Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 20 mai 2021, n° 19/05845

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Chronologie de l’affaire

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Laurent Garcia · Actualités du Droit · 26 mai 2021
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 5, 20 mai 2021, n° 19/05845
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/05845
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bobigny, 17 décembre 2018, N° 2017F00106
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRÊT DU 20 MAI 2021

(n° , 20 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/05845 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7RB3

Décision déférée à la cour : jugement du 18 décembre 2018 – tribunal de commerce de Bobigny – RG n° 2017F00106

APPELANTES

SA GENERALI IARD

Ayant pour avocat plaidant 2 rue Pillet-Will

[…]

N° SIRET : 552 062 663

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SAS A B C F

Ayant son siège social […]

[…]

N° SIRET : 449 080 969

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentées par Me D E-B, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515 Ayant pour avocat plaidant Me Bruno SEYBOLD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1540

INTIMEES

SAS QUALITAIR & SEA INTERNATIONAL

Ayant son siège social […]

95700 ROISSY-EN-FRANCE

N° SIRET : 392 293 635

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SA HELVETIA ASSURANCES SA

Ayant son siège social […]

[…]

N° SIRET : 339 489 379

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentées par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Ayant pour avocat plaidant Me Patrick MICHALEK de la SELARL VIEULOUP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D1352

PARTIE INTERVENANTE :

Société AMERICAN AIRLINES INC., société de droit étranger ayant son établissement principal sis Zone de Fret 7, […]

Ayant son siège social […]

TX 76155 (ETATS-UNIS D’AMERIQUE)

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Emmanuel JARRY de la SELARL RAVET & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0209

Ayant pour avocat plaidant Me François DAINELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : J040

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 février 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme J-K L, présidente de chambre et Mme Christine SOUDRY, conseillère.

Ces magistrats ont compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme J-K L, présidente de chambre, chargée du rapport

Mme Christine SOUDRY, conseillère

Mme Camille LIGNIERES, conseillère

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Mme Hortense VITELA-GASPAR

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme J-K L, présidente de chambre et par Mme G H-I, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La société A B C (« A B ») a pour activité la prestation de services relatifs à l’F, la promotion et la vente de produits sanitaires. La société Qualitair & Sea International (« Qualitair & Sea ») a pour activité le commerce d’opérations de transit, transports internationaux, affrètements maritimes, terrestres, aériens, ainsi que la fonction de commissionnaires de transports en France et à l’étranger.

La société A B a vendu des médicaments à une société Rovafarm et a confié l’organisation de leur transport, depuis Roissy jusqu’à Buenos Aires, à la société Qualitair & Sea, avec laquelle elle est liée par un contrat cadre de commission de transport.

La société A B soutient qu’elle avait donné pour instructions à la société Qualitair & Sea de recourir à un vol direct, sans escale, et de conserver les médicaments à une température comprise entre +2°C et +8°C.

Cependant, la société Qualitair a réservé un vol avec escale à Dallas (Etats-Unis) et a elle-même confié la réalisation du transport aérien à la société American Airlines Inc.

Lors de l’escale effectuée à Dallas le 9 octobre 2015, les marchandise sont restées en transit jusqu’au 21 octobre 2015. La livraison des médicaments à Buenos Aires est finalement intervenue le 22 octobre 2015.

Une expertise amiable diligentée à compter du 5 novembre 2015 a révélé que la marchandise avait subi une augmentation de température au cours du transport, et notamment pendant son transit à Dallas, ce qui l’avait rendue impropre à l’utilisation.

Faute de pouvoir être commercialisés, les médicaments ont été détruits, ce qui a contraint la société A B à émettre un avoir de 172.083,58 euros au bénéfice de son client.

La société A B a été indemnisée par son assureur, la société Generali Iard, à hauteur de 122.083,58 euros mais a conservé à sa charge une franchise d’un montant de 50.000 euros.

Aucun accord amiable n’ayant été trouvé pour le remboursement de ces sommes, les sociétés A B et Generali Iard ont, par acte d’huissier de justice du 6 janvier 2017, fait assigner la société Qualitair & Sea et son assureur, la société Helvetia Assurances, devant le tribunal de commerce de Bobigny, aux fins de les voir condamnées in solidum à verser la somme de 122.083,58 euros à la société Generli Iard et la somme de 50.000 euros à la société A B au titre des fautes commises dans l’organisation du transport des médicaments.

Par acte d’huissier de justice du 2 février 2017, les sociétés Qualitair & Sea et Helvetia Assurances ont assigné en garantie la société American Airlines Inc. ; la jonction des deux affaires a été prononcée.

Par jugement du 18 décembre 2018, le tribunal de commerce de Bobigny a :

— débouté les sociétés Qualitai & Sea International et Helvetia Assurances SA de leur demande de dire que la société A B C ne rapporte pas la preuve de son préjudice ;

— débouté la société American Airlines Inc de sa demande de déclarer les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA irrecevables car forcloses ;

— débouté les sociétés A B C et Generali Iard de leur demande de dire que la société Qualitair & Sea International a commis une faute inexcusable ;

— dit la société American Airlines Inc responsable des avaries survenues aux marchandises lors de leur transit à Dallas ;

— condamné in solidum les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à payer à la société Generali Iard, assureur de la société A B C, les sommes de :

'2.400 euros pour la faute personnelle commise par la société Qualitair & Sea International,

'la contre-valeur en euros au 18 décembre 2018, de 3.230 DTS, en raison de la faute commise par son substitué, la société American Airlines Inc ;

— condamné la société American Airlines Inc à garantir les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA de cette condamnation à hauteur de 3.230 DTS ;

— débouté la société A B C de sa demande principale ;

— condamné in solidum les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à payer à la société Generali Iard et à la société A B C la somme globale de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure et débouté les demandeurs pour le surplus ;

— condamné la société American Airlines Inc à payer aux sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA la somme globale de 2.000 euros ;

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire ;

— condamné solidairement les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA, et American Airlines Inc aux dépens ;

— liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 145,10 euros TTC (dont TVA 24,18 euros).

Par déclaration du 15 mars 2019, les sociétés Generali Iard et A B C ont interjeté appel de ce jugement en ce qu’il a :

— débouté les sociétés A B C et Generali Iard de leur demande de dire que la société Qualitair & Sea International a commis une faute inexcusable ;

— débouté les sociétés A B C et Generali Iard de leur demande de dire que la société Qualitair & Sea International a commis une faute inexcusable ;

— limité la condamnation des sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à payer à la société Generali Iard, assureur de la société A B C, aux sommes de :

'2.400 euros pour la faute personnelle commise par la société Qualitair & Sea International ;

— débouté la société A B C de sa demande principale et plus généralement de l’ensemble de ses demandes tendant à voir :

'dire et juger que la société Qualitair & Sea a commis une faute inexcusable ;

'dire et juger que la société Qualitair & Sea doit indemniser intégralement les sociétés A B C et Generali du préjudice supporté ;

En conséquence,

'condamner la société Qualitair & Sea et son assureur RC, la compagnie Helvetia, à régler in solidum à Generali Iard la somme de 122.083,58 euros en principal, avec intérêts de droits à compter de l’assignation et capitalisation des intérêts en application de l’article 1231-7 du code civil ;

'condamner la société Qualitair & Sea et son assureur R, la compagnie Helvetia, à régler in solidum à A B C la somme de 50.000,00 euros en principal avec intérêts de droits à compter de l’assignation et capitalisation des intérêts en application de l’article 1237-1 du code civil ;

— limité la condamnation des sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à payer à la société Generali Iard et à la société A B C et la société Generli Iard de leurs demandes de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 10.000 euros ;

Et plus généralement de toutes dispositions non visées au code dispositif et faisant grief à l’appelant selon les moyens qui seront développés dans les conclusions.

Par acte du 13 septembre 2019, les sociétés Qualitair & Sea et Helvetia Assurances ont formé un appel provoqué à l’encontre de la société American Airlines Inc.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 20 janvier 2021, les sociétés Generali Iard et A B C demandent à la cour de :

Vu le jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 16 janvier 2019,

Vu le contrat cadre,

Vu les articles 1103, 1104, 1217,1231-1 du code civil,

Vu les dispositions L.132-1 et suivants du code de commerce,

Vu l’article L.133-8 du code de commerce,

Vu les articles L.124-1 et suivants du code des assurances,

— débouter les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Compagnie Suisse d’assurance de leur appel incident et de toutes leurs demandes ;

— débouter la société American Airlines Inc de son appel incident et de toutes ses demandes ;

— confirmer le jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 16 janvier 2019 en ce qu’il a :

'dit les sociétés A B C et Generali Iard recevables ;

'dit la responsabilité personnelle de la société Qualitair & Sea engagée ;

'retenu la responsabilité de la société Qualitair & Sea, en tant que garant des faits du transporteur aérien American Airlines, et l’a condamnée, ainsi que son assureur Helvetia, à payer la somme de 3.230 DTS ;

'condamné in solidum la société Qualitair & Sea International et Helvetia assurances SA à payer à la société Generali Iard et à la société A B C la somme globale de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

'débouté les sociétés A B C et Generali Iard de leur demande de dire que la société Qualitair & Sea International a commis une faute inexcusable ;

'limité la condamnation des sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia assurances SA à payer à la société Generali Iard, assureur de la société A B C, aux sommes de :

'2.400 euros pour la faute personnelle commise par la société Qualitair & Sea International ;

'débouté la société A B C de sa demande principale et plus généralement de l’ensemble de ses demandes tendant à voir :

'dire et juger que la société Qualitair & Sea a commis une faute inexcusable ;

'dire et juger que la société Qualitair & Sea ne bénéficie d’aucune limitation de responsabilité ;

'dire et juger que la société Qualitair & Sea doit indemniser intégralement les sociétés A B C et Generali du préjudice supporté ;

En conséquence, statuant à nouveau :

— constater que les sociétés Qualitair & Sea et A B C ont conclu un contrat de commission de transport ;

— dire et juger que la société Qualitair & Sea, étant liée par un contrat cadre conclu avec la société A B C, ne peut pas invoquer le bénéfice des limitations de responsabilité prévues par le contrat-type commission de transport ;

En conséquence :

— condamner la société Qualitair & Sea et son assureur RC, la compagnie Helvetia, à régler in solidum à la société Generali Iard la somme de 122.083,58 euros en principal, avec intérêts de droits à compter de la présente assignation et capitalisation des intérêts en application de l’article 1231-7 du code civil (ancien) ;

— condamner la société Qualitair & Sea et son assureur RC, la compagnie Helvetia, à régler in solidum à la société A B C la somme de 50.000,00 euros en principal avec intérêts de droits à compter de la présente assignation et capitalisation des intérêts en application de l’article 1237-1 du code civil (ancien) ;

A titre subsidiaire :

— constater que la société Qualitair & Sea a commis une faute inexcusable au sens de l’article L.133-8 du code de commerce :

En conséquence :

— condamner les sociétés Qualitair & Sea et son assureur RC, la compagnie Helvetia, à régler in solidum à Generali Iard la somme de 122.083,58 euros en principal, avec intérêts de droits à compter de la présente assignation et capitalisation des intérêts en application de l’article 1231-7 du code civil (ancien) ;

— condamner les sociétés Qualitair & Sea et son assureur RC, la compagnie Helvetia, à régler in solidum à A B C la somme de 50.000,00 euros en principal avec intérêts de droits à compter de la présente assignation et capitalisation des intérêts en application de l’article 1237-1 du code civil (ancien) ;

En tout état de cause :

— condamner les sociétés Qualitair & Sea et Helvetia à payer la somme de 15.000,00 euros au titre de la procédure d’appel et ce en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner les sociétés Qualitair & Sea et Helvetia aux entiers dépens de la procédure toutes taxes comprises, avec distraction au bénéfice de Maître D E B.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 20 janvier 2021, les sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assurances SA demandent à la cour de :

Vu les articles L.132-1 et suivants du code de commerce,

Vu le contrat type de commission de transport,

Vu la Convention de Montréal du 28 mai 1999,

— infirmer le jugement en ce qu’il jugé que les sociétés Generali Iard SA et A B C SAS rapportaient la preuve de leur préjudice ;

— infirmer le jugement en ce qu’il a condamné les sociétés les sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assurances SA à verser aux sociétés Generali Iard SA et A B C SAS la somme de 2.400 euros pour faute personnelle et 3.230 DTS pour la faute de leur substitué ;

En conséquence, statuant à nouveau :

— dire et juger que la société Qualitair & Sea International SAS est exonérée de toute responsabilité sur le fondement de l’article 18.2.d) de la Convention de Montréal ;

— dire et juger que Qualitair & Sea International n’a commis aucune faute personnelle ;

A titre subsidiaire, pour le cas où le jugement serait confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité de la société Qualitair & Sea International en raison de sa faute personnelle :

— débouter les sociétés Generali Iard SA et A B C SAS de leur appel ;

— confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré que la société Qualitair & Sea International SAS n’a pas commis de faute inexcusable ;

— confirmer le jugement en ce qu’il a limité la responsabilité de la société Qualitair & Sea International et celle de son assureur Helvetia Assurances SA à la somme de 3.400 euros (non 2.400 euros comme indiqué par erreur dans le seul dispositif) en application de l’article 13.2.1 du contrat

type de commission de transport ;

— dire et juger que les sociétés Generali Iard SA et A B C SAS ne rapportent pas la preuve du préjudice subi ;

A titre subsidiaire, pour le cas où le jugement serait confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité personnelle mais infirmé sur l’application du contrat type commission au motif que la limitation de responsabilité pour faute personnelle est traitée par le contrat cadre conclu entre A B C SAS et Qualitair & Sea International SAS :

— juger que la limitation pour faute personnelle de la société Qualitair & Sea International SAS s’élève à la somme de à la somme de 3.230 DTS, en application de la Convention de Montréal du 28 mai 1999, applicable au mode de transport aérien ;

A titre subsidiaire, pour le cas où le jugement serait confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité de la société Qualitair & Sea International du fait de son substitué la société American Airlines Inc :

— confirmer le jugement en ce qu’il a limité la responsabilité de la société Qualitair & Sea International et celle de son assureur Helvetia Assurances SA à la somme de 3.230 DTS, en application de la Convention de Montréal du 28 mai 1999 ;

— confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré les demandes de la société Qualitair & Sea Interntional SAS et Helvetia Assurances SA recevables à l’encontre de la société American Airlines ;

— confirmer le jugement en ce qu’il a retenu le caractère bien fondé de l’appel en garantie des sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assurances SA à l’encontre de la société American Airlines Inc et l’a condamnée à les garantir de la condamnation mise à leur charge au titre de la responsabilité du transporteur aérien ;

— condamner la société American Airlines Inc à garantir les sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assurances SA de toute condamnation qui serait mise à leur charge par l’arrêt à intervenir ;

— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société American Airlines Inc à payer aux sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assurances SA la somme globale de 2.000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société American Airlines Inc. à verser aux sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assurances SA la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire, pour le cas où la Cour ferait droit à l’appel des sociétés Generali Iard SA et A B C SAS :

— dire et juger que les sociétés Generali Iard SA et A B C SAS ne rapportent pas la preuve du préjudice subi ;

— débouter les sociétés Generali Iard SA et A B C SAS de leurs demandes d’indemnisation mal fondées ;

En toute hypothèse :

— condamner les sociétés Generali Iard SA, A B C SAS ou American Airlines Inc à verser aux sociétés Qualitair & Sea International SAS et Helvetia Assuances SA la somme de 5.000

euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 12 décembre 2019, la société American Airlines Inc. demande à la cour de :

Vu la Convention de Montréal de 1999,

Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,

A titre principal :

— dire et juger que l’action des sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à l’encontre d’American Airlines est irrecevable car forclose ;

— En conséquence, infirmer le jugement du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu’il a déclaré l’action en garantie contre American Airlines recevable.

Subsidiairement :

— dire et juger qu’American Airlines n’est pas responsable des préjudices subis par la marchandise ;

— en conséquence, débouter intégralement Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA de leurs demandes à l’encontre d’American Airlines.

Très subsidiairement :

— limiter l’indemnisation qui serait éventuellement allouée à la contrevaleur en euros de 3.230 Droits de Tirages Spéciaux.

En tout état de cause :

— condamner in solidum les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à verser la somme de 10.000 euros à American Airlines au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens relativement de première instance ;

— condamner in solidum les sociétés Qualitair & Sea International et Helvetia Assurances SA à verser la somme de 5.000 euros à American Airlines au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens relativement à la présente procédure d’appel.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 28 janvier 2021.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’application du cahier des charges

Le décret n°2103-293 du 5 avril 2013 portant approbation du contrat type de commission de transport indique en notice que le code des transports prévoit que tout contrat de transport public de marchandises doit contenir certaines clauses (relatives à la nature et à l’objet du transport, aux modalités d’exécution du service, aux obligations des parties et au prix du transport et des prestations accessoires) et qu’à défaut de convention écrite les rapports entre les parties sont, de plein droit, ceux

fixés par les contrats types établis par voie réglementaire.

L’article 1er du contrat type de commission de transport prévoit notamment qu 'en cas de relations commerciales suivies entre un donneur d’ordre et un commissionnaire de transport, ayant fait l’objet d’une convention écrite, chaque envoi est présumé exécuté aux conditions de cette convention.

Il résulte du préambule du cahier des charges signé entre la société Qualitair et la société A B que « les termes et conditions du cahier de charges s’appliquent à toutes les opérations réalisées par le Prestataire pour le compte du donneur d’ordre, qu’elles soient réalisées dans le cadre d’un contrat de commission, d’un contrat de transport ou de toute autre type de contrat ».

L’article 8.2.1 dispose que le cahier des charges « est conclu pour une durée indéterminée prenant effet à compter de sa date de signature ».

L’article 6.4.4 du cahier des charges dispose que les conditions d’indemnisation prévues par les conventions internationales s’appliqueront, le donneur d’ordre et le prestataire ayant la possibilité de convenir d’une assurance ad valorem.

L’article 6.4.6 au paragraphe « limites de responsabilité du prestataire » ajoute qu’en cas de litige imputable au prestataire, les limites de responsabilité dé’nies par la convention applicable au mode de transport concerné s’appliqueront.

Le prestataire ne pourra se prévaloir d’une limitation de responsabilité ou d’un renversement du fardeau de la preuve, si le dommage provient de son dol ou d’une faute qui lui est imputable et qui, après saisine de la juridiction compétente, est considérée comme équivalente au dol. »

La société Qualitair invoque l’article 18.2.d) de la convention de Montréal qui dispose que « 'le transporteur n’est pas responsable s’il établit, et dans la mesure où il établit, que la destruction, la perte ou l’avarie de la marchandise résulte de (') un acte de l’autorité publique accompli en relation avec l’entrée, la sortie ou le transit de la marchandise. ».

Cependant, la société A B et son assureur reprochent à la société Qualitair des fautes antérieurement à l’intervention des douanes dans l’organisation du transport qui doivent être examinées au regard du contrat signé par les parties. Le contrat s’applique entre le donneur d’ordre et le commissionnaire puisqu’il a été passé entre ces deux parties et au vu des dispositions des stipulations du préambule susvisé.

Il sera ensuite évalué si l’intervention des douanes est à l’origine de l’avarie des médicaments et si elle exonère la société Qualitair de sa responsabilité du fait du transporteur.

Contrairement à ce que soutiennent les appelantes, seules les dispositions du cahier des charges s’appliquent et à défaut le contrat type de commission transport. Le fait que les parties n’aient pas prévu certaines dispositions signifie qu’elles s’en remettent à la convention type. Il ne peut être déduit de l’absence de dispositions dans le cahier des charges que les parties ont entendu y renoncer ; en effet, s’agissant de dispositions supplétives, le contrat type de commission transport s’applique à défaut de dispositions contractuelles.

Les parties ont prévu dans le cahier des charges que les limites de responsabilité ne s’appliqueront pas si le dommage provient de son dol ou d’une faute qui lui est imputable et qui, après saisine de la juridiction compétente, est considérée comme équivalente au dol. Le dol est assimilable à la faute inexcusable telle qu’elle est définie en droit des transports.

Le cahier des charges prévoyant une indemnisation en cas de faute personnelle du commissionnaire, il y a lieu de déterminer si la société Qualitair a commis des fautes et si elles constituent des fautes

inexcusables. Dans le cas contraire, la société Qualitair et son assureur pourront opposer les limites de responsabilité prévues au cahier des charges.

Sur la responsabilité personnelle de la société Qualitair & Sea en qualité de commissionnaire

Les sociétés Generali Iard et A B prétendent que la société Qualitair a commis une faute inexcusable au sens de l’article L.133-8 du code de commerce qui la prive du bénéfice de toute limitation de responsabilité ce que contestent les intimées.

L’article L.133-8 du code de commerce définit la faute inexcusable comme étant 'la faute délibérée qui implique la conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable.'

Quatre éléments cumulatifs doivent être réunis pour qu’une faute inexcusable soit constituée :

— une faute délibérée ;

— la conscience de la probabilité du dommage ;

— l’acceptation téméraire de sa probabilité ;

— sans raison valable.

La faute inexcusable s’apprécie in concreto, selon les circonstances. La faute doit être délibérée et ne pas être une simple négligence, la conscience de la probabilité du dommage n’étant pas celle de sa possibilité.

Sur la violation de son engagement d’organiser un transport sans escale

Les sociétés Generali Iard et A B C soutiennent que le commissionnaire de transport engage sa responsabilité chaque fois qu’il ne respecte pas les instructions reçues de son client, qu’en l’espèce, la société A B a expressément demandé à la société Qualitair d’organiser un vol direct, qu’après avoir émis une cotation conformément aux instructions reçues, la société Qualitair a expédié la marchandise sur un vol comportant une escale sans même en aviser la société A B avant l’expédition, que cette violation étant la cause directe des dommages, la responsabilité personnelle de la société Qualitair est entière.

Les sociétés Qualitair et Helvetia répondent que l’organisation d’un transport avec escale ne saurait être constitutive d’une faute dès lors que, c’est suite aux problèmes survenus chez Air France pendant cette période et dans le but de respecter les délais de livraison au regard du risque majeur d’annulation des vols, que la société Qualitair a organisé le vol avec la société American Airlines, et qu’elle n’a commis aucune faute inexcusable au sens de l’article L.133-8 du code de commerce, que la société Qualitair ne pouvait pas avoir conscience de la probabilité du dommage dès lors que la retenue douanière et l’absence de toute mesure de protection de la part des douanes américaines ne pouvaient sérieusement être envisagées.

L’article 5.1.2 du cahier des charges entre les sociétés A B SA et Qualitair, sur les conditions de conservation des marchandises (stockage et transfert), énonce que :

« Pour les livraisons sous température dirigée, des véhicules équipés de compartiments frigorifiques et ventilés garantiront, en fonction de la demande et sauf instruction spécifique, les intervalles suivants :

— A température ambiante contrôlée (+15°C/+25°C) ;

— En réfrigération (+2°C/+8°C), avec prévention de tout risque de congélation ;

— En congélation (

Le prestataire devra respecter la chaîne des températures et exigera de ses sous-traitants l’application de ces consignes durant toute la durée de la prestation de transport y compris au cours des phases de rupture de charges.

L’ensemble des conditions de maintien des températures demandées par l’expéditeur ou le donneur d’ordre doit être sous surveillance jusqu’à remise au destinataire.

Il résulte de la fiche de cotation export aérien versé aux débats que la société A B avait donné pour instruction à la société Qualitair & Sea de recourir à un service express vol direct, soit sans transit.

La société Qualitair ne conteste pas que la température des médicaments devait être comprise entre 2 °et 8° puisqu’elle a donné cette F à la compagnie aérienne.

Le 20 octobre 2015, la société A B informait la société Qualitair que les palettes n’étaient pas arrivées à destination et celle-ci répondait le 21 octobre que le lot était bloqué par les douanes, que « suite aux problèmes survenus chez Air France pendant cette période », la société Qualitair a opté pour un vol sur la compagnie American Airlines Inc. et ce « afin de garantir l’embarquement », que les palettes étaient stockées au frigo depuis le début du contrôle.. »

Dans un courriel du 21 octobre 2015 adressé à la société A B, la société Qualitair indiquait :

« Nous privilégions toujours le vol direct pour vos produits.

Le souci est que seul Air France offre ce service en direct. La période à laquelle l’envoi a été remis correspond à la crise sociale chez Air France qui a duré quelques jours. Par précaution, et compte tenu des évènements importants qui se déroulaient et des recommandations de Air France, nous avons choisi un vol en transit (')».

Il résulte des articles de presse versées aux débats qu’un jour de grève touchant une grande partie du personnel a eu lieu le 05 octobre 2015 à la suite d’un plan de licenciement, d’autres jours de grève étant programmés dans le mois. Aucune annulation de vol n’est cependant rapportée pour les journées des 8 et 9 octobre 2015.

Il résulte de ces éléments que le choix de faire transporter les médicaments par un vol avec transit résulte de la volonté personnelle de la société Qualitair ; s’il n’est pas contestable qu’elle a été confrontée à une période d’incertitude des vols liée à des grèves, elle a commis une faute en ne respectant pas la consigne qui avait été donnée d’un vol direct sans même consulter son donneur d’ordre alors qu’aucune urgence ni impossibilité n’existait.

Pour autant, elle ne pouvait pas avoir conscience de la probabilité du dommage et encore moins avoir accepté de manière téméraire sa probabilité puisqu’elle a fait ce choix pour apporter davantage de garantie et de sécurité à la réalisation du transport.

Sur le manquement de la société Qualitair à son obligation de renseignement sur la réglementation applicable et à son obligation de suivi des opérations de transport

Les sociétés Generali Iard et A B considèrent qu’en l’espèce, la société Qualitair n’a pas, préalablement au vol, transmis toutes les informations nécessaires pour le transit aux Etats-Unis et n’a pas établi correctement les documents nécessaires pour respecter la législation de ce pays, que ces

renseignements insuffisants étant la cause de la rétention de la marchandise par les autorités américaines, sa responsabilité personnelle doit être retenue, que la société Qualitair a informé la société A B que la palette était bien arrivée à Buenos Aires le 9 octobre 2015 puis ne l’a avisée que 12 jours plus tard que les médicaments étaient en réalité bloqués par les douanes américaines.

Les sociétés Qualitair et Helvetia répliquent que l’article 5.1.2 du cahier des charges prévoit que la société Qualitair doit être exonérée dès lors qu’il est établi que les conséquences dommageables découlant du défaut de conservation de température résultent de « circonstances particulières indépendantes de sa part », qu’en l’espèce, ce sont les circonstances particulières aux grèves d’Air France et à la détention de la cargaison par les autorités douanières américaines, toutes indépendantes de la société Qualitair, qui sont à l’origine des dommages, que la société Qualitair n’a fait que transmettre les informations communiquées par la société American Arlines, qu’elle n’avait pas de raison de se préoccuper d’une cargaison qu’elle croyait arrivée.

Par courriel du 09 octobre 2015, la société Qualitair informait la société A B que « la palette est bien arrivée a Buenos Aires ce jour à 9h57, heure locale.»

La société A B relançait la société Qualitair le 20 octobre 2015 en indiquant : « Le client nous dit que cette palette est toujours en France et qu’il n’a rien reçu’ Pouvez-vous vous renseigner de votre coté. »

Le 21 octobre, la société Qualitair répondait : « Je viens d’avoir le retour de la cornpagnie et le lot est bloqué par les douanes. Suite aux problèmes survenus chez Air France pendant cette période, nous avons réservé un vol via American Airlines avec un service express afin de garantir l’embarquement. Cette réservation s’est faite avec un transit à Dallas, et les douanes locales ont bloqué le lot. Tous les détails ont été envoyés à la compagnie qui devrait me fournir les nouveaux détails de vol au plus vite. Je vous avais confirmé l’embarquement du lot suite à l’appel et confirmation orale de la compagnie. Les palettes sont stockées au frigo depuis le début du contrôle. »

Le 22 octobre, la société Qualitair précisait que « la palette a été chargée sur le vol AA997 du 21 octobre. Arrivée prévue ce jour à 9h58, heure locale. »

Le 03 novembre, la société A B indiquait à la société Qualitair : « Nous avons reçu la courbe en pièce jointe. Etant donné l’excursion importante sur plus de 21 jours, les produits ne pourront pas être utilisés et seront détruits. »

Aux termes d’une attestation du 9 janvier 2018, Jo Ann Z, gestionnaire de fret à l’aéroport de Dallas a indiqué que « la raison donnée à American Airlines pour la « rétention » était que la description de la marchandise expédiée, « Pharmaceutical NR », n’était pas conforme aux exigences de la douane américaine et que la description devait être clari’ée. La réglementation sur laquelle la « rétention » était fondée est l’U.S. Code of Federal Regulations (Code américain des réglementations fédérales), titre 21, chapitre 1, sous-chapitre A, partie 1, sous-partie D, §l.70-§1.74. La description de la marchandise en cause, telle que fournie par l’expéditeur, était incomplète au regard de la réglementation. Une fois qu’American Airlines a été avertie par la douane américaine de la « rétention » et du fait que l’expéditeur devait transmettre à la douane américaine des clari’cations sur le contenu de l’expédition, nous avons pris attache avec le contact d’urgence qui avait été fourni, X, dont le numéro de téléphone est le 0562125014, et nous l’avons informé du problème. L’expéditeur n’a fourni la clari’cation requise à la douane américaine que le 17 octobre 2015. Une fois l’F fournie à la douane américaine, cette dernière a levé l’ordre de « rétention », le 20 octobre 2015 à 19h06, date à laquelle American airlines a transporté la marchandise vers sa destination 'nale à Buenos Aires, Argentine. »

L’attestation est imprécise quant aux manquements à la réglementation ayant justifié la rétention des

marchandises et émane d’une salariée de la société American Airlines, sans être corroborée par d’autres éléments de preuve ce qui ne permet pas de retenir une intervention des douanes américaines dans la rétention des médicaments. Par courriel du 21 octobre 2015, M. Y de la société Qualitair interrogeait American Airlines en lui adressant une copie de la lettre de voiture aérienne, en lui demandant : « nous vous remercions de bien vouloir indiquer ce qui ne va pas avec la lettre de voiture aérienne. Les palettes sont retenues à DFW depuis 10 jours sans que nous n’ayons eu de réaction de votre part. Ce sont des produits pharmaceutiques avec une réservation « exx-expedite oversize » ; la société American Airlines l’avisait quelques heures plus tard que la marchandise était délivrée. Il n’est pas justifié de documents supplémentaires réclamés.

Aucun élément objectif ne permet d’affirmer que la société Qualitair a été informée avant le 20 octobre 2015 par son donneur d’ordre de la rétention des marchandises. Il ressort de ce dernier courriel que dès que la société Qualitair est intervenue, la marchandise a été réexpédiée.

Il résulte de la lettre de transport aérien adressée à la compagnie American Airlines que les marchandises transportées étaient des produits pharmaceutiques soit du Navelbine avec la mention : « veuillez stocker cette palette à l’arrivée à plus 2° et plus 8° C ». Il n’est pas contesté que cette température n’a pas été respectée.

La société Qualitair ne peut être tenue responsable du non-respect des températures durant le transit à Dallas qui a duré près de 12 jours. En revanche, il rentrait dans ses obligations de vérifier que la marchandise était arrivée à destination sans pouvoir opposer à la société A B, sans apporter la moindre preuve, les informations orales de confirmation qu’elle avait reçues du transporteur. Cette faute résultant d’un défaut d’F ne peut davantage être qualifiée de faute inexcusable.

En faisant le choix d’un transport aérien avec transit, sans en informer son donneur d’ordre, et en diffusant à la société A B l’F erronée que les médicaments étaient arrivés à destination, la société Qualitair a commis des fautes personnelles engageant sa responsabilité en qualité de commissionnaire. La société Qualitair ne peut se soustraire à sa responsabilité en invoquant l’article 18.2.d) de la Convention de Montréal qui dispose que « 'le transporteur n’est pas responsable s’il établit, et dans la mesure où il établit, que la destruction, la perte ou l’avarie de la marchandise résulte de (') un acte de l’autorité publique accompli en relation avec l’entrée, la sortie ou le transit de la marchandise. ». En effet, la société Qualitair est commissionnaire de transport et sa responsabilité a été retenue dans le choix du transport avec transit qu’elle a fait contrairement aux indications de son donneur d’ordre et sans l’en informer et la preuve de la rétention des médicaments par les douanes américaines n’est pas rapportée. Cette faute personnelle a contribué au dommage en exposant les médicaments à un transit dans un pays tiers à celui de sa destination.

Les fautes n’ayant pas été qualifiées d’inexcusables et donc non assimilables à un dol, les limites de responsabilité prévues contractuellement sont applicables.

Sur la responsabilité de la société American Airlines en tant que transporteur

Sur la forclusion de l’action à l’encontre du transporteur aérien American Airlines

La société American Airlines oppose la forclusion de l’action à son encontre aux motifs qu’en l’espèce, le destinataire mentionné à la LTA n’a jamais adressé la moindre protestation écrite, que la lettre produite par la société Qualitair ne remplit pas les conditions posées par la Convention de Montréal dès lors que rien ne permet de vérifier qu’elle a été effectivement envoyée et reçue dans le délai de 14 jours et que seul le destinataire peut être l’auteur de la protestation prévue, qu’en conséquence, conformément à l’article 31.4 de la Convention de Montréal, l’appel en garantie exercé par les sociétés Qualitair et Helvetia est forclos.

Les sociétés Generali Iard et A B répliquent que l’action de la société Qualitair n’est pas

forclose dès lors que la société Qualitair a adressé des réserves au transporteur aérien American Airlines le 3 novembre 2015, soit 11 jours après la livraison intervenue le 22 octobre 2015, que quand bien même ces réserves ne seraient pas conformes à la convention de Montréal, il incombait à la société Qualitair, en sa qualité de commissionnaire de transport, de préserver le recours de son donneur d’ordre et au besoin de l’informer sur les démarches à entreprendre à cet effet, qu’en ne le faisant pas, celle-ci a commis une faute lui interdisant d’opposer à son donneur d’ordre la forclusion invoquée par son substitué.

Les sociétés Qualitair et Helvetia s’opposent à cette fin de non-recevoir aux motifs que la jurisprudence admet que les protestations et réserves à la livraison soient émises par une personne autre que le destinataire dès lors qu’elle agit comme son mandataire, que par une lettre du 3 novembre 2015 adressée à la société American Airlines, la société Qualitair a expressément formulé toutes protestations et réserves pour le compte des ayants-droit.

L’article 31.2 de la convention de Montréal prévoit « qu’en cas d’avarie, le destinataire doit adresser au transporteur une protestation immédiatement après la découverte de l’avarie et, au plus tard, dans un délai de sept jours pour les bagages enregistrés et de quatorze jours pour les marchandises à dater de leur réception. En cas de retard, la protestation devra être faite au plus tard dans les vingt et un jours à dater du jour où le bagage ou la marchandise auront été mis à sa disposition.

['] 4. A défaut de protestation dans les délais prévus, toutes actions contre le transporteur sont irrecevables, sauf le cas de fraude de celui-ci."

La société Qualitair justifie avoir adressé un courrier daté du 3 novembre 2015 à la société American Airlines aux termes de laquelle elle émet, pour le compte des ayants droit, toutes protestations et réserves relatives aux anomalies constatées sur la palette qui devait être stockée entre 2° C et 8° C dès l’arrivée du vol prévu.

Le courrier peut être adressé par l’expéditeur ; il a été envoyé par le commissionnaire qui dit agir pour le compte des ayants droit. Aucune forme n’est exigée pour l’envoi de ce courrier.

Le 10 novembre 2015, la société American Airlines a répondu à la réclamation en déclinant toute responsabilité en raison de la rétention des marchandises par les douanes. Une réclamation a bien été adressée au transporteur qui y a répondu.

La procédure prévue à l’article 31.2 de la Convention de Montréal ayant été respectée, la demande à l’égard de la société American Airlines est recevable.

Sur le non-respect des instructions de conservation de la marchandise

Les sociétés Generali Iard et A B allèguent que :

— aux termes de l’article 18 de la convention de Montréal, le transporteur est responsable du dommage survenu en cas de destruction, perte ou avarie de la marchandise dès lors que le fait qui a causé le dommage s’est produit pendant le transport aérien ;

— il appartenait donc au transporteur aérien de s’assurer du respect des températures pendant toute la durée de l’escale, ce qu’il n’a pas fait, qu’en conséquence, la responsabilité de la société Qualitair doit être engagée en sa qualité de garant de la société American Airlines.

La société American Airlines soutient que :

— conformément à l’article 18.2 d) de la convention de Montréal, le transporteur n’est pas responsable de l’avarie causée à la marchandise en présence d’un acte d’une autorité publique, qu’en l’espèce, les

marchandises ont été bloquées à l’aéroport de Dallas par les autorités américaines et que c’est pendant cette période de rétention que l’excursion de température reprochée a été relevée, que la société American Airlines, qui ne pouvait pas reprendre possession de la marchandise, doit être exonérée de sa responsabilité ;

— aux termes de l’article 16 de la convention de Montréal, le transporteur n’est pas responsable des dommages résultant de l’insuffisance d’informations fournies par l’expéditeur en vue de l’accomplissement des formalités douanières ;

— selon les termes de la LTA, qui a été signée sans aucune réserve, la consigne de température de la marchandise à +2°C et +8°C ne concernait que la conservation de celle-ci à l’arrivée à Buenos Aires et non en transit, de sorte que les excursions de températures lors de l’escale à Dallas ne peuvent en aucun cas être reprochées à la société American Airlines.

Les sociétés Qualitair et Helvetia considèrent que l’article 18.2 d) de la convention de Montréal a justement été invoqué par la société American Airlines pour s’exonérer et qu’elles sont donc bien fondées à s’en prévaloir pour exclure la responsabilité de la société Qualitair.

L’article 18 de la convention de Montréal stipule que :

« 1. Le transporteur est responsable du dommage survenu en cas de destruction, perte ou

avarie de la marchandise par cela seul que le fait qui a causé le dommage s’est produit pendant le transport aérien.

2. Toutefois, le transporteur n’est pas responsable s’il établit, et dans la mesure où il établit,

que la destruction, la perte ou l’avarie de la marchandise résulte de l’un ou de plusieurs des

faits suivants :

['] d) un acte de l’autorité publique accompli en relation avec l’entrée, la sortie ou le transit de la marchandise."

Selon l’attestation de Mme Z, les marchandises ont été retenues par les douanes américaines car les informations et les mentions fournies par l’expéditeur n’étaient pas conformes à la règlementation américaine applicable en la matière. Cependant, il n’est produit aucune demande en ce sens des autorités américaines alors que les médicaments ont été retenus pendant 12 jours et leur transport interrompu. Il a été retenu que l’attestation de Mme Z, salariée de la société American Airlines était insuffisante pour démontrer que les douanes américaines étaient responsables de la rétention des médicaments.

Or, il a été exposé que la société Qualitair a été avisée le 20 octobre 2015 du fait que les médicaments n’étaient pas arrivés à Buenos Aires, qu’elle a en conséquence adressé un mail à la société American Airlines pour avoir des informations ce qui a permis dès le 21 octobre 2015 le départ de la marchandise vers sa destination finale. Le transporteur ne communique aucun élément objectif démontrant l’intervention des douanes américaines et donc leur responsabilité dans l’interruption du transport des médicaments vers l’Argentine.

La société American Airlines devait veiller au maintien de la température des médicaments dès la sortie de l’avion, sans qu’il soit précisé que ce soit durant le transit ou à l’arrivée du vol.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de considérer que la société American Airlines, transporteur, est responsable du dommage survenu à la marchandise du seul fait que le dommage s’est produit

pendant le transport aérien et alors qu’elle est dans l’impossibilité de justifier de ce qu’il est survenu aux marchandises durant le transit à Dallas et donc à invoquer l’exception prévue à l’article 18.2 de la convention de Montréal soit un acte de rétention des douanes qui est à l’origine de l’avarie survenue et de nature à l’exempter de toute responsabilité.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité de la société American Airlines dans l’avarie survenue aux marchandises lors du transit à Dallas.

Il sera en conséquence également retenu la responsabilité de la société Qualitair du fait de son substitué, aucun fait extérieur n’ayant été relevé dans la survenue du sinistre, l’intervention des douanes américaines ayant été écartée.

Sur le partage de responsabilité

Des fautes personnelles du commissionnaire et la faute du transporteur ayant été retenues et ayant concouru dans les mêmes proportions à la réalisation du dommage, il sera procédé à un partage de responsabilité par moitié.

Sur l’indemnisation

Les parties ayant mentionné à l’article 6.4.4 du contrat que les conditions d’indemnisation prévues par les conventions internationales s’appliqueront, et à l’article 6.4.6 qu’en cas de litige imputable au prestataire, les limites de responsabilité dé’nies par la convention applicable au mode de transport concerné s’appliqueront, il y a lieu d’appliquer les dispositions de la convention de Montréal, plutôt que celles du contrat type de commission de transport.

Aux termes de de l’article 22.3 de la convention de Montréal, dans le transport de marchandises, la responsabilité du transporteur, en cas de destruction, de perte, d’avarie ou de retard, est limitée à la somme de 17 droits de tirage spéciaux par kilogramme, sauf déclaration spéciale d’intérêt à la livraison faite par l’expéditeur au moment de la remise du colis au transporteur et moyennant le paiement d’une somme supplémentaire éventuelle.

L’article 22.4 précise qu’en cas de destruction, de perte, d’avarie ou de retard d’une partie des marchandises, ou de tout objet qui y est contenu, seul le poids total du ou des colis dont il s’agit est pris en considération pour déterminer la limite de responsabilité du transporteur…

Conformément aux dispositions de l’article 24 de la convention de Montréal qui prévoit une réévaluation des limites de responsabilité en fonction de l’inflation, à la date du sinistre, la limite était fixée à 19 droits de tirage spéciaux par kilogramme.

La société A B verse à la procédure l’avoir établi au bénéfice de l’acheteur pour la somme de 1.824.000,00 Pesos argentins correspondant au montant de la facture de vente également produite et établissant le montant du préjudice subi.

Il est également versé une quittance subrogative aux termes de laquelle la société A B reconnaît avoir reçu de sa compagnie d’assurances la société Generali Iard la somme de 122.083,58 euros au titre de la perte subie des médicaments transportés par la compagnie American Airlines le 7 octobre 2015 et la subroge dans ses droits et recours. La société A B a conservé le montant de la franchise soit la somme de 50.000 euros à sa charge.

Le préjudice subi s’élève à la somme de 170 Kg X 19 DST = 3.230 DTS

Il sera rappelé qu’en vertu de l’article ancien 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à l’assuré qui n’a reçu qu’une indemnisation partielle au titre du contrat d’assurance.

Dans ces conditions, en raison des faute personnelles du commissionnaire, il convient de condamner in solidum la société Qualitair et la société Helvetia Assurances à régler à la société A B la somme équivalente en euros à 3.230 DTS, la société Generali Iard ne pouvant prétendre à aucune indemnisation, compte tenu des limites imposées. Le jugement sera infirmé sur le montant de la somme retenue et le créancier.

La société Qualitair et la société Helvetia Assurances seront également condamnées in solidum à verser à la société A B la somme équivalente en euros à 3.230 DTS, en qualité de garant du transporteur. Le jugement sera infirmé de ce chef en ce qu’il a précisé que cette somme devrait être versée à la société Generali Iard.

La société American Airlines, transporteur, devra garantir la société Qualitair et la société Helvetia Assurances à hauteur de la somme équivalente en euros à 3.230 DTS, le jugement sera confirmé de ce chef.

Les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 2 février 2017, date de l’assignation avec capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens et compte tenu de l’issue du litige, chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles d’appel. Les intimées qui restent débiteurs seront condamnés in solidum aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés Qualitair et Sea International et Helvetia Assurances SA à payer à la société Generali IARD, assureur de la société A B C F, la somme de 2.400 euros pour la faute personnelle commise par la société Qualitair et Sea International et la contre-valeur en euros au 18 décembre 2018 de 3.230 DTS, en qualité de garant de son substitué,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la société Qualitair & Sea International et la société Helvetia Assurances in solidum à verser à la société A B C F la somme équivalente en euros à 3.230 DTS à la date de l’arrêt au titre de la faute personnelle de la société Qualitair & Sea International,

CONDAMNE la société Qualitair & Sea International et la société Helvetia Assurances in solidum à verser à la société A B C F la contre-valeur en euros au 18 décembre 2018 de 3.230 DTS, en qualité de garant de son substitué,

DIT qu’il ne peut être alloué aucune indemnisation à la société Generali Iard,

DIT que la société Qualitair & Sea International et la société American Airlines Inc ont contribué chacune à hauteur de 50% à la réalisation du dommage,

DIT que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 2 février 2017 avec

capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE toute autre demande,

CONDAMNE la société Qualitair & Sea International et la société Helvetia Assurances d’une part et la société American Airlines Inc d’autre part in solidum aux dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de Maître D E B.

G H-I J-K L

Greffière Présidente



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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 20 mai 2021, n° 19/05845