’ayant pas été prise dans le délai requis.

Par acte du 16 mai 1995, les époux X agis sant comme porteurs de parts de la SARL

Camionex dont les opérations de liquidation amiable avaient été clôturées le 3 nov. 1989 ont fait assigner Me C A, qui était l’avo cat de la Sté Camionex aux fins de le voir condamner à leur payer la somme de 165 000 F en réparation de leur préjudice. Appelant, Me A poursuit l’infirmation de la décision déférée et expose : – que si les anciens associés disposent d’un droit personnel au recou vrement du boni de liquidation, celui-ci s’en tend du seul actif résultant du compte de liqui dation de la société et que la créance alléguée contre lui n’avait à la date de l’assemblée géné rale extraordinaire du 3 nov. 1989 qu’un caractè re éventuel, – que même si la personnalité mora le de la société peut subsister il convient de nommer un nouveau liquidateur, – que le tribu nal a fait une application erronée de l’art. 1844

9 al. 4 c. civ., que cet article n’a pour objet que de régler le sort de l’actif constaté, qu’une créan ce de dommages-intérêts ne serait-ce qu’au titre

d’une créance litigieuse ne peut être considérée comme un actif de la société, qu’il n’appartient pas aux époux X de se substituer à la société et à ses organes représentatifs pour décider de ce qui constitue ou aurait pu constituer un actif de la société et qu’ils n’ont donc pas qualité ▸


à agir, – sur le bien fondé de l’action, qu’il appartenait à la Sté Camionex d’épuiser les voies de recours, ce qu’elle a choisi de ne pas faire, se pri vant délibérément d’un droit à une indemnisation qu’elle ne peut récla mer à autrui, – que le préjudice de la Sté Camionex était constitué à la date de la vente puisque c’est à cette date que les notaires se sont dessaisis des fonds et que l’on ne peut donc plus invoquer, dans ces conditions, la tardiveté de l’inexécution définitive alors que les notaires n’étaient plus en possession du reliquat du prix de vente, – que la Sté Camionex a délibérément choisi de ne pas exercer de pourvoi en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 28 mars 1991, qu’elle n’avait nul besoin de conseil pour l’exercer, qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir émis un avis écrit et que sa mission avait pris fin, sauf preu ve contraire qui n’est pas rapportée, avec la décision de la cour d’appel. Il demande de déclarer irrecevable et subsidiairement mal fondée l’ac tion de M. et Mme X, de rejeter leurs demandes et de les condamner à lui régler la somme de 8000 F pour ses frais irrépétibles. Intimés, les époux X D : – qu’en vertu de l’art. 1844-9 al. 4

c. civ. ils ont, étant associés de la Sté Camionex, intérêt et qualité à agir pour demander réparation d’un préjudice trouvant sa source dans les faits antérieurs à sa liquidation comme l’a estimé le tribunal, – que la créance était née avant la liquidation et que n’ayant pas [pu] obtenir par la faute de Me A le montant des sommes auxquelles ils avaient droit en leur qualité d’associés, ils sont fondés à lui demander réparation du préjudi ce causé, – qu’il apparaît que la motivation de l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles est exempte de toute critique au regard des dispositions de l’art. 54 c. pr. civ. ancien et que M. A la critique aujourd’hui sans justifier du moindre conseil pour tenter d’obtenir sa cassation, – que sa res ponsabilité est engagée pour ne pas avoir pris une hypothèque dans les délais et pour ne pas leur avoir conseillé de former un pourvoi s’il esti mait sans importance la date d’inscription, – qu’ils ont subi un préjudice de 165 000 F puisque cette somme a dû être restituée aux notaires.

Ils sollicitent donc la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a retenu la responsabilité de Me A et par voie d’appel incident de le condamner à [leur] payer la somme de 165 000 F à titre de dommages intérêts et ce en réclamant l’allocation d’une somme de 20 000 F pour les frais irrépétibles.



LA COUR :- Sur la recevabilité : Considérant que M. X détenait 499 parts sur 1000 de la Sté Camionex, Mme X E et M. B une; – Considérant que la Sté Camionex a été reconnue créancière de M. Y pour une somme en principal de 151 065 F outre intérêts et 3000 F au titre de l’art. 700 NCPC par jugement du 26 nov. 1985 deve nu définitif le 28 févr. 1986, qu’elle était en droit comme l’ont relevé les premiers juges, d’entreprendre toutes les actions nécessaires au recou vrement de sa créance ou d’agir en réparation du préjudice découlant pour elle de l’impossibilité d’obtenir le paiement; Considérant que l’as semblée générale extraordinaire du 3 nov. 1989 a constaté la clôture des opérations de liquidation de la Sté Camionex; Qu’elle a constaté que

l’actif net comptable étant égal à 0, il ne pourrait être procédé à aucun rem boursement aux associés sur leur part dans le capital social; Qu’une réso lution selon laquelle M. X fera son affaire personnelle des procès en cours, les sommes qui pourraient être encaissées lui étant acquises jusqu’à concurrence de ses avances en compte-courant ainsi que de celles de Mme X qui s’élèvent au total à 441 708 F a été adoptée à l’unanimité; Considérant que même après la clôture de la liquidation et la radiation au registre du commerce, la personnalité morale de la société subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés et qu’il convient alors de nommer un nouveau liquidateur pour régler la liquidation comme le soutient M. A; Considérant cepen dant que l’art. 1844-9 al. 4, c. civ. dispose que tous les associés ou cer tains d’entre eux seulement peuvent aussi demeurer dans l’indivision pour tout ou partie des biens sociaux, leurs rapports étant alors régis, à la clôture de la liquidation, en ce qui concerne ces biens, par les dispositions relatives à l’indivision; Considérant que lorsque l’indivision est mainte nue, les anciens associés devenus copropriétaires indivis peuvent agir à titre individuel pour recouvrer des créances faisant partie des biens indi vis, tout indivisaire pouvant prendre les mesures nécessaire à la conser vation des biens indivis; Considérant que la liquidation de la société a laissé subsister droit de celle-ci à obtenir réparation du dommage qu’elle a subi en ne pouvant recouvrer la créance qu’elle détenait, que les associés peu


vent rester dans l’indivision pour tout ou partie des biens sociaux les quels sont alors régis par les dispositions relatives à l’indivision et que le droit d’agir en réparation d’un préjudice fait partie de ces biens; Que M. et Mme X disposent donc du droit en tant qu’anciens associés d’agir à titre personnel pour obtenir le paiement de leur créance indem nitaire et que leur action est recevable; Sur le fond : Considérant que selon l’art. 54 c. pr. civ. ancien l’ins cription d’hypothèque judiciaire provisoire devient rétroactivement sans effet quant une inscription définitive n’a pas été prise dans les deux mois à dater du jour où la décision statuant sur la même créance a acquis force de chose jugée; Que le jugement du 26 nov. 1985 est devenu définitif le 29 avr. 1986 et que l’inscription définitive n’a été prise que le 18 nov. 1986; Considérant que par son arrêt du 28 mars 1985 la Cour d’appel de Versailles a constaté qu’au 29 avr. 1986, l’inscription d’hypothèque pro visoire du 6 sept. 1985 avait perdu rétroactivement ses effets; Qu’elle a énoncé, que s’il n’était pas douteux que les notaires. avaient distribué le prix de vente de l’immeuble entre le 18 septembre et 12 nov. 1985 au vu d’un état antérieur de plus d’un mois à la vente intervenue le 18 sept. 1985 et qui ne mentionnait pas l’inscription d’hypothèque provisoire, cette faute n’avait pas eu au regard du dommage de la Sté Camionex un rôle causal certain et direct; Que si un état plus récent avait été levé, la

Sté Camionex n’aurait nullement pu appréhender le prix à concurrence de la somme couverte; Que cette inscription qui aurait poussé les notaires à surseoir à la distribution du prix, allait en effet par l’expiration du délai sus rappelé, perdre rétroactivement ses effets; Considérant qu’il appar tenait à Me A de veiller au délai de deux mois prévu par l’art. 54 c. pr. civ. ancien afin de procéder à l’inscription de l’hypothèque judi ciaire définitive; Qu’il a commis une faute en laissant ce délai expirer sans la faire prendre et que son inaction a fait perdre à la Sté Camionex, comme l’a estimé le tribunal, une chance d’obtenir l’indemnisation à laquelle elle pouvait légitimement prétendre en se prévalant de l’ins cription provisoire d’hypothèque; Considérant que la mission d’assis tance en justice emporte pouvoir et devoir de conseil et qu’il appartenait tout calon


à Me A d’informer la Sté Camionex sur les moyens permettant selon lui de critiquer l’arrêt rendu par la cour d’appel ou de conseiller la consul tation d’un avocat à la Cour de cassation d’autant que la responsabilité des notaires a été écartée du fait de l’absence de lien de cause à effet entre leur faute et le préjudice compte tenu de l’existence de la propre faute qu’il avait commise; Que l’avocat est tenu d’une obligation particulière d’in formation et de conseil vis-à-vis de son client et qu’il n’est pas justifié que Me A ait d’une quelconque manière conseillé à ses clients qui n’é taient pas des professionnels du droit de former un pourvoi alors qu’il estime la décision rendue mal fondée, étant observé qu’il ne déclare pas expressément dans ses écritures avoir conseillé de former un pourvoi à l’en contre de l’arrêt de la cour d’appel; Considérant qu’il est en conséquen ce tenu de supporter les conséquences de sa faute et de réparer le préju dice subi par les intimés; Considérant que le prix de vente était de 440000 F et que la seule autre inscription était elle de la Société Générale pour un montant de 258 000 F une somme de 257 473 F lui ayant été remise selon le relevé de compte du notaire; Qu’aucun élément ne jus tifie donc que la somme allouée aux époux X soit inférieure à 165 000 F;

Considérant que Me A sera condamné aux dépens et qu’il convient d’allouer une somme de 5 000 F aux époux X pour leurs frais irrépé tibles; Par ces motifs, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts alloués aux époux X; Statuant à nouveau sur ce point, condamne Me C A à payer aux époux X la somme de 165 000 F à titre de dom mages-intérêts; Le condamne aux dépens et à leur payer la somme de

5000 F sur le fondement de l’art. 700 NCPC […].

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