Cour d'appel de Paris, Pôle 6 chambre 5, 12 avril 2018, n° 16/11682

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 5

ARRET DU 12 AVRIL 2018

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/11682

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juillet 2016 -Conseil de prud’hommes – Formation de départage de BOBIGNY – RG n° F14/01190

APPELANT :

Monsieur [K] [M]

Demeurant [Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Sandrine BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0709

INTIMEE :

SA AIR FRANCE

Sise [Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Février 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle MONTAGNE , Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, Présidente,

Monsieur Stéphane MEYER, Conseiller,

Madame Isabelle MONTAGNE, Conseillère,

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Marine BRUNIE, lors des débats

ARRET :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Marie-Bernard BRETON, président et par Mme Marine BRUNIE, greffier présent lors du prononcé.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 26 février 1999, [K] [M] a été engagé par la société Air France en qualité de personnel navigant commercial pour exercer les fonctions de steward.

Par lettre du 10 septembre 2013, il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 2 octobre 2013, avec mise à pied à titre conservatoire avec solde à compter du 12 septembre 2013.

Par lettre du 17 octobre 2013, il a été convoqué à la réunion fixée le 12 novembre 2013 du conseil de discipline chargé d’émettre un avis sur la proposition de sanction conformément aux dispositions du règlement intérieur.

Par lettre du 25 novembre 2013, il a été licencié pour faute grave.

Le 3 mars 2014, il a saisi le conseil de prud’hommes de Bobigny afin d’obtenir sa réintégration et diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail.

Suivant jugement prononcé le 29 juillet 2016, notifié le 22 août 2016, cette juridiction a débouté le salarié de toutes ses demandes. Celui-ci a régulièrement relevé appel de ce jugement le 20 septembre 2016.

Suivant conclusions signifiées par le Rpva pour l’audience du 27 février 2018, l’appelant demande à la cour d’infirmer le jugement, condamner la société intimée à lui payer les sommes suivantes :

* 5.033,66 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 503,36 euros au titre des congés payés y afférents,

* 33.158,32 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

— ordonner sa réintégration dans ses fonctions de personnel navigant commercial et condamner la société intimée à lui payer les sommes suivantes :

* pour la période du 20 décembre 2013 au 31 octobre 2016 : 23.744,40 euros,

* du 1er novembre 2016 jusqu’à la date de sa réintégration, une indemnité journalière nette de 51,93 euros,

— à titre subsidiaire, la condamner à lui payer à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 91 000 euros,

outre 4.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions signifiées par le Rpva pour l’audience du 27 février 2018, la société intimée demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter l’appelant de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l’audience, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur le licenciement

Il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n’a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement, que la faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible la poursuite de l’exécution du contrat de travail entre les parties et rend nécessaire le départ immédiat du salarié de l’entreprise sans indemnités.

L’employeur qui invoque une faute grave doit en rapporter la preuve alors même que l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

La lettre de licenciement est ainsi rédigée : 'Le 28 août 2013, la Division est informée par le chef d’escale d'[Localité 1] d’un événement mettant en cause un PNC d’Air France. En effet la Direction de l’hôtel Pôlat Renaissance, où sont hébergés les équipages, nous signale l’implication d’un PNC dans la disparition du portefeuille d’un client de l’hôtel. Vous avez été identifié sur les images de la vidéo de l’hôtel. Le 12 septembre 2013 lors de la consultation de votre dossier de sanction, vous avez reconnu avoir pris le portefeuille du client. Ces faits constituent un manquement grave à vos obligations professionnelles en terme de comportement et d’attitudes générales et portent atteinte à l’image de la Compagnie et du métier de PNC auprès du client lésé et de l’hôtelier'.

En premier lieu, l’appelant fait valoir que l’employeur ne justifierait pas de la régularité de la procédure conventionnelle sur l’exacte et réelle information et consultation des délégués du personnel du collège auquel il appartient.

Le règlement intérieur de la société Air France organise une procédure disciplinaire propre aux personnels navigants, prévoyant, sauf opposition du salarié, la tenue d’un entretien préalable précédé d’une information écrite des délégués du personnel titulaires de l’établissement et du collège auquel appartient le salarié, et la possibilité pour ceux-ci de faire part d’observations écrites avant l’entretien préalable, ainsi que la consultation d’un conseil de discipline, organe paritaire, chargé d’examiner les propositions de sanctions du second degré à l’encontre des salariés présentant une ancienneté de plus de six mois.

La société Air France produit aux débats une note datée du 20 septembre 2013 intitulée 'information relative à la procédure disciplinaire du second degré engagées à l’encontre de Monsieur [K] [M]' sollicitant des observations éventuelles avant le 2 octobre 2013, qu’elle indique avoir affichée dans les locaux de l’entreprise, remise aux délégués du personnel de l’entreprise dans leurs casiers et adressée par télécopie avec accusé de réception aux organisations syndicales dont relevait chaque délégué du personnel ; elle produit les accusés de réception des envois par télécopie datés des 23 septembre 2013. Elle justifie ainsi suffisamment avoir respecté les dispositions mises à sa charge par le règlement intérieur quant à l’information écrite des délégués du personnel préalablement à l’entretien préalable. En outre, l’employeur justifie avoir régulièrement respecté l’ensemble de la procédure conventionnelle prévue.

Par ailleurs, l’appelant fait valoir que le fait unique qui lui est reproché n’aurait pas été commis dans le cadre professionnel mais ressortirait de sa vie personnelle et que le motif visé par la lettre de licenciement serait imprécis.

Toutefois, il n’est pas contesté que les faits, dont l’appelant ne conteste pas la matérialité, ont été commis dans un hôtel d'[Localité 1], partenaire commercial de la société Air France, qui y avait réservé à ses frais des chambres pour le salarié et ses collègues, membres de l’équipe navigante d’Air France dans laquelle il était affecté, pendant le temps d’une escale avant de reprendre leurs fonctions ; en outre la direction de l’hôtel a signalé directement les faits à la société Air France et a ainsi clairement identifié l’auteur des faits comme un salarié de cette société ; ces circonstances suffisent à retenir que ces faits se rattachent à la vie professionnelle du salarié.

Alors que le contrat de travail impose au salarié une obligation de loyauté à l’égard de l’employeur et le règlement intérieur de la société dans la rubrique 'attitude générale’ prévoit une obligation de discipline, de conscience professionnelle, de bonne tenue et de discrétion, la lettre de licenciement en reprochant au salarié 'un manquement grave à vos obligations professionnelles en terme de comportement et d’attitudes générales’ ainsi que d’avoir porté 'atteinte à l’image de la Compagnie et du métier de PNC auprès du client lésé et de l’hôtelier’ a précisément et suffisamment énoncé les manquements aux obligations contractuelles découlant de l’exécution du contrat de travail reprochés au salarié.

Enfin, l’appelant soutient que la sanction serait disproportionnée aux faits commis compte tenu de son ancienneté, du remboursement des 1.800 dollars se trouvant dans le portefeuille du client et de l’absence de publicité donnée aux faits.

Cependant, l’examen des correspondances entre l’hôtel et les correspondants d’Air France à [Localité 1] démontrent que si les faits, susceptibles de recevoir une qualification pénale, n’ont pas fait l’objet d’une procédure pénale, c’est en raison de l’intervention de la société Air France, le client ayant en effet conditionné le non dépôt d’une plainte à une réaction rapide de la société Air France.

En outre la cour relève que le salarié n’a pas spontanément reconnu les faits commis le 23 août 2013 ; ce n’est en effet qu’après avoir consulté son dossier disciplinaire le 12 septembre 2013 qu’il a admis, après avoir contesté les faits dans un premier temps, avoir dérobé le portefeuille qu’un client se trouvant devant lui, avait oublié sur le comptoir de l’hôtel, s’être emparé des billets se trouvant à l’intérieur puis avoir jeté le portefeuille, retrouvé ultérieurement dans des toilettes ; le salarié n’a pas non plus spontanément et immédiatement procédé au virement bancaire de la somme volée dans le portefeuille, puisque l’ordre de ce virement en faveur du client victime du vol n’a été signé de sa part que le 8 octobre 2013.

Dès lors, la mesure de licenciement pour faute grave n’apparaît pas disproportionnée au regard de la gravité des faits commis par le salarié.

Il résulte de tout ce qui précède que le licenciement pour faute est fondé. Les demandes de l’appelant seront rejetées.

Sur les frais irrépétibles

Il n’apparaît pas inéquitable de condamner l’appelant qui succombe en ses demandes à payer à la société intimée la somme de 500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement de départage prononcé par le conseil de prud’hommes de Bobigny le 29 juillet 2016,

CONDAMNE [K] [M] à payer à la société Air France la somme de 500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes,

CONDAMNE [K] [M] aux dépens exposés en cause d’appel.

Le greffier Le président

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Textes cités dans la décision

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