Cour d'appel de Paris, 7 mars 2007, n° 05/14023

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 7 mars 2007, n° 05/14023
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 05/14023
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Créteil, 9 mai 2005, N° 02/1145

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

19e Chambre – Section A

ARRET DU 7 MARS 2007

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 05/14023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Mai 2005 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL 5e chambre – RG n° 02/1145

APPELANTE

XXX,

agissant en la personne de son gérant.

Ayant son siège XXX

représentée par la SCP MENARD – SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Maître PEYRON (SELARL DELSOL) avocat

INTIMES

SCP H- I,

Ayant son siège XXX

en qualité mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la Société ATELIER DES ARCHITECTES ASSOCIES.

représentée par la SCP VARIN – PETIT, avoués à la Cour

assistée de Maître PILA (pour Maître GALLET) (SCP LYONNET BIGOT ET ASSOCIES) avocat

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS,

prise en la personne de ses représentants légaux.

Ayant son siège XXX

représentée par la SCP BOURDAIS-VIRENQUE – OUDINOT, avoués à la Cour

assistée de Maître MALARDÉ (pour Maître LARRIEU) avocat

Madame A X née F-G

Monsieur B X

demeurant tous deux XXX

représenté par la SCP BASKAL CHALUT-NATAL, avoués à la Cour

assisté de Maître GABIZON avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 juin 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-France FARINA, présidente

Monsieur Jean DUSSARD, conseiller

Madame Agnès FOSSAERT-SABATIER, conseillère

qui en ont délibéré.

rapport fait conformément aux dispositions de l’article 785 du nouveau code de procédure civile

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Hélène ROULLET

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par Madame Marie-France FARINA, présidente

— signé par Madame Marie-France FARINA, présidente et par Madame Marie-Hélène ROULLET, greffier présent lors du prononcé.

Par déclaration du 27 juin 2005, la XXX, vendeur d’immeuble à construire a appelé d’un jugement contradictoire rendu le 10 mai 2005 par le tribunal de grande instance de Créteil, 5e chambre civile qui statuant en ouverture du rapport clos le 2 juillet 2001 de Monsieur C Y, commis expert en référé à la demande des époux X acquéreurs en V.E.F.A. (Vente en l’état futur d’achèvement) d’un appartement en duplex situé aux 5e et 6e étages de l’immeuble du XXX à CACHAN dans lequel existe un seuil de 36 cm de hauteur pour accéder au balcon depuis la pièce de séjour :

— condamne la XXX à payer à Monsieur et Madame X la somme de 18.000 € en réparation du préjudice subi du fait de la transformation du balcon en terrasse,

— déboute Monsieur et Madame X de leur demande relative à la couleur de la façade,

— condamne la XXX à réaliser sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de deux mois après la signification du présent jugement la pose du bandeau sur l’escalier duplex et la reprise des fissures visées par la lettre du 15 juillet 2002,

— déboute Monsieur et Madame X de leurs autres demandes de réalisation de travaux sous astreinte,

— déboute Monsieur et Madame X de leurs demandes relatives à l’isolation phonique,

— condamne la XXX à payer à Monsieur et Madame X la somme de 5.000 € au titre de la réduction de la surface des terrasses au 6e étage,

— déboute Monsieur et Madame X de leurs demandes relatives au parking n°25,

— autorise Monsieur le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Val de Marne à ses dessaisir de la somme de 12.195,92 € consignée par Monsieur et Madame X sur le prix de vente entre ses mains,

— dit que cette somme est déduite de celle au paiement de laquelle est condamnée la XXX,

— déboute la XXX en son appel en garantie contre la SCP H-I ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ATELIER DES ARCHITECTES ASSOCIES et contre son assureur la MAF,

— condamne la XXX à payer à Monsieur et Madame X la somme de 4.500 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

— rejette les autres demandes,

— condamne la SCI aux entiers dépens, en ce compris, les frais et honoraires d’expertise, recouvrables conformément à l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

Les intimés ont constitué avoué.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux conclusions d’appel dont les dernières ont été signifiées à la requête :

— de la XXX, le 2 mai 2006,

— de la SCP H-I ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société ATELIER DES ARCHITECTES ASSOCIES (A.A.A.) maître d’oeuvre de l’opération de construction dont s’agit, le 12 mai 2006,

— de la MAF assureur de la société A.A.A., le 13 juin 2006,

— des époux X, le 6 juin 2006.

CELA ETANT EXPOSE

LA COUR

I/ SUR LES DEMANDES DES EPOUX X

1) Les non-conformités retenues en première instance

a) Les époux X ont acquis l’appartement en VEFA suivant acte notarié du 23 août 1999.

La conformité de la chose vendue s’apprécie par rapport aux plans annexés aux permis de construire alors accordés.

Les modifications de l’immeuble à construire intervenues postérieurement au contrat de vente et affectant l’appartement vendu, en l’espèce celles résultant des plans datés d’octobre 2000 ayant abouti au deuxième permis de construire modificatif n’ont donné lieu à la signature d’aucun avenant entre le vendeur et le acquéreurs portant approbation par ceux-ci de la modification de la chose vendue. Dès lors elles leur sont inopposables.

En conséquence, la conformité ou la non-conformité de l’appartement vendu aux documents contractuels doit s’apprécier par rapport à l’acte de vente et non au regard du permis de construire intervenu postérieurement sans qu’il importe que ces modifications obéissent ou non à des contraintes techniques ou réglementaires.

Il s’ensuit que le vendeur d’immeuble à construire qui est de plein droit responsable à l’égard des acquéreurs des non-conformités contractuelles excédant les tolérances admissibles en la matière ne peut pas s’exonérer de cette responsabilité en se prévalant des normes de sécurité. Celles-ci n’ont pas changé. C’est la réalisation de l’étanchéité qui a imposé la surélévation du balcon et partant la transformation et la surélévation des garde-corps 'contractuels'.

Avant de faire signer les actes de vente, il incombait à la SCI, professionnel des opérations immobilières, de s’assurer de la faisabilité de son projet tel qu’il résultait du permis de construire d’origine, ce constructeur non réalisateur devant faire son affaire personnelle des sujétions d’exécution et indemniser les acquéreurs des non-conformités et conséquences dommageables qu’elles pouvaient entraîner.

b) Il s’évince des opérations expertales et des documents techniques et/ou contractuels régulièrement produits aux débats que la matérialité des non-conformités contractuelles alléguées, qui excèdent considérablement les tolérances admissibles en V.E.F.A., est prouvée et que partant le vendeur d’immeuble à construire a failli à son obligation légale de livrer aux acquéreurs un appartement conforme aux documents contractuels.

En effet :

1°/ Le seuil du balcon de séjour prévu initialement n’était surélevé par rapport à cette pièce que de dix centimètres alors que la surélévation irrattrapable réalisée est très importante, – trente-six centimètres -, ce qui entre autres désagréments oblige les occupants à 'monter’ sur la terrasse et ensuite à en 'redescendre',

2°/ le garde-corps initialement prévu était une allège-béton de 45 centimètres de haut surmontée d’une partie métallique (quadrillage) ne bouchant pas la vue alors que celui réalisé est constitué d’une allège-béton nettement plus haute (65 centimètres) et de deux lisses métalliques fixées 'à l’italienne’ c’est à dire à l’intérieur du garde-corps, ce qui crée une emprise sur la terrasse, les modalités de jouissance de celle-ci s’en trouvant corrélativement affectées et diminuées,

3°/ le sixième étage correspondant au niveau haut du duplex des époux X présente un déficit de surface de terrasse de 1,26 mètres carré par rapport au plan contractuel (4,25 m² au lieu de 5,51 m²) ce qui correspond à une privation de jouissance de près de 23% de la surface de la terrasse.

c) Le rétablissement des balcons et terrasses dans l’état prévu au contrat de VEFA étant matériellement impossible la SCI LES ALIZES qui a livré un bien non conforme aux documents contractuels doit réparer le préjudice en équivalent.

Cette réparation qui doit être intégrale ne saurait être confondue avec une réfaction de prix qui n’est pas sollicitée et qui au demeurant ne pourrait pas l’être.

La Cour estime que les non-conformités de l’appartement au niveau inférieur, celui du séjour : différence de niveaux appartement et terrasse et balcon béton plus lisses :

— rendent mal commode l’accès à la terrasse,

— réduisent l’ensoleillement naturel, la clarté du salon, la vue sur l’extérieur (surtout si l’on est assis dans cette pièce),

— privent ainsi cette pièce de réception d’une part importante de l’agrément qui serait résulté d’un balcon à faible décrochement de niveau (10 centimètres) offrant une vue ouverte et dégagée au travers d’un barreaudage en métallerie classique.

La réparation intégrale de ce préjudice immatériel consiste en l’allocation d’une indemnité de 20.000 €, le jugement étant réformé en son évaluation trop faible dudit dommage.

La Cour estime également que le rétrécissement de la terrasse privée de près de 23% de sa surface qui n’offre plus les conditions de jouissance qu’en attendaient les acquéreurs au moment de la signature du contrat de vente, a causé à ceux-ci un préjudice immatériel entièrement réparé par l’indemnité de 5.000 € accordée à ce titre par les premiers juges dont la décision est confirmée de ce chef.

Aucune réduction de cette indemnité n’est admissible quelle que soit la base de calcul à laquelle l’appelante se réfère.

2) Les non-conformités rejetées par les premiers juges

a) Modification de la couleur de l’immeuble par rapport à celle apparaissant sur la plaquette publicitaire.

Les époux X reprennent en appel les mêmes moyens inopérants que ceux que les premiers juges ont écartés par des motifs pertinents ici adoptés.

La Cour confirme le jugement de ce chef en faisant observer à titre surabondant qu’il appert des photographies produites par les époux X que la couleur des façades qui a été retenue et appliquée est particulièrement réussie.

b) Mauvaise accessibilité du parking

C’est également par des motifs pertinents ici adoptés que les premiers juges ont rejeté ce grief mal fondé des acquéreurs.

Certes ceux-ci produisent en appel la norme AFNOR P91-120 d’avril 1996 sur les dimensions des constructions 'Parcs de stationnement à usage privatif'.

Mais les dimensions horizontales portées sur les tableaux et schémas des pages 6 et suivantes de cette norme ne paraissent pas avoir été méconnues en ce qui concerne l’emplacement 25 au regard du constat d’huissier analysé par les premiers juges.

L’inaccessibilité invoquée nécessitait les constatations et investigations d’un homme de l’art pour être vérifiée. Or l’expertise judiciaire sollicitée ayant abouti à la désignation de Monsieur Y ne portait pas sur ce point technique.

La preuve de la non-conformité de l’emplacement parking dont s’agit à la norme précitée n’étant pas administrée la Cour confirme le rejet de cette prétention.

c) Le défaut d’isolation acoustique des conduits d’évacuation des eaux

Les intimés produisent en appel le rapport SOCOTEC qui n’avait pas été soumis aux premiers juges.

Mais ce rapport est inexploitable dès lors que les mesures de ce technicien ont été réalisées dans deux appartements (Z et FURTADO) autres que celui des appelants qu’occupe leur fille Madame D E.

La Cour ne peut pas se contenter d’une extrapolation à partir des mesures SOCOTEC.

Là encore ce point technique méritait d’être soumis à l’expert judiciaire mais sa mission ne portait pas sur la non-conformité acoustique alléguée.

En conséquence la Cour rejettera par confirmation cette prétention mal fondée.

3) La demande d’exécution forcée de travaux de levée de réserves

Les premiers juges ont par des motifs pertinents ici adoptés rejeté la fin de non-recevoir tirée des articles 1642-1 et 1648 du code civil que le vendeur opposait aux acquéreurs.

En revanche cette prescription est applicable à ceux des désordres apparents dénoncés postérieurement au délai de l’article 1648 alinéa 2 du code précité qui n’ont pas fait l’objet d’une reconnaissance non équivoque de responsabilité ou d’un engagement de reprise de la part de la SCI.

La charge de la preuve de la levée des réserves formulées à la livraison de l’appartement ou dans le délai annal légal pèse sur la partie tenue d’y procéder, c’est-à-dire la SCI, en application de l’article 1315 alinéa 2 du code civil.

Sur ces bases et en considération de ce que la livraison de l’appartement est de fin décembre 2000 alors que les conclusions demandant la levée des réserves remontent à septembre 2003 et que l’instance a été introduite par acte du 13 décembre 2001, la Cour estime à l’examen, entre autres documents des suivants :

* liste des réserves contradictoirement établie entre le vendeur et les acquéreurs signée le 20 décembre 2000,

* échange de courriers entre ces deux parties portant sur les réserves précitées et sur de nouvelles dont il appert que les parties sont en désaccord sur certaines réserves et /ou leur levée,

* constat d’huissier du 7 octobre 2002 dressé unilatéralement à la demande des époux X mais régulièrement produit et partant admissible en preuve,

que les premiers juges ont fait l’exacte détermination des réserves non levées pour lesquelles la prescription annale n’était pas acquise, à savoir :

— le bandeau sur l’escalier duplex,

— la reprise des fissures visées dans la lettre du 15 juillet 2002 du promoteur.

Contrairement à la thèse de la venderesse sur la portée de son engagement résultant du courrier susvisé, la Cour estime que la reconnaissance de responsabilité de la SCI pour les deux désordres subsistants est indéniable compte tenu de l’offre d’indemnisation qu’elle y formule en ces termes dépourvus de toute équivoque :

' (…)

Concernant la pose du bandeau sur l’escalier duplex et la reprise des fissures, il semble que contrairement aux engagements pris par la société COMET, celle-ci ne soit toujours pas intervenue.

En conséquence, nous mettons une dernière fois cette société en demeure d’intervenir.

A défaut nous ferons intervenir une entreprise extérieure, à moins que vous préfériez faire exécuter ces travaux par une entreprise de votre choix, auquel cas nous serons disposés à vous adresser le montant relatif à cette prestation.

(…)'

II/ SUR L’APPEL EN GARANTIE DE LA SCI ET SA DEMANDE DE FIXATION DE CRÉANCE

Ces prétentions ont été rejetées par les premiers juges au motif qu’elles se fondaient sur un rapport d’expertise qui n’a pas été établi au contradictoire de l’architecte dès lors :

— que celui-ci n’a participé à la seule réunion d’expertise de Monsieur Y, tenue le 25 janvier 2001, qu’en qualité de sachant et d’assistant technique du maître d’ouvrage,

— qu’ensuite de l’ordonnance de référé du 17 avril 2001 étendant les opérations d’expertise à la société A.A.A. l’expert judiciaire a adressé à cet architecte une lettre du 3 mai 2001 aux fins suivantes :

'(…)

Je viens de recevoir l’ordonnance du 17 avril 2001 étendant les opérations à vous même.

Comme vous avez déjà assisté à la première réunion, pouvez-vous m’indiquer si vous souhaitiez que nous refassions un rendez-vous sur place.

Dans le cas contraire pouvez-vous m’envoyer les documents en votre possession justifiant le changement de hauteur de l’allège.

(…)'

— que cette lettre est restée sans réponse,

— que c’est en cette qualité de sachant ou d’assistant technique de l’une des parties, – d’ailleurs rappelée par courrier du 19 juin 2001 adressé par l’avocat de la SCI au maître d’oeuvre pour lui demander de rédiger une réponse technique au dire déposé par les époux X -, que l’architecte a rédigé la note transmise par l’avocat de la SCI à l’expert le 18 mai 2001,

— que le rapport a été déposé moins d’un mois après la lettre sus-citée de l’expert à l’architecte, ce qui ne constituait pas un délai suffisant pour assurer le respect du principe de la contradiction alors que l’architecte était non comparant à l’audience de référé du 3 avril 2001, à l’issue de laquelle l’ordonnance avait été mise en délibéré,

— que contrairement à ce que soutient la SCI, cette situation a causé un grief à l’architecte qui n’a pas été en mesure de présenter les moyens de sa défense et de participer au débat contradictoire sur les causes et les remèdes à apporter aux désordres examinés.

La Cour fait observer que contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, le rapport a été déposé le 2 juillet 2001, soit plus d’un mois après l’envoi du courrier de l’expert à l’architecte pris cette fois en qualité de partie aux opérations d’expertise, qui remonte au 3 mai 2001.

Il est encore vrai que la société A.A.A. a fait choix d’un avocat postérieurement seulement au dépôt du rapport d’expertise, la lettre de son conseil adressée à Monsieur Y étant du 10 juillet 2001.

En revanche, la Cour retiendra que l’ordonnance de référé du 17 avril 2001 a créé une contrariété d’intérêts évidente que l’expert ne pouvait pas ignorer :

— entre le maître d’ouvrage qui a obtenu l’extension des opérations d’expertise à la société A.A.A. pour rechercher à titre subsidiaire sa responsabilité d’une part,

— et entre l’architecte qui est passé du statut d’assistant technique du maître d’ouvrage aux opérations de l’expert à celui de partie aux dites opérations, d’autre part.

La note remise à l’expert le 18 mai 2001 n’a pas été établie par l’architecte en tant que partie aux opérations d’expertise mais en qualité d’assistant technique de la SCI puisque c’est celle-ci qui lui demandera d’établir cette note qu’elle remettra à l’expert, comme l’ont rappelé les premiers juges.

En considération de cette contrariété d’intérêts et de l’inertie de l’architecte, l’expert judiciaire ne pouvait pas se satisfaire de la petite note de mai 2001 de l’Atelier A.A.A. accompagnée de plans pour donner son avis sur la responsabilité du maître d’oeuvre.

Il lui incombait de le convoquer à une nouvelle réunion d’expertise, – comme on doit le faire pour toute partie à une expertise -, pour permettre un débat au contradictoire du maître d’oeuvre et des autres parties sur les raisons exactes du dépôt des permis de construire modificatifs et sur les circonstances précises dans lesquelles la modification du balcon et terrasses de l’appartement litigieux a été décidée.

En donnant son avis sur la responsabilité d’un constructeur non convoqué qui s’est borné à remettre au maître d’ouvrage sur demande de celui-ci une note succincte et quelques plans sur la hauteur du seuil de l’appartement B 501 l’expert a méconnu à l’égard de cette nouvelle partie à ses opérations le principe de la contradiction.

La défaillance de l’architecte en tant que partie à l’expertise, aussi patente fût-elle, ne dispensait pas l’expert du respect du principe fondamental sus-rappelé. De surcroît, selon les termes mêmes du courrier adressé à l’architecte par l’expert ce dernier se contentait de l’envoi de documents techniques alors que des demandes d’explications circonstanciées auraient pour le moins dû être formulées dans ce courrier.

Le défaut de convocation de l’architecte aux opérations d’expertise n’a pas permis à celui-ci de présenter ses observations et moyens de défense au cours de la mesure d’instruction alors que l’expert avait, entre autres missions, celle de fournir tous éléments techniques et de fait sur les responsabilités encourues.

La SCP H-I ès qualités et la MAF prouvent le grief que leur cause l’irrégularité des opérations d’expertise à l’égard de l’architecte.

En conséquence la Cour confirme par substitution partielle de motifs le jugement en ses dispositions sur l’inopposabilité au liquidateur de l’architecte et à l’assureur de ce dernier du rapport de l’expert Y.

Certes les constatations matérielles de cet expert restent opposables à l’architecte qui a assisté à l’unique réunion d’expertise.

Mais ces constatations matérielles, qui n’établissent que la non-conformité des balcons et terrasses au permis de construire initial et à l’acte de vente, ne peuvent pas suffire à prouver que cette non-conformité trouve sa cause dans une faute de conception de l’architecte ou dans un vice de ses plans.

Les permis de construire modificatifs déposés pour le compte du maître d’ouvrage ont nécessairement obtenu l’agrément de celui-ci.

L’appartement vendu aux époux X est conforme aux permis modificatifs et n’est pas affecté de non-conformités aux règles de l’art ou à la réglementation en vigueur.

Et l’architecte qui n’est pas partie aux contrats de vente ne répond pas de plein droit des non-conformités contractuelles des appartements vendus qui n’intéressent que les rapports vendeur/acquéreur.

De plus lors de la réception de l’immeuble le maître d’ouvrage ne justifie pas avoir émis des réserves portant sur la non-conformité litigieuse qu’elle connaissait déjà, les doléances des acquéreurs ayant été formulées en cours de chantier, bien avant la réception.

En ce qui concerne les multiples réserves émises à la livraison de l’appartement, constituant pour l’essentiel de petites non finitions même si elles sont désagréables pour les acquéreurs, elles ne suffisent pas à caractériser des manquements de l’architecte à l’accomplissement de sa mission de maîtrise d’oeuvre d’exécution.

Et si deux réserves subsistent, il n’est pas établi qu’elles procèdent d’un manquement de l’architecte à son obligation de moyen dans cette ultime phase de sa mission qui ne saurait être confondue avec le parfait achèvement pesant sur les seuls entrepreneurs concernés.

En conséquence la Cour, par confirmation, rejette les demandes de la SCI contre la MAF et le liquidateur.

La SCI n’a pas en effet de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société A.A.A. au titre de la non-conformité de l’appartement X.

III/ SUR LES AUTRES DEMANDES

1) La Cour confirme le jugement sur la déconsignation du solde du prix de vente, cette somme devant être déduite, par compensation, de celles dues aux acquéreurs.

2) Les dépens de première instance et d’appel pèsent sur la partie perdante qui reproche inutilement aux époux X, victimes, un prétendu acharnement procédural, ceux-ci s’étant bornés à solliciter la réparation de leur dommage.

3) La Cour confirme l’indemnité allouée au titre des frais hors dépens de première instance et ajoute 3.000 € au titre de ceux d’appel.

Les autres parties non perdantes conserveront la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Réforme partiellement le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

— élève à 20.000 € le principal de condamnation prononcée contre la XXX au titre de l’indemnisation du préjudice subi du fait de la transformation du balcon en terrasse,

— fixe à l’expiration d’un délai de deux mois courant à compter de la signification du présent arrêt le point de départ de l’astreinte confirmée de 100 € par jour de retard assortissant la condamnation de la XXX à l’exécution de la pose du bandeau sur l’escalier duplex et la reprise des fissures visées dans la lettre du 15 juillet 2002 de la société ELIGE,

Confirme pour le surplus,

Y ajoutant :

Condamne la XXX à payer aux époux X la somme de 3.000 € au titre des frais hors dépens d’appel,

Rejette les demandes autres plus amples ou contraires,

Condamne la XXX aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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