Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 23 juin 2010, n° 09/05766

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 1, 23 juin 2010, n° 09/05766
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 09/05766
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 29 janvier 2009, N° 07/08304
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 23 JUIN 2010

(n° , 06 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 09/05766

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 07/08304

APPELANTES

La société OR DE VENDOME, SARL

agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal

ayant son siège XXX

75001 PARIS

La société SOGEOR SAM, SA

agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal

ayant son siège Square Beaumarchais

XXX

représentées par la SCP FISSELIER – CHILOUX – BOULAY, avoués à la Cour

assistées de Me Fabien HONORAT, avocat au barreau de Paris, toque R 47

plaidant pour la SCP DEFLERS ANDRIEU & ASSOCIÉS

INTIMÉES

La société STUDIO 29, SARL

Prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège XXX

XXX

Madame X A épouse B

XXX

XXX

représentées par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avoués à la Cour

assistées de Me Jean-Pierre VERSINI-CAMPINCHI, avocat au barreau de Paris,

toque P 454

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 Mai 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Didier PIMOULLE, Président

Madame Q R, Conseillère

Madame Anne-Marie GABER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Aurélie GESLIN

ARRÊT : – contradictoire

— rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Mademoiselle Aurélie GESLIN, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

LA COUR,

Vu les appels relevés :

—  1°) par la s.a.r.l. or de vendôme et la société sogeor sam (déclaration d’appel n° 4809 du 2 mars 2009),

—  2°) par Mme X A et la s.a.r.l. studio 29 (déclaration d’appel n° 8326 du 14 avril 2009),

du jugement du tribunal de grande instance de Paris (3e chambre, 2e section, n° de RG : 07/8304), rendu le 30 janvier 2009, joints par ordonnance du conseiller de la mise en état du 20 octobre 2009 ;

Vu les dernières conclusions des sociétés or de vendôme et sogeor sam, appelantes et intimées (13 avril 2010) ;

Vu les dernières conclusions de la société studio 29 et de Mme A (28 avril 2010), appelantes et intimées ;

Vu l’ordonnance de clôture prononcée le 4 mai 2010 ;

* *

SUR QUOI,

Considérant que Mme A, styliste en joaillerie, qui revendique la création, en 2005, d’une bague référencée BXBA 43 dont elle a cédé les droits de reproduction et d’exploitation à la société studio 29, et cette même société, ayant constaté qu’un article du magazine Vogue Paris paru en mai 2007 présentait l’image de deux modèles de bagues et d’un modèle de bracelet présentés par la maison Repossi et constituant, selon elles, la copie servile ou quasi servile de leur bague BXBA 43, ont fait procéder à un constat d’achat le 9 mai 2007, puis à une saisie-contrefaçon, le 18 mai 2007, dans les locaux du magasin exploité sous l’enseigne Repossi par la société or de Vendôme pour assigner finalement cette société et sa société mère sogeor en contrefaçon ;

Que le tribunal, par le jugement dont appel, a jugé que les demanderesses démontraient être titulaires des droits qu’elles invoquaient, que les défenderesses n’établissaient pas que leur modèle était antérieur à celui de Mme A et retenu que le modèle BXBA 43 était original et que la contrefaçon des droits d’auteur était caractérisée à l’encontre des deux sociétés défenderesses s’agissant de la bague et de la seule société sogeor s’agissant du bracelet, et condamné ces dernières à payer aux demanderesses des dommages-intérêts sans toutefois accueillir leur demande d’expertise et ordonné diverses autres mesures réparatrices ;

Que les appelantes concluent à l’infirmation du jugement sur le seul moyen de l’absence de preuve de l’antériorité du modèle de bague revendiqué par les intimées, prétendant démontrer que les premiers modèles de leur collection incriminée ont été conçus avant septembre 2004 ;

Que Mme A et la société studio 29 concluent à la confirmation du jugement sauf sur l’évaluation de leur préjudice et le rejet de leur demande d’expertise ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, hormis la question de la réparation du préjudice, seules demeurent en discussion devant la cour les dates de création des modèles en cause ;

Considérant qu’il résulte des pièces versées au débat que, le 7 décembre 2005, la société studio 29, sous la signature de Mme A, a envoyé à la société oro style une télécopie (pièce 5) comportant les dessins de quatre modèles de bijoux dont celui de la bague référencée BXBA 43, commandée en deux exemplaires ; que la société oro style a émis le 22 décembre 2005 une facture n° 340 (pièce 6) relative à la fabrication des modèles de bijoux ayant fait l’objet de la commande du 7 décembre 2005 comportant notamment la fabrication de deux exemplaires de la bague référencée BXBA 43 ; qu’un exemplaire de cette bague référencée BXBA 43 a été livré au magasin Printemps-bijoutier joaillier XXX à Paris le 6 janvier 2006 (pièce 41) ; que la société studio 29 a offert un autre modèle de la même bague en cadeau à Mme K L (pièce 56/1) ; que, le 28 février 2006, la société studio 29 a commandé à la société oro style deux nouveaux exemplaires de la bague BXBA 43, commande portée à trois exemplaires le 4 mars 2006 (pièces 7 et 8) ; que, le 7 mars 2006, la société studio 29 a confié à la société Bergdorf Goodman un ensemble de bijoux créés par Madame A et comportant notamment le modèle de bague référencé BXBA 43 en vue d’une exposition à New York (pièce 43) ;

Considérant, au contraire de ce que soutiennent les appelantes, que ces documents, dont le rapprochement séquentiel ne laisse apparaître aucune incohérence ou incompatibilité chronologique, suffit à prouver que le modèle de bague dont la création est revendiquée par Mme A a été créé par elle en 2005, mis en fabrication en décembre 2005 et présenté au public dès le mois de janvier 2006 ;

Considérant que les sociétés or de Vendôme et sogeor affirment que les bijoux argués de contrefaçon ont été imaginés par Gaïa Repossi et Eugénie Niarchos en 2004, que les dessins techniques du premier modèle de bague ont été adressés à la société italienne G C en juin 2004, que celle-ci a réalisé l’ensemble des prototypes de la collection entre septembre 2004 et septembre 2006, que les premières ventes ont eu lieu en décembre 2006, que la campagne publicitaire a commencé début 2007 et que le lancement de la collection est intervenu le 7 juin 2006 à l’hôtel Ritz à Paris, de sorte que la bague et le bracelet incriminés sont d’une création antérieure à celle revendiquée par Mme A et la société studio 29 ;

Considérant que les appelantes ne produisent aucune preuve du travail personnel ou de l’inspiration des deux prétendues créatrices, mais font reposer l’essentiel de leur thèse, d’une part, sur une facture de la société G C (pièce 4), d’autre part sur un certain nombre d’attestations ;

Considérant que les sociétés or de Vendôme et sogeor versent au débat une facture (pièce 4) émise par la société G C le 8 septembre 2004 relative à la fabrication de deux bagues en or jaune référencées 04/0481 et 04/0482 et affirment que ces deux bagues constituent des antériorités opposables au modèle revendiqué par Mme A ;

Considérant toutefois que cette facture est en elle-même insuffisante à établir cette antériorité dès lors qu’elle ne représente pas la réalité désignée sous les deux références indiquées ; que les appelantes produisent en conséquence un procès-verbal (pièce 3) dressé le 20 mai 2009 par Mme AA-AB, huissier près la cour d’appel de Monaco, qui a constaté que les fiches de stock informatiques de la société sogeor, sous les références 04/0481 et 04/0482, faisaient apparaître la photographie de bagues semblables aux bijoux argués de contrefaçon, issus de la collection « Czarina » ;

Mais considérant que ce constat, effectué près de cinq ans après l’émission de la facture, et à la requête de la société sogeor, ne prouve nullement l’authenticité des fiches de stock ainsi décrites, dont Mme A et la société studio 29 soulignent à juste titre qu’elles sont issues du système informatique de la société requérante qui dispose de la faculté de créer, ajouter ou modifier ses fiches à sa guise ;

Considérant que les deux références en cause se retrouvent sur un bon n° 5268 du 18 septembre 2004 pour désigner des alliances en or « Czarina » que ce bon correspond, selon les appelantes, à la remise de ces bijoux à titre de cadeaux, l’un à Gaïa Repossi, l’autre à Mme U Z W qui, par une attestation du 16 mai 2009, confirme « avoir reçu le 17 septembre 2004 une bague en or à titre gracieux de la Maison Repossi joailliers de Monte-Carlo » et précise qu’il s’agissait du modèle « Czarina » qu’ elle reconnaît sur une photographie, jointe à son attestation, qui présente une bague ressemblant à celle arguée de contrefaçon ;

Mais considérant que cette attestation, établie près de cinq ans après le fait qu’elle rapporte est dépourvue de force probante dès lors qu’elle contredit la désignation d’alliance portée sur le bon portant la référence du bijou remis à Mme Z ;

Considérant qu’il est en outre produit au débat une attestation, accompagnée de plusieurs documents, établie par M. G C le 22 mai 2009, soit cinq mois après le prononcé du jugement dont appel, se rapportant à des faits supposés remonter, pour les plus anciens, à juin 2004 ; que M. C atteste qu’il a reçu par fax le 25 juin 2004 le dessin d’une bague pour réaliser un prototype et un devis pour la réalisation du même modèle à grande échelle ;

Mais considérant que les documents joints à cette attestation, s’ils représentent des dessins de bijoux produisant une impression d’ensemble voisine des créations de Mme A, ne sont accompagnés d’aucune lettre de commande ou d’instruction de réalisation qui permettrait de corroborer les explications des appelantes sur l’origine de leur création et n’ont, en toute hypothèse, aucune date certaine ; que la liste des bagues énumérées dans l’attestation comme ayant été fabriquées pour les sociétés or de vendôme et repossi entre septembre 2004 et mars 2007 ne comportent aucun objet désigné sous les références 04/0481 et 04/0482 ; que ces documents n’établissent donc pas une antériorité opposable à Mme A et à la société studio 29 ;

Considérant, par ailleurs, que l’attestation de M. D (pièce 12), qui affirme avoir « vu les éléments de la collection Czarina pour la première fois en octobre 2005 », ou celle de M. Y, qui atteste avoir été « en contrat avec Repossi joaillerie du 21 novembre 2005 au 20 novembre 2007 pour gérer la publicité ainsi que les relations de presse notamment concernant la nouvelle collection Czarina » (pièce 14) n’identifient précisément aucun modèle d’une création antérieure aux bijoux créées par Mme A et ne possèdent dès lors aucune vertu démonstrative eu égard au présent litige ; qu’il ne peut être exclu que Mme O P, qui déclare reconnaître sur la photographie incrustée dans son attestation du 23 avril 2010 (pièce 29) le dessin de la bague qu’elle avait vue en septembre 2004, ait eu sa mémoire précisément sollicitée par la présentation de cette photographie, de sorte que son témoignage ne peut être retenu ;

Considérant enfin qu’il n’y a pas lieu de s’arrêter à l’attestation de Mme E F, du 21 mai 2009 (pièce 15), en raison du lien de subordination qui l’unit à la Maison Repossi pour y avoir été employée pendant plus de vingt ans et être devenue administratrice en 2002 ;

Considérant, en synthèse, que les appelantes échouent à apporter la preuve d’une création antérieure et opposable à celle revendiquée par Mme A et la société studio 29 ; que la décision dont appel sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a retenu les actes de contrefaçon à la charge des sociétés sogeor et or de vendôme ainsi que sur les mesures d’interdiction et de publication, sauf à ajouter à la mention du dispositif du jugement celle du dispositif du présent arrêt confirmatif ;

Considérant, sur les dommages-intérêts, que le tribunal a retenu qu’une douzaine de bagues contrefaisantes avaient été offertes à la vente au prix d’au moins 2.800 euros l’unité ;

Considérant que, reprenant devant la cour leur demande d’expertise telle que rejetée par le tribunal, Mme A et la société studio 29 font valoir, pour l’essentiel, que la société sogeor et la société or de vendôme ont procédé à une très importante campagne publicitaire dans la presse sous forme de reportages présentant la gamme « Czarina » entre mars 2009 et mai 2009 ; qu’il peut être observé que cette campagne est ainsi postérieure au jugement assorti de l’exécution provisoire ;

Considérant que de telles circonstances ont aggravé le préjudice subi par Mme A pour l’atteinte à son droit moral d’auteur et celui de la société studio 29 pour l’atteinte à ses droits patrimoniaux ; qu’elles justifient une réformation du jugement sur le montant des dommages-intérêts alloués ; que la cour trouve dans la matière du litige, sans qu’il soit nécessaire de recourir à une expertise, les éléments suffisants d’appréciation lui permettant de porter à 40.000 euros le montant de la condamnation de la société sogeor au profit de Mme A, la société or de vendôme étant condamnée in solidum à hauteur de 25.000 euros, et à 40.000 euros le montant de la condamnation de la société sogeor au profit de la société studio 29, la société or de vendôme étant condamnée in solidum à hauteur de 25.000 euros ;

* *

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf le montant des dommages-intérêts alloués ;

LE RÉFORMANT et STATUANT À NOUVEAU de ce seul chef,

CONDAMNE la société sogeor à payer à Mme X A 40.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit moral d’auteur,.

CONDAMNE in solidum la société or de vendôme au paiement au profit de Mme A de la condamnation qui précède à hauteur de 25.000 euros.

CONDAMNE la société sogeor à payer à la société studio 29 40.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice patrimonial,

CONDAMNE in solidum la société or de vendôme au paiement au profit de la société studio 29 de la condamnation qui précède à hauteur de 25.000 euros,

CONDAMNE la société sogeor et la société or de vendôme in solidum aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile et à payer à Madame I A et à la société studio 29 10.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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