Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 27 mai 2020, n° 17/02591

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 27 MAI 2020

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/02591 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B2VNO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Janvier 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F16/01097

APPELANTE

Madame A B épouse X

[…]

[…]

Représentée par Me Mathieu BARONET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 68

INTIMEE

SA BNP PARIBAS

[…]

[…]

Représentée par Me Christophe FERREIRA SANTOS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0575

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Février 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme D E-F, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme D E F, présidentE

M. Benoît DEVIGNOT, conseiller

Mme Corinne JACQUEMIN, conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Philippe ANDRIANASOLO

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame D E F, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 5 décembre 1977, Madame A B épouse X était engagée par contrat de travail à durée indéterminée, par la société BNP PARIBAS, en qualité d’employée de table.

La convention collective de la banque du 10 janvier 2000 s’appliquait à la relation de travail.

En son dernier état, Mme X occupait le poste de chargée de renfort commercial au sein du groupe Paris 15 ème.

Le 19 décembre 2014, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 20 janvier 2015.

Le 11 février suivant, l’intéressée était licenciée pour faute simple.

A cette date, le salaire moyen perçu était de 2 015,38 euros pour 39 heures de travail par semaine.

Contestant le bien fondé de la mesure prise à son encontre, Mme X saisissait le conseil de prud’hommes de Paris le 1er février 2016 pour faire valoir ses droits.

Par jugement du 6 janvier 2017, notifié le 24 janvier suivant, cette juridiction l’a déboutée de l’intégralité de ses demandes.

Mme X a interjeté appel par déclaration du 16 février 2017.

Aux termes de ses dernières écritures déposées au greffe le 19 décembre 2017, Mme X demande à la cour :

— d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 06 janvier 2017 par le Conseil de prud’hommes de Paris ;

En conséquence,

— de condamner la SA BNP PARIBAS à lui verser à les sommes de:

—  72.553,68 euros à titre d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

—  2.711,48 euros de prime de fin de carrière

—  2.000,00 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

— de condamner la SA BNP PARIBAS aux entiers dépens de l’instance ;

— de prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe, le 5 juillet 2017, la société BNP PARIBAS demande à la cour:

— de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

— de condamner Mme X à lui payer une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— de la condamner à tous les dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 28 juin 2017.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

MOTIFS

Il est admis que le salarié commet une faute, de nature à justifier le prononcé d’une sanction, s’il n’exécute pas normalement son contrat de travail ou n’accomplit pas normalement sa prestation de travail et que son comportement est volontaire.

L’employeur qui a le choix de la sanction, peut prononcer le licenciement du salarié, pour faute simple, pour faute grave ou pour faute lourde.

La lettre de licenciement dont les termes fixent les limites du litige fait grief à Mme X d’avoir utilisé le site internet 'BNP NET’ 'pour procéder à des virements frauduleux’ du compte personnel d’un client vers son compte personnel, ainsi que de son compte vers celui du client en cause, dont le compte était domicilié à l’adresse personnelle de la salariée à laquelle il est reproché d’avoir eu ainsi 'accès au code secret 'BNP NET’ tout comme à l’intégralité des courriers destinés à ce client'.

Il est également reproché à Mme X le fait d’avoir 'consulté à 116 reprises depuis [son] poste de travail le dossier V6 de ce client afin de [s']assurer que le solde du compte ne dépassait pas la facilité de caisse accordée, en procédant, si besoin, à des versements espèces en cas de dépassement du montant autorisé'.

Enfin, l’employeur fait grief à Mme X 'd’avoir rédigé de manière apocryphe sur le coupon de retrait de carte bancaire signé par le client, que celle-ci devait être remise à [son] fils', le client n’ayant jamais demandé cela et ayant porté plainte en raison de l’utilisation frauduleuse de cette carte bancaire qu’il déclare n’avoir jamais eu en sa possession.

Qualifiant ces opérations de cavalerie, la société BNP Paribas rappelle qu’elles ont placé le compte de ce client en position débitrice de 799,43 euros, alors qu’il aurait dû être créditeur de 300 euros, Mme X ayant reconnu lors de l’entretien préalable être redevable envers lui de la somme de 1 099,43 euros.

Pour contester la mesure prise à son encontre, Mme X, qui rappelle sa très grande ancienneté au sein de l’entreprise, (37 ans), souligne que le client dont la lettre de licenciement fait état était M. Z, son concubin à l’époque de l’ouverture du compte et qu’en tant que tel il habitait chez elle à cette date, l’envoi de courriers de la banque à leur adresse commune ne lui étant pas imputable et l’accord de l’intéressé aux virements qu’elle effectuait sur le compte ouvert par lui via le site BNP NET ne pouvant dès lors constituer une faute, puisque les codes d’accès lui avaient été confiés par lui.

Cependant, et en particulier au regard de sa très longue ancienneté et grande expérience en qualité de chargée de service clientèle, puis chargée de renfort commercial, Mme X ne peut prétendre légitimer les opérations de virement qu’elle a effectuées à partir du compte de son ancien compagnon vers l’un des siens au seul prétexte d’un accord passé entre eux, ou, comme elle le dit le 6 août 2015 lors de son audition par les services de police avec la seule 'autorisation verbale’ de celui -ci, ce d’autant que ces opérations ont eu pour conséquence de placer le compte en position débitrice, la façon dont elle a eu connaissance des codes secrets nécessaires à de telles opérations étant indifférente.

Il ne peut être considéré que l’écrit signé de M. Z aux termes duquel Mme X 'aura tout pouvoir sur mon compte N° 475077/53 ouvert ce jour 30 juillet 2013(…)' constitue le mandat nécessaire à la réalisation des opérations litigieuses dès lors que ce dernier ne répond pas aux dispositions des articles 1984 et suivants du code civil, ni aux prescriptions applicables au sein de la BNP telles qu’elles résultent de la circulaire N° JUR-IV-010-001 du 12 juillet 29012 que Mme X ne prétend pas méconnaître, le document ne comportant en particulier aucune date d’effet et n’étant conçu qu’en termes généraux, alors qu’il n’a au demeurant fait l’objet d’aucun dépôt auprès de la banque, peu important que le titulaire du compte écrive, en revenant sur ses précédentes déclarations, et très postérieurement à ces dernières, avoir pleinement consenti aux virements opérés.

De plus, de l’article 3.2.2.2 du règlement intérieur dont Mme X ne conteste pas avoir eu connaissance, il résulte s’agissant des règles relatives au bon usage des moyens informatiques, que le salarié de la BNP s’engage à ne pas chercher à contourner les procédures et les mécanismes de sécurité mis en oeuvre par l’entreprise et en particulier se doit 'de ne pas utiliser ou tenter d’utiliser les moyens d’accès d’autres utilisateurs', en ce compris donc, les clients utilisateurs des moyens informatiques de la banque.

Le premier fait retenu à l’encontre de Mme X doit donc être considéré comme établi.

S’agissant de la consultation intempestive du compte de M. Z au moyen de la carte dite 'SDO’ ou du fichier 'V6« , elle n’est pas contestée par Mme X qui ne méconnaît pas le fait que ce document permet aux salariés de la banque d’avoir des informations sur la situation d’un compte, la salariée soutenant que jusqu’au 1er janvier 2015 et plus spécifiquement l’entrée en vigueur de 'la circulaire D-I-VIII-012.001, instituant de nouvelles règles de déontologie pour les conseillers », cette consultation était parfaitement tolérée.

Or, la circulaire dont Mme X fait état comme contenant l’interdiction de consultation du fichier V6 a été émise le 28 août 2014 et stipule en son article III-A qu’il est interdit de procéder à la visualisation des comptes qui ne serait pas motivée par les besoins de l’activité professionnelle du collaborateur, alors que le relevé des consultations du dossier V6 Z par l’intéressée démontre que cette dernière a procédé ainsi postérieurement à août 2014, sans justifier, sauf pour 116 consultations, de besoins liés à son activité professionnelle, un delta de plus de trente consultations non justifiées apparaissant dès lors.

Force est donc de constater que Mme X a procédé, de manière répétée, à la consultation injustifiée, le grief devant être considéré comme constitué dans cette mesure.

Quant au troisième fait, si la mention que Mme X ne conteste pas avoir écrit contient pour le moins une ambiguïté dès lors que celle-ci reconnaît être l’auteur de la formule’merci de délivrer ma carte bleue à Clément X', il n’en résulte pas que cette mention soit apocryphe et qu’elle ait été apposée sans que M. Z qui a signé le document de remise ne l’ait pas approuvée comme il le soutient dans le cadre des débats.

Ce grief ne peut donc être retenu.

Pour autant, les fautes établies telles qu’elles résultent des développements ci-dessus permettent de considérer que Mme X n’a pas exécuté normalement son contrat de travail en ne respectant pas volontairement les obligations qui lui incombaient en sa qualité de salariée, qui plus est, très expérimentée, d’un établissement bancaire, le licenciement disciplinaire de l’intéressée devant donc être considéré comme justifié.

Le jugement entrepris doit être confirmé et Mme X déboutée en conséquence de l’intégralité de ses demandes.

En raison des circonstances de l’espèce, il n’est pas inéquitable d’allouer à la société BNP Paribas une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.

DÉCISION

La Cour, par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme A X à verser à la société BNP Paribas la somme de 500 euros au titre des frais irrepétibles,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes.

CONDAMNE Mme A X aux dépens exposés en cause d’appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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