Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 3, 27 mai 2020, n° 19/09638

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Chronologie de l’affaire

Commentaires10

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adaltys.com · 21 juin 2022

La loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, dite loi Pinel[1], a instauré un droit de préemption au profit du locataire dont les contours continuent de susciter un contentieux important. Dans le prolongement de notre précédent article paru en novembre 2017[2], il semblait utile de faire un nouveau point d'étape sur les dernières évolutions de la jurisprudence. La nouveauté majeure est constituée par l'arrêt du 28 juin 2018[3], par lequel la Cour de cassation a considéré que le droit de préemption issu de l'article L. 145-46-1 du Code de commerce est un dispositif d'ordre public. Cette position de …

 

Cabinet Neu-Janicki · 10 octobre 2021

La Cour de cassation précise que pour l'application de l'article L 145-46-1 du Code de Commerce relatif à la purge du droit de préemption pour les baux commerciaux, (1) d'une part, un mandat de vente peut être conclu préalablement à la purge du droit de préemption, (2) d'autre part, qu'une promesse de vente sous condition de la purge du droit de préférence peut être conclu postérieurement à la notification de la purge,(3) et enfin, dès lors que le montant des honoraires d'agence sont séparés dans l'acte de purge alors celui-ci est valide. En l'espèce, le 3 mars 2018, la propriétaire des …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 3, 27 mai 2020, n° 19/09638
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/09638
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 27 mars 2019, N° 18/15054
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRÊT DU 27 MAI 2020

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/09638 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B744Y

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mars 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 18/15054

APPELANTE

SARL HOTEL [Adresse 4] agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 418 545 711

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090, avocat postulant

Assistée de Me Nadine TAURAND de l’ASSOCIATION TAURAND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R178, avocat plaidant

INTIMÉE

ASSOCIATION CULTUELLE FRATERNITÉ SACERDOTALE SAINT PIE X agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

déclarée à la préfecture des Hauts de Seine le 30 juillet 1980 sous le numéro 32/9798 devenu 92 200 70000

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-marie MOYSE de la SCP MOYSE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0274

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 18 Février 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Elisabeth GOURY, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile le prononcé de l’arrêt, (initialement fixé au 1er avril 2020) ayant été renvoyé en raison de l’état d’urgence sanitaire.

— signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte du 16 mai 2006, M. [Z], aux droits duquel vient L’ASSOCIATION CULTUELLE FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X (l’ASSOCIATION), a donné à bail en renouvellement à la société CLERC, désormais dénommée la société HOTEL [Adresse 4], des locaux à usage d’hôtel portant sur la totalité d’un immeuble situé [Adresse 2], pour 12 ans à compter du 1er mars 2006 moyennant un loyer de base forfaitaire et global annuel de 106.000 euros hors taxes et hors charges.

Par acte extrajudiciaire du 7 février 2018, la société HOTEL [Adresse 4] a sollicité le renouvellement de son bail pour 9 ans à compter du 1er mars 2018. Elle a ensuite saisi le juge des loyers commerciaux en fixation du prix du bail renouvelé par acte du 16 mai 2018, procédure qui est actuellement pendante.

Par acte extrajudiciaire du 24 octobre 2018, l’ASSOCIATION a notifié à la société HOTEL [Adresse 4] la lettre qu’elle lui avait adressée par recommandée le 19 octobre précédent, valant offre de vente de l’immeuble loué au prix de 5.050.000 euros outre 381.000 euros de frais, droits et émoluments de l’acte authentique ainsi que la commission de l’agence IMMOPOLIS aux frais de l’acquéreur de 300.000 euros. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 octobre 2018, la société HOTEL [Adresse 4] a contesté la régularité de cette offre de vente.

Par acte notarié du 9 novembre 2018, l’ASSOCIATION a consenti une promesse unilatérale de vente de l’immeuble à la société CHATEL TRANSACTION moyennant la somme de 5.050.000 euros, la promesse expirant le 31 janvier 2019.

Par avenant en date du 30 janvier 2019, le délai de réalisation de cette promesse unilatérale a été prolongé au 31 mai 2019, puis par avenant du 17 juin 2019 au 31 décembre 2019 et enfin par avenant du 22 novembre 2019 au 31 décembre 2020.

Autorisée par ordonnance du 20 décembre 2018, l’ASSOCIATION a fait assigner à jour fixe par acte d’huissier de justice des 21 et 26 décembre 2018 la société HOTEL [Adresse 4] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins essentielles de voir juger que le droit de préemption de la société HOTEL [Adresse 4] avait été purgé.

Par jugement en date du 28 mars 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :

— Rejeté la demande de renvoi de l’affaire devant le juge de la mise en état formée par la société HOTEL [Adresse 4],

— Déclaré recevable les demandes de l’ASSOCIATION CULTUELLE FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X,

— Dit que l’ASSOCIATION CULTUELLE FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X a régulièrement signifié à la société HOTEL [Adresse 4] le 24 octobre 2018 une offre de vente de l’immeuble à elle loué selon bail renouvelé du 16 mai 2006 et que cette offre n’a pas été acceptée par le preneur,

— Rejeté les demandes réciproques en paiement de dommages et intérêts,

— Condamné la société HOTEL [Adresse 4] aux dépens et dit qu’ils pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

— Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Ordonné l’exécution provisoire,

— Rejeté toute demande plus ample ou contraire.

Par déclaration en date du 3 mai 2019, la SARL HOTEL [Adresse 4] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 31 janvier 2020, la SARL HOTEL [Adresse 4], demande à la cour de :

— DECLARER la société HOTEL [Adresse 4] recevable et bien fondée en ses toutes ses demandes,

Et y faisant droit

— INFIRMER le jugement entrepris en ce que le Tribunal de Grande Instance de Paris a :

. Déclaré recevable les demandes de l’ASSOCIATION CULTUELLE FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X,

. Dit que cette dernière avait régulièrement signifié à sa locataire le 23 octobre 2018 une offre de vente de son immeuble et que cette offre n’avait pas été acceptée par le preneur,

. Rejeté la demande de dommages et intérêts de la SARL HOTEL [Adresse 4],

. Et condamné cette dernière aux dépens en disant qu’ils pourraient être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile et dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Et Statuant à nouveau

A TITRE PRINCIPAL

Vu les articles 5, 30, 31,32, 122, 330, et 555 du Code de Procédure Civile

Vu les pièces versées aux débats,

— DECLARER L’Association cultuelle FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X irrecevable en son action pour défaut d’intérêt à agir.

— LA DECLARER Également irrecevable en ses demandes faute pour elle d’avoir attrait le bénéficiaire de la Promesse signée par les parties le 9 novembre 2018.

A TITRE SUBSIDIAIRE, AU FOND

Vu l’article L.145- 46-1 du Code de Commerce,

Vu l’article 1104 du Code Civil,

Vu les articles 143, 144, 263 du Code de procédure civile,

Vu l’article 700 du Code de procédure civile,

Vu les Pièces versées aux débats,

— DIRE ET JUGER que la notification de l’offre de vente datée du 19 octobre 2018 et réceptionnée par la SARL HOTEL [Adresse 4] le 23 octobre 2018 viole les dispositions d’ordre public de l’article L. 145-46-1 du Code de Commerce,

— DIRE ET JUGER que ladite notification s’avère nulle et de nul effet, de sorte que la Promesse de Vente conclue par l’Association FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X avec la société CHATEL TRANSACTION, tierce au présent procès, le 09 novembre 2018, se trouve subséquemment entachée de nullité et dénuée de toute portée juridique ;

— DIRE ET JUGER que l’Association a frauduleusement éludé le droit de préférence de sa locataire, en lui proposant un prix d’achat excessif et dissuasif,

En conséquence,

— ORDONNER une mesure d’expertise judiciaire destinée à déterminer la valeur vénale des murs abritant le fonds hôtelier de la SARL HOTEL [Adresse 4],

— DESIGNER Tel expert immobilier, neutre, impartial et reconnu pour ses compétences dans le secteur spécifique des hôtels de tourisme, qu’il lui plaira de choisir, chargé de :

. Convoquer les parties, et dans le respect du principe du contradictoire,

. Se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission, . Se rendre ensuite sur place, et visiter les locaux situés [Adresse 3], et les décrire,

. Entendre les parties en leurs dires et explications,

. Procéder à l’examen des faits qu’allèguent les parties,

. Récolter tous éléments et données requis pour l’estimation du prix de vente de l’immeuble sis [Adresse 2],

. Donner son avis quant à la valeur vénale des murs afin de déterminer le prix auquel le preneur actuel des lieux pourrait exercer son droit de préemption,

. Le cas échéant, s’adjoindre tout sapiteur qu’il jugerait utile pour l’accomplissement de sa mission ;

. Exiger, en cas de besoin, la production de tous documents complémentaires qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission,

. Dresser un rapport des difficultés qui pourraient être rencontrées dans l’exécution de sa mission ;

. Rendre compte du tout, et donner son avis motivé,

. Dresser un rapport de ses constatations et conclusions, dans les délais et selon les modalités précisées dans la décision à intervenir,

— DIRE que l’Expert sera mis en 'uvre et accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et suivants du Code de Procédure Civile,

— FIXER le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert et en ordonner la consignation dans le respect de la date butoir indiquée dans le jugement à intervenir ;

— DIRE qu’il lui en sera référé en cas de difficultés ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

— DEBOUTER l’Association cultuelle de toutes ses demandes, fins et conclusions

— CONDAMNER l’Association cultuelle à réparer les préjudices causés à la société HOTEL [Adresse 4] en lui réglant 45.000 € de dommages et intérêts,

— CONDAMNER l’intimée à payer à la SARL HOTEL [Adresse 4] la somme de 10.000 € en application de l’article 700 du CPC et mettre à sa charge les entiers dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 6 août 2019, l’association cultuelle FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X, demande à la cour de :

Vu l’article L145-46-1 et suivants du Code de Commerce,

— CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a :

— DIT que l’immeuble du [Adresse 3], appartenant à l’association cultuelle « FRATERNITE SACERDOTALE SAINT-PIE X », ne peut plus faire l’objet d’une préemption par la société HOTEL [Adresse 4] alors qu’elle n’a pas accepté d’acheter au prix qui lui a été notifié.

— CONSTATÉ la purge du droit de préemption de la société HOTEL [Adresse 4] pour un prix de vente consenti pour les murs de l’immeuble du [Adresse 3] d’un montant de 5.050.000 euros.

— DÉBOUTER la société HOTEL [Adresse 4] de toutes ses demandes en ce compris de sa demande en paiement de dommages-intérêts.

Faisant droit à l’appel incident de l’association cultuelle « FRATERNITE SACERDOTALE SAINT-PIE X »,

— CONDAMNER la société HOTEL [Adresse 4] à payer à l’Association cultuelle « FRATERNITE SACERDOTALE SAINT-PIE X » la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêt et celle de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— CONDAMNER la société HOTEL [Adresse 4] en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP MOYSE & Associés, par application de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 6 février 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l’action

La société locataire soutient que l’action de l’association bailleresse est irrecevable faute d’intérêt à agir. Elle rappelle que cet intérêt doit être certain, né et actuel au jour même de l’introduction du procès ce qui exclut les actions déclaratoires ; qu’un véritable litige n’était pas né lors de la signification de l’assignation à jour fixe ; que si l’association doutait du bien fondé des contestations élevées par la société locataire cela ne lui conférait pas un intérêt né et actuel à prévenir l’exercice d’une demande en nullité de l’offre.

L’association soutient qu’avant même l’introduction de la présente procédure, la société locataire avait contesté par de multiples courriers, incluant des menaces de procédures, la validité de l’offre qui lui avait été notifiée ; que cette contestation empêchait la société CHATEL TRANSACTION d’exercer son option d’achat en exécution de la promesse de vente qui lui avait été consentie ; que l’association se trouvait privée du prix de vente de l’immeuble qu’elle ne pouvait conserver à titre personnel en application de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901.

Aux termes de l’article'31 du’code de procédure civile, 'l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé'. L’intérêt à agir se définit, comme étant une''condition de recevabilité de l’action consistant dans l’avantage que procurerait au demandeur la reconnaissance par le juge du bien-fondé de sa prétention'. L’intérêt à agir doit être certain, né et actuel lors de l’introduction de l’action. Les actions déclaratoires sont irrecevables.

La cour relève que seules les actions ayant pour objet de faire constater à l’avance que l’on est titulaire d’un droit constituent réellement des actions déclaratoires, en revanche, une action qui comme au cas présent, tend à voir déclarer purgé le droit de péremption de la société locataire, faute d’avoir accepté l’offre qui lui a été notifiée ne constitue pas une action déclaratoire. En outre, lors de l’introduction de son action devant les premiers juges, la régularité de la notification du droit de préemption à laquelle elle avait procédé, étant expressément contestée par la société locataire, notamment dans le courrier en date du 29 octobre 2018, l’association possédait un intérêt certain, né et actuel à agir, pour voir statuer sur ladite régularité.

La société locataire soutient également que l’action est irrecevable faute de mise en cause de la société CHATEL TRANSACTIONS bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente ; ce que conteste l’association bailleresse.

En l’espèce, le présent litige ne porte pas sur la régularité de la promesse unilatérale de vente consentie par l’association à la société CHATEL TRANSACTIONS, sous réserve de la purge du droit de préférence de la société locataire, mais sur la régularité de l’offre notifiée à la société locataire. Dans ces conditions, la société CHATEL TRANSACTIONS n’est pas concernée par le présent litige, et sa non mise en cause ne rend pas irrecevable l’action de l’association.

Sur la validité de la notification de l’offre de vente par le bailleur au preneur

La société locataire conclut à la nullité de l’offre de vente émise par l’association le 19 octobre 2018 et dont elle a accusé réception le 23 octobre suivant. Elle soutient que l’association aurait dû notifier son offre de vente avant la signature du mandat de vente à la société IMMOPOLIS en date du 3 mars 2018, d’autant qu’elle bénéficiait d’un avis de valeur en date du 8 février précédent, que la notification doit être antérieure à toute négociation avec un tiers et avant tout mandat de vente. Elle soutient également, que cette notification doit avoir lieu avant tout avant-contrat ; que la bailleresse ne pouvait signer une promesse unilatérale de vente le 9 novembre 2018. Elle conclut en outre que la notification a été faite à un prix dissuasif, la privant de toute faculté d’achat. Elle sollicite une mesure d’expertise judiciaire afin de déterminer le prix du bien compte tenu de l’importance des divergences de résultats selon la méthode de chiffrage.

L’association conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la régularité de la procédure suivie.

L’article L145-46-1 du code de commerce dispose que :'Lorsque le propriétaire d’un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Cette notification doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée. Elle vaut offre de vente au profit du locataire. Ce dernier dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer. En cas d’acceptation, le locataire dispose, à compter de la date d’envoi de sa réponse au bailleur, d’un délai de deux mois pour la réalisation de la vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l’acceptation par le locataire de l’offre de vente est subordonnée à l’obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois.

Si à l’expiration de ce délai , la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est sans effet.

Dans le cas où le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l’acquéreur, le notaire doit, lorsque le bailleur n’y a pas préalablement procédé, notifier au locataire dans les formes prévues au premier alinéa, à peine de nullité de la vente, ces conditions et ce prix. Cette notification vaut offre de vente au profit du locataire. Cette offre de vente est valable pendant une durée d’un mois à compter de sa réception. L’offre qui n’a pas été acceptée dans ce délai est caduque. (…)'.

Bien que l’association qualifie de droit préemption, le droit consenti par ce texte au preneur, il s’agit en fait d’un droit de préférence, ainsi que l’a précisé le jugement entrepris.

La cour relève que c’est à juste titre que les premiers juges ont retenu que le bailleur étant tenu, dans sa notification au preneur d’indiquer le prix et les conditions de vente qui l’engagent, la vente se faisant à ce prix, le bailleur pouvait entamer des démarches aux fins de commercialisation de son bien, afin de déterminer sa valeur et de vérifier l’existence d’un marché ; que le seul fait que le prix proposé paraisse excessif au regard des prix du marché, ne peut suffire à constituer un motif de nullité, sauf fraude caractérisée ; que le seul fait que l’offre de vente mentionne en sus du prix principal, le coût des honoraires de l’agent immobilier, sans introduire de confusion dans l’esprit de l’acquéreur, alors qu’ils ne sont pas dus, n’est pas une cause de nullité de l’offre de vente.

L’association qui a été envoyée en possession de son legs comprenant l’immeuble litigieux, par ordonnance en date du 11 juillet 2017 du président du tribunal de grande instance de Paris, n’ayant pas vocation à conserver ce bien dans son patrimoine, a pu après avoir demandé un avis de valeur à la société IMMOPOLIS, lui confier un mandat de vente le 3 mars 2018, puis faire procéder à des visites du bien. Le fait qu’elle ait conclu le 8 novembre 2018, une promesse unilatérale de vente, sous réserve du droit de préférence du preneur, n’invalide pas la notification de l’offre de vente à laquelle elle a procédé le 24 octobre précédent, la promesse unilatérale de vente ne valant pas vente, et la notification ayant dans ces conditions, été faite préalablement à la vente.

Contrairement à ce que soutient le preneur, le prix proposé de 5.050.000 euros, n’apparaît pas frauduleux en soi, puisqu’il est inférieur à l’avis de valeur de la société DANIEL FEAU qui estime le bien à 6.500.000 euros et à celui de la société IMMOPOLIS qui l’estime à une somme comprise entre 5.500.000 et 6.000.000 euros. Le cabinet [W], mandaté par la société locataire aux fins de donner une estimation de la valeur du bien indique que la valorisation du bien peut s’effectuer en prenant en compte la valeur locative à laquelle est appliquée un taux de rendement, lequel varie entre 2,5 et 7% et préconise compte tenu du bon emplacement, du bon état d’entretien, d’une architecture typique de la fin du XIXe dont les touristes asiatiques sont épris, de la taille réduite de l’établissement, qui en limite le développement, mais également le risque immobilier, de retenir un taux en bas de la fourchette. Certes, les conclusions de l’expert judiciaire [T], désigné par le juge des loyers aux fins de déterminer la valeur locative du bien dans le cadre de la procédure de renouvellement du bail, en ce qu’elles proposent de fixer à 150.000 euros la valeur locative du bien, sont contestées par la société locataire, mais elles permettent de constater, selon la méthode préconisée par l’expert [W], que le prix proposé dans la notification n’est pas complètement fantaisiste et sans corrélation avec le prix du marché puisqu’un taux de rendement de 3%, situé comme le propose l’expert [W] en bas de la fourchette des taux de rendement, appliqué à une valeur locative de 150.000 euros, conduit à une valorisation du bien à la somme de 5.000.000 euros.

Dans ces conditions, il n’y pas lieu de faire droit à la demande d’expertise sollicitée par le preneur, quand bien même propose-il des évaluations du bien à des montants bien inférieurs, la cour possédant suffisamment d’éléments pour apprécier le caractère non frauduleux du prix de vente proposé.

Ainsi que l’ont fait observer les premiers juges, si la vente devait finalement se réaliser pour un prix inférieur, le bailleur devrait procéder à une seconde notification, la purge du droit de préférence du preneur n’est donc pas définitive .

Le jugement devra en conséquence être confirmé en ce qu’il a dit que l’association a régulièrement signifié à la société locataire le 24 octobre 2018 une offre de vente de l’immeuble à elle loué selon bail renouvelé du 16 mai 2006 et que cette offre n’a pas été acceptée par le preneur et rejeté notamment la demande de l’association tendant à voir juger que le droit de préemption du preneur est définitivement purgé.

L’association devra être déboutée de ses demandes énoncées au dispositif de ses conclusions qui alors qu’elle demande la confirmation du jugement, et au prétexte d’en reprendre les termes, en déforme le sens.

Sur les demandes réciproques de dommages-intérêts

L’offre de vente notifiée par l’association étant déclarée régulière, la société locataire ne justifie d’aucune faute à son encontre et il convient de la débouter de sa demande de dommages-intérêts.

L’association ne caractérise aucune faute de la société locataire dans l’exercice de ses droits, celle-ci ayant rapidement fait connaître de manière argumentée les motifs de son opposition à la vente envisagée et le caractère malicieux de son attitude n’étant pas établi. En conséquence, elle sera déboutée de ce chef de prétention.

Sur les demandes accessoires

Le jugement étant confirmé à titre principal, il le sera également en ce qui concerne les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il ne sera pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel et la société locataire qui succombe en son appel sera condamnée aux dépens de l’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement,

Déclare l’Association cultuelle FRATERNITE SACERDOTALE SAINT PIE X recevable en son action ;

Confirme le jugement entrepris,

y ajoutant,

Rappelle que le droit de préférence du preneur n’est pas définitivement purgé ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne la société HOTEL DE LA TOUR MAUBOURG aux entiers dépens de l’appel, dont distraction au profit de la SCP MOYSE & Associés, par application de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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