Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9, 13 juin 2019, n° 16/11196

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 9, 13 juin 2019, n° 16/11196
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/11196
Décision précédente : Tribunal d'instance de Paris, 18 février 2016, N° 11-14-000177
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9

ARRÊT DU 13 JUIN 2019

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 16/11196 – N° Portalis 35L7-V-B7A-BY3KR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 février 2016 – Tribunal d’Instance de PARIS (7e) – RG n° 11-14-000177

APPELANTE

La société EUROSYS TELECOM, société à responsabilité limitée prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 437 953 714 00098

[…]

92600 ASNIERES-SUR-SEINE

Représentée par Me David BENAROCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E0477

INTIMÉES

La société GRENKE LOCATION, société par actions simplifiée agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 428 616 734 00128

[…]

[…]

Représentée par Me Morgane GRÉVELLEC, avocat au barreau de PARIS, toque : E2122

La société PHARMACIE X, société d’exercice libéral à responsabilité limitée prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 332 292 507 00024

[…]

92100 BOULOGNE-BILLANCOURT

Représentée et assistée de Me Valérie HADJAJE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1415

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 2 avril 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Agnès BISCH, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Philippe DAVID, Président

Mme Fabienne TROUILLER, Conseiller

Mme Agnès BISCH, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

—  CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Philippe DAVID, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 22 mars 2012, la société PHARMACIE X (pharmacie de l’Eglise) signait un bon de commande pour la fourniture d’une installation téléphonique et un raccordement sur le réseau France TELECOM, sur l’offre de la société ODITEL TELECOM, entreprise partenaire de la société EUROSYS TELECOM qui avait démarché la société PHARMACIE X.

Le 23 mai 2012, le matériel était livré comme convenu et installé par la société EUROSYS TELECOM.

Le 27 juin 2012, la connexion chez l’opérateur était réalisée et la PHARMACIE X signait un contrat de location de matériel téléphonique auprès de la société GRENKE LOCATION.

Il était contractuellement prévu que la société EUROSYS TELECOM devait entreprendre les démarches nécessaires à la résiliation des précédents abonnements téléphoniques de la pharmacie, auprès des opérateurs SFR et ORANGE.

Cependant, la société PHARMACIE X continuait de recevoir et de payer les factures émises par ses anciens opérateurs.

Cette anomalie était signalée au commercial de la société EUROSYS TELECOM, en juillet 2012, et le 7 février 2013, le service juridique de cette société expliquait que la réception des factures SFR postérieures à la résiliation du contrat d’abonnement résultait d’une absence de prise en compte de cette demande de résiliation qui avait été adressée à cet opérateur téléphonique le 14 novembre 2012, soit cinq mois après la connexion des lignes téléphoniques auprès de la société ODITEL TELECOM.

Le service client de la société SFR expliquait qu’il était impossible, compte tenu de l’ancienneté du contrat, de changer de contrat sans procéder au préalable à une coupure de la ligne téléphonique et de

la connexion Internet pendant 10 jours, ce qui pour une pharmacie qui prenait en charge des remboursements des assurés sociaux par la carte vitale et devait passer des commandes de médicaments quotidiennement auprès de son grossiste, était rigoureusement impossible.

Le 27 février 2013, la société PHARMACIE X résiliait, par courriers recommandés avec accusé de réception adressés à la société EUROSYS TELECOM, à la société ODITEL TELECOM et à la société GRENKE LOCATION, l’ensemble des contrats.

Le 27 août 2013, le matériel était restitué.

La société PHARMACIE X ayant mis un terme à l’autorisation de prélèvement pour le paiement des loyers du contrat de location longue durée, la société GRENKE LOCATION l’assignait devant le tribunal d’instance du 7e arrondissement de PARIS, par acte du 21 mai 2014, pour obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 5 514 euros avec intérêts, correspondant à la location de matériel téléphonique pour une durée de 63 mois, moyennant un loyer trimestriel de 103 euros.

Par acte en date du 17 octobre 2014, la société PHARMACIE X assignait en intervention forcée la société EUROSYS TELECOM aux fins de résiliation du contrat de prestation de services aux torts de celle-ci et de résiliation du contrat de location passé avec la société GRENKE LOCATION, l’ensemble formant selon la demanderesse en intervention forcée, une convention contractuelle indivisible et indépendante.

La société EUROSYS TELECOM soulevait à l’audience l’irrecevabilité des demandes de la PHARMACIE X.

Par jugement contradictoire en date du 19 février 2016, le tribunal d’instance du 7e arrondissement de PARIS :

— déclarait recevable l’action en intervention forcée à l’encontre de la société EUROSYS TELECOM,

— condamnait la société PHARMACIE X à payer à la société GRENKE LOCATION la somme de 5 514 euros au titre des loyers impayés, outre les frais, avec capitalisation des intérêts,

— condamnait la société EUROSYS TELECOM à garantir intégralement la société PHARMACIE X de ces condamnations et la condamnait à lui payer la somme de 1 023 euros à titre de dommages et intérêts, représentant les loyers qu’elle avait réglés,

— condamnait la société EUROSYS TELECOM à lui payer la somme de 1 300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal retenait que la société EUROSYS TELECOM ne pouvait se prévaloir des dispositions du contrat de location entre la société PHARMACIE X et la société GRENKE LOCATION et d’un défaut d’intérêt à agir de la PHARMACIE à son encontre, étant donné que l’action engagée par la société PHARMACIE X à l’encontre de la société EUROSYS TELECOM n’était pas fondée sur un mauvais fonctionnement du matériel loué par la société GRENKE LOCATION mais sur un défaut de conseil et d’information de la société EUROSYS TELECOM, en sa qualité de fournisseur du matériel.

Le tribunal considérait qu’aucun manquement contractuel ne pouvait être reproché à la société GRENKE LOCATION, notamment pas un défaut d’information et de conseil, société dont le rôle se bornait à acquérir au comptant auprès du fournisseur le matériel choisi par le locataire, et à facturer à ce dernier les mensualités prévues au contrat de location longue durée, sans option d’achat.

Le tribunal jugeait que la société EUROSYS TELECOM avait particulièrement manqué à son obligation de conseil et d’information, justifiant son appel en garantie intégrale des condamnations prononcées à l’encontre de la société PHARMACIE X.

Par déclaration en date du 18 mai 2016, la société EUROSYS TELECOM a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 2 janvier 2019, la société EUROSYS TELECOM demande à la cour :

— à titre principal, de déclarer son appel recevable,

— l’infirmation partielle du jugement en ce qu’il a déclaré recevable l’action en intervention forcée de la société PHARMACIE X contre la société EUROSYS TELECOM,

— de juger que le contrat de location conclu entre la société PHARMACIE X et la société GRENKE LOCATION comportait un transfert des garanties du fournisseur société EUROSYS TELECOM au profit du locataire et notamment le pouvoir d’agir en justice contre le fournisseur,

— de constater que le contrat de location avait été résilié par la société GRENKE LOCATION le 15 octobre 2014,

— de constater qu’en première instance, la société PHARMACIE de l’Eglise n’avait assigné en intervention forcée la société EUROSYS TELECOM que le 22 mars 2016,

— en conséquence, de juger que la société PHARMACIE de l’Eglise ne disposait plus du mandat à agir à l’encontre de la société EUROSYS TELECOM à cette date ni en conséquence, de la qualité à agir à son encontre,

— en conséquence, de juger irrecevables les demandes formées par la société PHARMACIE de l’Eglise, dirigées à l’encontre de la société EUROSYS TELECOM,

— à titre subsidiaire, dire que la société EUROSYS TELECOM, en sa qualité d’installateur de matériel de téléphonie, à exécuter l’ensemble de ses obligations contractuelles découlant du bon de commande en date du 22 mars 2012 et dire qu’elle n’a pas manqué à son obligation d’information et de conseil,

— en toute hypothèse, condamner la société PHARMACIE X à verser à la société EUROSYS TELECOM la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile (demande formulée deux fois).

Au soutien de ses demandes, la société EUROSYS TELECOM soutient que l’assignation en intervention forcée à son encontre n’est intervenue qu’un an et demi après le 22 mars 2016, date de la signature du contrat, de sorte que la société PHARMACIE de l’Eglise a interrompu spontanément et unilatéralement le versement des loyers, alors même qu’elle n’avait entrepris aucune procédure judiciaire à l’encontre du fournisseur, la société EUROSYS TELECOM.

Elle ajoute que le matériel livré ne présentait aucun dysfonctionnement et que la société PHARMACIE X (pharmacie de l’Eglise) devait par conséquent continuer de s’acquitter des échéances de loyer auprès de la société GRENKE LOCATION, de sorte que le fournisseur n’avait pas à la garantir de sa condamnation à payer ces loyers, d’autant qu’elle n’aurait commis aucun manquement au devoir d’information et de conseil et que rien ne prouverait que le matériel de téléphonie n’est pas compatible avec la connexion Internet de l’officine.

Elle impute le risque de coupure du réseau Internet à la société SFR exclusivement, à laquelle elle reproche d’avoir tardé à prendre en compte la demande de résiliation.

L’appelante indique également que du 23 mai 2012 au 17 novembre 2012, elle a accepté de prendre en charge les factures émises par les sociétés SFR et Orange, à titre commercial.

Elle conteste sa condamnation à devoir payer la somme de 1023 euros au titre du remboursement des loyers dont la société PHARMACIE X s’est acquittée auprès de la société GRENKE LOCATION, puisque les loyers étaient dus, sauf à admettre un enrichissement sans cause alors que l’installation téléphonique aurait été en parfait état de fonctionnement.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 6 septembre 2016, la PHARMACIE X demande à la cour :

— de déclarer recevable mais mal fondé l’appel interjeté par la société EUROSYS TELECOM et l’en débouter,

— en conséquence, la confirmation du jugement en toutes ses dispositions,

— le débouté de la société EUROSYS TELECOM de sa demande de condamnation de la société PHARMACIE X au paiement de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles,

— la condamnation de la société EUROSYS TELECOM au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la société PHARMACIE X fait valoir que la société EUROSYS TELECOM a manqué à son obligation d’information et de conseil en s’abstenant de vérifier la faisabilité technique de sa prestation et sa compatibilité avec les impératifs particuliers de l’officine.

La société PHARMACIE X fait valoir que par courrier du 27 février 2013 adressé aux sociétés EUROSYS TELECOM, GRENKE LOCATION et ODITEL, elle a dénoncé et résilié l’ensemble des contrats et que le matériel a été restitué le 27 août 2013, et que la société EUROSYS TELECOM n’a jamais contesté les raisons qui ont motivé la résiliation du contrat.

L’intimée soutient que l’appelante dénature le contrat en prétendant que le recours doit être engagé pendant la durée du contrat de location, en ce qu’aucune disposition du contrat ne prévoirait. La société PHARMACIE X indique que les articles 3 et 5 des conditions générales du contrat de location prévoient le transfert de recours en cas de retard de livraison du matériel ou en cas de mauvais fonctionnement du matériel, et que les seuls droits et actions que détient la société GRENKE LOCATION à l’encontre du fournisseur concernent ces motifs et non la qualité du conseil fourni par le professionnel, reproché en l’occurence à la société EUROSYS TELECOM. La société PHARMACIE X en conclut que la société GRENKE LOCATION ne peut pas transférer un droit qu’elle n’a pas et que son action en intervention forcée est recevable.

La société PHARMACIE X rappelle qu’il appartenait à la société EUROSYS TELECOM de s’assurer que la solution vendue était compatible avec le fonctionnement et les besoins de la pharmacie, ce qui n’a pas été le cas comme en témoigne la contrainte technique qu’engendrait le désabonnement par l’interruption de la connexion internet.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 14 juillet 2016, la société GRENKE LOCATION demande à la cour :

— au fond, la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société PHARMACIE

X, au paiement de la somme principale de 5 514,34 euros correspondant aux loyers échus impayés au 31 juillet 2013 (571,34 euros) et ceux dus pour la période du 1er septembre 2013 jusqu’au terme du contrat le 31 août 2017 (4 944 euros),

— la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé que la somme en principal de 5 514,34 euros portera intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure adressée le 19 août 2013 par la société GRENKE LOCATION à la société PHARMACIE X, soit à compter du 20 août 2012,

— la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société PHARMACIE X à payer à la société GRENKE LOCATION les frais pour un montant de 103 euros,

— à titre subsidiaire, sur le fondement des articles 1147 et suivants du code civil , la condamnation de la société EUROSYS TELECOM à payer à la société GRENKE LOCATION une indemnité de 5 514,34 euros en réparation du préjudice subi du fait du manquement à son devoir de conseil par la société EUROSYS TELECOM,

— à titre infiniment subsidiaire, la condamnation de la société EUROSYS TELECOM à garantir la société GRENKE LOCATION des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

— en tout état de cause, la condamnation de tout succombant à payer au profit de la société GRENKE LOCATION une indemnité de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la société GRENKE LOCATION fait valoir que le contrat de location conclu le 27 juin 2012 avec la société PHARMACIE X est parfaitement valable puisqu’en sa qualité de bailleur elle a payé le fournisseur du matériel commandé et livré, et puisqu’elle a mis en place l’échéancier de remboursement pour le locataire.

La société GRENKE LOCATION conteste l’interdépendance des contrats de livraison et de location. Elle soutient que l’interdépendance des contrats s’applique aux contrats de livraison et de location et ne s’étend pas aux contrats d’entretien ou de garantie des vices relatifs au matériel loué.

L’intimée fait valoir que dans le cas où la cour retiendrait un manquement de la société EUROSYS TELECOM entraînant la nullité du contrat de location, la responsabilité de la société EUROSYS TELECOM ne serait pas contestable dès lors que la société GRENKE LOCATION rapporte la preuve d’une inexécution contractuelle qui lui a directement causé un préjudice.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 janvier 2019.

SUR CE,

Sur la recevabilité de l’action en intervention forcée

La société EUROSYS TELECOM soutient que la société PHARMACIE X ne disposait plus d’un mandat à agir contre elle, lorsqu’elle l’a assignée en intervention forcée le 17 octobre 2014, soit postérieurement à la résiliation du contrat par la société GRENKE LOCATION le 19 août 2013, et ce en vertu des dispositions des articles 3 et 5 du contrat de location longue durée.

L’article 3 des conditions générales de vente du contrat de location dispose que : « le bailleur cède au locataire les droits et actions qu’il détiendrait contre le fournisseur à raison d’un retard, d’une non-conformité, d’un défaut ou d’un vice affectant les produits ».

L’article 5 dispose que : « le locataire a, en vertu de la cession faite à son profit par le Bailleur des droits et actions dont ce dernier pourrait être titulaire contre le Fournisseur, le devoir de faire valoir dans les délais impartis notamment les droits nés de la garantie des vices et d’en informer immédiatement par écrit le Bailleur. Le locataire exerce tous les recours utiles contre le Fournisseur et renonce à toute action contre le bailleur ».

Cependant, il est constaté en premier lieu, que le contrat ne précise pas quels sont les délais impartis dans le cadre du transfert de recours ; il n’est donc pas indiqué que les délais impartis supposent que l’action contre le fournisseur doit se faire nécessairement avant la résiliation du contrat.

A cet égard, l’article 1162 ancien du code civil dispose d’ailleurs que : « dans le doute, la convention s’interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l’obligation ».

Mais en second lieu, et surtout, la société PHARMACIE X n’a pas appelé en intervention forcée la société EUROSYS TELECOM en raison d’un retard, d’une non-conformité, d’un défaut ou d’un vice affectant les produits, mais en raison d’un manquement du fournisseur à son obligation d’information et de conseil relative à sa prestation qui supposait sa prise en charge de la résiliation du contrat d’abonnement avec la société SFR, avec la conséquence d’une interruption de la connexion Internet pendant 10 jours.

Ainsi, la société PHARMACIE X a pu assigner la société EUROSYS TELECOM indépendamment de tout transfert de recours ou mandat donné par la société GRENKE LOCATION, laquelle ne disposait pas d’un recours pour manquement à une obligation d’information et de conseil.

L’article 331 du code de procédure civile prévoit que : « un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d’agir contre lui à titre principal ».

C’est donc à bon droit que le tribunal a constaté que l’action engagée par la société PHARMACIE X à l’encontre de la société EUROSYS TELECOM n’étant pas fondée sur un mauvais fonctionnement du matériel loué mais sur un défaut de d’information et de conseil de sa part, la société EUROSYS TELECOM ne peut se prévaloir des dispositions du contrat de location entre la société PHARMACIE X et la société GRENKE LOCATION, pour opposer un défaut d’intérêt à agir.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a déclaré recevable l’action en intervention forcée.

Sur l’appel en garantie de la société EUROSYS TELECOM

La société EUROSYS TELECOM prétend ne pas pouvoir être prise en défaut dans la bonne exécution de ses obligations contractuelles résultant du bon de commande du 22 mars 2012, et de n’avoir, en l’occurrence, nullement manqué à son obligation d’information et de conseil, de sorte qu’elle demande la réformation du jugement en ce qu’il l’a condamnée à garantir intégralement la société PHARMACIE X de sa condamnation à payer à la société GRENKE LOCATION notamment la somme de 5 514 euros au titre des loyers impayés.

Elle insiste sur le fait que le matériel livré était en parfait état et ne présentait aucun dysfonctionnement, ce qui n’est pas contesté par la société PHARMACIE X, et sur le fait que rien ne prouve que le matériel de téléphonie n’était pas compatible avec la connexion Internet de l’officine.

Le bon de commande signé le 22 mars 2012 prévoit, outre la fourniture de l’installation, le raccordement à l’offre de l’opérateur ODITEL sur le réseau FRANCE TELECOM, ainsi que « toutes les demandes quant à la résiliation de vos prestations seront effectuées par nos soins ».

Or, il n’est pas contesté que la société EUROSYS TELECOM, qui en fait état dans ses conclusions, a adressé le 14 novembre 2012 à la société PHARMACIE X un modèle de courrier de résiliation à la société SFR, soit cinq mois après la connexion chez l’opérateur ODITEL le 27 juin précédent.

Ce long délais a engendré une double facturation, que reconnaît l’appelante puisqu’elle indique qu’à titre commercial, elle a accepté de prendre en charge les factures émises par les sociétés SFR et Orange jusqu’à la date de réception du courrier de résiliation par la société SFR, soit « environ » jusqu’au 17 novembre 2012.

Mais il apparaît que la double facturation a surtout été consécutive au fait que la résiliation de l’ancien abonnement nécessitait la coupure des lignes téléphoniques et de la connexion Internet pendant 10 jours.

À cet égard, il résulte d’un courrier électronique adressé par la société PHARMACIE X à la société EUROSYS TELECOM le 11 février 2013, faisant état de sa demande le 14 novembre pour la résiliation des lignes téléphoniques à la société SFR, que le service technique de cette dernière lui a répondu que : « notre contrat n’était pas modifiable du fait de son ancienneté (9 Telecom) et que la seule solution serait de changer de contrat avec à la clé une coupure de la ligne pendant 10 jours ».

Il résulte encore d’un courrier adressé par la société PHARMACIE X à la société EUROSYS TELECOM, le 27 février 2013, que : « malgré les engagements pris par EUROSYS, il s’avère qu’il est impossible de résilier l’abonnement SFR sans une coupure du lien Internet pendant 10 jours. Pour le bon fonctionnement de la pharmacie toute coupure même momentanée du lien Internet est impossible. Depuis juin 2012 nous recevons donc double facturation pour toutes les communications téléphoniques issues d’ODITEL et SFR. Nous avons relancé plusieurs fois la société EUROSYS (septembre, décembre 2012, janvier 2013 toutes les pièces écrites sont disponibles) pour qu’il trouve une solution technique ou commerciale à ce problème. À chaque fois il nous a été répondu d’envoyer les factures SFR à leur service juridique pour un remboursement. Ces envois n’ont eu aucune réponse. Enfin en février 2013 on nous a répondu qu’il n’y avait aucune solution à notre problème ».

La société EUROSYS TELECOM n’a pas contesté ces courriers et a donc reconnu implicitement son incapacité à régler un problème qu’elle n’avait pas anticipé et qui était ingérable pour une officine de pharmacie.

Et en tout état de cause, la société EUROSYS TELECOM n’a pas indiqué ni justifié qu’il était possible de résilier le contrat avec la société SFR et de changer d’opérateur, tout en assurant la continuité de la connexion Internet.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné, pour manquement à son obligation d’information et de conseil, la société EUROSYS TELECOM à garantir la société PHARMACIE X des condamnations prononcées à son encontre au titre des loyers impayés auprès de la société GRENKE LOCATION, soit la somme de 5 514 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 août 2012, outre les frais pour un montant de 103 euros.

Sur la condamnation de la société EUROSYS TELECOM à payer à la société PHARMACIE X la somme de 1023 euros à titre de dommages et intérêts représentant les loyers réglés

La société EUROSYS TELECOM soutient que sa condamnation à payer la somme de 1 023 euros à la société PHARMACIE X, qui correspond aux loyers qu’elle a réglés à la société GRENKE LOCATION, s’analyse en un enrichissement sans cause puisqu’elle aurait bénéficié d’une installation téléphonique en parfait état de fonctionnement, sans avoir à en payer le prix.

Cependant, il résulte du jugement que la société PHARMACIE X a demandé le remboursement de cette somme, et subsidiairement, le paiement de cette somme à titre de dommages et intérêts.

C’est à ce titre-là que la condamnation a été prononcée.

Sur le fondement de l’ancien article 1147 du code civil qui prévoit que : « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure », il convient, en raison du manquement à l’obligation d’information et de conseil et des préjudices qui en ont résulté pour la société PHARMACIE X, contrainte de résilier tous ses contrats, de confirmer la condamnation prononcée par le tribunal à l’encontre de la société EUROSYS TELECOM, à titre de dommages et intérêts.

Sur les dépens et les demandes relatives à l’article 700 du code de procédure civile

La société EUROSYS TELECOM qui succombe en appel, sera condamnée aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Valérie HADJAJE, avocate, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La société EUROSYS TELECOM sera déboutée de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de la société PHARMACIE X et de la société GRENKE LOCATION l’intégralité des frais irrépétibles qu’elles ont chacune engagés dans cette instance.

La société EUROSYS TELECOM sera donc condamnée à verser à chacune d’elle la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

— Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

— Condamne la société EUROSYS TELECOM à payer à la société PHARMACIE X la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la société EUROSYS TELECOM à payer à la société GRENKE LOCATION la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la société EUROSYS TELECOM aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement, par Me Valérie HADJAJE, avocate, et pour ce qui la concerne, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

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  2. Code civil
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