Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 5, 4 juillet 2019, n° 17/13577

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Chronologie de l’affaire

Commentaires6

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Me Murielle-isabelle Cahen · consultation.avocat.fr · 22 novembre 2023

Si le fournisseur est libre de refuser de vendre ses produits ou services, il est toutefois dans l'obligation de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour l'exercice de son activité professionnelle, a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 28 septembre 2022. Selon l'article L441-1 du Code du Commerce : I. - Les conditions générales de vente comprennent notamment les conditions de règlement, ainsi que les éléments de détermination du prix tels que le barème des prix unitaires et …

 

www.murielle-cahen.fr · 19 octobre 2022

Si le fournisseur est libre de refuser de vendre ses produits ou services, il est toutefois dans l'obligation de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour l'exercice de son activité professionnelle, a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 28 septembre 2022. NOUVEAU : Utilisez nos services pour faire rédiger vos cgv en en passant par le formulaire ! Il est préférable pour un fournisseur de refuser de vendre plutôt que de refuser de communiquer ses conditions générales de vente …

 

Vincent Téchené · Lexbase · 6 octobre 2022
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 5, 4 juill. 2019, n° 17/13577
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/13577
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 16 septembre 2015, N° 16/09611
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 12 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRÊT DU 4 JUILLET 2019

(n° , 21 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/13577 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B3JTF

Sur renvoi après un arrêt de la Cour de cassation (Chambre commerciale) en date du 29 mars 2017 ( N° Q 15-27.811) entraînant la cassation partielle d’un arrêt rendu le 17 septembre 2015 par la cour d’appel de PARIS ( Pôle 5- Chambre 5) sous le numéro RG 13/08258 ( rectifié par un arrêt du Pôle 5- Chambre 5 de la cour d 'appel de PARIS en date du 06 octobre 2016 sous le RG 16/09611) suite à un appel portant sur un jugement rendu le 28 mars 2013 par le tribunal de grande instance de PARIS (4ème Chambre, 2ème section) sous le n° RG 12/14522

DEMANDERESSES A LA SAISINE

SAS MON COURTIER EN PHARMACIE (anciennement Pyxis Services et à l’époque des faits Pyxis Pharma) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de TOURS sous le numéro 512 413 816

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Assistée de Me François-xavier TESTU de l’AARPI SALES, TESTU, HILL, HENRY-GABORIAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0355, avocat plaidant

SAS SAGITTA PHARMA agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de TOURS sous le numéro 534 188 941

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Assistée de Me François-xavier TESTU de l’AARPI SALES, TESTU, HILL, HENRY-GABORIAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0355, avocat plaidant

SELAS PHARMACIE GOURON-[X] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de TOURS sous le numéro 390 055 515

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Assistée de Me François-xavier TESTU de l’AARPI SALES, TESTU, HILL, HENRY-GABORIAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0355, avocat plaidant

SELAS PHARMACIE [Localité 6] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de TOURS sous le numéro 489 169 680

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Assistée de Me François-xavier TESTU de l’AARPI SALES, TESTU, HILL, HENRY-GABORIAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0355, avocat plaidant

DÉFENDERESSE A LA SAISINE

SAS COOPÉRATION PHARMACEUTIQUE FRANÇAISE (en abrégé COOPER) prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 399 227 636

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assistée de Me Mickaël RIVOLLIER, avocat au barreau de PARIS, toque : T03, avocat plaidant

PARTIE INTERVENANTE

ASSOCIATION PYXIS PHARMA SRA, association déclarée loi 1901venant pour partie aux droits de la société PYXIS SERVICES en qualité de structure de regroupement à l’achat

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Assistée de Me François-Xavier TESTU de l’AARPI SALES, TESTU, HILL, HENRY-GABORIAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0355, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 Mai 2019, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère en remplacement du Président empêché

Madame Christine SOUDRY, Conseillère

Madame Estelle MOREAU, Conseillère, chargée du rapport

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère en remplacement du Président empêché, et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

MM. [V] et [S] [X], pharmaciens d’officine, ont créé, en 2010, la société Pyxis Pharma, structure de regroupement à l’achat (SRA), puis en novembre 2011, une centrale d’achat pharmaceutique (CAP), dénommée Sagitta Pharma.

La société Coopération Pharmaceutique Française (ci-après, la société Cooper), établissement pharmaceutique spécialisé dans la fourniture aux pharmaciens de médicaments, spécialités et matières pharmaceutiques et accessoires, négocie avec certains groupements de pharmaciens (structures informelles de globalisation des achats) des contrats de référencement pour certains produits, aux termes desquels elle offre, aux membres des groupements, des conditions particulières favorables. Elle fournit également ses produits à des grossistes-répartiteurs qui vendent les produits aux officines.

Se prévalant de ce que les sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma faisaient acheter par les officines de MM. [X] les produits de la société Cooper, ensuite rétrocédés à la société Pyxis Pharma, puis les vendaient aux adhérents de la société Pyxis Pharma via le site internet créé par celle-ci www.lacentralepharma.com, la société Cooper a mis en demeure les sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma de cesser ces pratiques, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 24 février 2012, puis fait sommation à la société Pyxis Pharma de cesser ces pratiques, par acte du 2 mars 2012.

Par sommation du 3 avril 2012, la société Pyxis Pharma a demandé à la société Cooper de lui communiquer ses conditions générales de vente applicables à la vente en direct aux officines, qu’elle considérait lui être également applicables.

Par courrier du 6 avril 2012, la société Cooper a communiqué à la société Pyxis Pharma ses conditions générales de vente dont celles applicables aux officines achetant en direct, tout en soulignant que la SRA n’est pas éligible auxdites conditions, dès lors qu’elle n’est pas une officine mais intervient comme commissionnaire et qu’elle est assimilable, dans son modèle de distribution, aux grossistes répartiteurs.

Le 17 décembre 2012, la société Cooper a assigné les sociétés Pyxis et Sagitta, MM. [X] et les pharmacies en concurrence déloyale devant le tribunal de grande instance de Paris, sur le fondement des articles L. 5125-1 et L. 5125-2 du code de la santé publique, L. 121-1 du code de la consommation et 1382 du code civil. La société Pyxis Pharma s’est prévalue, en défense au fond et au soutien d’une demande reconventionnelle, de pratiques restrictives de concurrence imputables à la société Cooper, prises de la méconnaissance des articles L. 441-6 et L. 442-6 I.9° du code de commerce, ayant justifié selon elle les rétrocessions litigieuses, et a soulevé, en conséquence, une exception d’incompétence au profit du tribunal de commerce de Paris sur le fondement de l’article D. 442-3 du code de commerce.

Par jugement contradictoire rendu le 28 mars 2013, le tribunal de grande instance de Paris a :

— dit que la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Pharmacie [Localité 6] et la société Pharmacie Gouron-[X] se sont livrées à des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Coopération Pharmaceutique Française (Cooper),

En conséquence,

— condamné in solidum la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Pharmacie [Localité 6] et la société Pharmacie Gouron-[X] à payer à la société Cooper à titre de dommages-intérêts les sommes de 10.000 euros, 8.000 euros et 5.000 euros,

— fait interdiction à la société Pyxis Pharma et à la société Sagitta Pharma de commercialiser les produits Cooper,

— assorti cette interdiction d’une astreinte de 20 euros par jour et produits mis en vente sur le site internet www.lacentralepharma.com dans le délai de 24 heures à compter de la signification de la présence décision, et durant un délai de deux mois,

— autorisé la publication, dans trois journaux ou magazines au choix de la société Cooper, au frais des sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma, sans que le coût de chaque insertion puisse excéder la somme de 4.000 euros hors taxe, du communiqué judiciaire suivant: 'Par jugement du 28 mars 2013, le tribunal de grande instance de Paris a jugé que la mise en vente de produits Cooper sur le site www.lacentralepharma.com constituait un acte de concurrence déloyale à l’encontre de la société Cooper et en a ordonné la cessation immédiate»,

— ordonné la publication du dit communiqué sur le page d’accueil du site internet www.lacentralepharma.com accessible depuis la France dans un encadré de couleur rouge sur fond blanc figurant en partie supérieure, en police de caractère de taille 10, pendant une durée de huit jours à compter de la signification du présent jugement,

— rejeté les demandes formées à titre reconventionnel dans l’intérêt de la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Pharmacie [Localité 6], la société Pharmacie Gouron-[X], la société Pharmacie [X] Rambuteau, Monsieur [S] [X] et Monsieur [V] [X],

— condamné in solidum la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Pharmacie [Localité 6] et la société Pharmacie Gouron-[X] à payer à la société Cooper la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté toute autre demande,

— condamné in solidum la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Pharmacie [Localité 6] et la société Pharmacie Gouron-[X] aux dépens,

— ordonné l’exécution provisoire.

Par arrêt rendu le 17 septembre 2015, la cour d’appel de Paris a :

— confirmé le jugement entrepris,

— débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

— condamné in solidum la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Phamacie [Localité 6] et la société Pharmacie Gouron-[X] à payer à la société Cooper la somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

— condamné in solidum la société Pyxis Pharma, la société Sagitta Pharma, la société Pharmacie [Localité 6], la société Pharmacie Gouron-[X] aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Par arrêt rendu le 06 octobre 2016, la cour d’appel de Paris a :

Vu l’article 462 du code de procédure civile,

— rectifié l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris en date du 17 septembre 2015 (RG n° 13/08058),

— dit que le dispositif sera modifié ainsi qu’il suit :

— remplacé les mots 'confirme le jugement entrepris’ par : ' confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés Pyxis Services, Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6] et Pharmacie Gouron-[X] à payer à la société Cooper à titre de dommages et intérêts les sommes de 8.000 euros et 5.000 euros et y ajoutant '

— dit que le reste du dispositif sera inchangé,

— dit que mention du présent arrêt rectificatif sera portée sur la minute et les expéditions de l’arrêt rendu le 17 septembre 2015 (RG n° 13/08058),

— mis les dépens du présent arrêt à la charge du Trésor public,

— dit n’y avoir lieu à allouer une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt rendu le 29 mars 2017, la Cour de cassation a :

— cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il rejette les demandes reconventionnelles de communication des conditions générales de vente applicables aux officines et de paiement de dommages-intérêts et en ce qu’il statue sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens, l’arrêt rendu le 17 septembre 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Paris; remet en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée,

— condamné la société Coopérative Pharmaceutique Française aux dépens,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté sa demande et l’a condamnée à payer aux sociétés Pyxis Pharma, Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6] et Pharmacie Gouron-[X] la somme globale de 3.000 euros.

Au motif que :

'Vu l’article L. 442-6, I, 9°, du code de commerce ;

Attendu qu’un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l’article L.441-6 du code de commerce ; qu’il ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s’il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n’appartient pas à la catégorie concernée ;

Attendu que pour rejeter les demandes reconventionnelles des sociétés Pyxis, Sagitta, Pharmacie [Localité 6] et Pharmacie Gouron-[X] tendant à la communication, par la société Cooper, des conditions générales de vente applicables aux officines et au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du manquement à cette obligation, l’arrêt constate que la société Pyxis n’est pas une officine et en déduit qu’elle n’établit pas qu’elle avait vocation à bénéficier de ces conditions générales de vente, de sorte que la société Cooper était fondée à lui appliquer les conditions de vente régissant les grossistes ; qu’il en déduit qu’aucune pratique restrictive de concurrence n’est établie à l’encontre de la société Cooper ;

Qu’en se déterminant ainsi, sans préciser les critères appliqués par la société Cooper pour définir ses catégories d’acheteurs, lui permettant de retenir que la société Pyxis, qui n’est pas une officine, ne relevait pas de la même catégorie d’acheteurs que les officines et groupement d’officines et relevait ainsi nécessairement de celle des grossistes, la cour d’appel a privé sa décision de base légale'.

Par déclaration du 11 mai 2017, les sociétés Pyxis Services (anciennement Pyxis Pharma), Sagitta Pharma, Pharmacie Gouron-[X] et Pharmacie [Localité 6], ont saisi la cour d’appel de renvoi.

Par dernières conclusions notifiées le 7 mai 2019, la société Mon courtier en pharmacie, anciennement Pyxis Services et à l’époque des faits Pyxis Pharma, les sociétés Sagitta Pharma, Pharmacie Gouron-[X] et Pharmacie [Localité 6], et l’association Pyxis Pharma, intervenante volontaire à la procédure, demandent à la cour de :

Sur le fond, statuant à nouveau,

Vu les articles 122 du code de procédure civile, L.442-6 et L.441-6 du code de commerce, les articles R.5124-2-15° et D.5125-24-16 du code de la santé publique, l’article 1240 du code civil,

— déclarer recevable l’association Pyxis Pharma en son intervention,

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Pyxis Pharma de ses demandes reconventionnelles tendant à obtenir communication des conditions générales de ventes adéquates, la réparation de son préjudice et la publication de la décision à intervenir,

Et le réformant,

— enjoindre à la société Coopération Pharmaceutique Française de communiquer à la société Pyxis Pharma ou à l’Association Pyxis Pharma, en leur qualité de structure de regroupement à l’achat, les conditions générales de ventes adéquates, c’est-à-dire celles sur la base desquelles elle négocie avec les officines lorsque que celles-ci procèdent à des achats en direct, en précisant que ces conditions constitueront la base de la négociation entre elle, Cooper, et la structure de regroupement à l’achat,

— condamner la société Coopération Pharmaceutique Française à payer à la société Pyxis Services ou à l’Association Pyxis Pharma une somme globale de deux cent cinquante mille euros hors taxe (250.000 euros HT) en indemnisation du préjudice subi par la société Pyxis Pharma, aux droits de laquelle elles viennent, comme conséquence directe des pratiques restrictives de la société Coopération Pharmaceutique Française,

— ordonner la publication, aux frais de la société Coopération Pharmaceutique Française, du dispositif de l’arrêt infirmatif à intervenir, sur l’injonction de communiquer les conditions générales de ventes adéquates, dans les cinq publications suivantes: le journal Les Echos, Le Quotidien du Pharmacien, Le Moniteur des Pharmacies, la revue Impact Pharmacien, la revue Profession Pharmacien,

— condamner la société Coopération Pharmaceutique Française à verser à chacune des appelantes la somme de trois mille euros (3.000 €) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Coopération Pharmaceutique Française aux entiers dépens.

Elles font tout d’abord valoir la qualité et l’intérêt à agir de l’association Pyxis Pharma, créée en novembre 2017 et qui a repris progressivement les activités de SRA de la société Pyxis Pharma elle-même devenue Pyxis Services puis, récemment, Mon courtier en assurance.

Au fond, elles exposent que la société Pyxis Pharma, qui exerçait l’activité de SRA au moment des faits pour le compte de ses adhérents et non pas pour son propre compte, bénéficiait du statut de commissionnaire à l’achat, de sorte que les conditions commerciales applicables aux officines de pharmacie doivent lui être communiquées et constituer la base de la négociation commerciale avec la société Cooper.

Elles soutiennent à ce titre que l’article D.5125-24-16 alinéa 1 du code de la santé publique, qui précise que les pharmaciens peuvent constituer un GIE ou une association 'en vue de l’achat, d’ordre et pour le compte de ses associés', renvoie au contrat de commission visé à l’article L.132-1 du code de commerce et constitue donc un mandat opaque sans représentation, l’opération de vente étant passée directement entre le tiers vendeur et le commettant acheteur. Elles en déduisent que la société Cooper a la qualité de vendeur et que chaque officine fédérée par la SRA a la qualité d’acheteur.

Elles contestent que la société Pyxis Pharma serait un distributeur faisant des actes d’achat pour revendre, celle-ci n’étant ni propriétaire des produits, ni partie au contrat de vente conclu entre la société Cooper et l’officine acheteuse. Elles indiquent que le fait que la société Pyxis Pharma centralise les commandes, les paie au laboratoire qui les lui facture, et qu’elle facture les officines relève de son statut de commissionnaire ainsi qu’il ressort de l’avis de la Commission d’examen des pratiques commerciales du 11 mai 2017.

Elles ajoutent que la société Pyxis Pharma ne peut davantage être traitée comme un acheteur/revendeur au motif qu’elle se trouve adossée à la société Sagitta pharma, établissement pharmaceutique, le recours à ce prestataire logistique qui détient et stocke des médicaments étant sans incidence sur le statut de commissionnaire de la SRA.

Elles considèrent que dès lors qu’il existe deux types d’acheteurs selon le code de la santé publique, soit les grossistes répartiteurs, qui achètent pour revendre aux officines, et les officines qui achètent directement aux laboratoires, la société Pyxis Pharma doit bénéficier des conditions d’achat en direct des officines proposées par la société Cooper.

Elles font valoir que si l’article L.441-6 du code de commerce offre la faculté au producteur de définir des conditions générales diversifiées selon les catégories d’acheteurs, l’intimée méconnaît la loi en prétendant appliquer à la société Pyxis Pharma les conditions de vente des grossistes, alors que dans le mécanisme de la SRA, les officines adhérentes ont seules la qualité d’acheteur. Elles ajoutent que lorsque les opérateurs se situent au même niveau du circuit de distribution, la différenciation doit être justifiée par des considérations objectives, et que rien ne justifie objectivement une discrimination tarifaire entre les SRA et les officines. Elles précisent à ce titre que la SRA, qui se borne à recueillir les commandes des officines dont elle est le mandataire, n’est pas en concurrence avec celles-ci et intervient sur le même marché et au même niveau que les officines du point de vue de leurs relations commerciales avec les laboratoires. Elles relèvent que le document de consultation de l’Autorité de la concurrence intitulé 'Comment dynamiser la concurrence dans le secteur de la distribution du médicament en ville’ publié le 10 juillet 2013 préconise le soutien des SRA afin de permettre aux petites et moyennes officines de bénéficier des mêmes conditions d’achat que celles dont bénéficient individuellement les grandes officines.

Elles soutiennent que contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, la société Cooper, qui ne vend pas de produits de luxe ou de haute technologie, ne saurait être assimilée à un titulaire de réseau de distribution sélective qu’elle pourrait organiser librement. Elles ajoutent que la société Cooper ne pouvait refuser l’application des conditions de vente en direct avec les officines à la société Pyxis Pharma qui a agi en qualité de commissionnaire, ainsi qu’en justifie son contrat de commission.

Elles indiquent que la société Cooper n’est pas plus fondée à vouloir leur appliquer ses conditions 'officines groupées', qui ne valent que si la marchandise est facturée et livrée à l’officine et dont les paliers d’unités sont appréciés par officine et non pas au niveau des commandes regroupées par la SRA, en méconnaissance du fonctionnement des SRA.

Elles sollicitent en conséquence la communication par la société Cooper de ses conditions commerciales avec barème de prix destiné aux officines acheteuses, dites dans la pratique conditions du direct, et que celles-ci constituent le socle de négociation annuelle entre les parties.

Au titre du préjudice, elles font valoir l’impossibilité pour la société Pyxis Pharma de s’approvisionner simplement et normalement auprès de la société Cooper, ce qui constitue une violation des dispositions de l’article L.442-6 du code de commerce mais également un refus de vente abusif de la part de l’intimée, susceptible de sanction sur le fondement de l’article 1240 du code civil lorsqu’il dégénère en abus de droit, ou s’il est discriminatoire ou procède d’un abus de domination. Elles invoquent également un préjudice d’image, les ruptures de stock à répétition subies par les officines adhérentes ayant porté atteinte à la réputation commerciale de la société Pyxis Pharma.

Par dernières conclusions notifiées le 30 avril 2019, la société Cooper demande à la cour de:

Vu les articles 122, 329 et 554 du code de procédure civile,

Vu les articles L.132-1, L.442-6 et L.441-6 du code de commerce, L.5125-1, L.5125-2, R.5124-2, D.5125-24-16, D.5125-24-17 du code de la santé publique et 1240 du code civil,

Sur l’action de l’association Pyxis Pharma :

— juger irrecevable l’intervention de l’association Pyxis Pharma :

Sur les demandes des sociétés Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma), Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6], Pharmacie Gouron-[X], et subsidiairement de l’association Pyxis Pharma,

— juger que la société Cooper a communiqué ses conditions générales de vente à la société Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma),

— juger que la société Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma) n’a pas la qualité d’acheteur nécessaire afin de se prévaloir des dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce,

— juger que la société Cooper est libre de déterminer les conditions de vente applicables à ses distributeurs,

— juger que la société Cooper établit des critères objectifs de distinction de ses différentes catégories d’acheteurs (officines indépendantes, officines groupées, grossistes),

— juger que la société Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma), en qualité de commissionnaire à l’achat adossé à la société Sagitta Pharma, ne relève pas de la même catégorie d’acheteurs que les officines et groupements d’officines, mais relève nécessairement de celle des grossistes,

En conséquence,

— confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 28 mars 2013 (RG 12/14522) en ce qu’il a rejeté l’ensemble des demandes formées à titre reconventionnel par les sociétés Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma), Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6], Pharmacie Gouron-[X], Pharmacie [X]-Rambuteau et MM. [V] et [S] [X], tendant à obtenir les conditions générales de vente tels que négociées avec les officines, ainsi que des dommages-intérêts,

En tout état de cause,

— débouter les sociétés Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma), Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6], Pharmacie Gouron-[X] ainsi que l’association Pyxis Pharma de l’intégralité de leurs demandes,

— condamner les sociétés Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma), Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6], Pharmacie Gouron-[X] ainsi que l’association Pyxis Pharma,à verser à la société Cooper, la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner les sociétés Mon Courtier en Pharmacie (anciennement Pyxis Services et plus anciennement Pyxis Pharma), Sagitta Pharma, Pharmacie [Localité 6], Pharmacie Gouron-[X] ainsi que l’association Pyxis Pharma, au entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles en application de l’article 699 du code de procédure civile.

La société Cooper soulève tout d’abord l’irrecevabilité de l’intervention volontaire à la procédure de l’association Pyxis Pharma à défaut de justification de la transmission, au profit de celle-ci, de l’activité de SRA de la société Pyxis Pharma, et donc d’un intérêt à agir.

Au fond, elle fait valoir que les premiers juges ont à juste titre rejeté la demande de communication et d’application de ses conditions générales de vente destinées aux officines, qui s’inscrivent dans une différenciation de clientèle simple et objective.

Elle indique que l’obligation du vendeur se limite à la communication de conditions générales de vente, et qu’elle a communiqué celles-ci aux sociétés appelantes. Elle ajoute que la société Pyxis Pharma ayant adopté un statut de courtier et non pas de vendeur, ne peut prétendre se voir communiquer ses conditions générales de vente, alors qu’elle n’a pas vocation à acheter des produits auprès d’elle.

Elle précise qu’elle n’a jamais refusé de vendre des produits aux sociétés appelantes, lesquelles ont refusé de lui acheter les produits aux conditions proposées.

Elle rappelle que le fournisseur est libre d’organiser son réseau de distribution et de choisir le mode de distribution de ses produits, et de traiter différentes catégories de clients selon des critères qui lui sont propres, au moyen de conditions générales de vente, et qu’il peut, au sein d’une même catégorie, opérer des différenciations entre chacun de ses clients, en application des dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce.

Elle indique qu’elle a mis en place des critères objectifs afin de déterminer le statut de ses différentes catégories de clients et les conditions générales tarifaires applicables, sans que cela ne constitue une pratique discriminatoire ou un refus de vente délibérée.

Elle précise qu’elle dispose de trois catégories de conditions tarifaires, en fonction de la nature de sa clientèle soit, d’une part, celles accordées aux officines achetant directement les produits auprès d’elle et dans une démarche strictement individuelle, d’autre part, celles afférentes aux officines membres d’un groupement d’officines ayant conclu un contrat de référencement avec elle, enfin celles accordées aux grossistes et intermédiaires de toutes natures. Elle indique que lorsque les produits sont négociés par une officine ou un groupement d’officines, sont commandés, facturés et livrés aux officines, ce client bénéficie des conditions commerciales applicables aux officines ou aux officines membres de groupement d’officines ayant conclu un contrat de référencement avec elle. Elle précise qu’en revanche, lorsque les produits sont commandés par une autre entité qu’une officine, facturés et livrés à cette structure, le client bénéficie des conditions commerciales applicables aux grossistes. Elle souligne que les conditions préférentielles consenties aux officines indépendantes ou aux officines membres d’un groupement, dès lors qu’elles franchissent des paliers de commande, sont la contrepartie de la relation directe qu’elles entretiennent avec le consommateur final qu’elles conseillent, de la relation privilégiée qu’elle entretient avec les pharmaciens d’officine, enfin des contraintes de stockage qui leur sont imposées. Elle ajoute qu’au contraire, les grossistes revendent ses produits sans qu’elle puisse en connaître la destination finale et n’ont aucun rôle de conseil.

Elle soutient qu’en application de ces critères objectifs, la société Pyxis Pharma entre dans la catégorie des grossistes, et non pas dans celle des officines ou groupement d’officines.

Elle relève que la SRA, qui se livre à l’achat de médicaments ' d’ordre et pour le compte’ de ses membres, n’agit pas nécessairement en qualité de commissionnaire à l’achat pour le compte de ses adhérents, mais peut également intervenir comme simple référenceur et que dans ce cas, la SRA négocie les conditions commerciales de façon transparente pour le compte de ses adhérents, lesquels passent commande en leur nom propre, sont livrés et facturés par le laboratoire.

Elle souligne que le contrat de commission que la société Pyxis a choisi, n’implique pas que les officines membres soient des acheteurs auprès de la société Cooper, dont le seul cocontractant est la société Pyxis Pharma elle-même. Elle considère que celle-ci, en sa qualité de commissionnaire à l’achat, constitue un intermédiaire opaque dès lors qu’elle engage sa responsabilité personnelle avec les tiers avec lesquels elle contracte directement, ainsi que le confirment les avis de la Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC) des 10 avril 2012 et 11 mai 2017.

Elle ajoute que l’absence de relation directe entre elle et la SRA Pyxis Pharma est renforcée par l’adossement de celle-ci à l’établissement pharmaceutique Sagitta Pharma, habilité à effectuer des opérations de stockage et à livrer aux officines, et dont l’intervention est nécessaire à la distribution des médicaments en gros, en application des dispositions de l’article D.5125-24-16 alinéa 2 du code de la santé publique. Elle considère que l’objet de ces sociétés, indissociable, est ainsi d’exercer une activité de distributeur de médicaments à leurs membres. Elle en déduit que la société Pyxis Pharma, qui centralise les commandes de ses membres, négocie et passe commande auprès des laboratoires, puis revend les produits à ses membres, exerce une activité de distributeur de gros, aucune relation directe n’intervenant entre les officines et les laboratoires.

Elle souligne que l’activité des sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma diffère objectivement de celle d’une officine, faute pour elles de réaliser des reventes directes au consommateur final, et l’activité d’une officine se limitant à la distribution de médicaments au détail et ne pouvant, en conséquence, être assimilée à une activité de distribution de médicament en gros.

Elle ajoute que l’activité d’une SRA adossée à une CAP n’est pas non plus comparable à celle d’un groupement d’officines, qui intervient comme référent transparent de sorte que le flux d’affaires se fait entre le laboratoire et les officines.

Elle fait valoir que, la société Pyxis Pharma, adossée à la société Sagitta-Pharma achetant elle-même des produits dans le but de les revendre à ses adhérents sans que la société Cooper n’ait de visibilité sur la destination finale des produits ni aucune relation avec les officines, exerce une activité comparable à celle de grossiste-répartiteur définie à l’article R.5124-2 du code de la santé publique.

Elle soutient que ni le document de consultation publique de l’Autorité de la concurrence, ni son avis du 19 décembre 2013 ne permettent d’assimiler la SRA à une officine, ladite Autorité précisant que les SRA sont des acteurs de la distribution en gros et ayant confirmé dans son avis du 4 avril 2019, mais également dans sa décision du 20 janvier 2016 rejetant l’existence d’une entente horizontale au préjudice des sociétés Pyxis et Sagitta Pharma, que les SRA sont bien des intermédiaires et non des officines.

Enfin, elle conteste les préjudices allégués, qu’elle considère nullement caractérisés. Elle fait valoir à ce titre qu’aucune violation de l’article L.441-6 du code de commerce n’est caractérisée dès lors qu’elle a communiqué à première demande ses conditions générales et que l’interdiction du refus de vente a été abrogée par le législateur en 1996 et ne figure plus parmi les pratiques restrictive de concurrence. Elle ajoute, s’agissant du préjudice d’image allégué, qu’aucune rupture de stock ne lui est imputable dès lors qu’elle n’a jamais livré directement la société Pyxis Pharma, laquelle a, pour sa part, organisé un système illégal d’approvisionnement pour lequel elle a été définitivement condamnée.

MOTIFS

Sur la recevabilité à agir de l’association Pyxis Pharma SRA :

Selon l’article 122 du code de procédure civile, 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

L’article 554 du même code dispose que 'Peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité'.

L’article 329 du code de procédure civile précise que l’intervention volontaire principale 'n’est recevable que si son auteur a le droit d’agir relativement à cette prétention'.

L’association Pyxis Pharma soutient intervenir volontairement à la procédure en sa qualité d’association ayant repris l’activité de SRA de la société Pyxis Pharma. Elle explique à ce titre que pour des raisons historiques, la société Pyxis Pharma, devenue Pyxis Services puis, récemment, Mon Courtier en Pharmacie, exerçait à l’époque des faits l’activité principale de courtage pour les produits pharmaceutiques et une activité résiduelle de SRA, qu’elle a conservée de manière marginale et qui a été progressivement reprise par l’association Pyxis Pharma créée en 2017 postérieurement à l’arrêt rendu par la Cour de cassation.

La société Pyxis Pharma, ainsi dénommée à l’époque des faits, est devenue la société Pyxis Services puis récemment la société Mon Courtier en pharmacie.

L’extrait Kbis de la société Pyxis Pharma du 1er octobre 2012 mentionne que celle-ci, créée le 7 mai 2009 et de nouveau immatriculée le 16 mai 2012, a pour activité 'La mise en place et l’exploitation d’une structure de regroupement à l’achat, au sens de l’article D.5125-24-1 du code de la santé publique, de pharmaciens titulaires d’officines ou de sociétés exploitant une officine, dits adhérents, associés ou non de la société. L’achat d’ordre et pour le compte des adhérents du groupement exploité par la société, des médicaments (autres que des médicaments expérimentaux, et à l’exception des médicaments remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie) et des marchandises autres que des médicaments figurant dans l’arrêté mentionné à l’article L.5125-24 du code de la santé publique. La négociation sur les conditions d’achat, de transport, de stockage desdits produits auprès de fournisseurs ou prestataires, pour le compte des adhérents du groupement exploité par la société'.

L’extrait Kbis de la société Pyxis Services du 5 novembre 2018, qui est enregistrée au même numéro d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés que la société Pyxis Pharma, mentionne que ladite société, a pour activité la 'Réalisation de toutes prestations de services liées à la négociation, à la promotion, à la bonne exécution des approvisionnements des officines de pharmacies (exploitées sous forme individuelle ou en sociétés), regroupées ou non, relativement aux produits suivants : produits pharmaceutiques, parapharmaceutiques, homéopathiques, étant précisé que la société n’interviendra pas dans l’opération même d’achat vente et ne procédera pas au stockage ni à1a distribution en gros ou au détail des produits précités'.

L’extrait Kbis de la société Mon Courtier en pharmacie du 29 avril 2019, qui est enregistrée au même numéro d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés que les sociétés Pyxis Services et Pyxis Pharma, mentionne que ladite société, a pour activité la 'Réalisation de toutes prestations de services liées à la négociation, à la promotion, à la bonne exécution des approvisionnements des officines de pharmacies (exploitées sous forme individuelle ou en sociétés), regroupées ou non, relativement aux produits suivants : produits pharmaceutiques, parapharmaceutiques, homéopathiques, étant précisé que la société n’interviendra pas dans 1'opération même d’achat vente et ne procédera pas au stockage ni à1a distribution en gros ou au détail des produits précités. L’activité de courtage en médicaments'.

L’association Pyxis Pharma a été créée postérieurement au litige, le 29 décembre 2015, ainsi qu’en justifie le dépôt de ses statuts. Les statuts de cette association mis à jour le 15 novembre 2017 précisent que celle-ci, qui a pour président M. [V] [X] et pour vice-président M.[S] [X], a pour objet la mise en place et l’exploitation d’une structure de regroupement à l’achat (SRA) au sens de l’article D.5125-24-16 du code de la santé publique, au profit de ses adhérents, qui peuvent être uniquement des pharmaciens titulaires d’officines ou des sociétés exploitant une officine.

Il ne ressort pas de ces statuts que l’association ait 'repris’ l’activité de SRA de la société Pyxis Pharma ainsi qu’elle le fait valoir.

La circonstance qu’au cours d’une séance du conseil d’administration de l’association Pyxis Pharma du 14 septembre 2018, il ait été voté l’intervention volontaire de ladite association à la procédure 'du fait que les activités de SRA ont été pour l’essentiel reportées à l’association', ne suffit pas à établir la qualité et l’intérêt à agir de ladite association.

L’association étant par conséquent un tiers au litige, absent en première instance, ne justifie ni de sa qualité, ni de son intérêt à agir à la présente instance. Elle est donc irrecevable en son intervention volontaire.

Sur le fond :

L’article L.441-6 du code de commerce prévoit depuis la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 que’I.-Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Celles-ci constituent le soclede la négociation commerciale. Elles comprennent :

— les conditions de vente ;

— le barème des prix unitaires ;

— les réductions de prix ;

— les conditions de règlement'.

Depuis la loi n°2008-776 de modernisation de l’économie du 4 août 2008, ce texte précise que 'Les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de services. Dans ce cas, l’obligation de communication prescrite au premier alinéa ne porte que sur les conditions générales de vente applicables aux acheteurs de produits ou aux demandeurs de prestations de services d’une même catégorie'.

L’article L.442-6 I. 9° du même code prohibe, depuis la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 le fait 'De ne pas communiquer ses conditions générales de vente, dans les conditions prévues à l’article L.441-6, à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour l’exercice d’une activité professionnelle'.

Il résulte de ces dispositions qu’un fournisseur de produits est tenu de communiquer ses conditions générales de vente dans les conditions prévues à l’article L.441-6 du code de commerce et ne peut refuser à un acheteur la communication des conditions générales de vente applicables à une catégorie de clientèle que s’il établit, selon des critères objectifs, que cet acheteur n’appartient pas à la catégorie concernée.

Sur les critères des conditions générales de vente de la société Cooper :

Au vu des dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce susvisées, les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de services, et notamment entre grossistes et détaillants.

Avant la loi de modernisation de l’économie, il était prévu que 'les conditions dans lesquelles sont définies ces catégories sont fixées par voie réglementaire en fonction notamment du chiffre d’affaires, de la nature de la clientèle et du mode de distribution'. Les critères définissant les catégories d’acheteurs étaient ceux ainsi listés, sans que cette liste ne soit limitative.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi de modernisation de l’économie, le fournisseur définit librement les différentes catégories d’acheteurs auxquelles sont applicables ses conditions de vente, à condition que les critères définissant ces catégories soient objectifs, qu’ils ne soient pas discriminatoires, ni ne créent un déséquilibre significatif, une entente entre le fournisseur et les distributeurs favorisés ou encore un abus de position dominante.

Peuvent être retenus comme critères, outre ceux susvisés antérieurs à la loi de modernisation de l’économie, le secteur d’activité concerné et la destination finale du produit.

Les conditions générales de vente de la société Cooper se décomposent comme suit :

— celles accordées aux officines indépendantes, 'soit toute officine qui n’est pas affiliée à un groupement de pharmaciens, effectuant directement ses achats sans intermédiaire, comprenant un seul lieu de vente qui commercialise au détail, au consommateur final',

— celles accordées aux officines groupées 'soit toute officine qui justifie de l’affiliation à un groupement de pharmaciens, effectuant directement ses achats sans intermédiaire, comprenant un seul lieu de vente qui commercialise au détail au consommateur final',

— celles accordées aux grossistes (intermédiaires détaillants), tels que les grossistes-répartiteurs, les distributeurs en gros à l’exportation, les dépositaires, les centrales d’achats pharmaceutiques, les SRA et groupements, 'lorsqu’ils agissent en leur nom propre', et le cas échéant, 'à l’établissement pharmaceutique autorisé pour l’activité de distribution en gros lorsque la SRA ou le groupement se livre aux opérations d’achat (en son nom et pour son compte) ou de stockage des médicaments en vue de leur distribution en gros à ces adhérents'.

La société Cooper indique qu’elle dispose ainsi de trois catégories de conditions tarifaires variant en fonction de la nature de sa clientèle soit, d’une part, celles accordées aux officines achetant directement les produits auprès d’elle et dans une démarche strictement individuelle, d’autre part, celles afférentes aux officines membres d’un groupement d’officines ayant conclu un contrat de référencement avec elle, enfin celles accordées aux grossistes et intermédiaires de toutes natures. Elle précise que lorsque les produits sont négociés par une officine ou un groupement d’officines, sont commandés, facturés et livrés aux officines, ce client bénéficie des conditions commerciales applicables aux officines ou aux officines membres de groupement d’officines ayant conclu un contrat de référencement avec elle. Elle indique qu’en revanche, lorsque les produits sont commandés par une autre entité qu’une officine, facturés et livrés à cette structure, le client bénéficie des conditions commerciales applicables aux grossistes. Elle souligne que les conditions préférentielles consenties aux officines indépendantes ou aux officines membres d’un groupement, dès lors qu’elles franchissent des paliers de commande, sont la contrepartie de la relation directe qu’elles entretiennent avec le consommateur final qu’elles conseillent, de la relation privilégiée qu’elle entretient avec les pharmaciens d’officine, enfin des contraintes de stockage qui leur sont imposées. Elle ajoute qu’au contraire, les grossistes revendent ses produits sans qu’elle puisse en connaître la destination finale et n’ont aucun rôle de conseil.

Selon la société Cooper, elle établit des critères objectifs de distinction de ses différentes catégories d’acheteurs (officines indépendantes, officines groupées, grossistes) tenant à la nature des liens entretenus avec sa clientèle, au stockage des produits et à leur destination finale.

Sur l’application des conditions générales de vente de la société Cooper :

Selon l’article D5125-24-1 crée par décret n°2009-741 du 19 juin 2009, dans sa version applicable aux faits de l’espèce,'Les pharmaciens titulaires d’officine ou les sociétés exploitant une officine peuvent constituer une société, un groupement d’intérêt économique ou une association, en vue de l’achat, d’ordre et pour le compte de ses associés, membres ou adhérents pharmaciens titulaires d’officine ou sociétés exploitant une officine, de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, à l’exception des médicaments remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie. Cette structure peut se livrer à la même activité pour les marchandises autres que des médicaments figurant dans l’arrêté mentionné à l’article L.5125-24.

La structure mentionnée au premier alinéa ne peut se livrer aux opérations d’achat, en son nom et pour son compte, et de stockage des médicaments en vue de leur distribution en gros à ses associés, membres ou adhérents, que si elle comporte un établissement pharmaceutique autorisé pour l’activité de distribution en gros'.

L’article R5124-2 du code de la santé publique, modifié par décret n°2009-741 du 19 juin 2009, dans sa version applicable aux faits de l’espèce précise qu’on entend par :

'5° Grossiste-répartiteur, l’entreprise se livrant à l’achat et au stockage de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, en vue de leur distribution en gros et en l’état ; Cette entreprise peut également se livrer, d’ordre et pour le compte de pharmaciens titulaires d’officine ou des structures mentionnées à l’article D. 5125-24-1, à l’achat et au stockage de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, à l’exception des médicaments remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie, en vue de leur distribution en gros et en l’état.

15° Centrale d’achat pharmaceutique, l’entreprise se livrant, soit en son nom et pour son compte, soit d’ordre et pour le compte de pharmaciens titulaires d’officine ou des structures mentionnées à l’article D.5125-24-1 à l’achat et au stockage des médicaments autres que des médicaments expérimentaux, à l’exception des médicaments remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie, en vue de leur distribution en gros et en l’état à des pharmaciens titulaires d’officine'.

Il résulte des dispositions susvisées que la SRA, le grossiste-répartiteur et la centrale d’achat pharmaceutique interviennent dans le secteur de la distribution du médicament non remboursé.

La SRA exerce deux types d’activités.

En premier lieu, la SRA peut se livrer à l’achat d’ordre et pour le compte de ses associés, membres ou adhérents, auquel cas elle agit comme simple référenceur ou comme commissionnaire.

En sa qualité de référenceur, la SRA négocie des conditions commerciales pour les produits qu’elle référence auprès des laboratoires. Chaque officine membre de la SRA commande individuellement ses produits aux laboratoires. La livraison et la facturation sont faites individuellement par le laboratoire concerné auprès de chaque officine adhérente ou membre. Se nouent ainsi un contrat de référencement entre la SRA et le fabricant/exploitant, un contrat d’affiliation entre la SRA et les officines, et des contrats de vente entre le fabricant/exploitant et les officines membres de la SRA.

En sa qualité de commissionnaire à l’achat, la SRA est un opérateur intermédiaire entre les laboratoires et les officines. Elle centralise et négocie les commandes de ses membres, qu’elle transmet en son nom au fabricant/exploitant. Celui-ci émet des factures au nom de la SRA qui les règle pour le compte de ses adhérents, et facture ces derniers. Co-existent alors deux contrats, un contrat conclu entre la SRA et le fabricant/exploitant, et un contrat de commission à l’achat entre la SRA et chacun de ses adhérents.

Selon l’article L.132-1 du code de commerce, 'Le commissionnaire est celui qui agit en son propre nom ou sous un nom social et pour le compte d’un commettant'.

Le commissionnaire, à la différence d’un mandataire, agit en son nom propre ou sous un nom social qui n’est pas celui du commettant. Si le commissionnaire qui agit 'en son nom et pour le compte’ du commettant est seul engagé envers le tiers avec lequel il contracte, les effets réels du contrat se produisent dans le patrimoine du commettant.

Dans ses rapports avec son commettant, acheteur, le commissionnaire est tenu dans une relation de mandat. Dans ses rapports avec le fournisseur, vendeur, le commissionnaire est personnellement tenu des obligations des contrats d’achat qu’il conclut en cette qualité. La SRA peut donc, en qualité de commissionnaire à l’achat, solliciter de la part des laboratoires pharmaceutiques que ces derniers émettent des factures à son ordre.

La SRA, en sa qualité de commissionnaire à l’achat, ne peut effectuer aucune opération logistique afférente au médicament (stockage, livraison). Cette opération doit être réalisée par un établissement pharmaceutique, comme une centrale d’achat pharmaceutique ou un grossiste-répartiteur.

En second lieu, la SRA est également habilitée à acheter en son nom et pour son compte des médicaments en vue de leur distribution en gros à ses associés, membres ou adhérents, à la condition de comporter un établissement pharmaceutique autorisé pour l’activité de distribution en gros. La création d’un tel établissement permet à la SRA d’agir en son nom et pour son propre compte, et d’étendre son activité au stockage et à la distribution en gros pour ses membres. Dans ce cas, la SRA-CAP est propriétaire de ses stocks, comme l’est un grossiste-répartiteur, et ses clients sont les officines.

L’Autorité de la concurrence a donné plusieurs avis concernant le secteur d’activité de vente de médicaments non remboursés.

Dans son avis n°13-A-24 du 19 décembre 2013 relatif au fonctionnement de la concurrence dans le secteur de la distribution du médicament à usage humain en ville, l’Autorité de la concurrence précise que les SRA et CAP ont été créées en 2009 dans le but de faire baisser le prix des médicaments d’automédication, d’accompagner les déremboursements de médicaments et la mise en place du libre accès aux médicaments non remboursés mais également dans le but de mettre fin aux pratiques de rétrocession de médicaments entre pharmacie d’officine. Elle fait le constat que les groupements et SRA, agissant au nom et pour le compte des officines ou intermédiaires qu’ils représentent, n’obtiennent pas des avantages aussi conséquents que ceux pouvant être octroyés aux officines en vente directe et que certains laboratoires pharmaceutiques refuseraient par ailleurs de négocier directement avec ces intermédiaires. Elle rappelle que ces difficultés d’approvisionnement par les SRA ont été relevées dès 2012 par le Directeur général de la Santé qui a considéré que de telles pratiques vont à l’encontre de la politique du Ministre chargé de la santé en faveur du développement du libre accès à des médicaments dits de conseil pharmaceutique, dans des conditions favorables tant pour les consommateurs et le pouvoir d’achat que pour les officines. Elle souligne que la trop faible puissance d’achat compensatrice des SRA et CAP conduit les pharmaciens, et notamment les petites et moyennes officines, à rechercher des conditions de remises plus avantageuses que celles que les laboratoires offrent individuellement aux pharmacies, en groupant les commandes et en pratiquant la rétrocession, cette pratique commerciale leur permettant ainsi de récupérer de la marge sur les médicaments acquis par ce biais. Elle considère que si les difficultés soulevées par la Direction générale de la santé constituaient des pratiques discriminatoires injustifiées à l’égard des structures d’achats groupés, le droit de la concurrence pourrait trouver à s’appliquer.

L’Autorité de la concurrence recommande ainsi de mettre en oeuvre tous les moyens, en particulier ceux du droit de la concurrence, pour soutenir ces structures afin de permettre aux pharmaciens d’officine, en particulier les petites et moyennes officines, de bénéficier des mêmes conditions d’achat dont les grandes officines bénéficient individuellement aujourd’hui, ce qui aurait pour conséquence de mettre fin à la pratique de la rétrocession.

En dépit de cet avis contenant une telle recommandation, l’Autorité de la concurrence fait le constat, dans son avis n°19-A-08 du 4 avril 2019, relatif aux secteurs de la distribution du médicament en ville et de la biologie médicale privée, que les SRA connaissent des difficultés de fonctionnement et n’arrivent toujours pas à obtenir auprès des laboratoires des conditions commerciales aussi favorables que celles obtenues par les officines individuellement, voire même à s’approvisionner auprès de certains laboratoires. Elle indique que les différentes formes de regroupements à l’achat représentent un contre-pouvoir limité à l’égard des fournisseurs. Elle précise à ce titre que même si les groupements de pharmacies, et dans une moindre mesure les structures de regroupement à l’achat et les centrales d’achat pharmaceutiques permettent une amélioration des conditions commerciales pour certaines officines, les laboratoires continuent d’accorder leurs remises les plus importantes en direct, aux officines de taille importante. Elle considère que cette situation serait préjudiciable à un grand nombre de pharmacies, notamment les plus petites d’entre elles, qui n’ont pas les capacités de stockage adaptées pour le canal de la vente directe, contrairement aux intermédiaires, et qui sont parfois amenées à avoir recours à des pratiques de rétrocession, pourtant illégales.

Il ressort de ces éléments qu’a été constaté, par l’Autorité de la concurrence, un déséquilibre concurrentiel dont pâtissent certains intermédiaires dans le secteur de la distribution du médicament non remboursé, notamment les SRA.

La société Cooper, qui entend appliquer à la société Pyxis Pharma ses conditions générales de grossiste, doit justifier par des critères objectifs que ladite société ne relève pas de la même catégorie d’acheteur que les officines et groupements d’officines et relève en conséquence nécessairement de la catégorie des grossistes. Elle doit supporter à ce titre la charge de la preuve.

Sur l’activité de la société Pyxis Pharma et la catégorie d’acheteurs dont elle relève :

La société Cooper soutient tout d’abord que la société Pyxis Pharma exerce une activité similaire à celle du grossiste-répartiteur.

L’extrait Kbis de la société Pyxis Pharma du 1er octobre 2012 mentionne que celle-ci, immatriculée le 16 mai 2012, a pour activité 'La mise en place et l’exploitation d’une structure de regroupement à l’achat, au sens de l’article D.5125-24-1 du code de la santé publique, de pharmaciens titulaires d’officines ou de sociétés exploitant une officine, dit adhérents, associés ou non de la société, l’achat, d’ordre et pour le compte des adhérents du groupement exploité par la société, de médicaments (autres que des médicaments expérimentaux et à l’exception des médicaments remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie), et des marchandises autres que des médicaments figurant dans l’arrêté mentionné à l’article L.5125-24 du code de la santé publique, la négociation sur les conditions d’achat, de transport, de stockage desdits produits autres de fournisseurs ou prestataires, pour le compte des adhérents du groupement exploité par la société'.

Les statuts de la société Pyxis Pharma précisent que celle-ci a pour objet :

'-l’achat, d’ordre et pour le compte des adhérents du regroupement exploité par la société, de médicaments (…)

— la négociation sur les conditions d’achat, de transport et de stockage desdits produits auprès de fournisseurs ou prestataires, pour le compte des adhérents du groupement exploité par la société.

La société ne pourra en aucun cas procéder, en son nom et pour son compte, à des opérations d’achat, de stockage et de distribution en gros des médicaments aux adhérents du groupement exploité par la société. En tant que de besoin, elle fera procéder à ces différentes opérations en recourant aux services d’un tiers habilité'.

La société Pyxis Pharma produit aux débats un exemplaire du contrat, intitulé 'contrat de commission', qu’elle conclut avec les officines adhérentes.

Il est exposé en préambule de ce contrat que la société Pyxis Pharma intervient en qualité de SRA ayant pour objet l’achat, d’ordre et pour le compte de ses adhérents pharmaciens titulaires d’officines ou sociétés exploitant une officine, de médicaments autres que des médicaments expérimentaux, à l’exception des médicaments remboursables par les régimes obligations d’assurance maladie. Il est également précisé que 'Pour répondre à des besoins logistiques, lorsque nécessaire, la SRA a établi un lien de partenariat logistique avec Sagitta Pharma, une centrale d’achat pharmaceutique (CAP) qui, du fait de son statut d’établissement pharmaceutique (…) est en mesure de stocker pour le compte de l’adhérent les produits achetés par celui-ci à l’issue de la négociation menée par la SRA commissionnaire'.

L’objet du contrat est défini comme étant limité à l’achat des produits énumérés à l’article D.5125-24-1 du code de la santé publique, soit les médicaments non remboursables. Il est indiqué que la SRA commissionnaire n’acquiert pas la propriété des produits qu’elle est chargée de négocier pour le compte de l’officine commettante, l’opération de vente/achat étant directement et exclusivement effectuée entre le laboratoire fournisseur et l’officine commettante.

L’article 2.3 de ce contrat prévoit que 'L’officine commettante devra indiquer au moment de la commande si elle souhaite recourir aux services de la CAP Sagitta Pharma avec laquelle la SRA commissionnaire a conclu un contrat de services, pour le stockage des produits et leur livraison ultérieure par le prestataire logistique, selon ses besoins, ou si elle souhaite une livraison directe avec le fournisseur. En l’absence d’indication, particulière, la livraison par le laboratoire fournisseur sera effectuée dans les magasins du prestataire logistique, comme il est dit à l’article 3.3. Dans une telle hypothèse, l’officine commettante donne mandat, en tant que de besoin, au prestataire logistique, pour effectuer la réception juridique de la marchandise qui lui appartient'.

Au titre des conditions financières, il est prévu à l’article 4.3 que 'La SRA commissionnaire facturera les produits à l’officine commettante au moment de la livraison, le laboratoire fournisseur devant quant à lui facturer la SRA commissionnaire, conformément à la loi. La facture devra être payée par l’officine commettante dans les 30 jours à compter de sa date d’émission'.

L’article 4.4 de ce contrat énonce qu’ 'En rémunération de sa prestation d’entremise et de négociation, le commettant paiera à la SRA commissionnaire une commission annuelle de 300 euros/an HT, payable d’avance pour l’année en cours', laquelle commission pourra faire l’objet d’une régularisation en fin de période, consistant dans la différence entre le montant de l’avance de 300 euros, et une somme égale à 10% des avantages tarifaires obtenus effectivement par l’adhérant pour l’achat des produits sur une année entière grâce à la SRA'.

Il résulte de ces éléments que la société Pyxis Pharma exerce une activité de SRA et agit toujours 'd’ordre et pour le compte’ des officines adhérentes, et non pas pour son compte. Elle négocie des conditions d’achat plus favorables pour les officines adhérentes, dont elle est le mandataire. Lorsqu’elle procède à l’achat groupé en négociant, recueillant et centralisant les commandes des officines adhérentes, celles-ci peuvent choisir de se faire directement livrer les produits par le fournisseur. En l’absence d’un tel choix, elle a recours aux services de la CAP Sagitta Pharma avec laquelle elle a conclu un contrat de prestation de services, pour le stockage des produits et leur livraison ultérieure, la CAP Sagitta Pharma agissant comme un prestataire logistique. Dans tous les cas, contrairement aux grossistes-répartiteurs, la société Pyxis Pharma n’est pas propriétaire des produits dont elle passe la commande auprès du laboratoire d’ordre et pour le compte des officines adhérentes, qu’elle règle personnellement au laboratoire pour le compte des officines et qu’elle re-facture à ces dernières sans percevoir de commission, celles-ci s’acquittant seulement d’un droit d’adhésion annuelle. Son activité diffère de celle d’un grossiste-répartiteur.

Il s’ensuit que la société Pyxis Pharma agit en qualité de commissionnaire à l’achat, et constitue un opérateur intermédiaire entre le laboratoire et les officines adhérentes dont elle est le mandataire, lesquelles acquièrent directement la propriété des produits acquis d’ordre et pour leur compte par la SRA.

La circonstance que la société Pyxis Pharma commande les produits à la société Cooper, qui les lui facture et qu’elle engage sa responsabilité personnelle envers la société Cooper, ne lui donne pas la qualité de grossiste-répartiteur, lequel acquiert la propriété des produits. En effet, en sa qualité de commissionnaire à l’achat, la société Pyxis Pharma est personnellement engagée envers le fournisseur au titre d’un contrat d’achat et peut donc se faire facturer les produits, mais étant liée par un contrat de mandat avec les officines adhérentes, le transfert de propriété des produits vendus est directement opéré au bénéfice desdites officines.

Le fait que la SRA Pyxis Pharma, agissant d’ordre et pour le compte de ses adhérents, et non pas pour son compte, et ayant recours à la CAP Sagitta-Pharma en sa qualité de prestataire logistique, constitue un intermédiaire du réseau de distribution des médicaments en gros n’implique pas davantage qu’elle soit assimilée à un grossiste-répartiteur, dès lors qu’elle n’acquiert pas la propriété des produits.

De même, le fait que dans son avis du 20 janvier 2016, l’Autorité de la concurrence, après avoir constaté 'qu’à ce jour les conditions commerciales proposées à Pyxis ne sont pas harmonisées', ait rejeté l’existence d’une entente horizontale entre différents laboraires, dont la société Cooper, au préjudice des sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma, et qu’elle ait confirmé que les SRA et CAP n’étaient pas des officines mais des opérateurs intermédiaires, est sans incidence sur la qualité de commissionnaire à l’achat de la SRA Pyxis-Pharma.

La SRA Pyxis Pharma constituant un intermédiaire mandaté par les officines indépendantes doit donc pouvoir bénéficier des conditions d’achat de la société Cooper accordées aux officines indépendantes, peu important que ce mandat soit opaque envers la société Cooper.

Sur les autres critères objectifs allégués par la société Pyxis Pharma :

La société Cooper échoue à démontrer, ainsi qu’elle en a la charge, par des critères objectifs, que la société Pyxis Pharma ne rentre pas dans la même catégorie que les officines indépendantes.

En effet, l’absence de relation contractuelle directe entre la société Pyxis Pharma et le consommateur final, ne constitue pas un critère objectif permettant de ne pas appliquer à la société Pyxis Pharma les conditions des officines, dès lors que le transfert de propriété se fait dans le patrimoine de l’officine commettante qui a un rôle de conseil envers le consommateur final. De même, la relation privilégiée avec les officines de pharmacie, dont se prévaut la société Cooper, constitue un critère subjectif et non pas objectif. Enfin, l’absence de contrainte de stockage pour la société Pyxis Pharma, invoquée par la société Cooper, ne constitue pas un critère distinctif, dans la mesure où la société Pyxis Pharma, tout comme les pharmaciens titulaires d’officine, a recours à des CPA pour assurer le stockage des médicaments commandés à la société Cooper, lequel recours lui est imposé.

Dans ces conditions, la société Cooper ne saurait objectivement réserver l’application de ses conditions d’achat favorables aux seules officines indépendantes ou membres d’un groupement qui se charge du seul référencement des produits, les commandes, facturations et livraisons des produits se faisant directement avec les officines, et appliquer à la SRA Pyxis Pharma, agissant d’ordre et pour le compte des officines ahdérentes, les conditions commerciales moins favorables réservées aux grossistes, voire aux officines groupées. Cette pratique, tendant à ne pas faire bénéficier aux SRA des mêmes conditions d’achat que celles des officines d’ordre et pour le compte desquelles elles agissent, illustre un déséquilibre concurrentiel au sein de la chaîne de distribution, au détriment des intermédiaires, dont les SRA, et la position de faiblesse dans laquelle se trouvent, à différents degrés, les intermédiaires de la distribution vis-à-vis des laboratoires pour leur approvisionnement, ainsi que l’a relevé l’Autorité de la concurrence, alors que les SRA ont été constituées pour présenter un réel contre-pouvoir du marché des fournisseurs et permettre de mettre fin à la pratique des rétrocessions entre pharmaciens.

La société Pyxis Pharma, qui exerçait l’activité de SRA au moment des faits litigieux, et nouvellement dénommée Mon Courtier en assurance, était donc bien fondée à solliciter la communication et l’application à son bénéfice des conditions générales d’achat de la société Cooper accordées aux officines indépendantes, lesquelles doivent constituer le socle de la négociation commerciale, en application des dispositions des articles L.442-6 et L.441-6 du code de commerce.

Sur les préjudices :

Selon l’article L.442-6 I. du code de commerce, 'Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers

9° De ne pas communiquer ses conditions générales de vente, dans les conditions prévues à l’article L.441-6, à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour l’exercice d’une activité professionnelle'.

Le défaut de communication des conditions générales de vente constitue en tant que tel une pratique restrictive de concurrence, sanctionnée par les dispositions de l’article L.442-6 III du code de commerce.

Si la société Cooper a communiqué l’ensemble de ses conditions générales à la société Pyxis Pharma, elle a refusé de lui appliquer les conditions générales correspondant aux officines et d’en faire le socle de leur négociation commerciale en violation des dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce.

L’absence de communication, à la société Pyxis Pharma, des conditions générales de vente de la société Cooper applicables aux officines de pharmacie comme socle de la négociation commerciale, constitutive d’une pratique restrictive de concurrence, a causé un préjudice à la société Pyxis Pharma, qui a subi un désavantage compétitif dans la chaîne de distribution des médicaments non remboursés.

La société Pyxis Pharma justifie d’un préjudice lié à cette pratique restrictive de concurrence, en ce que ses adhérents ont dû faire face à des ruptures de stocks, générant une atteinte à la réputation de la société Pyxis Pharma et remettant en cause le principe même ou l’utilité de son activité de structure de regroupement d’achat.

Il convient, en conséquence, de condamner la société Cooper à payer à la société Pyxis Pharma devenue Mon Courtier en pharmacie, la somme de 20.000 euros en réparation de son préjudice au titre de cette pratique restrictive de concurrence.

Sur la publication de la décision :

La publication de la décision étant de droit en application des dispositions de l’article L.442-6 III du code de commerce, il convient d’ordonner la publication d’un communiqué judiciaire selon les modalités figurant au dispositif.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

La société Cooper échouant sera condamnée aux entiers dépens.

Il convient, en outre, de la condamner à payer à la société Pyxis Pharma, devenue Pyxis Services puis Mon Courtier en Pharmacie, une indemnité totale de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de débouter le surplus des appelantes de leurs demandes à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

DIT l’association Pyxis Pharma irrecevable à agir,

INFIRME le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris 28 mars 2013 en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle d’enjoindre la société Coopération Pharmaceutique Française d’adresser à la société Pyxis Pharma, comme base de négociation commerciale annuelle, la version de ses conditions générales de vente applicables aux officines et sa demande indemnitaire à ce titre,

Statuant de nouveau,

CONDAMNE la société Coopération Pharmaceutique Française à communiquer à la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, les conditions générales de ventes accordées aux officines indépendantes, comme base de négociation commerciale entre lesdites sociétés,

CONDAMNE la société Coopération Pharmaceutique Française à payer à la société Pyxis Pharma, devenue Mon Courtier en Pharmacie, la somme de 20.000 euros en réparation de son préjudice au titre de la pratique restrictive de concurrence,

CONDAMNE la société Coopération Pharmaceutique Française à payer à la société Pyxis Pharma devenue Mon Courtier en Pharmacie, une indemnité de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

ORDONNE la publication du communiqué judiciaire suivant, aux frais de la société Coopération Pharmaceutique Française et dans la limite du montant maximal de 5.000 euros TTC :

'Par arrêt du 4 juillet 2019, la cour d’appel de Paris a jugé que relevait des dispositions de l’article L.442-6 du code de commerce le défaut de communication, à la société Pyxis Pharma, SRA agissant d’ordre et pour le compte des officines adhérentes, des conditions de vente de la société Cooper applicables aux officines indépendantes'.

DIT que ce communiqué devra figurer dans un encadré de couleur rouge sur fond blanc figurant en partie supérieure, en police de couleur noire et de caractère de taille 10, et paraître dans la première ou la seconde parution des publications suivantes : Le journal Les Echos et Le Quotidien du Pharmacien, suivant la signification de l’arrêt, en première page intérieure de ces publications, dans la limite du montant maximal de 5.000 euros susvisé,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Coopération Pharmaceutique Française aux dépens de première instance et d’appel.

La Greffière La Conseillère pour le Président empêché

Hortense VITELA Fabienne SCHALLER

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 5, 4 juillet 2019, n° 17/13577