Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 23 mai 2018, n° 16/15219

  • Locataire·
  • Préjudice·
  • Immeuble·
  • Expert·
  • Dégât des eaux·
  • Procédure civile·
  • État·
  • Application·
  • Partie commune·
  • Jugement

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 2, 23 mai 2018, n° 16/15219
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/15219
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 6 juin 2016, N° 14/12338
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 2

ARRÊT DU 23 MAI 2018

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/15219

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juin 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/12338

APPELANT

Monsieur E B

né le […] à […]

domicilié chez son gérant locatif, l’AGENCE DES CHAMPS ELYSEES, SAS au capital de 60 000 €, dont le siège social est au […] ' […]

[…]

représentée par son Président domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représenté par Me Philippe LASSERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0598

Ayant pour avocat plaidant Me Gauthier CHEVALIER, avocat au barreau de PARIS, toque: D671

,

INTIMES

Monsieur G X

né le […] à […]

[…]

[…]

Madame H I épouse X

née le […] à PONDICHERY

[…]

[…]

Représentés par Me Sandrine D, avocat postulant et plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque : B0966

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Muriel PAGE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

M. Frédéric ARBELLOT, Conseiller

Mme Muriel PAGE, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. Q R-S

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Jean-Loup CARRIERE , président et par M. Q R-S, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

FAITS & PROCÉDURE

Le 6 novembre 1992, Mme H I épouse X et M. G X (ci-après M. et Mme X) ont acquis un appartement au rez-de-chaussée de l’immeuble, soumis au statut de la copropriété, […].

M. E B est également propriétaire de plusieurs lots dont le lot n°7, occupé par Mme Z au premier étage situé au dessus de l’appartement de M. et Mme X.

Ces derniers se sont plaints d’infiltrations depuis 2005.

A l’initiative de la copropriété, Mme A a été désignée en qualité d’expert le 2 novembre 2011 et a déposé son rapport le 23 octobre 2013.

M. et Mme X sont intervenus volontairement dans le cadre des opérations expertales.

Mme A a déposé son rapport le 23 octobre 2013.

Par jugement rendu le 5 mai 2015, le tribunal de grande instance de Paris a déclaré M. E B responsable des infiltrations affectant les parties communes et l’a condamné à indemniser le préjudice subi par le syndicat des copropriétaires.

M. et Mme X ont saisi le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir condamner M. E B à leur verser les sommes suivantes :

—  23.625 €, arrêtée au 30 mars 2014, au titre de l’indemnisation de leur préjudice tiré de l’absence de perception de tout loyer entre juillet 2010 et mars 2014, outre les intérêts au taux légal à compter de l’assignation

—  3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 7 juin 2016 ce tribunal a :

— jugé M. E B responsable des infiltrations dans l’appartement de M. et Mme X dans l’immeuble […],

— condamné M. E B à payer à M. et Mme X les sommes suivantes :

* 22.000 € au titre du préjudice de jouissance d’août 2010 à mars 2014

* 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile

— rappelé que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement

— débouté les parties du surplus de leurs demandes

— condamné M. E B aux dépens

— autorisé Maître M N de la SELARL Roine & associés, avocat, à recouvrer directement contre ce dernier les dépens qu’il a avancés sans recevoir provision,

— ordonné l’exécution provisoire.

M. E B a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 11 juillet 2016.

Suivant ordonnance en date du 7 mars 2018, le conseiller de la mise en état, saisi d’un incident de communication de pièces, a rejeté l’ensemble des demandes de M. E B et l’a condamné aux dépens de l’incident, recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La procédure devant la cour a été clôturée le 14 mars 2018.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions signifiées le 9 mars 2018, par lesquelles M. E B, appelant, invite la cour, au visa des articles 1240 et suivants, 1345 et suivants, 1353 et suivants du code civil et 700 du code de procédure civile, à:

— infirmer le jugement,

— débouter M. et Mme X de leurs demandes, fins et conclusions,

— condamner M. et Mme X aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 5.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— à titre subsidiaire, ramener le quantum du préjudice allégué par M. et Mme X à la somme

de 11 016 € (459 € x 24 mois),

— à titre très subsidiaire, constater que l’appartement était au 12 décembre 2012 en parfait état et ramener le quantum du préjudice allégué par M. et Mme X à la somme de

13.311 € (459 € x 29 mois), correspondant à la période d’août 2010 à décembre 2012 ;

Vu les conclusions signifiées le 8 février 2018, par lesquelles M. et Mme X, demandent à la cour, au visa des articles 9 de la loi du 10 juillet 1965 et 1240 du code civil, de :

— confirmer le jugement,

— y ajoutant, condamner M. B aux dépens, ainsi qu’à leur payer la somme de 5.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Les moyens soutenus par les parties ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu’il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d’une discussion se situant au niveau d’une simple argumentation ;

Il convient seulement de souligner et d’ajouter les points suivants :

Sur l’origine des désordres et la responsabilité

Aux termes de l’article 9 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ;

En application de l’article 544 du code civil, l’exercice du droit de propriété, même sans faute, est générateur de responsabilité lorsque le trouble qui en résulte pour autrui dépasse la mesure des obligations ordinaires du voisinage ;

M. E B fait valoir que les constats amiables de dégâts des eaux établis exclusivement par M. X et Mme Z, sa locataire, lui sont inopposables, outre qu’il n’a pas été défaillant dans l’exécution de ses obligationsc;

M. et Mme X soutiennent que ces constats sont opposables à M. E B, lequel n’a pas assuré le bon entretien de ses installations et parties privatives ;

En l’espèce, quatre constats amiables de dégâts des eaux ont été signés entre Mme Z, locataire de M. E B et M. X, le premier en 2005 faisant état d’une fuite en provenance de l’évacuation de l’évier de Mme Z provoquant la chute de gouttes d’eau au plafond de la salle de bain de M. et Mme X, le second en 2008 mentionnant une fuite d’eau à raison d’une goutte par seconde provenant de deux endroits du plafond et apparition de lignes de fissures au plafond de la salle de bain de M. et Mme X, le troisième en 2009 mentionnant une fuite de la machine à

laver de Mme Z due à l’alimentation d’eau débranchée, enfin le quatrième en février 2010, portant mention d’une fuite d’eau à plusieurs endroits au niveau du plafond de la salle de bain de M. et Mme X;

En 2008, la société Ravier-Ruffin, chargée de rechercher l’origine de la fuite entre l’appartement de M. et Mme X au rez-de-chaussé et celui du premier étage, établit un rapport simplifié d’intervention, aux termes duquel est préconisée une recherche de fuite destructrice sous le bac à douche de l’appartement du premier étage, aucune fuite apparente n’ayant été détectée dans la cuisine;

En mars 2010, la société LDC procède également à une recherche de fuite chez M. B et fait mention de la dépose du carrelage au mur et sur le contour du bac à douche outre de la dépose du bac à douche suite à son intervention, et fait état d’un problème d’étanchéité au niveau du carrelage ainsi que le contour du bac à douche;

M. E B ne justifie de la réalisation de travaux de rénovation de la salle de bain qu’au cours de l’année 2005 ;

Il ne justifie pas s’être heurté au refus de sa locataire de laisser l’accès à l’appartement pour faire exécuter les travaux à compter de 2010 ;

Dans son rapport d’expertise de 2013, Mme A indique s’agissant de l’appartement de M. E B : 'l’absence de travaux récents nous force à dire que l’appartement était dans un état insalubre';

Elle relève différents désordres affectant les installations sanitaires de cet appartement , notamment celles de la cuisine, pièce située au dessus de la salle de bain de M. et Mme X;

Il est notamment mentionné une fuite provenant de la chaudière, que le siphon est fuyard, le sol sous l’évier trempé, le mur sous l’évier gorgé d’eau, le joint périphérique de l’évier détérioré, les joints de la faïence en crédence défectueux, le tuyau en cuivre qui traverse la cloison de la salle de bain pour alimenter l’évier et la chaudière fuyard, l’allège de la fenêtre gorgée d’eau;

Il est également constaté par Mme A une cassure de la poutre du plancher haut de l’appartement de M. et Mme X, favorisée par l’eau présente en permanence;

L’expert indiquant que le plancher haut de la salle de bain de M. et Mme X, y compris son plafond a été humidifié par la cuisine non conforme de l’appartement de M. E B;

Mme A conclut en son rapport à la non-conformité de l’étanchéité des pièces d’eau de l’appartement de M. E B;

Dès lors, la responsabilité de M. E B est engagée même sans faute, du fait des infiltrations provenant de son appartement, sans qu’il ne puisse se retrancher derrière la responsabilité de sa locataire, à charge pour lui de se retourner le cas échéant contre elle, comme l’ont dit les premiers juges;

Le jugement entrepris sera confirmé en ce que M. E B a été jugé responsable des infiltrations dans l’appartement de M. et Mme X dans l’immeuble situé […];

Sur le préjudice subi par M. et Mme X

La réparation du préjudice doit être intégrale ;

M. E B fait valoir que M. et Mme X ne démontrent ni la réalité de leur préjudice, ni les caractères certain, direct et actuel du préjudice prétendu ;

Il fait valoir que le bien n’est toujours pas loué alors que les travaux sont achevés depuis avril 2014, qu’à la date du 4 décembre 2012, une estimation de la valeur de l’appartement a relevé le bon état, voire le très bon état du logement, que les désordres n’ont affecté que la salle de bain, que le congé du locataire versé aux débats n’est pas probant, que l’absence de location est due au mauvais état de l’immeuble;

M. et Mme X font valoir quant à eux que le départ de leur locataire en juin 2010 est consécutif à l’absence de travaux réalisés dans leur appartement du fait de l’absence de réparation des infiltrations provenant de l’appartement de M. E B, que depuis ils n’ont pu relouer leur bien ;

En l’espèce, il est produit aux débats le contrat de bail signé le 31 mars 2010, entre M. et Mme X et Mme O P, ainsi que les trois premières quittances de loyer, outre le congé donné par la locataire à effet au 26 juillet 2010 ;

Ce congé mentionne expressément que le départ des lieux est surtout lié au fait que les travaux dans l’appartement n’ont pas été réalisés comme il lui avait été indiqué au moment de la signature du bail ;

Il convient de rappeler ainsi que l’ont justement relevé les premiers juges que le contrat de bail a été conclu après le dégât des eaux survenu le 25 janvier 2010 ayant causé des infiltrations au plafond de la salle de bain et pour lequel il n’est justifié d’aucuns travaux entrepris par M. E B ;

Postérieurement, durant les opérations d’expertises qui se sont déroulées en 2012 et 2013 avec notamment l’examen des lieux le 17 avril 2013 et l’observation de la structure du plancher haut du rez-de-chaussée, partie située dans la salle de bain de M. et Mme X le 18 juillet 2013, ont été relevés les désordres rendant impropres à la location le logement des intimés ;

Ces désordres sont liés essentiellement aux infiltrations et mauvais état de la poutre du plancher haut, comme en témoignent les photographies reproduites dans le rapport d’expertise en page 16 ;

Il a été vu en effet que Mme A, expert judiciaire, a constaté une cassure de la poutre du plancher haut de l’appartement de M. et Mme X, favorisée par l’eau présente en permanence ;

L’expert a précisé que la poutre en question est une solive d’enchevêtrure sur laquelle s’appuient les linçoirs (ou chevêtres) qu’il s’agit d’une pièce importante ;

Les travaux de réfection préconisés par l’expert pour remédier aux désordres sont les suivants (page 20 du rapport) :

— purge plâtre

— réparation poutre

— réfection peinture murs et plafonds, pour un coût total de 5.748, 26 € HT;

Il ressort du procès-verbal de réception des travaux que la remise en état du logement de M. et Mme X (salle d’eau – séjour) a été achevée le 2 avril 2014 ;

Dès lors, c’est à juste titre que les premiers juges ont retenu la période d’indemnisation de M. et Mme X d’août 2010, date du départ de leur locataire, à mars 2014, date d’achèvement des travaux

de réfection ;

Concernant les désordres affectant les parties communes et les travaux votés par l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble qui s’est tenue le 30 juillet 2015, il convient de constater que ces désordres ont été mis à jour à la suite d’une campagne de sondage effectuée par M. C, architecte de l’immeuble, postérieurement à la période d’indemnisation de M. et Mme X (courrier du syndic du 1er juillet 2015) ;

Il ressort en outre du procès-verbal de l’assemblée générale du 30 juillet 2015, que la reprise du plafond préconisée dans l’appartement de M. et Mme X est totalement différente des travaux réalisés il y a deux ans dans le cadre de la procédure B ;

Dès lors, sur la période d’indemnisation de M. et Mme X, seule la responsabilité de de M. E B est engagée ;

Par ailleurs, s’agissant de l’estimation réalisée par l’agence Etude Sinclair, il convient de constater que cette évaluation de la valeur locative a été transmise à l’expert au cours de ses opérations, afin de chiffrer le préjudice de M. et Mme X (dire de Maître D du 1er octobre 2013);

Dès lors, il ne peut être retenu que cette évaluation démontre que dès le mois de décembre 2012, l’appartement de M. et Mme X avait été refait à neuf et ce alors que les travaux préconisés par l’expert, sur la poutre du plancher haut, n’avaient pas été encore réalisés ;

Cette estimation démontre en revanche la volonté certaine de M. et Mme X de louer leur bien, outre fait état d’une valeur locative comprise entre 550 € et 600 € mensuel charges comprises ;

Le contrat de bail du 31 mars 2010 prévoyait quant à lui un loyer mensuel de 500 € outre une provision sur charges mensuelle de 50 € ;

Le jugement doit donc être confirmé confirmé en ce qu’il a évalué le préjudice subi par M. et Mme X à la somme de 22.000 €, correspondant à la perte de loyers entre le mois d’août 2010 et le mois de mars 2014 ( 500 € x 44 mois) ;

La coupure de l’alimentation en eau de l’appartement de M. E B en mars 2012 n’apparaît pas devoir justifier une réduction de la période d’indemnisation, le moyen est inopérant au regard des désordres constatés;

Sur les dépens et l’application des articles 700 du code de procédure civile et 10-1 de la loi du 10 juillet 1965

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l’application qui y a été équitablement faite des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

M. E B, partie perdante, doit être condamné aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à M. et Mme X, la somme supplémentaire de 2.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l’article 700 du code de procédure civile formulée par M. E B;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M. E B aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à M. et Mme X la somme supplémentaire de 2.000 € par application de l’article 700 du même code en cause d’appel ;

Rejette toute autre demande ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 23 mai 2018, n° 16/15219