Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 3 mars 2021, n° 18/10594

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 4, 3 mars 2021, n° 18/10594
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/10594
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Longjumeau, 28 juin 2018, N° F16/00676
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRET DU 03 MARS 2021

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/10594 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6NGR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juin 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LONGJUMEAU – RG n° F16/00676

APPELANTE

SARL EB MENUISERIE

[…]

[…]

Représentée par Me Francis TISSOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0044

INTIME

Monsieur Z A

[…], bât. […]

[…]

Représenté par Me Nathalie LEHOT, avocat au barreau d’ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Novembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Monsieur Olivier MANSION, conseiller

Madame Anne-Gael BLANC, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. Z A a été embauché par la SARL EB Menuiserie selon contrat à durée indéterminée du 1er octobre 2006, avec reprise d’ancienneté au 1er février 2002, en qualité de représentant.

La relation de travail était régie par la convention collective des VRP.

L’entreprise compte moins de onze salariés.

Le salarié a saisi le conseil des prud’hommes de Longjumeau le 26 juillet 2016 aux fins d’obtenir paiement de rappels de salaire tels que commission et primes.

Par lettre du 24 octobre 2016, l’employeur l’a convoqué à un entretien préalable fixé au 2 novembre 2016, en vue d’un éventuel licenciement.

Celui-ci lui a été notifié par lettre du 7 novembre 2016 dans les termes suivants :

'Je me suis récemment aperçu à la suite d’une discussion avec un poseur habituel de l’entreprise, que vous avez prélevé dans les stocks de EB Menuiserie une fenêtre inadaptée pour un chantier à la suite d’une erreur de prise de côtes, ainsi qu’un tablier de volet roulant, sans me demander d’autorisation préalable, afin de faire installer ces matériaux à votre domicile à Cabourg'.

En dernier lieu, M. Z A sollicitait la condamnation de la société à lui payer les sommes suivantes :

—  53.583,20 euros de rappel de prime d’objectif annuel ;

—  5.358,32 euros d’indemnité de congés payés y afférents ;

—  16.306,27 euros de rappel de commission ;

—  1.630,62 euros d’indemnité de congés payés y afférents ;

—  10.000 euros de dommages-intérêts pour non-respect des obligations contractuelles ;

—  92.800 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

—  15.466,08 euros d’indemnité de préavis ;

—  1.546,60 euros d’indemnité de congés payés y afférents ;

—  10.791,88 euros d’indemnité de licenciement ;

—  2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La défenderesse s’est opposée à ces prétentions et a sollicité la condamnation du demandeur à lui payer les sommes suivantes :

—  16.611 euros en remboursement du trop perçu de commission et prime d’objectif ;

—  2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 29 juin 2018 le juge départiteur a condamné la SARL EB Menuiserie à payer à M. Z A les sommes suivantes

—  29.058,66 euros de rappel de commissions et de primes sur objectifs ;

—  15.466,08 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;

—  15.466,08 euros d’indemnité de préavis ;

—  1.546,60 euros d’indemnité de congés payés y afférents ;

—  10.791,88 euros d’indemnité de licenciement ;

— ces trois dernières sommes avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2017 ;

—  2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les autres demandes des parties ont été rejetées.

La société a été condamnée aux dépens.

Appel a été interjeté par la défenderesse le 20 septembre 2018 après que le jugement lui avait été notifié le 29 août 2018.

Par conclusions notifiées par le réseau virtuel privé des avocats le 14 décembre 2018, l’appelante prie la cour de réduire le montant du rappel de prime et commission à la somme de 17.918,13 euros et de rejeter toutes les demandes en paiement d’indemnité de préavis, d’indemnité de congés payés y afférents, d’indemnité de licenciement et de dommages-intérêts. Elle reprend sa demande de première instance en paiement de la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par conclusions notifiées par le réseau virtuel privé des avocats le 26 février 2019, l’intimée reprend ses prétentions de première instance sous réserve qu’elle réclame la somme de 38.665,19 euros d’indemnité conventionnelle de licenciement et subsidiairement la somme de 10.791,88 euros d’indemnité légale de licenciement. Elle élève à la somme de 3.500 euros sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé sur le litige, la cour se réfère aux conclusions des parties en application de l’article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS :

1 – Sur les primes et commissions

1.1 – Sur le rappel de prime et commission

La SARL EB Menuiserie indique tout d’abord qu’elle consent à ce que les primes et commissions

soient calculées en s’en tenant aux montants de chiffre d’affaire prévus initialement, sans application de la clause de revalorisation annuelle qui n’a jamais fait l’objet d’un avenant à chaque exercice comme cela aurait dû être. Elle soutient néanmoins que le calcul des primes et commissions effectué par le juge départiteur est erroné en ce qu’il ne tient pas compte d’une avance sur prime de 5.000 euros intervenue en novembre 2014. Il estime donc ne devoir que la somme de 17.918,13 euros.

M. Z A répond que les calculs de l’employeur sont incompréhensibles, que l’application des critères du contrat passé entre les parties aboutit à un montant dû de 16.306,27 euros au titre des commissions et de 53.583,20 euros au titre des primes d’objectifs et que les primes de 2013 et 2014 sont des primes exceptionnelles et non des avances sur primes d’objectif ou commissions, de sorte qu’elles n’ont pas lieu d’être déduites au titre de ces dernières.

Sur ce

Le calcul de la société ne saurait être retenu puisqu’elle ne répond pas aux critiques de M. Z A à savoir les raisons du retrait de certaines sommes du chiffre d’affaire servant de base à ses calculs, du décomissionnement de certaines affaires, de la modification du taux de commissionnement sans accord entre les parties.

Le calcul des commissions effectué par le salarié sur la période non prescrite est en revanche exacte et prend bien en compte les avances faites enregistrées sur les bulletins de paie au titre des commissions. M. Z A relève à juste titre que des primes exceptionnelles ne peuvent être prises en compte ni pour le calcul des commissions, ni pour le calcul des primes.

Quant au calcul des primes, ces feuilles de paie ne portent pas trace d’avance sur celles- ci durant la période considérée. Dès lors la somme demandée par celui-ci à ce titre doit être retenue.

1.2 – Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect des obligations contractuelles de la société

M. Z A demande la condamnation de son adversaire à lui payer la somme de 10.000 euros de dommages-intérêts pour n’avoir pas respecté son engagement de lui payer les primes et commissions dues.

Sur ce

Ainsi que l’a relevé le premier juge, cette demande tend dans une certaine mesure à contourner les règles de la prescription sous couvert de demande de dommages-intérêts.

En second lieu elle s’inscrit aussi dans une perspective d’indemnisation du paiement avec retard des sommes dues.

Or cette prétention ne peut prospérer en application de l’article 1231-6 du code civil, faute par l’intéressé de prouver qu’il a subi un préjudice indépendant du retard par la mauvaise foi de la société.

Le salarié sera donc débouté de ce chef.

2 – Sur le licenciement

2.1 – Sur la licéité du licenciement

La SARL EB Menuiserie soutient qu’alors qu’il avait trouvé acquéreur en la personne de M. X, pour une fenêtre qui avait été fabriquée avec des côtes erronées et qui avait été déposée dans un

entrepôt mal éclairé, elle s’est aperçue en la recherchant avec ce client le 20 octobre 2016 qu’elle avait disparu. C’est alors qu’elle aurait appris le vol par le salarié.

Celui-ci répond qu’il n’a fait que suivre un usage au sein de l’entreprise selon lequel les fenêtres mal côtés et par suite inutilisables pouvaient être emportées par les salariés, qu’il avait placé la fenêtre prés de l’entrée de l’entrepôt à un endroit parfaitement éclairé avec un papier indiquant qu’il la prendrait, ce qu’il a fait avec l’aide d’un menuisier en mai 2016. Enfin M. Z A relève la coïncidence troublante du déclenchement de la procédure disciplinaire par la lettre de convocation à l’entretien préalable du 24 octobre 2016, après la saisine du conseil des prud’hommes par lui-même le 26 juillet précédent.

Sur ce

Il résulte des articles L. 1234 – 1 et L. 1234 -9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n’a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié d’entreprise.

L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Un témoignage non conforme aux prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile émanant de M. X, mais avalisé et complété par une attestation régulière de la même personne du 13 décembre 2018 démontre la véracité de la version de la société et notamment que c’est du fait qu’il n’avait pas retrouvé la fenêtre litigieuse le

22 octobre 2016, que l’employeur a appris de la part d’un poseur qu’elle avait été emportée par un salarié. Or le témoignage d’un poseur, en la personne de M. Y, établit que celui-ci avait aidé M. Z A à emporter la fenêtre avant 'les grandes vacances’ de 2016, en pensant que celui-ci avait obtenu l’accord de la société.

S’agissant d’un produit dont la société ne prouve pas que le salarié pouvait penser qu’elle en ferait usage, il peut être considéré qu’il estimait s’emparer d’un objet qui ne pourrait être récupéré utilement par l’entreprise.

Dans ces conditions, même si la soustraction sans autorisation de cette fenêtre reste fautive, il n’est pas prouvé que le maintien du contrat travail de ce salarié d’une ancienneté de plus de dix ans d’ancienneté était impossible, fût-ce le temps du préavis.

Le licenciement sera donc déclaré fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais la faute grave écartée.

2.2 – Sur les conséquences financières de la rupture

Les motifs qui précèdent conduisent la cour à écarter la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La demande d’indemnité spéciale de rupture à hauteur de 38.665,19 euros prévue par l’article 14 de l’accord national interprofessionnel des voyageurs représentants et placiers ne saurait prospérer, faute par M. Z A de remplir la condition de renonciation dans les trente jours suivant l’expiration du contrat de travail à l’indemnité de clientèle à laquelle il pourrait avoir droit. L’indemnité légale de licenciement sollicitée à titre subsidiaire sera donc accordée.

Par suite, la SARL EB Menuiserie sera condamnée à payer à M. Z A les sommes

réclamées à juste titre à savoir :

—  15.466,08 euros d’indemnité de préavis ;

—  1.546,60 euros d’indemnité de congés payés y afférents ;

—  10.791,88 euros d’indemnité de licenciement.

3 – Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il est équitable au regard de l’article 700 du code de procédure civile de confirmer le jugement déféré sur les frais irrépétibles de première instance et de débouter les parties s’agissant des frais irrépétibles d’appel. La société sera déboutée de ce chef. Chaque partie conservera la charge de ses dépens.

4 – Sur les intérêts

Les sommes allouées de nature contractuelle porteront intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2017 comme l’a prévu le premier juge. Les autres sommes de nature indemnitaire porteront intérêts à compter de la décision qui les a prononcées.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Infirme le jugement uniquement sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur la demande de rappel de primes et de commissions et sur les dépens ;

Statuant à nouveau ;

Déboute M. Z A de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SARL EB Menuiserie à payer à M. Z A les sommes suivantes :

—  16.306,27 euros de rappel de commissions ;

—  53.583,20 euros de rappel de prime d’objectifs ;

Confirme la décision déférée pour le surplus ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propre dépens de première instance ;

Y ajoutant ;

Déboute les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles d’appel ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens d’appel.

LA GREFFI’RE LE PR''SIDENT

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