Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 14 décembre 2017, n° 16/24229

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 8, 14 déc. 2017, n° 16/24229
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/24229
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 16 octobre 2016, N° 16/81984
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 8

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2017

(n° 719/17 , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/24229

Décision déférée à la cour : jugement du 17 octobre 2016 – juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris – RG n° 16/81984

APPELANTE

Association Les Droits des Non-Fumeurs, prise en la personne de son représentant légal Monsieur X Y, président de l’association

[…]

68140 Griesbach-au-Val

représentée par Me Pierre Mairat de la Scp Mairat et Associés, avocat au barreau de Paris, toque : P0252

ayant pour avocat plaidant Me Léa Dominique, avocat au barreau de Paris, toque : P0120

INTIMÉE

Sas Le Brebant, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

N° SIRET : 344 233 424 00029

[…]

[…]

représentée par Me Christian Laroche, avocat au barreau de Paris, toque : B0028

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 novembre 2017, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Emmanuelle Lebée, présidente de chambre, chargée du rapport

Mme Anne Lacquemant, conseillère

M. Gilles Malfre, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Z A

ARRÊT :

—  contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Emmanuelle Lebée, présidente et par M. Z A, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu la déclaration d’appel en date du 1er décembre 2016 ;

Vu les conclusions récapitulatives de l’association Les Droits des Non-Fumeurs (l’association DNF), en date du 06 mars 2017, tendant à voir infirmer le jugement rendu le 17 octobre 2016 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris, statuant à nouveau, liquider l’astreinte ordonnée par la cour d’appel de Versailles dans son arrêt en date du 11 juin 2015 à la somme de 82 200 euros pour la période du 29 juillet 2015 au 12 septembre 2016, condamner la société Le Brébant à payer cette somme à l’association DNF, subsidiairement, liquider l’astreinte à la somme de 81 000 euros pour la période du 29 juillet 2015 au 6 septembre 2016, en tout état de cause débouter la société Le Brébant de l’ensemble des ses demandes, fins et conclusions, condamner la société Le Brébant à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens dont la distraction est demandée ;

Vu les conclusions récapitulatives de la société Le Brébant, en date du 31 juillet 2017, tendant à voir, à titre principal, confirmer le jugement, écarter le constat du 18 février 2016, condamner l’association à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive outre la même somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens';

Pour plus ample exposé du litige, il est fait renvoi aux écritures visées.

SUR CE :

Par arrêt du 11 juin 2015, rendu après cassation, la cour d’appel de Versailles a condamné la société Le Brébant, qui exploite un café à Paris, à payer à l’association DNF les sommes de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts et de 500 euros au titre des frais de procédure et lui a fait injonction de se mettre en conformité avec les dispositions du code de la santé publique et du code du travail relatives à la réglementation et à la protection contre le tabac sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai d’un mois après signification de l’arrêt. Cet arrêt a été signifié le 29 juin 2015.

Le 2 juin 2016, l’association DNF, qui a pour mission reconnue d’utilité publique de lutter contre le tabagisme et d’agir pour le respect de la réglementation qui protège les non-fumeurs, a assigné en justice la société Le Brébant afin que le juge de l’exécution liquide l’astreinte prononcée par la cour d’appel de Versailles le 11 juin 2015 à la somme de 82 200 euros pour la période du 29 juillet 2015 au 12 septembre 2016 et condamne la partie défenderesse à lui payer cette somme, celle de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par jugement en date du 17 octobre 2016, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris a débouté l’association de ses demandes et l’a condamnée à payer une indemnité de procédure. C’est la décision attaquée.

L’association DNF, association reconnue d’utilité publique, dont la qualité et l’intérêt à agir ne sont pas discutés, soutient, à l’appui de son appel, qu’il résulte du procès-verbal de constat dressé le 18

février 2016 que la société Le Brébant n’a pas exécuté l’obligation mise à sa charge par l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, que des personnes continuent de fumer à l’intérieur de la terrasse de l’établissement, close et fermée et que l’astreinte a commencé à courir à compter de 29 juillet 2015.

Elle ajoute que lors du constat du 18 février 2016, aucune signalisation rappelant le principe de l’interdiction de fumer n’était apparente.

La société Le Brébant n’apportant pas la preuve qu’elle s’était mise en conformité tant avec l’injonction qu’avec la législation il convient, selon l’appelante, de liquider l’astreinte à la somme de (point de départ': 29 juillet 2015, date de la liquidation': 12 septembre 2016, date de l 'audience devant le juge de l’exécution = 411 jours x 200 euros = 82.200 euros).

La société Le Brébant lui oppose l’imprécision du constat dressé le 18 février 2016 qui ne précise pas, alors qu’il relève l’absence de cendriers, si les fumeurs exhalent ou non du tabac, le fait qu’elle a été relaxée des poursuites devant le tribunal de police pour les mêmes faits, que l’astreinte portait sur une obligation de ne pas faire qu’elle a exécutée.

Aux termes des articles L 131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, l’astreinte est en principe liquidée par le juge de l’exécution qui "tient compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter". Ainsi, l’astreinte est une menace de condamnation pécuniaire virtuelle qui ne se concrétise qu’en cas d’inexécution ou d’exécution tardive d’une décision de justice exécutoire puisque sa finalité est précisément d’obtenir l’exécution de cette décision. La liquidation de l’astreinte, c’est-à-dire l’évaluation du montant dû par le débiteur récalcitrant ne consiste pas à simplement procéder à un calcul mathématique en multipliant son taux par le nombre d’infractions constatées ou de jours sans exécution mais à apprécier les circonstances qui ont entouré l’inexécution, notamment la bonne ou la mauvaise volonté du débiteur.

En application de l’ article L. 3511-7 du code de la santé publique, interprété à la lumière de l’article 8 de la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte anti-tabac du 21 mai 2003 ratifiée par la France le 19 octobre 2004, il est interdit de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, notamment scolaire, et dans les moyens de transport collectif, sauf dans les emplacements expressément réservés aux fumeurs ; en application de l’article R. 3511-1, 1 o du même code, l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif mentionnée à l’article L. 3511-7 s’applique dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public ou qui constituent des lieux de travail ; il en résulte que la terrasse d’un établissement accueillant du public ne constitue pas un lieu fermé et couvert où s’impose l’interdiction totale de fumer, dès lors que close des trois côtés, elle n’a ni toit ni auvent, ou bien si, disposant d’un toit ou auvent, elle est intégralement ouverte en façade frontale.

L’arrêt de la cour d’appel de Versailles a enjoint, sous astreinte, à l’intimée de se mettre en conformité avec les dispositions du code de la santé publique et du code du travail relatives à la réglementation et à la protection contre le tabac.

Il s’agit donc bien, contrairement à ce qui est soutenu par l’intimée, d’une obligation de faire.

Il lui incombe, en conséquence, de démontrer si elle a exécuté ou non l’obligation mise à sa charge, le cas échéant, de démontrer les difficultés d’exécution qu’elle a rencontrées et sa bonne volonté.

En l’espèce, l’intimée admet que la terrasse qu’elle exploite entre dans le champ d’application des textes relatives à l’interdiction de fumer et soutient qu’elle la respecte et la fait respecter.

Elle produit plusieurs attestations de salariés qui exposent qu’ils ont reçu instruction de leur employeur de ne pas mettre de cendriers sur les tables et de faire respecter l’interdiction de fumer sur

la terrasse.

Ces attestations sont corroborées par le procès-verbal de constat lequel relève, contrairement au constat dressé le 08 janvier 2010 sur la requête de l’association DNF, l’absence de cendrier sur les tables.

Si les attestations des salariés versées aux débats démontrent qu’ils ont reçu instruction de ne pas mettre de cendriers sur les tables et de faire respecter l’interdiction de fumer, l’intimée ne démontre pas, alors qu’elle en a la charge, qu’elle a procédé à l’affichage réglementaire.

Il convient donc, en tenant compte de la bonne volonté de la débitrice, d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de liquider l’astreinte un montant minoré à la somme de 10 euros soit à la somme de ( 10 x 411 jours = 4 110 euros).

Sur les dommages-intérêts':

L’intimée sollicite la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Le droit d’exercer une action en justice ou une voie de recours ne dégénère en abus que s’il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l’appréciation de ses droits. Tel n’apparaît pas le cas en l’espèce.

La demande de dommages-intérêts n’est par conséquent pas justifiée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société Le Brébant qui succombe principalement doit être condamnée aux dépens, déboutée de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à l’appelante une somme de 2 000 euros en application de ces dernières dispositions.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau,

Liquide l’astreinte pour la période du 28 juillet 2015 au 12 septembre 2016 à la somme de 4 110 euros’et condamne la société Le Brébant à payer cette somme à l’association Les Droits des Non-Fumeurs, outre la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile';

Rejette toute autre demande ;

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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