Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 2 octobre 2020, n° 18/04098
Chronologie de l’affaire
Commentaire • 1
Sur la décision
Référence : | CA Paris, pôle 4 - ch. 3, 2 oct. 2020, n° 18/04098 |
---|---|
Juridiction : | Cour d'appel de Paris |
Numéro(s) : | 18/04098 |
Décision précédente : | Tribunal d'instance de Paris, 28 décembre 2017, N° 11-17-000204 |
Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
- Président : Claude TERREAUX, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties : SELARL MARC SITBON
Texte intégral
Copies exécutoires
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 3
ARRÊT DU 02 OCTOBRE 2020
(n° 206 /2020, 7 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/04098 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5D6P
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Décembre 2017 -Tribunal d’Instance de PARIS 8e – RG n° 11-17-000204
APPELANT
Monsieur Z X
Né le […] à […]
[…], […]
[…]
Ayant élu domicile élu et étant représenté par Me Jérôme HOCQUARD, de la SCP HOCQUARD et associés, avocat au Barreau de PARIS, toque P0087
INTIMÉS
Monsieur A Y
[…]
92300 LEVALLOIS-PERRET
SELARL A Y
SIRET : […]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège :
[…]
92300 Levallois-Perret
Représentés par Me Laurent CHAPOT, avocat au Barreau de Paris, toque G0787
COMPOSITION DE LA COUR :
En application :
— de l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19;
— de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, notamment ses articles 1er et 8 ;
— de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période ;
L’affaire a été retenue selon la procédure sans audience, les avocats y ayant consenti expressément ou ne s’y étant pas opposés dans le délai de 15 jours de la proposition qui leur a été faite de recourir à cette procédure
La cour composée comme suit en a délibéré :
Monsieur Claude TERREAUX, Président de chambre
Monsieur Michel CHALACHIN, Président de chambre
Madame Pascale WOIRHAYE, Conseillère
ARRÊT :
— contradictoire
— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
— signé par Claude Terreaux, Président et par Sixtine ROPARS, Greffier présent lors de la mise à disposition
En date du 24 mai 2016, la SELARL A Y a loué un appartement pour une durée d’une année à compter du 24 mai 2016, pour loger son gérant A Y, au 5e étage du bâtiment sur rue de l’immeuble sis […], appartenant à Monsieur X, gérant de la société CO INVEST.
Dès la prise de possession des lieux, Monsieur A Y constate la présence de punaises de lit, ce qui n’est pas contesté par le bailleur.
Le 10 février 2017, Monsieur A Y assigne Monsieur X afin que ce dernier soit condamné à lui verser la somme de 9.500 euros au titre des sommes indument versées pour le logement non conforme en application de la loi du 6 juillet 1989, et la somme de 20.000 au titre de son préjudice moral.
La SELARL A Y est ensuite intervenue volontairement à la procédure.
Le Tribunal d’Instance du 8e arrondissement a, par jugement entrepris du 29 décembre 2017 :
— Déclaré irrecevable la demande de Monsieur A Y pour défaut d’intérêt à agir,
— Déclaré recevable la demande de la SELARL A Y, intervenante volontaire
— Constaté que le bailleur, Monsieur X, n’a pas satisfait à son obligation de délivrer un logement décent
— Condamné Monsieur X à verser à la SELARL A Y:
1. La somme de 2.767 euros en remboursement des loyers pour la période du 24 mai au 30
juin 2016
2. La somme de 4.088 euros en restitution du dépôt de garantie
3. La somme de 990 euros en remboursement des frais d’agence mis à la charge du locataire
4. La somme de 1.629 euros en remboursement des frais d’hôtel et de pressing engagés
suite à la présence de punaises dans l’appartement loué
— Débouté la SELARL A Y de sa demande d’indemnisation du préjudice moral
— Condamné Monsieur X à verser à la SELARL A Y la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
— Condamné Monsieur X aux entiers dépens
— Ordonné l’exécution provisoire
— Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif
Monsieur X a interjeté appel le 22 février 2018.
Par dernières conclusions en date du 23 octobre 2018, Monsieur X , appelant, demande à la Cour de :
' Recevoir Monsieur X en son présent appel
' L’y déclarer bien fondé
Y faisant droit :
' Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la SELARL A Y de sa demande
d’indemnisation de préjudice moral
' Infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
— Déclaré recevable la demande de la SELARL A Y, intervenante volontaire
— Constaté que le bailleur Monsieur X n’a pas satisfait à son obligation de délivrer un logement décent
— Condamné Monsieur X à verser à la SELARL A Y:
1. La somme de 2.767 euros en remboursement des loyers pour la période du 24 mai au 30 juin 2016
2. La somme de 4.088 euros en restitution du dépôt de garantie
3. La somme de 990 euros en remboursement des frais d’agence mis à la charge du locataire
4. La somme de 1.629 euros en remboursement des frais d’hôtel et de pressing engagés
suite à la présence de punaises dans l’appartement loué
— Condamné Monsieur X à verser à la SELARL A Y la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
— Condamné Monsieur X aux entiers dépens
— Ordonné l’exécution provisoire
— Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif
Statuant de nouveau :
A TITRE PRINCIPAL
' Constater le défaut de qualité à agir de Monsieur Y
' Constater que la SELARL A Y ne justifie d’aucun intérêt propre et distinct à agir à l’encontre de Monsieur X
En conséquence,
' Déclarer irrecevable l’action engagée par Monsieur Y à l’encontre de Monsieur
X
' Déclarer irrecevable la SELARL A Y en son intervention volontaire
A TITRE SUBSIDIAIRE
' Constater les diligences accomplies par Monsieur X pour garantir à la SELARL A Y une jouissance paisible du logement
' Constater que l’origine des punaises n’est pas déterminée
En conséquence,
' Dire et juger que Monsieur X n’est pas responsable de la présence de ces
insectes mais que celle-ci constitue à son endroit un cas de force majeure
' Débouter Monsieur Y de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions
' Débouter la SELARL A Y de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions
EN TOUT ETAT DE CAUSE
— Condamner la SELARL A Y, représenté par son gérant, à rembourser à Monsieur X la somme de 10.313,62 euros qu’il a été contraint de lui verser en exécution des termes du jugement de première instance
— Condamner Monsieur Y aux entiers dépens en application de l’article 699 du Code de Procédure Civile
— Condamner Monsieur Y à verser à Monsieur X la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile
Monsieur X fait principalement valoir qu’il n’a pas manqué à son obligation de délivrer un logement décent, car celui ci n’est d’une part, pas responsable de la présence des punaises de lit et d’autre part, a accompli toutes les diligences possibles pour assurer la jouissance paisible du logement.
Par dernières conclusions en date du 23 juillet 2018, Monsieur A Y et la SELARL A Y, intimés, demandent à la Cour de :
' Confirmer le jugement rendu le 29 décembre 2017 par le Tribunal d’Instance du 8e
arrondissement de Paris, en ce qu’il a:
— Déclaré recevable la demande de la SELARL A Y, intervenante volontaire
— Constaté que le bailleur Monsieur X n’a pas satisfait son obligation de délivrer un logement décent
— Condamné Monsieur X à verser à la SELARL A Y :
1. La somme de 2.767 euros en remboursement des loyers pour la période du 24 mai au 30 juin 2016
2. La somme de 4.088 euros en restitution du dépôt de garantie
3. La somme de 990 euros en remboursement des frais d’agence mis à la charge du locataire
4. La somme de 1.629 euros en remboursement des frais d’hôtel et de pressing engagés suite à la présence de punaises dans l’appartement loué
— Condamné Monsieur X à verser à la SELARL A Y la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
— Condamné Monsieur X aux entiers dépens
' Infirmer le jugement rendu le 29 décembre 2017 par le Tribunal d’Instance du 8e arrondissement en ce qu’il a :
— Débouté la SELARL A Y de sa demande d’indemnisation du préjudice moral
Et statuant à nouveau :
' Condamner Monsieur X à payer à la SELARL A Y la somme de 30.000 euros au titre de son préjudice moral
' Condamner Monsieur X à payer à la SELARL A Y la somme de 5.000
euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel, en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens
' Condamner Monsieur X aux dépens, dont distraction au profit de Maître Laurent CHAPOT, Avocat, qui sera autorisé à les recouvrer conformément à l’article 699 du Code de Procédure Civile
Monsieur Y et la SELARL A Y font principalement valoir que le bailleur n’a pas respecté son obligation de délivrer un logement décent au locataire, ce dernier ayant alors subi un important préjudice moral et matériel.
MOTIFS DE L’ARRET :
Sur l’action de la SELARL A Y :
L’appelant soutient que l’action de la SELARL A Y est irrecevable car cette dernière ne justifierait pas d’un intérêt propre et distinct de celui invoqué par le demandeur principal.
Mais considérant que la SELARL A Y est, contrairement à Monsieur Y,
signataire du bail ; que la jurisprudence constante constate la recevabilité de l’intervention
volontaire d’une partie dès lors que celle-ci a pour objet d’exercer un droit propre né d’un contrat auquel elle a été partie ; que la SELARL A Y exerce un droit propre né du contrat de bail qu’elle a signé avec Monsieur X ; qu’il n’y a pas de conséquences sur la recevabilité de l’intervention volontaire lorsque cette dernière a le même objet que la demande initiale.
La demande de la SELARL A Y est donc recevable.
Sur l’indécence du logement :
L’appelant soutient que le logement loué n’était dans aucun cas indécent. De plus, il soutient que le locataire aurait pu introduire lui même les punaises de lit dans l’appartement.
Mais considérant qu’il résulte de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître des risques manifestes
pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé du locataire ; que le locataire s’est plaint auprès du bailleur de la présence de punaises de lit dès le 28 mai 2016, après une seule nuit passée dans le logement ; que le locataire a du se rendre au service dermatologique de l’Hopital Saint Louis ; qu’il présente de nombreuses piqûres sur les avants bras ; qu’il lui est impossible de dormir ; que les réactions cutanées portent atteinte au confort, à la santé et à l’activité professionnelle du locataire ; que les interventions du bailleur n’ont jamais fait disparaître la présence de ces punaises de lit lui permettant de s’acquitter de son obligation de délivrer un logement décent ; que le bailleur a précisé lui même avoir fait appel à une entreprise de désinsectisation le 1er avril 2016, c’est à dire avant la prise d’effet du bail, démontrant qu’il était conscient de la présence de punaises de lit dans son logement.
Le bailleur a donc manqué à son obligation de délivrer un logement décent.
Sur le préjudice matériel :
L’appelant soutient que n’ayant pas manqué à son obligation de délivrance d’un logement
décent, il doit être remboursé des sommes qu’il avait été contraint de verser à la SELARL A Y en exécution des termes du jugement de première instance. Ces sommes
correspondant au remboursement des loyers pour la période du 24 mai au 30 juin 2016, à la restitution du dépôt de garantie, au remboursement des frais d’agence mis à la charge du locataire, au remboursement des frais d’hôtel et de pressing engagés suite à la présence de
punaises dans l’appartement loué.
Mais considérant que Monsieur Y a été atteint, dès la prise de possession de l’appartement, de démangeaisons et d’urticaire et ce pendant toute la durée de l’occupation de l’appartement loué ; qu’il a été obligé d’engendrer des frais de pressing pour se débarrasser des punaises sur ses vêtements ; que lui étant devenu impossible de dormir dans ce logement, il a du dormir à l’hôtel engendrant des frais supplémentaires.
Le non respect de l’obligation de délivrer un logement décent par le bailleur, a fait subir un
préjudice matériel au locataire ouvrant droit à des dommages et intérêts.
Sur le préjudice moral :
L’appelant demande à la Cour de confirmer le jugement de première instance qui a retenu que la SELARL A Y ne justifiait pas de l’existence d’un préjudice distinct de celui résultant de l’impossibilité de faire usage de l’appartement loué, et de la nécessité d’avoir engagé des frais pour se débarrasser des punaises de lit.
Considérant que le préjudice moral étant le dommage subit par une personne dans ses sentiments, d’ordre psychologique ; que n’a pas été prouvé l’existence d’un préjudice distinct de celui résultant de l’impossibilité de faire usage de l’appartement loué et de la nécessité d’avoir engagé des frais pour éradiquer les punaises de lit ; que les praticiens constatent l’existence de réactions cutanées mais pas de dommage d’ordre psychologique ; qu’une perte de chiffre d’affaire ne saurait justifier l’existence d’un préjudice moral.
La preuve du préjudice moral n’étant pas rapporté par la SELARL A Y, cette dernière sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts consécutif au préjudice moral.
Sur les autres demandes :
Monsieur X qui succombe devra supporter les dépens.
Considérant que la SELARL A Y a du engager des frais pour assurer la défense de ses intérêts ; qu’il serait inéquitable de laisser ces frais à la charge de la SELARL A Y.
Monsieur X sera condamné à verser la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du Code de la Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour:
— CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,
— REJETTE toutes autres ou plus amples demandes
Y ajoutant,
— CONDAMNE Monsieur X à verser à la SELARL A Y la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
— CONDAMNE Monsieur X aux entiers dépens
Le greffier Le Président
Textes cités dans la décision