Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 6, 19 mai 2017, n° 15/22284

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 6, 19 mai 2017, n° 15/22284
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/22284
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Meaux, 31 août 2015, N° 12/05173
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 16 mai 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 19 MAI 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/22284

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Septembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de Meaux – RG n° 12/05173

APPELANT

Monsieur [G] [V]

Né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et ayant pour avocat plaidant Me Pierre-François ROUSSEAU de l’AARPI PHI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0026

INTIMEE

SA CREDIT DU NORD

RCS LILLE 456 504 851

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Ali EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289

Ayant pour avocat plaidant Me Maryvonne EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D0289

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

Mme Muriel GONAND, Conseillère

M. Marc BAILLY, Conseiller

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions de l’article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Mme Josélita COQUIN

ARRET :

— Contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Françoise CHANDELON, président et par Mme Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Meaux du 1er septembre 2015 qui, saisi par l’assignation qu’a fait délivrer le Crédit du Nord à M. [G] [V] le 13 novembre 2012 d’une action en résiliation contractuelle du prêt immobilier qui lui a été consenti a notamment :

— rejeté le demande de M. [G] [V] tendant à voir réputée non écrite la clause 9.1 des conditions générales prévoyant la résolution du contrat au motif qu’elle est abusive,

— condamné M. [G] [V] à payer au Crédit du Nord la somme de 126 005,37 euros avec intérêts au taux conventionnel de 4,30 % à compter du 18 septembre 2012,

— ordonné la capitalisation des intérêts et l’exécution provisoire,

— rejeté les demandes reconventionnelles de M. [G] [V],

— condamné M. [G] [V] à payer au Crédit du Nord la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions en date du 24 janvier 2017 de M. [G] [V], à la suite de l’appel qu’il a interjeté, le 3 novembre 2015, qui fait valoir :

— principalement, que la clause formant l’article 9 du contrat de prêt qui dispose notamment qu’il deviendra immédiatement exigible par anticipation notamment dans le cas de 'fourniture de renseignements inexacts sur la situation de l’emprunteur dès lors que ces renseignements étaient nécessaires à la prise de décision du prêteur’ est nulle pour être abusive au sens de l’article L132-1 code de la consommation en ce qu’elle est déséquilibrée selon la recommandation de la commission des clauses abusives du 30 septembre 2004 comme laissant penser que le prêteur dispose d’un pouvoir discrétionnaire et que l’emprunteur ne peut recourir au juge puisqu’elle est prévue 'de plein droit', qu’elle permet un remboursement anticipé hors l’hypothèse d’impayé, que les éventuelles divergences de jurisprudence justifient que soit sollicité l’avis de la Cour de cassation,

— subsidiairement, que les conditions de la déchéance du terme du contrat qui y sont prévues ne sont pas réunies en ce qu’il n’est ni l’auteur des documents argués de faux ni celui qui les a remis à la banque alors qu’aucun élément n’objective l’existence de faux renseignements fiscaux, que le simple courriel avec la Société Générale affirmant que les relevés de banque ne sont 'pas conformes’ est insuffisant à démontrer que le Crédit du Nord n’aurait pas contracté alors que la plainte pénale déposée par le Crédit du Nord a été classée sans suite le 3 mars 2014 au motif 'auteur inconnu’ mais que l’enquête confirme qu’il est entré en relation avec la banque par un intermédiaire, qu’il est étranger à toute remise de documents falsifiés,

— que le contrôle de ces documents a été fautivement tardif de la part de la banque alors que certaines inexactitudes seraient grossières selon elle en ce qu’il aurait notamment perçu des revenus agricoles alors qu’il exerce l’activité artisanale de couvreur, que c’est ainsi avec mauvaise foi que le contrat est prétendument résolu alors qu’il s’acquitte régulièrement des échéances et que ce contrôle n’est que la conséquence d’une fraude massive interne à la banque que cette dernière cherche à dissimuler, avec participation d’un préposé comme le confirme le jugement du tribunal correctionnel de Bobigny du 2 décembre 2014 qui évoque le laxisme et la complaisance dont la banque a fait montre à l’égard de l’une de ses chargées de clientèle, Mme [I], qui a été précisément la sienne dans le contrat litigieux, la reconnaissance de la confection de faux documents par l’un des complices de celle-ci étant mise en exergue, le silence conservé par la banque sur cette affaire en cours de première instance étant coupable, d’autant qu’il avait sollicité un sursis à statuer,

— que ses revenus sont bien équivalents à ceux revendiqués et ont permis le paiement des échéances en toute bonne foi,

— que la demande tendant au prononcé de la nullité du prêt pour dol est irrecevable comme nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile, d’autant que le Crédit du Nord n’a pas formé appel incident et qu’il ne s’agit pas d’une défense au fond de nature à contredire ses propres demandes reconventionnelles puisqu’à la supposer admise, elle aurait des effets plus larges dès lors que les conséquences d’une nullité ou d’une déchéance du terme ne sont pas les mêmes, alors précisément que la banque invoque l’article 565 du code de procédure civile qui est bien relatif à de nouvelles prétentions,

— que le dol ne peut être utilement invoqué alors qu’il n’est pas l’auteur des prétendus faux documents qui ont été reçus avec complaisance par la préposée du Crédit du Nord qui connaissait leur nature mensongère,

— à titre reconventionnel, que la stipulation du TEG dans l’offre de prêt ne respecte pas les dispositions des articles L312-8 et L313-1 code de la consommation puisque deux calculs sur simulateurs donnent des résultats supérieurs, soit de 5,19 % soit de 5,185 % alors que la souscription d’une assurance était une condition de l’octroi du prêt conformément à l’article 5.1 des conditions générales, la somme à restituer s’élevant à 21 063,22 euros, de sorte qu’il demande à la cour :

— de déclarer irrecevable comme nouvelle la demande du Crédit du Nord tendant au prononcé de la nullité du contrat pour dol,

— d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

— principalement, de constater le caractère abusif de l’article 9 du contrat de prêt et de débouter la banque de toutes ses demandes,

— à titre reconventionnel, de prononcer la nullité de la clause d’intérêts conventionnels, de prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la banque, et, en conséquence, de condamner la banque à lui restituer la somme de 24 063,22 euros,

— de condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme de 4 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions de la société Crédit du Nord en date du 23 janvier 2017 qui expose :

— que la clause 9.1 des conditions générales du contrat de prêt n’est pas abusive puisque la résolution stipulée est conditionnée par la fourniture de renseignements confidentiels erronés portant sur une caractéristique essentielle pour la conclusion d’un crédit, qu’en l’espèce, les relevés bancaires n’ont pas été reconnus conformes par la Société Générale et que les avis d’imposition ne sont pas plus sincères, M. [V] n’ayant jamais justifié de leur authenticité, sa déclaration de revenus étant de 14 719 euros et non de 30 691 euros comme figurant dans le document remis à la banque, ses revenus mensuels étant de 1 200 euros non susceptibles d’entraîner l’octroi d’un crédit de nature à l’endetter à hauteur de 60 %, de sorte qu’elle est bien fondée à sa prévaloir de la clause de déchéance du terme, M. [V] ayant nécessairement participé à la fraude en signant l’offre de prêt et en renvoyant la fiche de renseignements inexacts sur sa situation comme le montrent les courriels de la Société Générale qui suffisent à cet égard, que les revenus perçus par lui de la CAF corroborent ces éléments inexacts,

— qu’en l’état de cette fourniture délibérée de renseignements inexacts, il ne peut utilement rechercher la responsabilité de la banque qui n’était pas tenue à des diligences particulières au vu de ses déclarations,

— que M. [V] ne peut se retrancher derrière le jugement correctionnel du 2 décembre 2014 et l’intervention d’un intermédiaire qui aurait participé à la fraude pour s’exonérer alors qu’en signant l’offre de prêt, il est le seul responsable des documents versés à l’appui de sa demande, sans qu’importe l’identité des auteurs des faux,

— qu’en tout état de cause, la production de faux serait constitutive d’un dol au sens de l’article 1116 du code civil et donc du prononcé de la nullité du contrat en vertu de son article 1137 nouveau, que cette demande n’est pas nouvelle mais constitue un nouveau moyen de droit en défense au sens des article 71 et 72 du code de procédure civile qui peut être soutenu pour la première fois en appel et alors qu’en vertu de l’article 565 du code de procédure civile, elle tend aux mêmes fins que les demandes déjà formulées,

— que la nullité de la stipulation d’intérêts ou la déchéance de ce droit à raison du TEG de 5,069 % mentionné dans l’offre sont injustifiées dès lors que les calculs proposés ne reprennent pas toutes les composantes du TEG notamment de frais de dossier et de constitution de garantie et sont donc dépourvus de force probante, de sorte qu’il demande à la cour :

— de confirmer le jugement déféré,

— subsidiairement, de prononcer la nullité du contrat pour dol et de condamner, en conséquence, M. [V] à lui payer la somme de 120 000 euros avec intérêts au taux légal,

— de condamner M. [V] à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 24 janvier 2017 ;

SUR CE

L’article L132-1 code de la consommation, codifié désormais à l’article L212-1, répute non écrite les clauses ainsi définies 'dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat'.

L’article 9.1 des conditions générales du contrat de prêt du Crédit du Nord prévoit qu’il deviendra 'immédiatement et de plein droit exigible par anticipation sans que le Prêteur ait à remplir une formalité judiciaire quelconque’ notamment dans le cas de 'fourniture de renseignements inexacts sur la situation de l’emprunteur dès lors que ces renseignements étaient nécessaires à la prise de décision du prêteur'.

Il y a lieu de relever, premièrement, que cette stipulation limite expressément la faculté de prononcer l’exigibilité anticipée d’un prêt non à la fourniture de renseignements inexacts sur un élément quelconque de la situation de l’emprunteur mais seulement sur l’un de ceux déterminant du consentement du prêteur dans l’octroi du crédit.

Deuxièmement, la faculté que se réserve la banque de prononcer cette exigibilité sans recours préalable au juge – qui n’a pas été mise en oeuvre en l’espèce puisque c’est la banque qui est demanderesse à l’instance après la prise d’une hypothèque judiciaire provisoire- ne prive en rien l’emprunteur d’y recourir, quant à lui pour faire juger que l’application de la clause est injustifiée.

En conséquence et compte tenu de ces limites, cette stipulation – qui sanctionne l’obligation de contracter de bonne foi, existante au moment de la souscription du prêt litigieux et désormais expressément prévue à l’article 1112 nouveau du code civil – ne créé pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et ne revêt, in abstracto, pas un caractère abusif au sens de la disposition ci-dessus.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande tendant à voir déclarer cette clause non écrite, sans qu’il soit besoin de solliciter l’avis de la Cour de cassation sur cette question, qui n’est pas nouvelle.

S’agissant du caractère inexact des renseignements fournis, c’est à juste titre que le tribunal a retenu que la réponse apportée au Crédit du Nord par l’employé de la Société Générale, préposé à la lutte anti-blanchiment, selon laquelle 'les relevés joints à ta demande de vérification pour l’ent(reprise) [G] [V] ne sont pas conformes’ suffisent à caractériser l’inexactitude desdits relevés, alors que l’affirmation d’un préposé du Crédit du Nord selon lequel les avis d’imposition sont également inexacts en ce qu’il aurait déclaré, en 2011 au titre de l’année 2010, des revenus de 14 719 euros au lieu de 30 691 euros n’est pas contredite par M. [V], auquel il est loisible de verser ces documents certifiés conformes aux débats.

Or, il n’est pas contestable que les relevés bancaires de M. [V] sur lesquels étaient versés les revenus professionnels issus de son activité d’entrepreneur en couverture ramonage étaient essentiels à l’appréciation de sa solvabilité, de son endettement et donc nécessaires à la prise de décision de la banque quant à l’octroi du prêt.

La circonstance que M. [V], qui aurait eu recours à des intermédiaires mis en cause dans le cadre d’une procédure pénale ayant conduit au jugement du tribunal correctionnel de Bobigny du 2 décembre 2014, ne serait pas l’auteur matériel et principal des falsifications de documents est indifférente dès lors qu’il ne conteste pas les avoir transmis à la banque ou un mandataire, dont il doit répondre, pour son compte, étant observé que la préposée de la banque, poursuivie mais du chef d’autres dossiers d’emprunteur puisque le nom de M. [V] ne figure pas en procédure, a été renvoyée des fins des poursuites,

En tout état de cause, l’éventuelle participation d’un préposé du Crédit du Nord à une infraction pénale en lien avec les faits litigieux ne saurait permettre à ceux qui en ont bénéficié d’opposer ce fait à la banque, qui en a été victime, pour échapper à leurs obligations et la fourniture, à tout le moins pour le compte de l’appelant qui a signé, de documents inexacts ne permet pas à l’appelant de se prévaloir d’une négligence du Crédit du Nord, pour tardiveté dans l’examen des pièces produites, à propos desquelles, au demeurant, elle n’était astreinte à aucune vérification particulière.

En conséquence, c’est à juste titre que le tribunal a estimé fondé le prononcé de la déchéance du terme entraînant, selon l’article 9.2 des conditions générales du contrat, l’exigibilité anticipée des sommes dues en capital et intérêts échus avec intérêts au taux conventionnel, outre 7 % de la créance à titre d’indemnité.

L’article L312-8 du code de la consommation, dans sa version alors applicable issue de la loi du 12 avril 1996, impose notamment l’indication, dans l’offre de prêt 'outre le montant du crédit susceptible d’être consenti et, le cas échéant, celui de ses fractions périodiquement disponibles, son coût total, son taux défini conformément à l’article L.313-1 ainsi que, s’il y a lieu, les modalités de l’indexation', le TEG défini conformément à cette disposition devant comporter, outre les intérêts 'les frais, les taxes, les commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, supportés par l’emprunteur y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du prêt, même si ces frais, commission ou rémunérations correspondent à des débours réels'.

La charge de la preuve de l’inexactitude du TEG retenu et indiqué de 5,069 % repose sur M. [G] qui ne la rapporte pas au moyen de simples captures d’écrans de deux simulations effectuées sur des calculateurs en ligne, radicalement impropres à établir la réalité du calcul.

En conséquence de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres demandes, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de condamner M. [G] [V] aux dépens d’appel ainsi qu’à payer au Crédit du Nord la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M. [G] [V] à payer à la société Crédit du Nord la somme de 1000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [V] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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