Cour d'appel de Paris, 27 février 2009, n° 08/15243

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 27 févr. 2009, n° 08/15243
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 08/15243
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 10 juillet 2008, N° 08/55837

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

14e Chambre – Section B

ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2009

(n° 166 , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 08/15243

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Juillet 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 08/55837

APPELANTS

Madame D X

Lucy

XXX

Monsieur E Y

Lucy

XXX

représentés par la SCP FISSELIER – CHILOUX – BOULAY, avoués à la Cour

assistés de Me Gilles BOUYER, avocat au barreau de PARIS, toque : A 317

INTIMES

S.A.S X-Y agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

S.A.S L.B C agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

Monsieur F Z

XXX

XXX

représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assisté de Me Georgie COURTOIS, avocat au barreau de PARIS (SELARL DE GAULLE – FLEURANCE ET ASSOCIES), toque : K 35

*

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 29 janvier 2009, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Henriette SCHOENDOERFFER, président

Madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller

Madame G H, conseiller

qui en ont délibéré

sur le rapport de Madame G H

Greffier, lors des débats : Madame Emmanuelle TURGNÉ

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Henriette SCHOENDOERFFER, président, qui a remis la minute à Madame Emmanuelle TURGNÉ greffier, pour signature.

*

Vu l’appel formé le 28 juillet 2008 par Mme D X et M. E Y de l’ordonnance de référé rendue le 11 juillet 2008 par le président du tribunal de grande instance de PARIS qui a :

— donné acte à la société X-Y qu’elle n’utilise plus l’image de Mme X ni celle de M. Y,

— débouté les consorts X-Y de leurs demandes,

— condamné les consorts X-Y in solidum aux dépens et à payer aux sociétés X-Y, L.B. C et à M. Z une indemnité de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions en date du 17 décembre 2008 par lesquelles les appelants demandent à la cour, au visa des dispositions des articles 6, 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 14 du pacte des droits civils et politiques, 9.1 du code civil, 11 du code pénal (sic), 16, 562 alinéa 2, 808, 809 du code de procédure civile, L. 121-1 et L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle, de les dire recevables et bien fondés en leur appel et y faisant droit, de :

* sur le droit au procès équitable, le principe de l’égalité des armes et la présomption d’innocence,

— dire que le fait, pour la société X-Y, la société L.B. C et M. Z de produire des plaintes, lettres et pièces ressortant d’une instruction pénale, alors que Mme X et M. Y ont l’interdiction de répondre en faisant état d’éléments de l’instruction, constitue une violation du principe de l’égalité des armes que le juge de première instance aurait dû relever d’office,

— dire, en outre, que le fait pour les intimés d’avoir présenté lors de l’audience de première instance et devant la cour, sans réserve, les appelants comme coupables de multiples délits soumis à une instruction en cours, constitue une atteinte à la présomption d’innocence telle que définie par l’article 9.1 du code civil,

— dire que le juge de première instance se devait d’écarter des conclusions et des pièces, de plus tardives, constituant une atteinte flagrante à la présomption d’innocence,

— en conséquence, prononcer la nullité ou, en tout état de cause, réformer purement et simplement l’ordonnance dont appel,

— écarter les pièces produites par les intimés ressortant de l’instruction en cours,

— faire injonction, en tant que juge des référés, aux intimés de supprimer dans leurs conclusions d’appel et lors de l’audience publique, toute reprise, confirmation ou développement présentant les appelants comme coupables de faits délictueux objets d’une instruction en cours en application des dispositions de l’article 9.1 du code civil,

— condamner 'conjointement et solidairement’ (sic) la société X-Y, la société L.B. C et M. F Z, en application des dispositions de l’article 9.1 du code civil, à payer la somme de 5 000 € à Mme D X et à M. E Y, à chacun, par provision sur la réparation du préjudice qu’ils ont subi de ce fait,

* sur les demandes,

statuant à nouveau,

' sous divers constats,

— dire que les intimés ne peuvent, tout à la fois, alléguer que la rémunération était comprise dans le prix de cession des actions, que la cession des droits d’auteur aurait été gratuite et que cette gratuité avait été expressément consentie par Mme X ou encore que ses C découlaient de sa qualité de salariée ou encore de sa qualité d’ancien actionnaire etc…,

— dire que c’est donc à tort que le juge de première instance a pu estimer, en dépit de cette constatation incontestable, que la question posée devait être examinée au regard d’actes de cession d’actions, de souscription d’actions ou d’apport en compte courant,

— dire que la violation de dispositions d’ordre public constitue un trouble manifestement illicite et que c’est la démonstration inverse, si elle est possible, qui relève du juge du fond,

— en conséquence, faire interdiction à la société X-Y d’utiliser les marques tant que Mme X ne se sera pas vue octroyer une rémunération proportionnelle par le juge du fond conformément aux usages et à la jurisprudence,

— faire également interdiction à la société X-Y d’utiliser les dénominations «Libre comme l’air» et «B.A-BA» ainsi que leurs illustrations,

— dire que ces interdictions devront être respectées dans les huit jours de la signification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 € par infraction constatée,

' – dire, pour les mêmes motifs et en application de l’article L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle, que le fait que Mme X soit privée de toute rémunération proportionnelle aux recettes réalisées par la société X-Y dans le cadre de la commercialisation des oeuvres existantes et commercialisées au 8 janvier 2007, dont la liste était annexée à cet acte, constitue un trouble manifestement illicite,

— dire que l’obligation de rémunérer Mme D X n’est pas sérieusement contestable,

— condamner, en conséquence, la société X-Y à payer à Mme D X, par provision, la somme de 30 000 € au vu du chiffre d’affaires réalisé par la société X-Y au cours des deux derniers exercices,

— désigner tel expert qu’il plaira avec mission de déterminer le montant des recettes, assiette des droits,

' – dire que le minimum garanti de rémunération dû à Mme D X au titre des C nouvelles, postérieures au 1er janvier 2007, constitue une obligation non sérieusement contestable indépendante de son contrat de travail,

— dire que c’est par une dénaturation et un amalgame des articles 6.1, 6.2 et 6.3 du pacte du 8 janvier 2007 que le juge de première instance a pu estimer que Mme D X n’avait pas droit à rémunération de ses droits d’auteur sur l’exploitation des 74 oeuvres nouvelles qu’elle avait créées à partir du 1er janvier 2007,

— condamner, en conséquence, 'conjointement et solidairement’ (sic) la société X-Y et M. Z à payer, par provision, à Mme D X la somme de 62 500€,

— faire injonction, sous astreinte de 500 € par jour de retard, à la société X-Y et à M. Z, pris 'conjointement et solidairement’ (sic), à fournir à Mme D X, dans les huit jours de la signification de l’arrêt à intervenir, l’état des recettes réalisées au titre des oeuvres nouvelles créées par elle à compter du 1er janvier 2007 ainsi que cinq exemplaires de chacune de ces oeuvres nouvelles,

— dire que l’expert dont la désignation est sollicitée procédera à la vérification des états de recettes fournis et des sommes dues au titre des C nouvelles,

' – faire interdiction, sous astreinte de 500 € par infraction constatée, à la société X-Y de continuer à utiliser, huit jours après la signification de l’arrêt à intervenir, le nom de Mme D X, associé ou non au nom de M. E Y, dans des documents de promotion générale des ventes ou sur des certificats d’authenticité d’utilisation générales et non spécifique aux oeuvres dont Mme X est l’auteur,

— faire interdiction, sous astreinte de 500 € par infraction constatée, à la société X-Y de continuer à utiliser dans ses documents publicitaires et ses certificats d’authenticité les photographies de Mme D X ou de M. E Y, dans les huit jours de la signification de l’arrêt à intervenir,

— condamner la société X-Y à payer à Mme D X et à M. E Y, chacun, la somme de 25 000 €, par provision à valoir sur la réparation du préjudice subi par eux du fait de cette utilisation non autorisée,

' condamner 'conjointement et solidairement ' (sic), ou tout du moins in solidum, la société X-Y, la société L.B. C et M. F Z à payer à Mme D X et à M. E Y, chacun, la somme de 10 000 € HT en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions en date du 20 novembre 2008 des intimés tendant au rejet des demandes formées par Mme D X et M. E Y, à la confirmation de l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et à la condamnation solidaire de Mme D X et M. E Y à verser à la société X-Y, la société L.B. C et M. F Z la somme de 8 000 € chacun en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que Mme D X et M. E Y ont créé en 1983 une entreprise ayant pour activité la fabrication et la reproduction sous forme de statuettes, de personnages notoires tirés de bandes dessinées (Tintin, Spirou, A, B, etc…), créés par Mme X, ainsi que les propres personnages, objets et éléments de décoration (vases, coussins, tapis, lampes, mobilier design…) créés par celle-ci ;

Qu’en 1989, Mme X et M. Y ont transformé cette entreprise en une société à responsabilité limitée dénommée X-Y, devenue une société par actions simplifiée ; que la commercialisation s’effectuait à travers un réseau de représentants ainsi que dans deux boutiques de vente dont l’une à Paris, exploitée par la société MEM ;

Qu’au terme de négociations qui ont débuté au cours du mois d’avril 2006, M. F Z a, le 18 octobre 2006, créé la société par actions simplifiée L.B. C et s’est fait consentir ainsi qu’à cette société, par acte du 30 octobre 2006, une promesse unilatérale de cession des actions de la société X-Y moyennant un prix de base fixé forfaitairement et un complément de prix différé, fonction du chiffre d’affaires de ladite société au cours des deux exercices suivants ; que les audits commencés avant la signature de la promesse se sont poursuivis ;

Que M. Z a levé l’option d’achat le 14 décembre 2006 et les différents actes de cession ont été signés le 8 janvier 2007 ; que par un apport personnel en capital, Mme D X est en outre devenue actionnaire de la société L.B. C ; que Mme D X est demeurée salariée de la société X-Y tandis que M. E Y, qui était président de cette société, a démissionné de ses fonctions le 8 janvier 2007 et a été remplacé par M. F Z ;

Que le 29 juin 2007, Mme X a été mise à pied à effet immédiat ; qu’elle a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée du 2 août 2007 ; que, le 8 août 2007, les sociétés X-Y et L.B. C ont porté plainte avec constitution de partie civile contre X pour corruption de salarié auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance de DIEPPE ; que par lettre du 25 octobre 2007, lesdites sociétés ont en outre dénoncé des faits susceptibles d’être qualifiés d’escroquerie et de faux ; que Mme X et M. Y ont été mis en examen par le juge d’instruction de ce tribunal dans le cadre de l’information actuellement en cours ; que le 18 avril 2008, le contrat de concession exclusive signé le 8 janvier 2007 avec la société MEM a été résilié à effet immédiat par la société X-Y ;

Que, concomitamment à une instance au fond tendant à voir remettre en cause les contrats de cession du 8 janvier 2007, Mme X et M. Y ont saisi le juge des référés de diverses demandes relatives aux droits de propriété intellectuelle de Mme X ainsi qu’au titre des atteintes portées à leur nom patronymique et à leur image aux fins, notamment, de mesures d’interdiction et de paiement de provisions à valoir sur la réparation des préjudices qui leur ont été causés ;

Que c’est dans ces conditions qu’a été rendue l’ordonnance entreprise ;

Considérant que les appelants faisant valoir qu’ils n’ont pas le droit d’invoquer l’instruction en cours au tribunal de DIEPPE alors que, de leur côté, les intimés communiquent des éléments issus de cette instruction, demandent à la cour, sur le fondement des articles 6, 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 14 du pacte des droits civils et politiques, 9.1 du code civil, 11 du code pénal (sic – en réalité code de procédure pénale) et 16 du code de procédure civile, du principe de l’égalité des armes et de la présomption d’innocence, de prononcer la nullité de l’ordonnance ou, à défaut, de l’infirmer, d’écarter les pièces produites par les intimés ressortant de ladite information, de leur faire injonction de supprimer toute reprise ou développement des allégations présentant Mme X et M. Y comme coupables et de condamner les intimés 'conjointement et solidairement', malgré le caractère antithétique de ces deux termes, au paiement à chacun d’une provision à valoir sur la réparation du préjudice qu’ils ont subi ;

Considérant, cependant, qu’informer, dans l’énoncé des circonstances du litige, le juge civil d’une instruction en cours ne saurait porter atteinte à la présomption d’innocence puisque les parties mises en examen, dès lors que, par nature, elles ne sont pas encore condamnées, bénéficient, de droit, de cette présomption ;

Que, par ailleurs, le principe selon lequel la partie civile n’est pas tenue au secret de l’instruction serait vidé de son contenu et dénué de toute pratique s’il n’autorisait pas celle-ci à communiquer au procès civil les éléments du dossier pénal auxquels elle a accès et qu’elle estime utile au litige en cours ; que, dans la mesure où ces pièces sont soumises à la contradiction des appelants qui ont la faculté de produire leurs propres pièces pour la défense de leurs intérêts, c’est vainement qu’il est soutenu que cette autorisation aboutirait à une inégalité des armes dans le procès civil et à une violation du droit à un procès équitable, contraires à la déclaration des droits de l’homme;

Qu’il y a donc lieu de rejeter l’exception de nullité de l’ordonnance et l’ensemble des demandes formées à ce titre par Mme X et M. Y ;

Considérant que, sans la reprendre dans le dispositif, M. F Z, dans le corps de ses écritures, réitère devant la cour sa demande, à laquelle le premier juge n’a pas répondu, tendant à être mis hors de cause aux motifs qu’aucune faute personnelle ne lui est imputable, que les demandes n’ont trait qu’à des obligations qui ne sont pas à sa charge et pour lesquelles il ne s’est pas personnellement engagé ;

Considérant, cependant, que, dès lors que sont en cause, notamment, des obligations résultant du 'pacte d’actionnaires’ signé le 8 janvier 2007 entre Mme D X et M. F Z, en présence des sociétés L.B. C, X-Y et de M. E Y, il n’y a pas lieu de mettre hors de cause M. Z qui doit répondre des engagements pris à titre personnel dans ce pacte, lesquels seront appréciés au fur et à mesure de l’examen des différentes demandes formées par les appelants ;

Considérant qu’ont été, le 8 janvier 2007, signées les conventions suivantes :

* un contrat signé entre Mme D X et M. E Y, d’une part, et la société L.B. C, d’autre part (pièce n° 11 des appelants), ayant pour objet de définir les conditions de la cession de la marque française semi-figurative n° 3301442 «BABOOM» et de l’ensemble des droits de propriété intellectuelle de Mme X sur les dessins et logos utilisés par ladite marque, les conditions de dépôt et d’utilisation des dénominations «Libre comme l’air» et «B.A-BA» ainsi que de l’ensemble des droits de propriété intellectuelle de Mme X sur les dessins et logos utilisés dans l’illustration de ces dénominations ;

* un contrat signé entre Mme D X et M. E Y, d’une part, et la société X-Y, encore représentée par M. Y, d’autre part (pièce n° 12 des appelants), ayant pour objet de définir les conditions de coexistence entre la marque française n° 3421286 «D X» et les signes distinctifs de la société, notamment ses marques, de garantir à la société la possibilité de poursuivre l’exploitation de signes distinctifs et, notamment, des marques dénominatives, semi-figuratives et figuratives «X-Y», contenant les noms patronymiques de Mme X et de M. Y, la cession de l’ensemble des droits de propriété intellectuelle de Mme X sur les dessins et logos utilisés à titre de signes distinctifs par la société et, notamment, ceux figurant dans les marques listées en annexe (marques françaises semi-figuratives «Tralala figurines de collection» n° 003034075, «X-Y» n° 94515397, «X-Y» n° 95603679, figurative (lièvre) n° 043280752 et la marque internationale semi-figurative «X-Y» n° 655722) ;

* un contrat de cession de droits d’auteur signé entre Mme D X et la société X-Y, encore représentée par M. E Y (pièce n° 13 des appelants);

* le pacte d’actionnaires dont il a été question ci-dessus (pièce n° 4 des appelants), dans lequel la société X-Y est représentée par M. Z et qui est soumis au débat en ce qu’il fixe, notamment, en son article 6 le statut de Mme D X (6.1 : contrat de travail, 6.2 : exclusivité, 6.3 : droit de préférence et 6.4 : prestations de services) ainsi que la convention de nantissement de compte d’instruments financiers, entre Mme X et M. Z, laquelle n’est pas soumise au débat ;

Considérant que Mme X demande en premier lieu qu’il soit fait interdiction à la société X-Y, sous astreinte, d’utiliser les marques et dénominations «BABOOM», «Libre comme l’air», «B.A-BA», «Tralala figurines de collection», «X-Y» ainsi que la marque figurative dite «lièvre» tant qu’elle ne se sera pas vue octroyer une rémunération proportionnelle sur ses droits d’auteur par le juge du fond aux motifs qu’aucune rémunération n’a été prévue concernant la cession de ses droits d’auteur sur le personnage «BABOOM», les illustrations, dessins et logos constituant la partie figurative de ces marques et dénominations, pas plus que n’a été prévue la gratuité de cette cession ; qu’elle prétend que les intimés ne peuvent tout à la fois alléguer que la rémunération était comprise dans le prix de cession des actions, que la cession des droits d’auteur aurait été gratuit, qu’elle aurait expressément consentie à cette gratuité ou encore que ses C découlaient de sa qualité de salariée ou de sa qualité d’ancienne actionnaire de la société X-Y ; qu’elle fait ainsi grief au premier juge d’avoir retenu l’existence de contestations sérieuses et estimé que la question devait être examinée au regard de l’ensemble des contrats ;

Considérant, toutefois, que, dès lors, d’une part, que les marques et dénominations susvisées ont été cédées aux termes des deux premiers contrats précités (pièces 11 et 12), lesquels prévoient expressément la cession des droits d’auteur attachés aux illustrations, dessins et logos constituant leurs parties figuratives 'afin que le bénéficiaire puisse jouir pleinement’ desdits signes et, d’autre part, qu’il n’est pas prétendu qu’il en est fait une utilisation non conforme aux conditions fixées par ces contrats, le caractère illicite du trouble dont se plaint Mme X du fait de l’utilisation de ces marques et dénominations sous le seul prétexte qu’elle n’ouvre pas droit au règlement de droits d’auteur n’est pas manifeste, en sorte que la cour, confirmant l’ordonnance de ce chef, rejettera cette demande ;

Considérant que Mme X sollicite en deuxième lieu, sur le fondement de l’article L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle, le paiement d’une provision de 30 000 € sur ses droits d’auteur au titre des oeuvres existantes et commercialisées par la société X-Y au 8 janvier 2007 et d’une provision de 62 500 € sur ses droits d’auteur au titre des C nouvelles, postérieures au 1er janvier 2007, ainsi que la communication sous astreinte de l’état des recettes réalisées au titre de ces dernières et la désignation d’un expert avec mission de déterminer le montant des recettes, assiette de ses droits, tant pour les oeuvres existantes que pour les C nouvelles ;

Considérant que l’article L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle dispose en son alinéa 1er que 'La cession par l’auteur de ses droits sur son oeuvre peut être totale ou partielle. Elle doit comporter au profit de l’auteur la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l’exploitation.' ; qu’il prévoit, dans son alinéa 2, les cas dans lesquels il est admis une rémunération forfaitaire de l’auteur et, à l’alinéa 3, la licéité de la conversion des droits en annuités forfaitaires ;

Considérant que, dans le contrat de cession de droits d’auteur (pièce n° 13) signé entre Mme X et la société X-Y portant sur les 'C actuellement exploitées par la société (telles que listées en annexe 1)' et fixant l’étendue de la cession consentie 'à titre exclusif', l’article 3 relatif au prix de cession stipule :

' 3.1 Les Parties rappellent que la présente cession de droits d’auteur est l’une des conditions de la réalisation de la Cession de l’intégralité des actions de la Société par les actionnaires de celle-ci (dont Madame X) à la société LB C SAS (…).

Les Parties prennent donc acte de ce que la présente cession de droits d’auteur s’analyse comme un reclassement desdits droits dans le patrimoine de la Société préalablement à la cession de celle-ci.

Les Parties décident en conséquence de fixer le prix de la cession de droits d’auteur à un euro (1 €) symbolique.

3.2 Madame X déclare par ailleurs être parfaitement remplie de ses droits au titre du contrat du 10 octobre 1989 conclu entre elle et la Société. En conséquence, la poursuite de l’exploitation des C ne donnera pas lieu au versement d’une redevance complémentaire et les dispositions du présent Contrat remplacent l’ensemble des stipulations du contrat du 10 octobre 1989 en ce qui concerne les C et ce à compter de l’entrée en vigueur du Contrat.

(…)' ;

Que, dès lors que ladite cession n’entre manifestement pas dans les conditions prévues par l’article L. 131-4 alinéa 2 du code précité permettant au cessionnaire de s’affranchir du paiement d’une rémunération proportionnelle, il ne peut être a priori exclu, qu’ainsi que le soutient Mme X, la référence au reclassement dans le patrimoine de la société et la fixation du prix de cession à un euro qualifié de 'symbolique’ soient analysées en une absence totale de rémunération susceptible, comme telle, d’entraîner la nullité de cet acte emportant cession de ses droits d’auteur ;

Que l’obligation pour la société X-Y de verser à l’auteur les droits lui revenant au titre des oeuvres qu’elle est autorisée à exploiter n’étant pas sérieusement contestable, il y a lieu, en infirmant la décision déférée de ce chef, de la condamner à payer à Mme X une provision à ce titre qui peut être estimée, au vu de la liste des oeuvres en cause annexée au contrat et des éléments du dossier, à la somme de 30 000 €, sans risque de répétition de l’indu;

Considérant, s’agissant des oeuvres nouvelles, créées par Mme X dans le cadre de son contrat de travail, qu’il convient de se reporter à l’article 6 du pacte d’actionnaires relatif à son statut dans la société X-Y prévoyant un salaire annuel brut de 55 000 € (article 6.1), une clause d’exclusivité au profit de cette société (article 6.2) et un droit de préférence (article 6.3) consenti par Mme X durant cinq années 'sur les oeuvres nouvelles’ dont les modalités, en cas d’exercice par la société, sont précisément définies ;

Qu’il est ainsi prévu, à l’article 6.3.1 qu’en cas d’exercice de son droit de préférence préalablement au 31 décembre 2008, 'la société X-Y versera à Mme X, en plus de son salaire tel que stipulé à l’article 6.1, une redevance annuelle de un pour cent (1 %) hors taxes, mais charges sociales comprises, du chiffre d’affaires annuel hors taxes afférent à la commercialisation de cette Oeuvre Nouvelle ou des commandes sous licence de tiers, à la condition toutefois que la commercialisation de cette Oeuvre Nouvelle par la société X-Y représente au minimum dix pour cent (10 %) du chiffre d’affaires annuel hors taxes réalisé par la société X-Y.

En tout état de cause, la société X-Y versera, jusqu’au 31 décembre 2008, une avance globale annuelle sur ces redevances de cinquante mille euros (50 000 €) hors taxes, mais charges sociales comprises, valant minimum garanti, non remboursable. Cette avance sera imputable sur les redevances dues à Madame D X sans limitation de durée pour les Oeuvres Nouvelles (…)

Enfin, Madame D X se verra attribuer à titre gratuit, selon le nombre total d’exemplaires produits, les cinq (5) premiers exemplaires de chaque Oeuvre Nouvelle.' ;

que l’article 6.3.2 précise la redevance due en cas d’exercice du droit de préférence postérieurement au 31 décembre 2008 ;

Que les intimés contestent l’affirmation de Mme X selon laquelle elle aurait effectivement créé, à compter du 1er janvier 2007 et jusqu’à la date de sa mise à pied le 29 juin 2007, soixante-quatorze oeuvres nouvelles ; qu’ils soutiennent que cela représenterait une production de douze oeuvres par mois, ce qui serait impossible ; que, de son côté, Mme X indique qu’ayant été contrainte de quitter immédiatement la société, elle n’a pas pu emporter les preuves afférentes à son travail de création ; que s’il n’appartient pas au juge des référés d’en déterminer avec certitude le nombre précis -étant observé que la liste communiquée en pièce n° 47 n’est étayée par aucun autre document-, il n’est en revanche pas sérieusement contestable que, jusqu’à son départ, Mme X a créé plusieurs oeuvres nouvelles pour laquelle elle est en droit de prétendre au versement d’une rémunération, le fait qu’elle ait été entre-temps licenciée étant sans incidence sur l’exercice de ce droit ;

Qu’il n’est en outre pas sérieusement discutable qu’elle ne peut pas être privée de sa rémunération même dans le cas où la condition fixée pour son paiement ne serait pas remplie, faute par l’oeuvre en cause d’atteindre au minimum 10 % du chiffres d’affaires réalisé par la société ;

Que, dès lors que le pacte prévoit le versement d’un minimum garanti de 50 000 €, il y a lieu, en infirmant l’ordonnance de ce chef, d’allouer une provision de ce montant au titre de l’exploitation des oeuvres nouvelles par la société X-Y ;

Que par ailleurs, il convient de faire injonction à ladite société de fournir à l’auteur cinq exemplaires de chacune des oeuvres nouvelles, et ce, selon les modalités définies au dispositif ci-après ;

Que ces condamnations, prononcées à l’encontre de la société X-Y, autorisée à exploiter les oeuvres en cause, n’ont pas à être étendues à la société L.B. C ni à M. Z ;

Considérant que le juge du fond étant déjà saisi, notamment, de la question relative à la nullité alléguée de la cession des droits d’auteur de Mme X, c’est à lui qu’il appartiendra de décider, en fonction de la réponse qu’il y apportera, de l’opportunité d’ordonner une expertise pour déterminer les droits devant revenir à Mme X au titre de l’exploitation de ses oeuvres ; qu’il n’est donc pas nécessaire à ce stade de la procédure d’enjoindre les intimés d’adresser à l’auteur sous astreinte le montant des recettes réalisées ;

Considérant que les appelants demandent en troisième lieu qu’il soit fait interdiction aux intimés, sous astreinte, de faire usage de leurs noms patronymiques et de leurs photographies ;

Considérant que, dès lors qu’il n’est pas établi avec certitude, au vu des deux certificats d’authenticités versés aux débats, qu’il a été fait par la société X-Y, ainsi que par la société L.B. C et M. Z, un usage des noms patronymiques des appelants en violation de leurs droits, comme ils le soutiennent, plutôt qu’un usage par la société X-Y des patronymes de D X et d’E Y conforme à l’autorisation qui lui a été donnée dans le contrat de cession du 8 janvier 2007 (pièce n° 12), comme le prétendent les intimés, le caractère illicite du trouble dont se plaignent Mme X et M. Y résultant de cette utilisation n’est pas manifeste ; que l’ordonnance sera confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande formée à ce titre ;

Qu’en revanche, dans la mesure où il n’était pas contesté que, notamment sur des documents publicitaires ou des certificats d’authenticité ainsi qu’il ressort, pour ces derniers, des deux exemplaires communiqués, il était fait usage de photographies des appelants alors qu’il n’est justifié d’aucune autorisation en ce sens, l’engagement pris par les intimés de cesser une telle utilisation ne pouvait suffire à mettre fin au trouble causé à Mme X et M. Y par l’atteinte portée à leur image sans que le juge des référés n’ordonne une mesure d’interdiction contraignante ; que la décision sera infirmée également de ce chef ; que, toutefois, l’appréciation de la réparation du préjudice subi mérite un débat de fond qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de trancher ; qu’il n’y a pas lieu à référé sur la demande de provision formée de ce chef ;

Considérant que les intimés qui succombent pour l’essentiel, seront condamnés aux dépens de première instance et d’appel et, pour des motifs tirés de l’équité, à payer une indemnité de procédure aux appelants ;

PAR CES MOTIFS,

Rejette l’exception de nullité de l’ordonnance ;

Rejette la demande tendant à ce que soient écartées des débats les pièces produites par les intimés ressortant de l’instruction en cours au tribunal de grande instance de DIEPPE ;

Confirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté toutes les demandes relatives à l’utilisation des marques, dénominations et noms patronymiques cédés par Mme D X et M. E Y ainsi que la demande d’expertise relative à l’assiette de calcul des droits d’auteur de Mme D X et d’injonction de communiquer l’état des recettes réalisées par la société X-Y ;

Infirme cette ordonnance en ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à mettre hors de cause M. F Z ;

Rejette toutes les demandes formées au titre de l’atteinte à la présomption d’innocence ;

Condamne la société X-Y à payer à Mme D X, par provision :

° la somme de 30 000 € au titre des droits d’auteur sur les oeuvres existantes,

° la somme de 50 000 € au titre des droits d’auteur sur les oeuvres nouvelles ;

Condamne la société X-Y à remettre à Mme D X cinq exemplaires de chaque 'oeuvre nouvelle’ au sens du pacte d’actionnaires signé le 8 janvier 2007, créée par celle-ci postérieurement au 1er janvier 2007, dans le délai de quinze jours après la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 100 € par jour de retard pendant trois mois après lequel délai, il sera à nouveau statué ;

Fait interdiction à la société X-Y, à la société L.B. C et à M. F Z de faire usage à quelque titre et sur quelque document que ce soit, de l’image de Mme D X et M. E Y, et ce, dans le délai de quinze jours après la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 € par infraction constatée;

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de provision formée par Mme D X et M. E Y au titre de l’atteinte portée à leur image ;

Condamne la société X-Y, la société L.B. C et M. F Z à payer à Mme D X et M. E Y ensemble la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société X-Y, la société L.B. C et M. F Z aux dépens de première instance et d’appel dont recouvrement dans les conditions prévues par l’article 699 du même code.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Paris, 27 février 2009, n° 08/15243