Cour d'appel de Paris, Pôle 2 chambre 1, 18 juin 2019, n° 18/20661

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 2 ch. 1, 18 juin 2019, n° 18/20661
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/20661
Importance : Inédit
Sur renvoi de : Cour de cassation, 6 juin 2018, N° B17-17.779
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRET DU 18 JUIN 2019

(n° 279 , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/20661 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6LR5

Décisions déférées à la Cour : Arrêt du 07 Juin 2018 – Cour de Cassation – Pourvoi n° B 17-17.779

Arrêt du 24 Mars 2017 – Cour d’Appel de PARIS – RG n° 15/12473

Jugement du 20 Mai 2015 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU – RG n° 14/00263

APPELANTS

Monsieur [E] [S]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 1]

Madame [N] [S] née [W]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 2]

Représentés par Me Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0079

Ayant pour avocat plaidant Me Marie-Christine BEGUIN de la SELAS CABINET BEGUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0254

INTIMES

Monsieur [M] [D]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté et plaidant par Me Diane PROTAT de l’AARPI AARPI PROTAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0084

SELAFA M. J.A. prise en la personne de Me [I] [Y] ès-qualité de liquidation judiciaire de la société SGA VARENNE.

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

Ayant pour avocat plaidant Me Olivier DEBEINE de l’AARPI CBR & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0504

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 Avril 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian HOURS, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

Mme Anne de LACAUSSADE, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Christian HOURS dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Christian HOURS, Président de chambre et par Lydie SUEUR, Greffière présent lors du prononcé.

*****

Selon acte du 27 janvier 2012 la société Cabinet Varenne Champagne, ayant une activité d’administration de biens, a été absorbée par la SAS Société de gestion et d’administration, détenue par la société Ficap, elle même détenue par la société Bertlinck SA.

Par acte authentique du 10 octobre 2012, M. [E] [S] et Mme [N] [W], son épouse, ont consenti à M. [M] [D] une promesse d’hypothèque sur un bien immobilier leur appartenant, sis à [Adresse 4], pour garantir les investissements que celui-ci envisageait de réaliser dans le groupe dont M. [S] devait assurer la direction.

Par acte sous seing privé du 6 novembre 2012, les époux [S] ont cédé à M. [D] une part de la société Ficap au prix de 1 euro, l’article 5 de l’acte de cession, intitulé « garantie de passif et d’actif » précisant : « les cédants garantissent solidairement avec la société Bertlinck SA, associée de la SARL Ficap la parfaite sincérité des bilans de sociétés Ficap, SAS Cabinet Varenne Champagne et Société de gestion et d’administration arrêtés au 30 septembre 2012 ».

Par acte sous seing privé du 7 novembre 2012, les époux [S] ont également cédé à M. [D], au prix global et forfaitaire de 30 euros, les trente actions de 1 000 euros chacune qu’ils détenaient dans la société Betlinck SA, ce prix ayant été fixé sur la base du bilan au 31 décembre 2011 de cette société, ainsi qu’en fonction de la situation financière, comptable et juridique actuelle de ses sociétés filiales, la SAS Société de gestion et d’administration et la SAS Cabinet Varenne. La promesse d’hypothèque précitée du 10 octobre 2012, sur le bien immobilier leur appartement, sis à [Adresse 5], était rappelée.

Invoquant des détournements qu’aurait commis M. [S] au préjudice de la société SGA-Varenne, M. [D] l’a mis en demeure, le 1er février 2013, d’avoir à restituer à cette société la somme de 1 517 456,13 euros et l’a informé qu’à défaut de réponse positive la lettre valait mise en oeuvre de la garantie de passif qu’il lui avait accordée.

Par lettre du 3 février 2013, M. et Mme [S] ont reconnu devoir cette somme à M. [D].

Par courrier du 7 février 2013 adressée à M. [D], les époux [S] ont indiqué que :

'Par la présente, nous acceptons la mise en oeuvre de la garantie de passif stipulée aux contrats de cessions des actions et de part sociale des sociétés Bertlinck et Ficap en date des 6 et 7 novembre 2012.

Nous reconnaissons que nous vous devons ce jour la somme de 1 517 456,13 euros au titre de cette garantie de passif.

Nous vous proposons dans un premier temps de vous céder notre maison sise [Adresse 6] pour un prix de 420 000 euros payé par compensation avec les sommes que nous vous devons'.

Par acte authentique du 6 février 2013, les époux [S] ont consenti une promesse de vente de l’immeuble précité selon les modalités indiquées.

Par acte authentique du 20 mars 2013, les époux [S] ont vendu à M. [D] le pavillon à usage d’habitation précité, sis [Adresse 7], au prix de 420 000 euros, payable par compensation avec le montant en principal et intérêts d’une même somme formant partie de la dette reconnue par les vendeurs envers l’acquéreur en vertu d’une garantie de passif incluse dans deux actes sous seing privé précités des 6 et 7 novembre 2012 aux termes desquels les époux [S] avaient cédé à M. [D] les actions et parts qu’ils détenaient dans la société de droit luxembourgeois Bertlinck SA et la société Ficap.

L’acte de vente comportait également une clause d’entrée en jouissance des acquéreurs au 30 septembre 2013 avec une clause pénale d’indemnité journalière de 150 euros par jour de retard du fait du vendeur.

Le 24 avril 2013, le redressement judiciaire de la société SGA-Varenne a été ouvert, converti en liquidation judiciaire le 17 juillet 2013.

Par acte du 14 novembre 2013, les époux [S] ont fait assigner M. [D] en nullité de la vente du 20 mars 2013 devant le tribunal de grande instance de Fontainebleau. Ils ont également demandé l’annulation des actes de cession d’actions et de la part sociale, ainsi que des garanties de passifs qu’ils contiennent.

Par ordonnance de référé du 20 janvier 2014, le juge d’instance de Fontainebleau a débouté M. [D] de sa demande principale en expulsion des époux [S] du bien immobilier cédé en raison de la contestation sérieuse tirée de l’existence d’une procédure sur le fond.

Par jugement du 20 mai 2015, le tribunal de grande instance de Fontainebleau, a :

— rejeté l’exception d’irrecevabilité soulevée par M. [D], relative à la publication de l’assignation ;

— déclaré recevable la demande de nullité des actes de cession des actifs et part sociale des sociétés Bertlinck SA et SARL Ficap comportant garantie de passif ;

— débouté les époux [S] de leurs demandes de nullité de la vente du bien immobilier et des cessions des actions et part sociale ;

— accordé à M. [D] un délai de deux mois à compter de la signification du jugement pour acquitter l’euro correspondant au prix de cession ;

— constaté que les époux [S] étaient occupants sans droit ni titre du bien cédé depuis le 1er octobre 2013 ;

— ordonné aux époux [S] de libérer les lieux de tous les occupants de leur chef sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;

— autorisé M. [D], à défaut de libération volontaire, à faire procéder à leur expulsion ;

— condamné solidairement les époux [S] à payer à M. [D] les sommes de 54 750 euros au titre de l’indemnité journalière forfaitaire pour la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014, de 5 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 1 500 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné les époux [S] aux dépens ;

— ordonné l’exécution provisoire.

Le tribunal de grande instance de Fontainebleau a essentiellement retenu que l’acte authentique faisait foi des faits énoncés par l’officier public comme ayant été accomplis par lui ou s’étant passés en sa présence dans l’exercice de ses fonctions ; que les époux [S] n’avaient pas contesté les faits énoncés par le notaire instrumentaire, lequel avait dûment constaté leur consentement pour vendre leur bien immobilier à hauteur de 420 000 euros par compensation avec partie du passif garanti sur les parts et actions des sociétés cédées ; que les époux [S] ne rapportaient pas la preuve de violences ou de menaces à leur encontre tant pour les cessions de parts et d’action, que pour celle de l’immeuble ; que M. [S], président de la société SGA, ne pouvait ignorer sa situation financière ni l’étendue de ses propres engagements.

Par un premier jugement du 18 octobre 2016, le tribunal de commerce de Paris, sur la requête du procureur de la République, a prononcé à l’encontre de M. [S], pour aggravation frauduleuse du passif de la société SGA-Varenne dont il était le dirigeant de droit, une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler une entreprise artisanale ou commerciale pendant une durée de cinq ans et, à l’encontre de M. [D] (qui a interjeté appel de cette décision), pour détournement d’actif de la même société dont il était le dirigeant de fait, la faillite personnelle pour la même durée.

Par un second jugement du même jour, le tribunal de commerce de Paris a sursis à statuer sur l’action en comblement de l’insuffisance d’actif, exercée par le liquidateur judicaire de la société SGA-Varenne à l’encontre de MM. [S] et [D], jusqu’à ce qu’il soit définitivement statué sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement du 20 mai 2015.

Sur appel des époux [S] contre le jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau du 20 mai 2015, la cour d’appel de Paris (chambre 4-1) a, par arrêt du 24 mars 2017, rendu au contradictoire de la Selafa MJA, ès qualités de mandataire liquidateur de la société SGA-Varenne, intervenue volontairement en cause d’appel, confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a :

— rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [D] ;

— déclaré recevable la demande de nullité des actes de cession des actions et part sociale des société Bertlinck SA et SARL Ficap ;

— débouté M. [S] et Mme [W], épouse [S], de leur demande de nullité des actes sous seing privé des 6 et 7 novembre 2012 de cession des actions et part sociale et la SA Bertlinck et SARL Ficap ;

et, l’infirmant pour le surplus, statuant à nouveau a :

— prononcé l’annulation de l’acte authentique du 20 mars 2013 reçu par M. [M], notaire associé de la SCP « [V] [H], [X] [C], [P] [G], Christian [H], [Z] [M], [W] [T] et [C] [Q], notaires », publié au service de la publicité foncière de Fontainebleau le 28 mars 2013, volume 2013 P n°1536, aux termes duquel M. [S] et Mme [W], épouse [S], ont vendu à M. [D] un pavillon à usage d’habitation sis [Adresse 8] au prix de 420 000 euros payé par compensation avec le montant en principal et intérêt d’une même somme, formant partie de la somme due par le vendeur à l’acquéreur, ainsi qu’il ressort du courrier adressé par M. et Mme [S] à M. [D] du 3 février 2013 dont copie annexée à l’acte;

— dit que le présent arrêt sera publié par la partie la plus diligente au service de la publicité foncière territorialement compétent ;

— débouté M. [D] de ses demandes d’expulsion, de paiement d’indemnité d’occupation et de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

— rejeté les autres demandes ;

— condamné M. [D] aux dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

La cour a essentiellement retenu qu’en l’absence de prix convenu pour la cession de l’immeuble, il n’y avait pas eu de vente conclue.

Sur pourvoi en cassation de M. [D] contre cet arrêt, la Cour de cassation a, par arrêt du 7 juin 2018, cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt de la cour d’appel du 24 mars 2017, lui reprochant d’avoir violé l’article 1582 du code civil en ayant, pour prononcer l’annulation de l’acte de vente et rejeter les demandes de M. [D], retenu que celui-ci n’était pas créancier de la garantie de passif, que la reconnaissance de dettes était sans cause et que, à défaut de prix, la vente devait être annulée, alors qu’elle avait constaté que le prix de vente avait été déterminé dans l’acte et que l’existence de ce prix n’était pas affectée par une éventuelle impossibilité de le compenser avec une dette du vendeur à l’égard de l’acquéreur.

Les époux [S], qui ont saisi la cour de renvoi, demandent à la cour dans leurs dernières écritures du 18 mars 2019 :

— de les recevoir en leur appel et de les déclarer bien fondés ;

— de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [D] et déclaré recevable la demande en nullité des actes de cessions de part et actions des sociétés Ficap et Bertlinck ;

— d’infirmer le jugement rendu le 20 mai 2015 par le tribunal de grande instance de Fontainebleau en toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau :

— de constater la nullité des actes de cessions de parts et d’actions des sociétés Bertlinck et Ficap et des prétendues garanties de passif qu’ils contiennent ;

— de prononcer la nullité de la vente du bien immobilier sis à [Adresse 9] ;

— d’ordonner la publication du jugement à intervenir aux services compétents de la publicité foncière ;

— de constater la résolution de la vente du bien immobilier appartenant aux époux [S] pour défaut de paiement du prix ;

— de condamner M. [D] à leur verser une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

subsidiairement :

— de prononcer la résolution de la vente du bien immobilier sis à [Adresse 9], dont les références cadastrales sont indiquées dans le paragraphe qui précède ;

— de condamner M. [D] à leur verser une somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— de condamner M. [D] aux entiers dépens en ce compris les frais de publication foncières.

Dans ses dernières conclusions du 4 février 2019, la Selafa MJA, liquidateur de la société SGA Varenne, demande à la cour de :

— lui donner acte de son intervention volontaire à titre accessoire pour soutenir les prétentions des époux [S] et débouter M. [D] de sa demande tendant à faire juger irrecevables ses demandes ;

— juger que les époux [S] ont publié à la conservation des hypothèques leur assignation introductive de l’instance au fond devant le tribunal de grande instance de Fontainebleau;

. débouter M. [D] de sa fin de non recevoir visant les demandes des époux [S] en annulation et subsidiairement en résolution de la vente de l’immeuble ;

. sur le fond à titre principal, faire droit aux demandes des époux [S] en ce qu’elles visent à la nullité de la vente du bien immobilier leur appartenant, faute de prix et l’infirmation du jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau rendu le 20 mai 2015 ;

. sur le fond à titre subsidiaire, y faire droit en ce qu’elles visent à la résolution de la vente du bien immobilier leur appartenant, faute de paiement du prix et l’infirmation du jugement du TGI de Fontainebleau rendu le 20 mai 2015 ;

— donner acte aux époux [S], en cas d’annulation de la vente, de leur engagement de vendre leur bien immobilier au prix du marché et d’en verser le produit à la liquidation judiciaire de la société SGA Varenne.

Dans ses dernières écritures du 4 janvier 2019, M. [D] demande à la cour de :

— juger qu’une demande de « donner acte » est dépourvue de toute portée juridique ;

— en conséquence, juger irrecevables les conclusions de la Selafa MJA,

— juger irrecevables les demandes des époux [S] tendant au prononcé de la nullité et/ou de la résolution de la vente du bien immobilier sis à [Adresse 9], faute pour ces derniers de justifier avoir procédé à la publication de leur assignation introductive d’instance en date du 14 novembre 2013 et avoir produit un certificat du conservateur des hypothèques ou la copie de leur demande revêtue de la mention de publicité avant la clôture des débats de première instance qui a été prononcée par le tribunal de grande instance de Fontainebleau par ordonnance en date du 19 janvier 2015 ;

à titre subsidiaire :

— confirmer le jugement rendu le 20 mai 2015 par le tribunal de grande instance de Fontainebleau ;

— débouter les époux [S] de leurs demandes en nullité des actes de cession de la part de la société Ficap et des actions de la société Bertlinck ;

— constater qu’il a procédé au règlement de la somme de 1 euro par RAR du 22 juin 2015 retirée le 4 juillet 2015 correspondant au prix de cession de la part de la société Ficap, sous réserve toutefois de son règlement déjà effectué antérieurement,

— débouter les époux [S] de leurs demandes en nullité de la vente de leur bien immobilier sis [Adresse 10], intervenue le 20 mars 2013,

— en conséquence, prononcer l’expulsion des époux [S], occupant sans droit ni titre ainsi que des occupants de leur chef, avec le concours de la Force publique, si besoin et d’un serrurier ;

— l’autoriser à procéder au transport et à la séquestration de tous meubles et objets laissés dans les lieux, au frais, risques et périls, des époux [S], dans tel garde meubles qu’il plaira à l’acquéreur ;

— condamner solidairement les époux [S] à lui payer une astreinte journalière de 50 euros à compter du 3 juin 2015, date de signification du jugement du 20 mai 2015 et une indemnité journalière contractuelle d’occupation de 150 euros, soit, pour la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014, la somme de 150 euros x 365 jours = 54 750 euros;

— ordonner la mainlevée de la publication au SPF de Fontainebleau le 6 décembre 2013 de l’assignation introductive d’instance du 14 novembre 2013 et ce sous astreinte provisoire de 500 euros passé le délai de quinzaine de la signification de l’arrêt à intervenir, et ce durant un mois, passé lequel délai il sera à nouveau statué tant sur la liquidation de cette astreinte, que sur la fixation d’une astreinte plus dissuasive,

— condamner solidairement les époux [S] à lui payer une indemnisé d’occupation contractuelle d’un montant de 4 500 euros par mois (150 euros x 30 jours) jusqu’à la libération des lieux et ainsi la somme liquidée provisoirement de 164 250 euros pour la période du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2018,

— condamner solidairement les époux [S] et la Selafa MJA à lui payer 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— les condamner solidairement aux dépens de première instance, appel, cassation et renvoi après cassation, dont la distraction au profit de l’Aarpi Protat, avocats, par application de l’article 699 du code de procédure civile.

A l’audience, il a été acté par le greffier que le conseil de M. [D] a renoncé à la fin de non recevoir tirée de l’absence de publication de l’assignation des époux [S] devant le tribunal de grande instance de Fontainebleau.

SUR CE,

Considérant que les époux [S] allèguent que :

— en vertu de l’article 1109 ancien, le consentement n’est pas valable s’il a été obtenu par la violence ; M. [S] a été manipulé pendant des années par M. [D] ; il n’a été qu’un exécutant, mettant plusieurs années à comprendre la situation ; il était mandataire social révocable sur le champ par les associés ; il a signé car il existait une contrainte économique et parce qu’il avait peur d’aller en prison ;

— subsidiairement, l’acquéreur n’a jamais payé le prix qui aurait été payé « hors la vue du notaire » par compensation avec une créance, née de la mise en 'uvre d’une garantie de passif consentie à M. [D] ;

— le règlement du prix constitue une condition essentielle à la cession au visa des dispositions de l’article 1650 du code civil ; faute de paiement, l’acte est nul et ne peut produire aucun effet ;

— la totalité des actes reprochés à M. [S] ont été exécutés dans le cadre de ses fonctions et sous les ordres de M. [J], beau-père de M. [D], véritable dirigeant de fait des sociétés en cause ;

— le seul bénéfice que les appelants ont tiré de ces opérations a été fixé par l’administration fiscale à la somme de 157 552 euros ; ils ont d’ailleurs acquitté un redressement fiscal ;

— M. [D] ne démontre pas l’existence de dettes de la société justifiant le paiement ;

— la garantie de passif bénéficie à la société cédée et non au cessionnaire, de sorte qu’il n’y a pas pu avoir paiement par compensation avec une créance inexistante de M. [D] ;

Considérant que M. [D] réplique que :

— l’article 30-5 du décret du 4 janvier 1955 précise que la demande de résolution, révocation, annulation ou rescision de droits résultant d’actes soumis à publicité n’est recevable devant les tribunaux que si elle a été elle-même publiée à la conservation des hypothèques et s’il est justifié de cette publication par un certificat du conservateur ou la production d’une copie de la demande revêtue de la mention de publicité ; les époux [S] ne justifient pas avoir procédé à la publication de leur assignation introductive d’instance en date du 14 novembre 2013 ; ils ne produisent pas non plus un certificat du conservateur des hypothèques ;

— les époux [S] ne rapportent pas la preuve d’une violence exercée à leur encontre afin d’obtenir leur consentement ; ils ne prouvent ni la contrainte par menace de voie de droit, ni son caractère illégitime, ni encore son caractère démesuré, étant rappelé qu’en sa qualité de dirigeant de société, M. [S] était à même de répondre par les voies de droit appropriées ;

— l’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux des faits personnellement constatés par l’officier public ;

— M. [S] est un professionnel ayant plus de 30 ans d’ancienneté ;

— les époux [S] n’ont jamais déposé de plainte pénale à l’encontre de M. [D] ou de M. [J] pour violences, menaces ou encore harcèlement ;

— les époux [S] n’ont déposé aucune inscription pour faux à l’encontre de l’acte de vente du 20 mars 2013 ;

— M. [S] n’apporte pas de commencement de preuve de la pression qu’il dit avoir subie quotidiennement ;

— pour apprécier la validité de la vente il ne faut pas confondre défaut de prix et absence de prix ; en vertu de l’article 1583 du code civil, la vente est considérée parfaite entre les parties et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur dès qu’il est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé; la convention de vente immobilière conclue le 20 mars 2013 comportait bien l’indication du prix de vente ; l’absence de paiement du prix n’emporte pas nullité de la vente ;

— contrairement à ce qu’affirme la Selafa MJA, en l’absence de stipulation pour autrui dans l’acte, la garantie de passif bénéficie nécessairement au cessionnaire ; puisque la convention du 6 novembre 2012 ne désignait pas la société, tiers à l’acte, comme bénéficiaire de la garantie, la cour d’appel ne pouvait juger que le cessionnaire, partie à l’acte, ne pouvait en être le bénéficiaire et que la société pouvait l’être ;

— la convention de cession d’actions produite aux débats et dûment signée par eux précise que « le cessionnaire a payé par chèque remis à ce jour » ; le prix de la vente étant payé, aucune résolution n’est encourue ;

Considérant que Selafa MJA, ès qualités, fait valoir que :

— l’intervention est accessoire lorsqu’elle appuie les prétentions d’une partie ; elle est recevable si son auteur a intérêt pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie; si la cour décide que la vente est valable, le détournement de la créance d’indemnisation de la SGA Varenne sera consommé et la condamnation par le tribunal de commerce s’imposera d’autant plus ; si la cour annule la vente les époux [S] pourront exécuter leur engagement de faire vendre la maison au prix du marché et en verser le prix à la procédure collective ce qui pourra diminuer l’insuffisance d’actif ; le liquidateur judiciaire est ainsi en droit et à tout intérêt à appuyer la demande d’annulation de la vente des époux [S] ;

— la vente est par essence un contrat à titre onéreux ; la contrepartie du transfert de propriété réside dans le paiement d’un prix ; de jurisprudence constante, la cession de la propriété d’une chose sans prix ou en contrepartie d’un prix symbolique n’est pas une vente;

— la SGA Varenne a, depuis 2009, facturé aux copropriétaires des honoraires et frais qui n’étaient pas justifiés par de réelles prestations ; M. [D] avait pleinement conscience que la SGA Varenne était titulaire de la créance d’indemnisation des détournements opérés par M. [S] et non lui même ;

— M. [D] ayant acquis le contrôle de la SGA Varenne pour un prix symbolique n’a subi aucun préjudice suite à la découverte prétendue de nouveaux passifs de la société ;

— eu égard au montant dérisoire du prix de vente des droits sociaux, les parties ne sont pas convenues que M. [S] pourrait avoir à indemniser M. [D] d’une diminution de l’actif net ou de la valeur des sociétés Bertlink, Ficap ou SGA Varenne ;

— en droit des sociétés, mise à part la garantie d’éviction, la seule garantie de droit bénéficiant à l’acquéreur en cas de cession d’actions est la possibilité pour la société d’exercer l’activité économique constituant son objet social ;

— lorsque la clause de garantie ne comporte pas d’indication du bénéficiaire, la garantie est réputée stipulée au profit de la société dont les droits sont vendus dès lors qu’elle porte sur les dettes sociales ; dans la clause de garantie de passif du contrat de cession des actions Bertlink il n’est pas prévu d’obligation du cédant d’indemniser le cessionnaire en cas de diminution de la valeur de la société ; il en va de même pour la société Ficap ; M. [D] n’a pas été mentionné en qualité de bénéficiaire de la garantie de passif dans les contrats de cession des sociétés Bertlinck et Ficap ; le bénéficiaire ne peut être que la société et non l’acquéreur de ses droits sociaux ;

— les époux [S] n’ayant aucune dette envers M. [D] au titre de la garantie de passif, les parties étant convenues que le prix décidé de vente de 420 000 euros était payé par compensation avec une dette, qui n’existait pas, ont convenu que la vente aurait lieu pour un prix déterminé, mais qui ne serait jamais payé, ce qui équivaut à un prix nul ;

Considérant que par des motifs pertinents que la cour fait siens le premier juge a relevé que la demande en nullité pour violence de la vente de l’immeuble des appelants n’était aucunement fondée en l’absence de toute preuve d’un tel comportement de la part de M. [D] sur M. [S], comptable de profession, dirigeant social possédant une expérience certaine ; qu’il n’est pas justifié d’une situation de violence économique qui serait résulté du simple fait que M. [D] et/ou son beau-père auraient disposé de moyens financiers beaucoup plus importants que les siens ou qu’il aurait occupé une fonction de mandataire social précaire ; qu’aucune plainte pénale n’a été déposée par M. [S] ni aucune autre action sous quelque forme que ce soit ; que, dans ces conditions, il ne peut y avoir lieu à nullité de la vente pour violence ;

Considérant par ailleurs que l’absence de prix, qui aurait été de nature à entraîner la nullité de la vente de l’immeuble des époux [S], ne doit pas être confondue avec l’absence de paiement du prix de vente ; qu’en l’espèce un prix de vente avait bien été prévu pour la maison des appelants, seule posant difficulté le fait de savoir s’il a été valablement payé ; que dans ces conditions, il ne peut y avoir lieu à nullité de la vente pour absence de prix de vente;

Considérant que l’éventuelle absence de paiement du prix de vente n’est pas de nature à entraîner la nullité de la vente mais seulement sa résolution ; qu’il ne peut y avoir lieu à nullité de la vente pour absence de paiement du prix de vente ;

Considérant que le prix était censé avoir été payé par compensation avec la créance dont disposait M. [D] du fait des garanties d’actif et de passif insérées dans les actes de vente, respectivement d’une part de la société Ficap au prix de 1 euro et de 30 parts de la société Bertlinck SA au prix de 30 euros ;

Considérant qu’eu égard au montant extrêmement faible, voire négligeable, des prix de vente convenus pour les actions et part cédés, de telles clauses ne sauraient pouvoir être qualifiée de clause de révision de prix dont pourrait se prévaloir le cessionnaire mais seulement de clause de garantie de reconstitution permettant, le cas échéant, une action de la société cédée, en paiement du passif non prévu dans le bilan de référence ; que d’ailleurs, M. [D] avait bien interprété ainsi les clauses dont s’agit puisque, dans son courrier de mise en demeure aux époux [S] du 1er février 2013, reprochant à M. [S] l’absence de sincérité des comptes sociaux au motif que des vacations avaient été facturées à hauteur de 1 517 456, 13 euros sans contrepartie réelle au profit des syndicats de copropriétaires, il les mettait en demeure de restituer ladit somme à la SGA et non pas à lui-même ;

Considérant dès lors que le bénéficiaire des garanties souscrites apparaissant être en réalité la SGA et non M. [D], la reconnaissance de dette des époux [S] envers M. [D], contenue dans leur courrier du 3 février 2013, est dépourvue de cause, de sorte que le prix de vente n’a pu être payé par compensation et que, ne l’ayant pas été, la vente doit être résolue pour défaut de paiement ;

Considérant que pour autant, les cessions des actions et part ne sont pas nulles faute de preuve de violence, le tribunal de grande instance de Fontainebleau devant être confirmé sur ce point ;

Considérant qu’il convient de donner acte aux époux [S] de leur engagement de vendre le bien immobilier en cause au prix du marché et d’en verser tout le produit à la liquidation judiciaire de la société VGA Varenne ;

Considérant que M. [D] devra verser aux époux [S] la somme de 5 000 euros pour compenser les frais qu’ils ont exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu’il devra en outre supporter les dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais de publication foncière ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau en ce qu’il a débouté les époux [S] de leurs demandes en nullité des actes de cessions de part et d’actions des sociétés Bertlinc et Ficap et des garanties de passif, ainsi que de la vente du bien immobilier sis à [Adresse 9] ;

L’infirmant pour le surplus et statuant à nouveau, prononce la résolution de ladite vente du bien sis à [Adresse 9], cadastré comme suit :

SECTION N. Lieudit Surface

AL 549 3 Rue de Brolles 00 ha 12 à 23 ca

AL 551 Rue de Brolles 00 ha 01 a 11 ca

AL 553 Les Ranges 00 ha 00 a 27 ca

AL 555 Les Ranges 00 ha 00 a 06 ca

AL 557 Les Ranges 00 ha 00 a 09 ca

AL 559 Les Ranges 00 ha 00 a 03 ca

AL 561 Les Ranges 00 ha 00 a 07 ca

AL 563 Les Ranges 00 ha 00 a 03 ca

AL 565 Les Ranges 00 ha 00 a 08 ca

AL 567 Les Ranges 00 ha 00 a 11 ca

Ordonne la publication du jugement aux services compétents de la publicité foncière ;

Déboute M. [D] de l’ensemble de ses demandes ;

Donne acte aux époux [S] de leur engagement de vendre le bien immobilier en cause au prix du marché et d’en verser tout le produit à la liquidation judiciaire de la société VGA Varenne ;

Condamne M. [D] à verser aux époux [S] la somme de 5 000 euros pour compenser les frais qu’ils ont exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu’il devra en outre supporter les dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais de publication foncière.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Paris, Pôle 2 chambre 1, 18 juin 2019, n° 18/20661