Cour d'appel de Paris, 24 mars 2015, n° 14/11119

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 24 mars 2015, n° 14/11119
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 14/11119
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 1er mai 2014, N° 09/19305

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 5

ARRÊT DU 24 MARS 2015

(n°2015/ , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/11119

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Mai 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 09/19305

APPELANTES

SARL D’EXPLOITATION DES TRANSPORTS DELALOY agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège.

XXX

XXX

et

Mutuelle D E agissant poursuites et diligences en la personne de son directeur général en excecice domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représentées par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistées par Me Stéphanie GRIGNON DUMOULIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C2334

INTIMÉES

SA XXX IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

XXX

XXX

et

SA B C agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

XXX

XXX

et

Société K Z M A AG agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

XXX

XXX

et

SA X I J & SPECIALTY agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

XXX

XXX

et

SAS LES LABORATOIRES SERVIER agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

XXX

XXX

Représentées par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistées par Me Henri JEANNIN de la SCP SCHEUBER JEANNIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0480

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Février 2015, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme F G, Conseillère, entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Madame F G, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente et par Madame Aouali BENNABI, greffier présente lors de la mise à disposition.

La SAS LES LABORATOIRES SERVIER a vendu à la société italienne IFB STRODER cinquante-six palettes de boîtes de médicaments d’une valeur totale de 931.848,30€. Par lettre de voiture internationale soumise à la convention CMR n° 000361 relative au contrat de C international de marchandises par route, la société LABORATOIRES SERVIER a confié le C de ces marchandises (sous température) à la société d’exploitation des transports DELALOY.

La marchandise a été prise en charge le 5 juin 2007 et dans la nuit du 7 au 8 juin 2007, cinq palettes de médicaments ont été volées sur le parking d’une station service de l’autoroute Bologne-Tarente en Italie.

Exposant avoir indemnisé la SAS LES LABORATOIRES SERVIER, leur assuré par l’intermédiaire de la société apéritrice, la SA XXX cette société, la SA B C, la SA X I J & Y et la SA XXX et la SAS LES LABORATOIRES SERVIER ont fait assigner la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E devant le tribunal de commerce de Paris afin d’obtenir le remboursement de l’indemnité d’assurance évaluée à dire d’expert à la somme 83.472,15€.

Par jugement du 17 septembre 2009, la juridiction consulaire s’est déclarée incompétente pour connaître du litige au profit du tribunal de grande instance de Paris, qui par jugement en date du 2 mai 2014 a :

— dit recevable les demandes des sociétés XXX, B C, X I J & Y, K L M A ;

— condamné in solidum la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E à leur payer la somme de 83.472,15€, devant être ensuite répartie par les créanciers au prorata de leur engagement respectif aux termes de la police d’assurance souscrite par la société LABORATOIRES SERVIER,

— dit que cette somme porte intérêts de retard au taux de 5% l’an à compter du 29 mai 2008, les intérêts dus pour une année entière étant capitalisés à compter du 6 octobre 2010 en application de l’article 1154 du code civil,

— débouté la SAS LES LABORATOIRES SERVIER de sa demande en paiement d’une somme de 750€,

— condamné in solidum la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E à payer à XXX, B C, X I J & Y, K L M A la somme de 3.000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,

— rejeté tout autre demande des parties,

— ordonné l’exécution provisoire.

Par déclaration en date du 23 mai 2014, la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E ont interjeté appel. Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 24 novembre 2014, elles demandent à la cour, infirmant la décision déférée et sous divers constats dont celui d’une absence de justification de leur intérêt à agir, de débouter les intimées de leurs demandes. Subsidiairement au visa de l’article L 133-8 du code de commerce applicable aux faits de la cause et des limitations de l’article 23 de la convention CMR de dire que l’indemnité ne saurait excéder la somme de 6241,71€ ou l’équivalent en €uro au jour de jugement de la somme en unité de compte de 5.514,21 DTS. Elles sollicitent une somme de 7000€ chacune, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et la condamnation des intimées aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. La compagnie D E sollicite en tout état de cause, sa mise hors de cause et subsidiairement, elle oppose aux intimées les franchises contractuelles et soutient l’inopposabilité des majorations de l’indemnité versée par les assureurs, demandant à la cour de limiter sa garantie à la somme de 66177,72€ ou à l’équivalent en €uro au jour de jugement de la somme en unité de compte de 5.514,21 DTS et sollicitant le remboursement des sommes versées en exécution du jugement de première instance.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 22 décembre 2014, la SAS LES LABORATOIRES SERVIER, la SA XXX, la SA X I J & Y, K L M A et la SA XXX (disant venir aux droits de la société B C) demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a retenu une faute lourde du transporteur et la garantie de la compagnie D E, sollicitant la condamnation in solidum des appelantes à payer à :

— la SA XXX, à la SA X I J & Y et à la SA XXX la somme de 82.722,15€, avec intérêts au taux de 5% en application de l’article 27 de la convention CMR à compter du 29 mai 2008 et leur capitalisation en application de l’article 1154 du code civil outre une indemnité de procédure de 9000€ ;

— la SAS LES LABORATOIRES SERVIER la somme de 750€ avec intérêts au taux de 5% en application de l’article 27 de la convention CMR à compter du 29 mai 2008 et leur capitalisation en application de l’article 1154 du code civil outre une indemnité de procédure de 1000€ ;

Subsidiairement, elles sollicitent la condamnation in solidum des appelantes au paiement de l’équivalent en €euro au jour du jugement de 5.744,45 DTS outre les intérêts au taux de 5% en application de l’article 27 de la convention CMR et leur capitalisation ainsi que l’allocation d’une somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En tout état de cause, elles sollicitent la condamnation des appelants au paiement des dépens de première instance et d’appel qui comprendront les frais de traduction jurée, les dépens d’appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2015.

SUR CE, LA COUR

Considérant que les appelantes soutiennent le défaut de qualité et d’intérêt à agir des sociétés d’assurances intimées faute pour elles de justifier d’une subrogation légale ou conventionnelle dans les droits de la SAS LES LABORATOIRES SERVIER, rappelant que la subrogation légale suppose un paiement obligé qui n’est pas établi en l’espèce, d’une part, faute de production de l’intégralité du contrat et notamment des conditions générales visées à la police et d’autre part, en raison de l’exclusion des vols commis dans les véhicules en stationnant figurant à la police produite, écartant également la subrogation conventionnelle, la quittance subrogative ayant été délivrée après le paiement ; qu’elles relèvent également, pour soutenir cette fin de non recevoir, l’absence de preuve d’un paiement par ou pour le compte des sociétés B C, X I J & Y co-assureurs, seul un chèque émis par la société apéritrice, la XXX, étant produit ainsi que l’absence de justification des conditions de la coassurance et donc d’un paiement régulier par la GENERALI ; que les intimées rétorquent qu’elles justifient du paiement d’une indemnité d’assurance par une quittance signée par leur assuré et la copie d’un chèque, ce qui suffit puisqu’elles prétendent uniquement à une subrogation légale, ajoutant qu’elles produisent les conditions particulières de la police souscrite par la SAS LES LABORATOIRES SERVIER en 2004 ainsi que les conditions générales 'marchandises transportées par voie terrestre’ en application de laquelle l’indemnité a été réglée, déniant toute pertinence à l’invocation d’une exclusion de garantie prévue à l’article 16 de la police, relative aux vols commis de nuit dans le véhicule des collaborateurs du laboratoire ; qu’elles font également valoir que la compagnie XXX figure en qualité d’apériteur, sur la dernière page du contrat et qu’en cette qualité, elle dispose d’un mandat de régler l’indemnité d’assurance au nom de toute la coassurance ;

Considérant que les intimées produisent aux débats :

— les conditions particulières de la police marchandises transportées n°69 202 395 souscrite par la SAS LES LABORATOIRES SERVIER auprès des sociétés XXX, qualifiée en page 18 d’apériteur, B C, X et Z A, leur part dans la coassurance (respectivement 60%, 15%, 15% et 10%) apparaissant au droit de la signature des assureurs ;

— les conditions générales marchandises transportées par voie terrestre (imprimé du 7 novembre 1990 modifié le 3 novembre 1993 visé aux conditions particulières), les autres polices françaises visées aux conditions particulières étant étrangères aux garanties mobilisées puisque relatives aux transports maritimes ou aériens et à des garanties spécifiques telles que les conséquences des grèves et lock-out ;

Que les intimées justifient par la production du chèque émis par la GENERALI, coassureur apériteur et de la quittance qui lui a été délivrée par la SAS LES LABORATOIRES SERVIER, celle-ci faisant expressément référence à un paiement en son nom et aux noms des autres co-assureurs, du paiement d’une somme de 82 722,15€ correspondant à la valeur du chargement déduction faite de la franchise restée à charge (750€) au titre du sinistre du 7 juin 2008 ;

Que ce paiement opère une subrogation au profit tant de l’apériteur que des autres co-assureurs, dès lors que le premier pouvait valablement le faire au nom et pour le compte des seconds, en application de l’article 1236 du code civil, la production d’un mandat de paiement étant dès lors inutile comme la preuve (qui est rapportée en l’espèce par les pièces communiquées sous le n°12) de la participation effective de chacun des co-assureurs à ce règlement ;

Qu’enfin, la police garantit tous risques 'les marchandises transportées de tous points du globe à tous points du globe', l’article 16 cité partiellement par les appelantes constituant une extension de garantie aux vols de marchandises commis dans les véhicules utilisés par l’assurée ou ses collaborateurs à l’exclusion des vols de nuit qui n’a pas vocation à s’appliquer s’agissant d’un sinistre consistant en un vol de marchandises confiées à un transporteur public ;

Que dès lors, la subrogation légale des assureurs intimés au titre d’une indemnité versée en exécution d’une police d’assurance est établie et ceux-ci ont qualité et intérêt pour agir ;

Considérant que la SAS LES LABORATOIRES SERVIER, qui a conservé à la charge de la franchise contractuelle a également intérêt et donc qualité à agir ;

Considérant au fond, la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E, rappelant les dispositions de l’article 29 de la CMR et qualifiant d’interprétatives les dispositions de la loi du 2009-1503 du 8 décembre 2009 ayant introduit un article L 133-8 au code de commerce, soutient que les conditions de la faute inexcusable ne sont pas réunies, le chauffeur du transporteur ne pouvant se voir reprocher de ne pas avoir violé la réglementation relative aux temps de conduite afin de se rendre sur un parking dont il n’est pas établi qu’il présentait de meilleures conditions de sécurité que celui sur lequel il a stationné ; qu’elles écartent également la faute lourde, affirmant que le chauffeur a stationné son véhicule dont la remorque était verrouillée sur une aire de repos spécifiquement affectée aux transporteurs, qui était clôturée, surveillée et gardiennée, ce que les assureurs ont d’ailleurs implicitement admis en indemnisant la SAS LES LABORATOIRES SERVIER ; qu’elles ajoutent que le transporteur n’avait pas connaissance de la valeur de la marchandise et qu’il n’avait reçu aucune instruction particulière relative à la sécurité de la marchandise ;

Que les intimées contestent l’application de l’article L.133-8 du code du commerce, estimant qu’il est seulement requis de l’expéditeur la preuve que le transporteur a commis une faute lourde, évidente en l’espèce, puisque, les conclusions de l’expertise diligentée à leur demande mettent en évidence que les portes du véhicule n’étaient même pas munies d’un cadenas, l’aire de stationnement n’était pas gardiennée, regrettant que le chauffeur n’ait pas pris la précaution de rejoindre un des parkings clos et surveillé listé par l’IRU ;

Considérant que l’article 29 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, dite « CMR » prive le transporteur du bénéfice des dispositions de la convention qui excluent ou limitent sa responsabilité ou qui renversent le fardeau de la preuve, si le dommage provient de son dol ou d’une faute qui lui est imputable et qui, d’après la loi de la juridiction saisie, est considérée comme équivalente au dol ;

Que la loi no 2009-1503 du 8 décembre 2009 a ajouté un article L. 133-8 au code de commerce qui dispose que 'seule est équipollente au dol la faute inexcusable du voiturier ou du commissionnaire de C’ ; que ce texte ne se borne pas à reconnaître sans innover un état de droit préexistant qu’une définition imparfaite avait rendu susceptible de controverse mais consacre une solution juridique nouvelle par rapport à l’état de droit antérieur, dès lors qu’il était alors de principe, par référence aux dispositions de l’article 1150 du code civil, que la faute lourde du transporteur de nature à faire échec à la limitation d’indemnisation se caractérisait par de très graves manquements démontrant l’incurie ou à tous le moins l’inaptitude du voiturier à accomplir la mission qui lui avait été confiée ; que dès lors, en application de l’article 2 du code civil, ce texte est d’application immédiate et n’a pas vocation à régir l’opération de C litigieuse réalisée avant son entrée en vigueur ;

Considérant qu’appelantes et intimées produisent deux rapports d’expertise non contradictoires dont les conclusions diffèrent quant à la responsabilité du transporteur mais qui décrivent l’un et l’autre l’aire de stationnement sur laquelle s’est arrêté le chauffeur de la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY ; qu’il en ressort qu’il s’agit de l’aire de la station service CANNE DELLA BATTAGLIA OUEST, qui sur l’arrière dispose d’une aire de stationnement pouvant recevoir une trentaine de poids lourds et équipée de trois caméras de vidéo-surveillance, le signal de ces caméras étant destiné à une salle de contrôle de la société d’autoroute ; que contrairement aux allégations des appelantes, l’aire de stationnement réservée aux camions n’était nullement close, les poteaux dont il est fait état à l’une et l’autre des expertises séparant l’ensemble des installations de son environnement immédiat, en l’espèce, des champs ; qu’enfin, s’il est relevé la présence d’un gardien, celui-ci n’était nullement affecté à la surveillance de l’aire de stationnement spécifique aux camions ; qu’il devait contrôler l’ensemble des installations de la station service ainsi que celles de l’aire située de l’autre côté de l’autoroute, accessible par un passage souterrain ;

Qu’au surplus, lors de son audition par les services de police italiens le chauffeur a déclaré ainsi qu’il ressort de la traduction jurée de son audition que 'la porte de la semi-remorque était facile à ouvrir, étant donnée qu’elle n’était munie d’aucun système anti-effraction’ n’évoquant d’ailleurs aucune trace d’effraction sur la porte du véhicule ; que cette déclaration précise ne peut être contredite par la déclaration sur l’honneur du chauffeur du 27 août 2007 sollicitée par son employeur et destinée à son assureur, dans la mesure où il se contente d’affirmer que la remorque était 'fermée et sécurisée par un cadenas’ sans fournir la moindre explication sur sa déclaration précédente et que les documents destinés à établir une réparation du système verrouillage de la remorque, l’accusé de réception d’une commande d’un système de fermeture datant du 24 août 2008 et se rapportant à un matériel mis à disposition le 15 novembre 2005 ;

Qu’enfin, l’affirmation que le transporteur était dans l’ignorance de la nature sensible et de la valeur du chargement est démentie les déclarations du chauffeur devant les services de police italiens, celui-ci ayant dit qu’il avait chargé des médicaments de l’ARVENUM 500 en comprimé de 30c, or les intimées ne peuvent et ne sont nullement contredites lorsqu’elles affirment qu’il s’agit de marchandises convoitées par les voleurs et faciles à écouler dans les circuits de commercialisation clandestins, la valeur de la cargaison se déduisant, en outre, de sa nature ;

Que dès lors et même s’il n’avait reçu aucune consigne particulière, le transporteur devait prendre les mesures nécessaires à la sécurité de la marchandise qui lui était confiée et notamment donner instruction à son employé de ne s’arrêter la nuit pour y dormir, que sur l’une des aires effectivement closes, surveillées et gardiennées (notamment celles signalées par l’IRU), étant par ailleurs relevé que tant l’absence de système anti-effraction sur la porte de la remorque du camion, qui de ce fait était 'facile à ouvrir’ comme le choix d’une aire n’offrant aucune mesure de sécurité spécifique suffit à caractériser l’incurie du transporteur et justifie que soit écarté le plafond d’indemnisation de l’article 23-3 de la CMR comme d’ailleurs les dispositions de l’article 1150 du code civil, qui limitent aux E prévisibles l’obligation de réparation du débiteur fautif, la décision déférée devant être confirmée sur ces points et la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY devant réparer l’entier préjudice de la SAS LES LABORATOIRES SERVIER;

Considérant que tenue en vertu de sa police 'marchandises transportées – responsabilité du transporteur', la compagnie D E ne peut s’exonérer de ses obligations à l’égard de la victime et des assureurs subrogés dans les droits de celle-ci au motif qu’elle se serait acquittée de son obligation entre les mains de son assurée alors que celle-ci n’est nullement le bénéficiaire de l’indemnité d’assurance ; que la compagnie D E est donc tenue dans les limites de son contrat ;

Considérant que les intimées réclament une somme totale de 83 472,15€ correspondant à la valeur unitaire (facturée au destinataire) des boites de médicaments volées (4,35€) multipliées par le nombre de manquants (19189), sans application des majorations des articles 8-l-1 et 8-3 des conditions particulières de la police de la GENERALI relatifs à la détermination des valeurs d’assurance ;

Que dès lors, les intimées peuvent légitimement prétendre au paiement de cette somme dans la limite de 82.722,15€ pour les assureurs, la différence (750€) constituant la franchise restée à la charge de la SAS LES LABORATOIRES SERVIER ainsi qu’il ressort de la quittance subrogative ; qu’en application de l’article 27 de la convention CMR, ces sommes porteront intérêts dans les termes retenus par les premiers juges et avec anatocisme, la décision déférée étant réformée afin de prendre en compte la répartition sus-mentionnée;

Considérant que la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY sera condamnée au paiement des sommes sus-mentionnées et la compagnie D E tenue dans les limites de son contrat sera condamnée à ses côtés mais dans la limite de la somme 74 362,94€, compte tenu des franchises contractuelles figurant aux conditions particulières de sa police en cas de vol (20% du sinistre avec un minimum 114€ et un maximum de 762€ applicable en l’espèce) et de faute lourde (10% du montant des E soit en l’espèce, 8347,21€) ;

Considérant que les premiers juges ont fait une juste appréciation des sommes allouées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en première instance; qu’il convient d’allouer une somme de 4000€ aux assureurs intimés et une somme de 1000€ à la SAS LES LABORATOIRES SERVIER , au titre des frais de toute nature que ces parties ont exposés en cause d’appel, en ce compris les frais de traduction, qui ne constituent des dépens que s’ils répondent aux exigences de l’article 695 9e du code de procédure civile ;

Considérant que la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E, parties perdante, seront condamnées aux dépens d’appel ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, le 2 mai 2014 uniquement en ce qu’il condamne in solidum la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E à payer aux sociétés XXX, B C, X I J & Y, K L M A une somme de 83 472,15€ et en ce qu’il a débouté la SAS LES LABORATOIRES SERVIER de sa demande et le confirme pour le surplus ;

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant ;

Déclare la SAS LES LABORATOIRES SERVIER recevable en ses demandes ;

Condamne la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY avec la compagnie D E à payer :

— à la SA XXX, à la SA X I J & Y, à la société K L M A et à la SA XXX (venant aux droits de la société B C) la somme de 82.722,15€ ;

— à la SAS LES LABORATOIRES SERVIER la somme de 750€ ;

Dit que la compagnie D E est tenue in solidum avec la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY dans la limite de la somme principale de 74 362,94€ et, en tant que de besoin, la condamne à payer cette somme aux sociétés sus-mentionnées ;

Dit que les sommes sus-mentionnées portent intérêts au taux de 5% à compter du 29 mai 2008 et ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, celle-ci intervenant le 6 octobre 2010 ;

Condamne in solidum la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E à payer d’une part, aux sociétés ENERALI ASSURANCES, à X I J & Y, K L M A et à XXX la somme de 4000€,

d’autre part, à la SAS LES LABORATOIRES SERVIER la somme de 1000€,

sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SARL d’exploitation des TRANSPORTS DELALOY et la compagnie D E aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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