Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 13 juin 2019, n° 18/04972

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 9, 13 juin 2019, n° 18/04972
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/04972
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 25 janvier 2018, N° 2016070608
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRÊT DU 13 JUIN 2019

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/04972 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5HHP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Janvier 2018 -Tribunal de commerce de PARIS – RG n° 2016070608

APPELANTES :

Madame Z X

[…]

[…]

Madame C X

[…]

[…]

Madame A X

[…]

[…]

Madame D X

[…]

[…]

Représentées par Me Charles-edouard FORGAR de la SELAS LARGO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0205

INTIMÉE :

Madame E F G Y

[…]

[…]

Représentée par Me Paul-gabriel CHAUMANET de l’ASSOCIATION CHAUMANET, […], avocat au barreau de PARIS, toque : R101

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Avril 2019, en audience publique, devant Madame K L, Présidente de chambre, Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère et Madame Aline DELIERE, Conseillère.

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions de l’article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame I J

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame K L, Présidente de chambre et par Madame I J, Greffière présente lors du prononcé.

*****

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme E Y est gérante de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL et présidente de la SAS Le Café des Chats 'Paris Bastille, ces sociétés ayant une activité de salon de thé et de restauration en présence de chats en liberté.

Mme C X a apporté la somme de 5000 euros au capital social de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL.

Mmes Z X, C X, A X et D X (Mmes X) ont souscrit à hauteur de la somme totale de 32 990 euros au capital en numéraire de la SAS Le Café des Chats 'Paris Bastille et ont reçu chacune 311 actions.

L’établissement de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL a ouvert le 21 septembre 2013.

L’établissement de la SAS Le Café des Chats ' Paris Bastille a ouvert le 2 septembre 2014.

Par jugement du 13 octobre 2016, sur assignation de l’URSSAF du 22 décembre 2015 et de la société BMR holding du 8 février 2016, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la SARL Le Café des Chats – Paris ' SARL, a fixé la date de cessation des paiements au 13 avril 2015 et a désigné la SCP BTSG en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 28 octobre 2016, Mmes X ont mis en demeure Mme Y de leur communiquer la comptabilité et les rapports de gestion des deux sociétés et lui ont proposé de leur rembourser la somme de 32 990 euros apportée, en s’engageant, en contre partie, à renoncer à tout recours à son encontre pour divers manquements à ses obligations de gérante et de présidente.

Le 22 novembre 2016 Mmes X ont assigné Mme Y devant le tribunal de commerce de Paris en remboursements de leurs apports et en paiement de dommages et intérêts pour violation des statuts des deux sociétés et des dispositions légales applicables et en réparation des fautes de gestion commises.

Par jugement du 26 janvier 2018, le tribunal de commerce a :

— déclaré irrecevables les demandes de Mmes Z, A et D X s’agissant de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL pour défaut d’intérêt à agir,

— débouté Mme C X de ses demandes à l’encontre de Mme Y, en sa qualité de gérante de la SARL Le Café des chats ' Paris 'SARL,

— débouté Mmes X de leurs demandes à l’encontre de Mme Y, en sa qualité de présidente de la SAS Le Café des Chats ' Paris ' Bastille,

— débouté les consorts X de leur demande de remboursement de leurs apports en capital et de leurs autres demandes,

— débouté Mme Y de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— condamné in solidum les consorts X aux dépens et à payer la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile .

Mmes X ont fait appel le 7 mars 2018.

Elles exposent leurs moyens et leurs demandes dans leurs dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 12 juin 2018 auxquelles il est renvoyé en application de l’article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Elles concluent à l’infirmation du jugement et demandent à la cour de :

— condamner Mme Y à verser à Mme C X la somme de 5000 euros au titre du remboursement de ses apports,

— condamner Mme Y à verser à Mme C X la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

— ordonner à Mme Y de communiquer concomitamment les bilans et comptes de résultat de la société Le Café des Chats ' Paris ' Bastille à compter de mai 2014 jusqu’au 31 décembre 2017, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard,

— condamner Mme Y à leur verser la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme Y expose ses moyens et ses demandes dans ses dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 12 septembre 2018 auxquelles il est renvoyé en application de l’article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Elle conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour, en plus, de l’autoriser à communiquer les pièces comptables de la SAS Le Café des Chats ' Paris ' Bastille, sous un délai minimum de 6 mois.

Elle réclame la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L’ARRÊT

1) Sur la demande de Mme C X de remboursement de son apport au capital social de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL et de dommages et intérêts pour perte de chance

Mme C X soutient que Mme Y a violé les statuts de la société car elle n’a pas organisé d’assemblées statuant sur les comptes sociaux et ceux-ci n’ont pas été approuvés par des décisions collectives, qu’elle a violé l’article L232-22 du code de commerce puisqu’aucune comptabilité ni aucun rapport de gestion de la société n’ont été déposés au greffe du tribunal de commerce et qu’elle n’a jamais été informée par Mme Y de la situation financière de la société ni du placement en liquidation judiciaire.

Elle ajoute que Mme Y a commis des fautes de gestion en ce qu’elle n’a assuré qu’une gestion passive de la société, n’a pas répondu aux mails des associés, et a également commis une faute de surveillance, comme en témoignent les quinze inscriptions au titre du privilège de la Sécurité Sociale et du Trésor Public. Elle réclame la réparation de ses préjudices qui résultent de la perte de son apport à la suite de la liquidation judiciaire de la société et de la perte de chance de percevoir des bénéfices à la suite de son investissement.

Mme Y répond qu’elle s’est impliquée et a rendu compte de son activité aux associés, qu’elle les as informés dès le 28 décembre 2014 des difficultés financières de la société et des dettes envers l’URSSAF, que Mme X comme les autres associés ne s’est pas manifestée auprès d’elle, qu’elle a bien convoqué les associés à des assemblées générales qui ont eu lieu le 30 juin 2015 et que les comptes, pour l’exercice courant de juillet 2013 au 31 décembre 2014, ont bien été établis, qu’elle ne peut pas prouver que la comptabilité ou le rapport de gestion ont été communiqués aux associés mais que ces éléments comptables étaient à leur disposition. Elle ajoute que la faute de gestion tenant au défaut de dépôt des comptes sociaux n’a pas créé de préjudice personnel à Mme X.

Il ressort des articles 9, 20, 21 et 22 des statuts de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL qu’une assemblée générale doit être réunie chaque année, dans les 6 mois de la clôture des comptes pour statuer sur les comptes de l’exercice écoulé et que les décisions collectives statuant sur les comptes sociaux sont obligatoirement prises en assemblée à laquelle les associés doivent participer.

Le premier exercice social a été clôturé, comme le prévoient les statuts, le 31 décembre 2014 et Mme Y avait l’obligation de soumettre les comptes de l’année 2014 à l’assemblée générale avant le 30 juin 2015.

Il ressort des mails qu’elle a adressés à tous les associés le 10 juin 2015 et le 18 septembre 2015 que l’assemblée générale annuelle a eu lieu le 30 juin 2015. Aucun procès-verbal de cette assemblée n’a manifestement été établi.

Dans la convocation à l’assemblée générale était fixée à l’ordre du jour l’approbation du report de la présentation du rapport de gestion de l’exercice clos le 31 décembre 2014, du rapport spécial de gérance et de l’approbation des comptes et de l’affectation des résultats. Il était prévu la présentation des éléments disponibles concernant l’exercice 2013-2014 et la présentation d’un plan de trésorerie, de dépenses et de recettes pour l’exercice 2014. Il était également précisé que les points différés seraient abordés lors d’une nouvelle assemblée générale, dans le délai de 3 mois.

Il ressort en effet de l’attestation de l’expert-comptable de la société, du 10 février 2016, que les comptes de la société n’ont pas pu être présentés à l’assemblée générale car ils n’étaient pas établis. Dans son attestation l’expert comptable expose qu’il attend des justificatifs pour le bilan 2014, qui devrait être terminé sous peu.

Il est donc établi que Mme Y n’a pas régulièrement présenté les comptes de l’exercice 2013-2014 aux associés en violation des articles 20 à 22 des statuts.

Mais il y a lieu de relever d’une part que Mme Y avait bien informé les associés qu’elle n’était pas en mesure de leur présenter les comptes et son rapport de gestion. Les mails échangés entre les associés en mai 2015 sur la situation de la société n’ont pas été adressés à Mme Y et celle-ci a été interpellée directement par mail d’un associé le 9 juin 2015 qui la remercie d’avoir exposé la situation de l’établissement et les différents problèmes et lui demande d’organiser une assemblée générale au plus vite.

Puis à la suite de l’assemblée générale du 30 juin 2015 ce n’est que le 14 février 2016 qu’un associé lui a demandé si les comptes de l’exercice 2013-2014 étaient clôturés.

D’autre part il ressort de l’ensemble des mails versés à la procédure que Mme Y a informé régulièrement les associés des événements relatifs à l’activité de la société et à sa situation financière.

Le 28 décembre 2014 elle leur communique des éléments chiffrés et invoque la dette envers l’URSSAF pour un montant estimé à 80 000 euros environ.

Le 15 janvier 2015 elle fait un compte-rendu de l’activité en 2014 en faisant état des difficultés de fonctionnement et de gestion du personnel, de difficultés bancaires, des charges impayées à l’URSSAF, d’un contrôle de l’inspection du travail et et du défaut de paiement des honoraires du comptable.

Le 24 janvier 2015 elle a organisé une réunion des associés.

Le 21 mai 2015 elle adresse un long mail d’appel à l’aide aux associés en invoquant les problèmes avec l’URSSAF, le retard de paiement des loyers et annonce «'il faut 15 000 euros d’ici au 30 juin'».

Dans un mail du 10 juin 2015, préparatoire à l’assemblée générale, elle donne des informations aux associés sur la nécessité de prévoir une augmentation de capital, sur le litige en cours avec le bailleur pour le paiement des arriérés de loyer, sur le licenciement d’une salariée soupçonnée de vol et sur les questions de gestion du personnel.

Le 18 septembre 2015 elle informe les associés que les comptes ne sont toujours pas finalisés et qu’un contrôle par l’URSSAF est en cours.

Le 7 avril 2016 elle a sollicité les associés pour participer à une réunion d’échange sur toutes les questions qu’il se posent, réunion qui a eu lieu le 19 avril 2016, et au cours de laquelle elle les a informés de la situation financière délicate de la société. Le 13 avril 2016 elle les a informés que la société était convoquée au tribunal.

Le 28 août 2016 elle les a informés de la convocation à l’audience du 21 septembre 2016 de liquidation judiciaire et du contrôle fiscal en cours. Elle proposait, pour éviter la liquidation judiciaire, de vendre le fonds de commerce de la société pour solder les dettes de celle-ci ou de la dissoudre dans le cadre d’une liquidation amiable

Ainsi, même si Mme Y n’a pas présenté les comptes définitifs de la société, les associés ont été informés régulièrement de la situation de celle-ci, notamment financière, ainsi que des procédures engagées à son encontre. A réception de ces informations Mme X ne s’est pas pour autant manifesté auprès de Mme Y.

S’agissant du défaut de dépôt des comptes annuels de la société au greffe du tribunal de commerce Mme Y reconnaît ne pas les avoir déposés, en violation des dispositions de l’article L232-22

du code de commerce.

S’agissant des fautes de gestion qui sont invoquées par Mme X, celle-ci ne cite aucun fait précis et ne démontre pas que Mme Y a commis des fautes de gestion, par passivité ou défaut de surveillance, et que de telles fautes sont à l’origine de la situation de cessation des paiements qui a mené à la liquidation judiciaire de la société, alors que les mails et les pièces qui concernent l’activité de la société et la gestion du personnel montrent qu’elle n’est pas restée passive, qu’elle n’a pas agi à l’insu des associés et qu’elle a du faire face à une situation qui se dégradait.

Les seules fautes qui sont établies à l’encontre de Mme Y sont donc le fait de ne pas avoir été suffisamment diligente pour faire établir les comptes définitifs de la société et de ne pas avoir déposé les comptes au greffe du tribunal de commerce.

Comme le tribunal l’a retenu, ces seules fautes n’ont pas causé à Mme X un préjudice personnel distinct de celui subi par la société.

Le jugement sera donc confirmé pour avoir rejeté les demandes de dommages et intérêts de Mme X correspondant au remboursement de son apport et à la perte de chance de percevoir des bénéfices résultant de son apport.

2) Sur la demande de communication des bilans et comptes de résultat de la SAS Le Café des Chats – Paris-Bastille

Mmes X reprochent à Mme Y de ne pas avoir déposé les comptes annuels de la SAS Le Café des Chats – Paris-Bastille au greffe du tribunal de commerce, en application de l’article L232-23 du code de commerce, et de ne pas leur avoir communiqué ces comptes, notamment dans le cadre des assemblées générales annuelles. Elles réclament la production des bilans et des comptes de résultat, sous astreinte.

Mme Y justifie de la tenue d’une assemblée générale le 17 avril 2017 mais il ressort du procès-verbal que, si quelques éléments comptables ont été communiqués, les comptes n’ont pas été soumis à l’approbation des associés car aucun bilan n’avait été réalisé par le cabinet comptable.

Mme Y ne conteste pas la demande de communication des bilans et comptes de résultat clôturés les 31 décembre 2015, 2016 et 2017, fait valoir qu’elle est en train de les faire établir et demande un délai de 6 mois pour les communiquer.

Il sera donc fait droit à la demande en accordant un délai de 6 mois à Mme Y et en fixant une astreinte.

3) Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement sera confirmé sur ces deux points.

Les dépens d’appel seront partagés entre Mme Y et Mme X et leurs demandes respectives au titre de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a débouté Mme C X de ses demandes à

l’encontre de Mme Y en sa qualité de gérante de la SARL Le Café des Chats ' Paris ' SARL et a condamné in solidum Mmes Z X, C X, A X et D X aux dépens et à payer à Mme Y la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande de Mmes Z X, C X, A X et D X de communication des bilans et comptes de résultat de la SAS Le Café des Chats 'Paris Bastille,

Statuant à nouveau,

ORDONNE à Mme Y de communiquer à Mmes Z X, C X, A X et D X les bilans et comptes de résultat des exercices clôturé les 31 décembre 2015, 2016 et 2017, dans le délai de 6 mois à compter de ce jour, puis sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard,

REJETTE les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

PARTAGE les dépens par moitié entre Mmes Z X, C X, A X et D X, tenues in solidum, d’une part, et Mme Y d’autre part.

La Greffière La Présidente

I J K L

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