Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 22 juin 2017, n° 16/03114

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 5, 22 juin 2017, n° 16/03114
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/03114
Décision précédente : Tribunal de commerce de Créteil, 28 mai 2012, N° 2009F01042
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRÊT DU 22 JUIN 2017

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/03114

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de Créteil du 29 mai 2012 – RG n°2009F01042

Arrêt de la Cour d’Appel de PARIS – Pôle 5 Chambre 6 – du 9 janvier 2014 – RG n°12/10185

Arrêt Cour de Cassation du 8 septembre 2015 – Arrêt n°732 FS-P+B+I – Pourvoi n°G14-14.208

DEMANDERESSE À LA SAISINE

Madame A Y épouse X

XXX

XXX

née le XXX à

Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistée de Me Jean-Michel BARGIARELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : D2070

DÉFENDERESSE À LA SAISINE

SA CRÉDIT DU NORD

ayant son siège XXX

XXX

N° SIRET : 456 504 851

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par et assistée de Me Christophe BORÉ de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère, faisant fonction de Présidente, chargée du rapport

Madame C D, Conseillère

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère appelée d’une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l’article R.312-3 du Code de l’Organisation Judiciaire,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Cyrielle BURBAN, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCÉDURE

La société Ital Fruit France, représentée par Mme Y épouse X sa gérante, a ouvert un compte courant au Crédit du Nord le 3 septembre 2004 et a obtenu une facilité de caisse par découvert en compte courant ainsi qu’une ligne de crédit de trésorerie permanente qualifiée de crédit de campagne, de 100.000 euros, sous la forme d’un effet de commerce à échéance à un mois, à chaque fois renouvelé.

Le 26 juin 2009, par lettre recommandée avec accusé de réception, le Crédit du Nord a dénoncé toutes les conventions liant les parties et a clôturé le compte de la société Ital Fruit le 31 août 2009.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 septembre 2009, le Crédit du Nord a mis en demeure la société Ital Fruit France de lui payer les sommes restant dues, et a mis en demeure Mme Y épouse X, en sa qualité d’avaliste, de lui payer le montant de 100.000 euros correspondant au dernier effet à échéance au 31 août 2009, resté impayé.

Par jugement en date du 8 octobre 2009, la société Ital Fruit France a été placée en redressement judiciaire.

Autorisé par le juge de l’exécution, le Crédit du Nord a fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens immobiliers appartenant à Mme Y épouse X.

Le 10 novembre 2009, le Crédit du Nord a fait assigner par acte d’huissier Mme Y, épouse X, en sa qualité d’avaliste pour la voir condamner à payer le dernier effet émis par la société Ital fruit France, placée en liquidation judiciaire (TC Paris 2 septembre 2010).

Par jugement en date du 29 mai 2012 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de commerce de Créteil a :

• dit valable l’engagement donné par Mme Y épouse X à la société Ital Fruit France ;

• condamné Mme Y, épouse X, à payer au Crédit du Nord la somme de 100.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2009, les intérêts échus depuis plus d’un an portant eux-mêmes intérêt conformément à l’article 1154 du code civil, à compter du 10 novembre 2009 ;

• condamné Mme Y, épouse X, à payer au Crédit du Nord 2 000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

• débouté le Crédit du Nord du surplus de sa demande ;

• débouté Mme Y, épouse X, de sa demande formée de ce chef.

Mme Y, épouse X, a interjeté appel de cette décision.

Par un arrêt rendu le 9 janvier 2014, la Cour d’appel de Paris a :

• confirmé le jugement déféré ;

Y ajoutant,

• condamné Mme Y épouse X à payer au Crédit du Nord la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

• rejeté toutes autres demandes.

Mme Y, épouse X, a formé un pourvoi en cassation.

Par un arrêt rendu le 8 septembre 2015, la chambre commerciale de la Cour de cassation a :

• cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 janvier 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

• remis, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant le dit arrêt ;

• pour être fait droit, renvoyé les parties devant la cour d’appel de Paris, autrement composée.

Vu la déclaration de saisine après renvoi devant la cour d’appel de Paris de Mme Y en date du 30 janvier 2016 ;

Vu les dernières conclusions signifiées par Mme Y épouse X le 4 mai 2016 par lesquelles il est demandé à la cour de :

• réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

• débouter purement et simplement la banque Crédit du Nord de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

• condamner le Crédit du Nord, à titre de dommages et intérêts, à verser à Mme Y épouse X une somme de 30.000 euros en réparation du préjudice consécutif à l’inscription de deux hypothèques, sur deux immeubles lui appartenant ;

• ordonner en tant que de besoin, la mainlevée desdites hypothèques, à charge du Crédit du Nord, sur :

• l’immeuble situé XXX (référence cadastrale : G- 478) ;

• l’immeuble situé XXX l’Haÿ-les-Roses (référence cadastrale : I-1-I60 ' Lot de copropriété n° 70)

• dire qu’il appartiendra au Crédit du Nord de procéder à cette double mainlevée, dans la quinzaine de la signification de l’arrêt à intervenir ;

• condamner le Crédit du Nord, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à verser à Mme Y, épouse X, une somme de 5 000 euros au titre de son intervention en première instance, et 6 000 euros devant la Cour ;

• condamner le Crédit du Nord en tous les dépens, dont distraction pour ceux d’appel au profit

• de Maître Vignes ' Avocat à la Cour – SCP G.R.V. ' Toque L0010, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société Crédit du Nord le 20 juin 2016 par lesquelles il est demandé à la cour de :

A titre principal

• confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit et jugé valable l’engagement personnel donné par Mme X à la société Ital Fruit France ;

• débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Statuant à nouveau

• dire et juger que la mention d’aval apposée par Mme X vaut engagement personnel et autonome et constitue une promesse de se porter fort de l’exécution de l’engagement de la société Ital Fruit France à rembourser le Crédit du Nord du montant du « Crédit de campagne » ;

• condamner Mme X, dans les mêmes termes que le jugement entrepris, mais sur le fondement des dispositions de l’article 1120 du code civil ;

• confirmer le jugement en ses autres dispositions ;

• débouter, à titre subsidiaire, si la Cour ne faisait pas droit à la demande principale, Mme X de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ;

En tout état de cause,

• débouter Mme X de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

• condamner Mme X à payer au Crédit du Nord la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile et mettre à sa charge les entiers dépens d’appel.

*

* *

Mme Y épouse X soutient que l’aval d’un effet de commerce irrégulier en raison d’un vice de forme dont l’effet de commerce est lui même atteint est nul et ne vaut pas promesse de porte-fort, que les hypothèques inscrites par le Crédit du Nord l’ont été en sûreté d’une créance inexistante, lui causant un trouble de jouissance important de nature à justifier l’octroi de dommages et intérêts d’un montant de 30.000 euros.

Le Crédit du Nord soutient que l’aval porté sur un effet de commerce irrégulier peut être considéré comme un cautionnement ordinaire ou comme un commencement de preuve par écrit d’un cautionnement, dès lors que le cautionnement comporte les mentions manuscrites prescrites par les articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation, qu’en l’espèce, les parties avaient mis en place une véritable pratique contractuelle puisque pas moins de 47 effets de commerce ont été souscrits entre janvier 2005 et juillet 2009 et avalisés par Madame Y, que la qualité de dirigeante de la signataire de l’aval constitue un élément de preuve suffisant à démontrer sa volonté autonome de s’engager pour le compte de sa société débitrice principale, corroboré en l’espèce par la régularité de son engagement, qu’il peut s’analyser en un engagement personnel de porte-fort autonome, qu’en tout état de cause, le Crédit du Nord subit un préjudice que Madame Y s’est personnellement engagée à indemniser.

Il conteste la demande d’indemnisation formulée par Madame Y et rappelle qu’il n’a commis aucune faute, que sa créance avait été valablement déclarée au passif de la société Ital Fruit France et admise par le juge-commissaire, et que c’est en vertu de deux décisions de justice lui ayant donné gain de cause et en application des dispositions du code des procédures civiles d’exécution qu’il a pu convertir son inscription d’hypothèque judiciaire provisoire en inscription définitive sur les immeubles de Mme Y épouse X, que celle-ci n’apporte d’ailleurs pas la preuve d’un quelconque préjudice en lien avec l’inscription de ces sûretés.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Sur ce, la Cour,

Considérant qu’il n’est pas contesté par les parties que l’effet de commerce, à échéance au 31 août 2009 dont Mme Y épouse X se serait portée aval et dont le Crédit du Nord sollicite le paiement, ne comporte qu’un tampon commercial de la société Ital Fruit France qui ne vaut ni signature manuscrite ni signature non manuscrite prescrite par l’article L.511-1 du code de commerce ;

Qu’il est donc irrégulier pour défaut de signature valable du tireur et ne vaut pas lettre de change ;

Considérant de plus que l’aval d’un effet de commerce irrégulier en raison d’un vice de forme est lui-même nul, et ne vaut pas promesse de porte-fort ;

Considérant que si l’aval invalidé pouvait constituer un commencement de preuve d’un cautionnement de dette de la société Ital’Fruit France donné par Mme Y épouse X, un tel cautionnement serait néanmoins nul en l’absence des mentions manuscrites prescrites par la loi ;

Qu’il en résulte que l’aval allégué ne saurait valoir comme aval cambiaire, ni comme cautionnement ou engagement personnel et autonome de porte-fort ;

Qu’en effet, en application de l’article 1120 du code civil, le porte-fort, débiteur d’une obligation de résultat autonome, est tenu envers le bénéficiaire de la promesse des conséquences de l’inexécution de l’engagement promis ;

Qu’une telle promesse ne peut s’appliquer que pour un engagement valable ;

Que l’engagement étant irrégulier, et dès lors nul, l’aval ne saurait valoir promesse de porte-fort ;

Que la demande en paiement du Crédit du Nord fondée sur l’engagement cambiaire de Mme Y épouse X ne peut par conséquent être accueillie ;

Qu’il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris et de débouter la société Crédit du Nord de sa demande ;

Considérant qu’en ce qui concerne la demande reconventionnelle de dommages-intérêts formulée par Madame Y, il appartient à cette dernière de rapporter la preuve de la faute alléguée ;

Que toutefois c’est à l’appui de jugements exécutoires que le Crédit du Nord a inscrit les hypothèques sur les immeubles sis XXX (référence cadastrale : G- 478) et XXX l’Haÿ-les-Roses (référence cadastrale : I-1-I60 ' Lot de copropriété n° 70) ;

Qu’il appartient au juge de l’exécution de prononcer les mainlevées sollicitées ;

Qu’aucune faute ne pouvant être reprochée au Crédit du Nord, il y a lieu de rejeter la demande d’indemnisation formulée ;

Considérant qu’il est inéquitable de laisser à la charge de Mme Y épouse X le montant de ses frais irrépétibles ;

Qu’il convient de condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que le Crédit du Nord, qui succombe, supportera les dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, sur renvoi après cassation,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau,

DÉBOUTE le Crédit du Nord de toutes ses demandes ;

DÉBOUTE Mme Y épouse X de ses demandes reconventionnelles ;

CONDAMNE le Crédit du Nord à payer à Mme Y épouse X la somme de 8.000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE le Crédit du Nord aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Vignes, avocat à la Cour (SCP G.R.V.) Toque L0010, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Conseillère faisant fonction de Présidente

Cyrielle BURBAN Fabienne SCHALLER

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