Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 21 décembre 2012, n° 2012/07318

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRET DU 21 DECEMBRE 2012

Pôle 5 – Chambre 2 (n° 310, 11 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 12/07318.

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Mars 2011 – Tribunal de Grande Instance de CRETEIL 1re Chambre Section A- RG n° 09/04088.

APPELANTES : - SA SYSTEME U CENTRALE NATIONALE prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social Parc tertiaire SILIC – […],

- Société SYSTEME U CENTRALE REGIONALE OUEST prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social place des Pléiades – ZI Belle E Antarès 44470 CARQUEFOU, représentées par la SELARL de CANDE – B en la personne de Maître Patrice DE C, avocat au barreau de PARIS, toque : P0265, assistées de Maître Julien B de la SELARL de CANDE – B, avocat au barreau de PARIS, toque : P0265

INTIMÉ : Monsieur Daniel T exerçant sous l’enseigne TRAMEX LA PILE D’ASSIETTES demeurant […] 64200 BIARRITZ, représenté par Maître Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753, assisté de Maître Jean B SAINT CRICQ, avocat au barreau de BAYONNE.

INTIMÉS : - Monsieur Stéphane G demeurant La Chaboissière – Chemin Barbate 86340 NOUAILLE MAUPERTUIS,

- SAS FINANCIERE D prise en la personne de son président, ayant son siège social Le Planty – 86300 CHAUVIGNY, représentés par la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE en la personne de Maître J PELLERIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, assistés de Maître Etienne D, avocat au barreau de PARIS, toque : E1654.

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 16 novembre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Eugène LACHACINSKI, président, Monsieur Dominique COUJARD, président de chambre, Madame Sylvie NEROT, conseillère. qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur T L NGUYEN.

ARRET : Contradictoire,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Sylvie NEROT, en l’empêchement du Président, et par Monsieur NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.

Stéphane G, qui exerce la profession de designer, a créé un modèle de coupe carrée caractérisée par des ondulations en relief formant un jeu de vagues et désigné sous la dénomination Nara.

Ce modèle, a été fabriqué et commercialisé par la société anonyme Deshoulières depuis 2001 avec l’autorisation de M. G, avant que celui-ci ne cède, en avril 2005, ses droits patrimoniaux à la société par actions simplifiée Financière Deshoulières

Estimant que des modèles d’assiettes commercialisées par la société Super U contrefaisaient leur collection, Stéphane Galerneau et la société Financière Deshoulières ont fait procéder, le 18 octobre 2007, à une saisie contrefaçon dans le magasin Typer U de Montmorillon (86).

Les assiettes saisies avaient été fournies par la société Système U Centrale Nationale qui les tenait de M T, exerçant sous le nom commercial Tramex, lequel en avait déposé le modèle, le 5 novembre 2007, sous le n° 07/5047 et sous la désignation TVC09658 Ondine, à l’Institut national de la propriété industrielle.

Par actes des 3 et 10 avril 2009, Stéphane G et la société Financière Deshoulières ont assigné la société Système U Centrale régionale Ouest et la société Système U devant le tribunal de grande instance de Créteil, en contrefaçon de droits d’auteur et en concurrence déloyale.

Par jugement du 1er mars 2011, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal a principalement :

— dit que l’action de Stéphane G et de la société Financière Deshoulières est recevable,

— dit que les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale ont commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur en distribuant des catalogues intitulés « Cours d’économies » reproduisant des copies serviles du modèle Nara créé par Stéphane G et commercialisé par la société Financière Deshouilères,

— dit que les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire eu préjudice des requérants en distribuant un catalogue représentant un modèle d’assiette constituant une reproduction servile du modèle Nara créé par Stéphane G, tout en commercialisant en magasin un modèle légèrement différent et d’une qualité inférieure,

— condamné in solidum les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à verser à Stéphane G la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de l’atteinte au droit moral d’auteur,

— condamné in solidum les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à verser à la société Financière Deshoulières la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de l’atteinte à son image de marque,

— condamné in solidum les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à verser à la société Financière Deshoulières la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de la concurrence déloyale et parasitaire,

— dit que les intérêts seront dûs à compter de la décision,

— interdit aux sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale de commercialiser les articles litigieux, sous astreinte de 100 € par infraction constatée dans le délai de deux mois à compter de la signification de la décision,

— ordonné, sous le contrôle d’un huissier, la destruction de la totalité du stock de produits et de documents représentant les articles litigieux,

— autorisé la publication de la décision dans deux revues au choix de la société Financière Deshoulières et aux frais des sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale sans que le coût total des insertions n’excède à la charge de celles-ci la somme de 3 500 € par insertion,

— rejeté la demande de nullité du modèle n°07/5047 et l’appel en garantie formé à l’encontre de Daniel T,

— rejeté le surplus des demandes,

— condamne in solidum les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à verser à Monsieur Stéphane G et à la société Financière Deshoulières la somme de 8 000 € au titre des frais irrépétibles.

Vu l’appel interjeté le 29 mars 2011 par les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale,

Vu les dernières conclusions signifiées le 19 avril 2012, par lesquelles les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale demandent à la cour au visa des Livres I et II du Code de la propriété intellectuelle, des articles 1302 et 1626 du code civil :

— d’infirmer le jugement du 1er mars 2011 en toutes ses dispositions,

— de prononcer la nullité des opérations de saisie-contrefaçon pratiquées auprès du magasin Typer U de Montmorillon,

— de déclarer Stéphane G et la société Financière Deshoulières irrecevables à agir au titre du droit d’auteur,

— de débouter Stéphane G et la société Financière Deshoulières de l’intégralité de leurs demandes,

' à titre subsidiaire,

— débouter Stéphane G et la société Financière Deshoulières de leurs demandes indemnitaires,

' dans tous les cas,

— de condamner Daniel T à les garantir de toute éventuelle condamnation,

— de condamner Stéphane G et la société Financière Deshoulières et, le cas échéant, Daniel T à leur verser à chacune la somme de 10 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions signifiées le 23 août 2011, par lesquelles Stéphane G et la société Financière Deshoulières demandent à la cour :

— de débouter les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale de leurs demandes,

— de dire qu’en reproduisant des copies serviles du modèle de coupe carrée Nara dans le catalogue « Cours d’économies », les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest se sont rendues coupables de contrefaçon de droits d’auteur à l’encontre de Stéphane G et de la société Financière Deshouillères,

— de dire qu’en commercialisant des copies du modèle de coupe carrée Nara , les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de Stéphane G et de la société Financière Deshouillères,

' en conséquence,

— d’interdire aux sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale la commercialisation des articles litigieux sous astreinte de 1 000 € par infraction constatée, à compter du prononcé de la décision à intervenir,

— d’ordonner sous le contrôle d’un huissier la destruction et sous astreinte de 1 500 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt, la destruction de la totalité du stock de produits et des documents représentant les produits litigieux,

— de déclarer nul l’enregistrement du modèle n°07/5047 et ordonner à l’Institut national de la propriété industrielle la radiation de cet enregistrement,

— de condamner solidairement les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à payer la somme de 15 000 € à Stéphane G en réparation du préjudice subi au titre de la violation de son droit moral d’auteur,

— de condamner solidairement les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à payer à la société Financière Deshoulières la somme de 130 000 € en réparation du préjudice subi au titre de la contrefaçon de droits d’auteur,

— de condamner solidairement les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à payer à la société Financière Deshoulières la somme de 190 431,24 € en réparation du préjudice subi au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,

— de dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

— d’ordonner la publication de l’arrêt dans cinq revues ou journaux français ou étrangers de leur choix et aux frais des sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale, à concurrence de 4 500 € hors taxes par insertion, et ce, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires,

— de condamner solidairement les sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale à payer à la société Financière Deshoulières la somme globale de 30 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile tant pour la 1re instance que par la procédure d’appel,

— de les condamner aux dépens dont distraction dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées le 15 septembre 2011, par lesquelles Daniel T demande à la cour :

— de débouter des sociétés Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale de leur demande en garantie,

— de dire que sous le vocable Nara ont été produites différentes assiettes de sorte que la demande n’est pas caractérisée,

— de dire que les assiettes produites ne présentent aucune originalité,

— de débouter Stéphane G et la société Financière Deshoulières de leur demande en annulation du modèle Institut national de la propriété industrielle n°07/5047 portant sur une assiette distincte,

— de confirmer la décision déférée en ce qu’elle a débouté les appelants principaux et incidents de leurs demandes à son encontre,

— de condamner les appelants à lui payer la somme de 10 000 € pour procédure abusive , outre la somme de 10.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— de condamner les appelants aux entiers dépens.

CELA EXPOSE, LA COUR :

Sur la saisie contrefaçon :

La saisie contrefaçon litigieuse a été autorisée par ordonnance rendue le 25 septembre 2007 par le président du tribunal de grande instance de Poitiers ;

Les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest font grief l’huissier de justice, rédacteur du procès-verbal de saisie contrefaçon :

— d’avoir mentionné par erreur une société Hyper U qui n’existe pas,

— d’avoir signifié l’ordonnance à « Monsieur Alain G, directeur administratif de la SA Hyper U » alors qu’en réalité, le responsable du magasin était Alain G,

— d’avoir présenté, sans autorisation le catalogue Hyper U de Montmorillon pour désigner le modèle argué de contrefaçon sans avoir au préalable constaté la présence de produits argués de contrefaçon,

— de s’être livré à des investigations non autorisées en se faisant remettre les assiettes arguées de contrefaçon, alors qu’elles ne se trouvaient plus en rayon.

— de s’être fait accompagné par un collaborateur comptable et pas par un expert-comptable comme le prévoyait l’ordonnance de saisie-contrefaçon,

— de n’avoir pas fait porter les voies de recours susceptibles d’être mises en 'uvre, sur l’acte de signification de l’ordonnance dur requête.

Sur ces griefs, la rédaction des procès-verbaux de saisie contrefaçon obéit aux règles de droit commun prévues par l’article 648 du code de procédure civile, lequel ne fait pas obligation à l’huissier instrumentaire d’y faire figurer les recours possibles ;

La mention de la raison sociale Hyper U, figurant au procès-verbal contesté, n’est que la reprise des mentions portées dans l’ordonnance rendue le 25 septembre 2007 par la présidente du tribunal de grande instance de Poitiers et correspond au nom du magasin dans lequel l’huissier s’est rendu ;

Dès lors que l’huissier de justice s’est rendu au magasin Hyper U de Montmorillon et y a rencontré le responsable, en la personne de Monsieur Alain G, lequel s’est dit habilité à recevoir l’acte, les simples erreurs matérielles tenant à la confusion entre l’enseigne du magasin et la raison sociale de la société qui l’exploite sont sans conséquence sur la validité de l’acte ;

L’huissier de justice n’a pas commis d’erreur sur le nom du responsable du magasin, Alain G, mais le point sur le « i » du nom « G », écrit à la main sur l’acte de notification, a disparu par l’effet d’estompement de la photocopie ;

Il résulte des termes de l’ordonnance du 25 septembre 2007 que l’huissier de justice a strictement respecté la mission qui lui a été confiée par l’ordonnance sur requête, laquelle consistait, notamment, à se rendre dans les locaux de l’Hyper U de Montmorillon, ainsi qu’en tous lieux et dépendances dans le ressort du tribunal où des constatations pourraient se révéler utiles, et de procéder à la saisie réelle de deux exemplaires chacun de tous modèles reproduisant les caractéristiques des modèles Nara et à la saisie de tout article comportant les caractéristiques originales de ces modèles ;

L’huissier de justice a ainsi pu personnellement constaté que les produits argués de contrefaçon n’étaient plus en rayon mais qu’ils se trouvaient encore en stock dans le magasin comme le responsable du magasin Hyper U de Montmorillon le lui avait indiqué ;

En présentant à ce responsable la page 79 du journal publicitaire émis par la chaîne pour la période du 28 août au 8 septembre 2007, l’huissier de justice s’est conformé à l’ordonnance sur requête en respectant son paragraphe c), page 3, ledit catalogue étant, lui-même argué de contrefaçon ;

Les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest ne sont donc pas fondées à prétendre comme elles le font que l’huissier de justice n’était pas autorisé à présenter le catalogue afin de désigner le modèle argué de contrefaçon alors que l’ordonnance autorisant la saisie-contrefaçon l’autorisait à procéder à toutes constations utiles dans le but de découvrir l’étendue de la contrefaçon ;

Enfin, il ne résulte pas du procès-verbal de contrefaçon que l’huissier de justice ait procédé à une enquête personnelle, mais il a présenté la mission qui lui avait été confiée au responsable du magasin, M G, lequel a demandé à une de ses collaboratrices de lui présenter les documents comptables, l’huissier ayant pris des clichés photographiques des articles qui lui étaient présentés en provenance du stock, conformément aux termes de l’ordonnance ;

Il s’ensuit que la demande d’annulation du procès-verbal de contrefaçon sera rejetée ;

Sur la titularité des droits d’auteur :

Stéphane G caractérise son modèle d’assiette Nara par la combinaison :

— d’une céramique de couleur blanche

— d’une forme carrée,

— de bords relevés,

— de stries conférant à l’assiette un aspect rugueux en surface,

— d’ondulations en jeu de vagues conférant à l’ensemble un aspect japonisant ;

Daniel T considère que sous le vocable Nara ont été produites différentes assiettes de sorte que la demande n’est pas caractérisée ;

Mais s’il est constant que la collection initialement dénommée Zen, puis Nara décline de nombreux articles de porcelaine blanche, assiettes, coupes, bols, plats et vases, tous caractérisés par les mêmes stries en forme de vagues imbriquées, les articles argués de contrefaçon sont constitués par deux assiettes carrées que Stéphane G et la société Financière Deshouillères estiment contrefaits, à savoir l’assiette carrée représentée dans leurs dernières conclusions, correspondant à la pièce n°2 ;

Les demandes formées par Stéphane G et par la société Financière Deshoulières sont donc bien caractérisées ;

Daniel T soutient également que les assiettes Nara ne présentent aucune originalité ;

Mais si les éléments, tels que ci-dessus décrits qui composent le modèle Nara sont effectivement connus et si, pris séparément, ils appartiennent au fonds commun de l’art de la table, leur combinaison, telle que revendiquée, présente cependant un aspect d’ensemble propre traduisant un parti pris esthétique qui porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et le rend éligible à la protection conférée aux créations originales en vertu des dispositions du livre l du Code de la propriété intellectuelle ;

Les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest considèrent que la preuve n’est pas rapportée par les intimés de l’existence d’un acte de cession des droits patrimoniaux d’auteur entre Stéphane G et la société Financière Deshouillères ;

Mais la société Financière Deshouillères qui agit conjointement avec Stéphane G, le créateur, verse aux débats des catalogues, des factures de commercialisation au nom de la société intimée et divers catalogues datés des années 2004 à 2008 (pièce n°3, 4 et 5) qui, en l’absence de toute revendication de l’auteur établissent une présomption de titularité attribué à l’exploitant qui commercialise son produit de façon non équivoque ;

L’objection soulevée par les appelants sera par conséquent rejetée ;

Sur la contrefaçon de droits d’auteur :

Stéphane G et la société Financière Deshouillères reprochent aux sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest d’avoir reproduit des copies serviles du modèle de coupe carrée Nara dans leur catalogue d’août – septembre 2007, intitulé « Cours d’économies », se rendant ainsi coupables d’actes de contrefaçon de droits d’auteur à leur préjudice ;

Le catalogue (pièce n°10) des articles proposées à la vente par le magasin Hyper U, contient à la page 79 une photographie des deux assiettes carrée en porcelaine blanche Décor graphique désignées par l’appellation Ondine, 26x26 cm et 22x22 cm ;

L’assiette Ondine commercialisée par la société Système U Centrale Régionale Ouest qui la tient de la société Système U Centrale Nationale selon un mécanisme non contesté de filière, diffère légèrement du modèle Nara revendiqué, en ce que, d’une part, les stries qui en couvrent le fond ne s’étendent pas sur toute sa surface, que, d’autre part, ses bords, lisses, forment un angle avec le fond et, enfin, en ce que le dessin en forme de vague comporte des ruptures en accent circonflexe, absentes du modèle antérieur, et ne présente donc pas rigoureusement les caractéristiques revendiquées ;

modèle Nara modèle TVC09658 Ondine

Si l’originalité des assiettes Nara provient essentiellement de la forme des vagues imbriquées, il apparaît que les éléments essentiels et caractéristiques du modèle antérieur ont été reproduits et que les modifications apportées aux assiettes par l’adjonction d’une bordure blanche sur le pourtour, loin de permettre de distinguer le modèle contrefaisant, constitue une reproduction du modèle original ;

Il en résulte que les assiettes commercialisées par les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest constituent des actes de contrefaçon de droits d’auteur sont caractérisés appartenant à Stéphane G et à la société Financière Deshouillères ;

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé de ce chef ;

Sur la concurrence déloyale :

Stéphane G et la société Financière Deshouillères soutiennent qu’en commercialisant des copies du modèle de coupe carrée Nara , les Système U Centrale régionale Ouest et Système U Centrale nationale se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et parasitaire à leur préjudice ;

Mais si la commercialisation par les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest, des assiettes contrefaisantes Ondine constitue une faute, celle-ci ne se distingue pas de celle qui résulte des faits de contrefaçon retenus par la cour pour la publication du catalogue « Cours d’économies » qui proposait cette vente et dont elle n’est que le prolongement, de sorte que la demande fondée sur la concurrence déloyale sera rejetée ;

La décision déférée sera infirmée sur ce point ;

Sur la demande d’annulation du modèle n° 07/5047 Ondine :

L’assiette Ondine, qui apparaît comme la reproduction du modèle Nara , étant contrefaisante, le modèle n° 07/5047 Ondine, enregistré par Daniel T, le 5 novembre 2007, postérieurement à la création originale Nara, sera annulé, en application des dispositions de l’article L.512-4, d) du code de la propriété intellectuelle ;

Sur l’appel en garantie formé par les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest :

Daniel T qui a cédé le modèle d’assiettes Ondine contrefaisantes aux sociétés appelantes devra être condamné à garantir les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest du paiement des sommes qui seront mises à leur charges et au profit de Stéphane G et de la société Financière Deshouillères ;

Sur les mesures d’interdiction :

Les mesures d’interdiction de commercialiser les articles litigieux, de destruction des stocks d’articles contrefaisants et de publicité demandées de Stéphane G et de la société Financière Deshouillères sont nécessaires, compte tenu de l’atteinte portée à leurs droits et à leur image ; il y sera fait droit dans les termes du dispositif ci-après ;

Sur l’indemnisation des préjudices :

La somme de 10. 000 € accordée par les premiers juges en réparation de l’atteinte portée à au droit moral d’auteur de Stéphane G sera confirmé ;

Pour démontrer la réalité du préjudice qu’elle évalue à la somme de 190 431,24 €, la société Financière Deshouillères verse aux débats des supports de communication de la collection Nara, (pièce n°4), les tarifs Deshouilères de 2008 (pièce n°6), une attestation de son expert comptable (pièce n°7) selon qui le prix de revient de la coupe carrée vendue 21,10 € s’élevait à cette date à la somme de 6,73 € ;

Elle produit également des factures émanant de la société TRAMEX TRUCO faisant état de la vente à la société SYSTME U de 13.152 assiettes carrées au prix unitaire de 1,62 € ;

D’autre part, une facture saisie par l’huissier dans les locaux du magasin de Montmorillon établit que les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest ont commandé 172 assiettes ;

Compte tenu de la place des articles litigieux dans les supports commerciaux et publicitaires développés par la société Financière Deshouillères et du nombre d’articles contrefaisants achetés à la suite de ces parutions par les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest, la cour considère qu’une somme de 50.000 € réparera justement l’atteinte portée aux droits patrimoniaux de la société Financière Deshouillères ;

Sur les mesures de publication :

Compte tenu, notamment, de l’ancienneté des faits et de la quantité d’assiettes contrefaisantes commercialisées par les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest , les mesure de publication sollicitées ne seront pas ordonnées ;

Sur les autres demandes :

Toutes les demandes de Daniel T, partie perdante, seront rejetées, tout comme celles des sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest qui seront condamnées in solidum à payer la somme complémentaire de 15.000 € à la société Financière Deshouillères en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

P A R C E S M O T I F S,

Confirme le jugement rendu le 1er mars 2011 par le tribunal de grande instance de Créteil en ce qu’il a :

— rejeté l’exception de nullité des opérations de saisie contrefaçon,

— déclaré Stéphane G et la société Financière Deshouillères recevables à agir en réparation de l’atteinte portée à leurs droits d’auteur,

— dit que les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest ont commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur en distribuant des catalogues intitulés « Cours d’économies » reproduisant des copies du modèle Nara créé par Stéphane G et commercialisé par la société Financière Deshouillères,

— condamné les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest à payer à Stéphane G la somme de 10.000€ en réparation de son préjudice moral,

L’infirme sur ses dispositions relatives à la concurrence déloyale, le rejet de la demande de nullité du modèle n°07/5047, l’appel en garantie et le montant de la réparation du préjudice financier de la société Financière Deshouillères,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne in solidum les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest à payer à la société Financière Deshouillères, la somme de 50 .000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation de ses droits patrimoniaux d’auteur,

Déclare nul l’enregistrement du modèle n°07/5047, effectué le 5 novembre 2007 par Daniel T, sous la désignation TVC09658 Ondine,

Dit que le présent arrêt d’annulation sera inscrit au registre national des dessins et modèles, en application des articles L. 512-6 et L.513-3 du code de la propriété intellectuelle,

Fait interdiction aux sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest de commercialiser les articles litigieux, sous astreinte de 500 € par infraction constatée, à compter de la signification de l’arrêt,

Ordonne la destruction, sous le contrôle d’un huissier, de la totalité du stock de produits et de documents représentant les assiettes litigieuses, aux frais des sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest et sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter du 15e jour suivant la signification du présent arrêt,

Dit que la cour se réserve la liquidation de l’astreinte en application des dispositions de l’article 35 de la loi du 9 juillet 1991,

Rejette toutes autres demandes des parties,

Condamne Daniel T à garantir les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest du paiement de toutes les condamnations prononcées contre elles,

Condamne in solidum les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest à payer à la société Financière Deshouillères la somme complémentaire de 15.000€ en application des dispositions de l’article 700 du code de

procédure civile,

Condamne in solidum les sociétés Système U Centrale Nationale et Système U Centrale Régionale Ouest aux entiers dépens dont distraction dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

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