Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 13, 9 novembre 2021, n° 21/02545

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 13, 9 nov. 2021, n° 21/02545
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 21/02545
Sur renvoi de : Cour de cassation, 17 novembre 2020, N° K19-13.402
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 13

ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2021

(n° , 24 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02545 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDCQA

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 18 Novembre 2020 – Cour de Cassation de PARIS – RG n° K19-13.402

APPELANTS

Monsieur L X

Né le […] à Saint-Prix (07)

[…]

[…]

Monsieur N Y

Né le […] à […]

[…]

[…]

Monsieur P Z

Né le […] à […]

[…]

[…]

Monsieur R I

Né le […] à […]

37 rue Max de Saint-Genest

[…]

Monsieur T A

Né le […] à […]

[…] »

66200 CORNEILLA-DEL-VERCOL

Madame V F

Née le […] à […]

[…]

83700 SAINT-RAPHAEL

Monsieur AA B

Né le […] à […]

[…]

42600 ECOTAY-L’OLME

Monsieur AC C

Né le […] à […]

[…]

69230 SAINT-GENIS-LAVAL

Monsieur AJ-AK D

Né le […] à […]

[…]

[…]

Monsieur N E

Né le […] à Aix-Les-Bains (73)

[…]

[…]

Représentés par Me Fabien PEYREMORTE de la SELARL EIDJ-ALISTER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0034

Ayant pour avocat plaidant Me Sylvain NIORD de la SELAS D.F.P. & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT ETIENNE

INTIMÉE

SOCIETE CIVILE DES MOUSQUETAIRES

[…]

[…]

Représentée par Me Marie-Laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936

Ayant pour avocat plaidant Me Stéphanie MASKER, avocat au barreau de Paris, toque : K0002

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Septembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente, chargée du rapport et Mme Estelle MOREAU, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND

ARRÊT :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Nicole COCHET, Première présidente de chambre et par Séphora LOUIS-FERDINAND, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

* * * * *

Faits et procédure

La société civile des mousquetaires (ci-après, la SCM) est une société civile à capital variable créée en 1986 qui détient les actions de la société ITM Entreprise, propriétaire et franchiseur notamment des enseignes Intermarché et Vétimarché, qui dirige le groupement de commerçants indépendants dénommé Groupement des mousquetaires.

MM. X, Y, Z, I, A, B, C, D, E et Mme F (ci-après, les consorts X), adhérents du Groupement des mousquetaires, ont exploité durant plusieurs années des points de vente sous l’une des enseignes appartenant à la société ITM Entreprise.

Ils sont devenus associés de la SCM entre 1987 et 1999, puis ont cédé leurs points de vente.

Différentes assemblées générales extraordinaires de la SCM ont alors voté entre 1998 et 2009 leur exclusion ainsi que les conditions de remboursement des parts qu’ils détenaient dans le capital de la

SCM.

Contestant leur révocation et l’estimation de leurs parts, les consorts X ont assigné la SCM devant le tribunal de grande instance de Paris, lequel, après jonction de procédures, par jugement du 5 juillet 2005 a annulé les assemblées générales décidant ces révocations et ordonné leur réintégration dans leurs droits d’associés de la SCM. Cette décision a cependant été infirmée par un arrêt de la cour d’appel de Paris du 3 novembre 2006, ayant rejeté l’ensemble des demandes.

Le 7 mars 2007, le président du tribunal de grande instance de Paris a, sur la demande des associés exclus, désigné en qualité d’expert M. G avec pour mission de déterminer la valeur de rachat des parts sociales de la SCM sur le fondement de l’article 1843-4 du code civil. Par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris du 17 mai 2010, M. G a été remplacé par M. H, lequel a déposé deux rapports le 25 février 2011.

Par actes des 13 mai 2011, les consorts X ont assigné la SCM devant le tribunal de grande instance de Paris afin qu’elle soit condamnée, sur le fondement des articles 1153, 1154 et 1843-4 du code civil, à leur payer la valeur de leurs participations respectives dans le capital de la SCM, telle que fixée par M. H, déduction faite des sommes déjà acquittées par la SCM.

Par ordonnance du 13 février 2012, le juge de la mise en état a rejeté l’exception soulevée par Mme F et MM. X, Z, I, A, B, C, D et E qui déniait sa compétence pour statuer sur le sursis sollicité par la SCM, a dit n’y avoir lieu à surseoir à statuer et débouté les consorts F, X, Z, I, A, B, C, D et E de leur demande de provision.

Par ordonnance du 28 mars 2012, le juge de la mise en état a notamment prononcé la jonction de cette affaire à celle opposant Mme F et MM. X, Z, I, A, B, C, D et E à la SCM.

Par ordonnance du 20 décembre 2012, le juge de la mise en état a notamment déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par la SCM et rejeté la demande de clôture à titre de sanction des anciens associés de la SCM.

Cette décision a été infirmée par un arrêt de la cour d’appel de Paris du 23 mai 2013, qui a fait droit à la demande de sursis à statuer formée par la SCM dans l’attente de la décision de la Cour de cassation sur pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Paris portant sur la désignation de l’expert en application de l’article 1843-4 du code civil l’opposant aux consorts X, dit la SCM recevable à invoquer la compétence arbitrale concernant l’instance l’opposant à M. Y, fait droit à l’exception d’incompétence soulevée par la SCM au profit du tribunal arbitral en vertu de la clause compromissoire insérée dans les contrats d’enseigne, rejeté les autres demandes.

Par arrêt du 14 mai 2014, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l’arrêt rendu le 23 mai 2013 par la cour d’appel de Paris, remis les parties dans l’état où elles se trouvaient avant l’arrêt et les a renvoyées devant cette même cour autrement composée.

Par arrêt du 30 juin 2015, la cour d’appel de Paris a confirmé l’ordonnance du juge de la mise en état du 20 décembre 2012, sauf en ce qu’elle avait déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée à l’égard de M. Y et, statuant à nouveau, a rejeté cette exception.

Le 8 juillet 2015, les consorts X ont sollicité le rétablissement de l’affaire devant le tribunal de grande instance.

Par jugement du 18 mai 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

— annulé les rapports de M. H en date du 25 février 2011 proposant une valorisation des parts sociales de la société civile des mousquetaires des consorts L X, V F, R I, N E, AJ-AK D, T A, P Z, AC C, AA B et N Y,

— rejeté l’ensemble des demandes formées par les consorts L X, V F, R I, N E, AJ-AK D, T A, P Z, AC C, AA B et N Y,

— condamné les consorts L X, V F, R I, N E, AJ-AK D, T A, P Z, AC C, AA B et N Y aux dépens, les frais de l’expertise ordonnée au regard des dispositions statutaires en raison du désaccord entre les parties sur la valeur des parts sociales étant supportés par moitié par les anciens associés d’une part et la SCM d’autre part,

— condamné les consorts L X, V F, R I, N E, AJ-AK D, T A, P Z, AC C, AA B et N Y à payer à la SCM la somme de 3 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— accordé aux avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par arrêt du 6 février 2019, la cour d’appel de Paris a confirmé en toutes ses dispositions le jugement du 18 mai 2017.

Par arrêt du 18 novembre 2020, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 février 2019 au motif que :

'Vu l’article 2 du code civil et l’article 1843-4 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 31 juillet 2014 : Selon le premier de ces textes, la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif. Les effets légaux d’un contrat étant régis par la loi en vigueur à la date où ils se produisent, l’article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, est applicable aux expertises ordonnées à compter du 3 août 2014, date de son entrée en vigueur. Pour annuler les rapports d’expertise du 25 février 2011 et rejeter les demandes formées par les consorts X, l’arrêt relève qu’il résulte des termes du rapport au Président de la République présentant les dispositions de l’ordonnance du 31 juillet 2014 que le législateur a entendu revenir sur l’interprétation extensive qui était faite par la Cour de cassation des dispositions de l’article 1843-4 pour faire prévaloir les dispositions statutaires quand celles-ci permettent de déterminer le prix des parts, notamment dans le cas d’exclusion d’un associé de société civile tel que l’associé de la SCM. Il ajoute que le législateur a entendu répondre à un impérieux motif d’intérêt général de sécurité juridique et rendre ainsi le nouveau texte applicable aux instances en cours même en cause d’appel, dans le but de corriger sans délai une interprétation juridictionnelle extensive de l’ancienne rédaction, sujette à controverse et de nature à générer un important contentieux. Il en déduit que la nouvelle rédaction est applicable à la situation des consorts X dès lors que le rapport déposé par le tiers évaluateur, même s’il est antérieur à l’entrée en vigueur de l’ordonnance de 2014, a toujours été contesté par la SCM et n’a pas encore produit d’effet définitif en l’absence de décision les concernant. En statuant ainsi, après avoir constaté que l’expert avait été désigné le 7 mars 2007 et le 1er février 2010, de sorte que l’article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 31 juillet 2014, était applicable, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 31 juillet 2014 : Il résulte de ce texte qu’il appartient à l’expert de déterminer lui-même, selon les critères qu’il juge appropriés à l’espèce, sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux. Pour statuer comme il fait, l’arrêt retient qu’en devenant associés de la SCM, les consorts X ont souscrit aux règles des statuts et du règlement intérieur qui stipule, en son article 7, le remboursement de la valeur des parts au prix déterminable selon les modalités qu’il prévoit. Il en déduit que la contestation par les consorts X du prix des parts offert par la SCM en application de ces stipulations ne peut donner lieu, y compris sous l’empire de l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, qu’à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties. En statuant ainsi, alors que l’article 1843-4 du code civil est applicable aux cessions de droits sociaux imposées par les statuts ou le règlement intérieur de la société, la cour d’appel a violé le texte susvisé'.

Par déclaration du 3 février 2021, les consorts X ont saisi la cour d’appel de renvoi.

Prétentions des parties

Dans leurs dernières conclusions notifiées et déposées le 25 mars 2021, les consorts X demandent à la cour, sur le fondement des articles 2, 1153, 1154 et 1843-4, 1869 du code civil et L.231-1 du code de commerce de :

— confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 18 mai 2017 en ce qu’il a dit que les frais d’expertise ordonnée, au regard des dispositions statutaires, en raison du désaccord entre les parties sur la valeur des parts sociales seront supportés par moitié par les anciens associés d’une part et par la SCM d’autre part,

Pour le surplus,

— infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 18 mai 2017 en ce qu’il a :

— annulé les rapports de M. H en date du 25 février 2011 proposant une valorisation de leurs parts sociales de la société civile des mousquetaires,

— rejeté l’ensemble de leurs demandes,

— les a condamnés aux dépens,

— les a condamnés à payer à la SCM la somme de 3 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Et statuant de nouveau,

— écarter l’exception de nullité de leurs apports,

— écarter l’exception d’inconstitutionnalité de l’article 1843-4 du code civil,

— écarter l’existence d’une cession parfaite entre les parties, au regard de l’obligation de remboursement des parts de l’associé retrayant, prévue par la loi et les statuts, et en l’absence de pacte extra-statutaire et de levée d’option aménagé au profit de la société cessionnaire,

En conséquence,

— condamner la SCM :

— au regard du caractère inapplicable de l’ordonnance du 31 juillet 2014 modifiant les dispositions de l’article 1843-4 du code civil, aux contrats souscrits antérieurement à cette date et donc aux rapports du tiers évaluateur H déposés le 25 février 2011,

— du caractère obligatoire des rapports du tiers évaluateur H, qui s’impose aux juges et aux parties,

— de ce que les rapports en date du 25 février 2011, ne sont affectés d’aucune erreur grossière,

— du respect du contradictoire par le tiers évaluateur qui en toute impartialité a expliqué la méthode retenue pour l’évaluation, et a répondu à l’exclusion des statuts et du règlement intérieur de la SCM pour l’évaluation des parts sociales,

— de l’absence de méthode de calcul contenue dans les statuts du 24 juin 1997, applicable aux consorts I, A, D, X, F, B, C, Z, E et Y,

— de ce que, pour les consorts F, B, C, Z, E et Y, l’application de l’article 16-4 des statuts et de l’article 6 du règlement intérieur aboutit au remboursement des capitaux propres consolidés, soit un montant identique à la valeur de remboursement déterminé par M. H,

— de ce que enfin, le tiers évaluateur s’est également placé à la date la plus proche du remboursement pour déterminer la valeur des parts,

— de ce que l’application de l’article L.231-1 du code de commerce dans le cadre d’une société non coopérative, ne peut aboutir au plafonnement du remboursement des parts de l’associé retrayant, à concurrence de ses seuls apports, sauf à le priver des résultats mis en réserve,

— de l’absence de faute de leur part,

— de ce que le remboursement des parts dont la valeur a augmenté depuis l’entrée des associés au sein de la SCM, ne caractérise aucun enrichissement sans cause, mais est fondée au contraire sur le principe du contrat de société,

à payer et porter eu égard au montant déjà réglé par la SCM à :

M. I : 60 parts : 3 056 827,66 euros,

M. A : 60 parts : 3 071 188,53 euros,

M. D : 27 parts : 1 375 572 euros,

M. X : 32 parts : 1 630 308,22 euros,

M. E : 24 parts : 1 216 108,28 euros,

Mme F : 60 parts : 2 989 465,AI euros,

M. J : AI parts : 1 992 976,60 euros,

M. C : 20 parts : 996 488,80 euros,

M. Z : 29 parts : 1 444 908,46 euros,

M. Y : 18 parts : 929 192,74 euros,

Soit, pour 370 parts sociales, la somme de 18 702 787,51 euros,

Et encore,

A titre principal,

— condamner la SCM à payer et porter, au titre des intérêts moratoires arrêtés au 12 février 2021 à :

M. I : 522 447,86 euros,

M. A : 524 902,32 euros,

M. E : 207 847,21 euros,

M. D : 235 101,46 euros,

M. X : 278 638,88 euros,

Mme F : 510 934,87 euros,

M. Z : 246 951,87 euros,

M. C : 170 311,69 euros,

M. J : 340 623,18 euros,

M. Y : 158 810,00 euros,

sommes à parfaire et compléter au vu de la date à laquelle sera rendue la décision jusqu’à complet paiement du principal,

— condamner la SCM à supporter la moitié des frais d’expertise soit 44 252 euros exposés par MM. I, D, X, A, E, C, B, Z, et Mme F,

— condamner la SCM à supporter la moitié des frais d’expertise soit 11 960 euros exposés par M. Y,

— condamner la SCM à leur payer la somme de 20 000 euros chacun au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile compte tenu des 15 années de procédures, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance, distraits au profit de la Selarl Eidj-Alister, sur son affirmation de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées le 9 septembre 2021, la société civile des Mousquetaires demande à la cour de :

A titre principal,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 mai 2017 en ce qu’il a annulé le rapport établi par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par MM. I, X, Z, A, B, K, D, E et Mme F,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 mai 2017 en ce qu’il a annulé le rapport établi par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par M. Y,

En premier lieu,

— constater le défaut d’impartialité de M. H,

En conséquence,

— annuler les rapports rendus par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En deuxième lieu,

— constater que les rapports de M. H ont été établis le 25 février 2011, soit postérieurement à l’expiration des délais fixés par les ordonnances des 1 er février et 17 mai 2010, qui prenaient fin respectivement les 1 er juillet 2010 et 17 janvier 2011, sans avoir sollicité ni obtenu des parties une prorogation de ces délais, de sorte que les rapports litigieux ont été établis alors que sa mission avait pris fin et qu’il en était dessaisi,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En troisième lieu,

— dire et juger que la SCM a commis une erreur sur les qualités substantielles de la personne des consorts I et autres et que cette erreur a vicié son consentement aux contrats d’apports,

En conséquence,

— dire et juger que les contrats d’apports conclus entre d’une part la SCM et d’autre part les consorts I et autres sont nuls,

— annuler par voie de conséquence les rapports rendus par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par les consorts I et autres,

En quatrième lieu,

— dire et juger que l’exigence d’un procès équitable prévue par l’article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales impose un contrôle effectif dans le cadre des recours contre une décision de justice,

— constater que la décision désignant l’expert n’a pas fait l’objet d’un contrôle effectif dans le cadre du recours formé à l’encontre de cette décision par la SCM, dès lors que cette dernière n’a pas pu utilement faire valoir, notamment, la fin de non-recevoir tirée du défaut de respect de la procédure de conciliation préalable prévue par les statuts, ou l’illicéité du remplacement par M. H de l’expert précédemment désigné,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

— dire et juger que la décision de l’expert doit, pour satisfaire l’exigence d’un procès équitable, donner lieu à un contrôle effectif, en fait et en droit, qui ne peut se limiter à celui de l’erreur grossière,

En conséquence,

— juger que chacune des erreurs commises par l’expert, en vertu de tous les chefs de dispositif ci-après, doit conduire à annuler ces rapports, sans égard pour le fait que ces erreurs présentent le caractère d’une erreur grossière,

En cinquième lieu,

— dire et juger que les rapports rendus par M. H portent une atteinte excessive au droit au respect des biens protégé par l’article 1er du Protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En sixième lieu,

— dire et juger que l’article 1843-4 du code civil est inapplicable à une société à capital variable,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

Subsidiairement de ce chef et à supposer l’article 1843-4 du code civil applicable aux sociétés à capital variable :

— dire et juger que les dispositions d’ordre public de l’article L.231-1 du code de commerce limitent les droits des associés sortants d’une société à capital variable à la 'reprise des apports effectués',

— constater que les statuts et le règlement intérieur de la SCM, pris en application de ce texte, prévoient que l’associé démissionnaire ou exclu a droit au remboursement de ses apports, indexés comme il est dit à l’article 6 du règlement intérieur,

— dire et juger que l’article L.231-1 du code de commerce est applicable à l’expert désigné en application de l’article 1843-4 du code civil, qui n’y déroge pas,

— dire et juger qu’en prétendant réaliser une évaluation 'économique’ des parts de la SCM, sans égard pour sa forme juridique et les règles qui s’y appliquent, M. H a méconnu les dispositions de l’article L.231-1 du code de commerce et a commis une erreur grossière,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En septième lieu,

— dire et juger que l’article 1843-4 du code civil est inapplicable à la cause dès lors que Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y, avaient pris l’engagement contractuel, en vertu de l’article 7 du règlement intérieur, de fixer le prix de toutes les futures transactions concernant leurs parts sociales, au montant fixé conformément à l’article 6 du même règlement,

— subsidiairement de ce chef, dire et juger que l’expert a commis une erreur grossière en évaluant les titres en cause à une valeur différente, en violation des engagements contractuels pris par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En conséquence,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 mai 2017 en ce qu’il a annulé le rapport établi par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 mai 2017 en ce qu’il a annulé le rapport établi par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par M. Y,

En huitième lieu,

— dire et juger que les conventions sur la preuve sont valables entre les parties et qu’il résulte de l’article 16-4 des statuts de la SCM dans leurs rédactions des 23 novembre 1999, 27 novembre 2001 et 26 novembre 2002, que les associés démissionnaires ou exclus 'entérinent’ la valeur de remboursement de leurs parts par l’encaissement du paiement total ou partiel,

— constater que les consorts E, Z, B, F et C ont encaissé les chèques qui leur ont été remis en paiement de leurs parts sociales, de sorte que la mutation était parfaite,

— dire et juger que l’article 1843-4 du code civil est en conséquence inapplicable à leur égard,

— subsidiairement de ce chef, dire et juger que l’expert a commis une erreur grossière en fixant la valeur des parts sociales en cause à une valeur différente de celle qui avait été acceptée,

En conséquence :

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par les consorts E, Z, B, F et C,

En neuvième lieu,

— dire et juger que, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, l’expert désigné sur le fondement de l’article 1843-4 du code civil ne peut évaluer les parts à la date de son rapport que si le remboursement n’est pas déjà intervenu, et seulement 'en l’absence de dispositions statutaires sur ce point’ ;

— constater que les statuts et le règlement intérieur de la SCM fixent tout à la fois la date à laquelle

l’associé exclu ou démissionnaire perd sa qualité d’associé et la date d’évaluation du montant dû à l’associé sortant en remboursement de ses parts, et que le remboursement des parts des consorts I et autres est intervenu conformément à ces règles après leur exclusion,

— dire et juger en conséquence que M. H a commis une erreur grossière en évaluant les parts sociales à une date postérieure à la perte de la qualité d’associé de Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En dixième lieu,

— dire et juger que l’expert a commis les erreurs grossières suivantes dans l’évaluation des titres de la SCM :

— l’expert a considéré qu’il ne lui appartenait pas de déterminer le prix que les parties auraient fixé mais de rechercher une 'valeur’ des titres de la SCM,

— l’expert s’est cru tenu par la jurisprudence de la Cour de cassation de procéder à une évaluation 'économique’ par une méthode multi-critères,

— l’expert a évalué les titres de la SCM à une valeur 'économique’ fictive, et non à leur valeur réelle, c’est-à-dire vénale, telle qu’elle résulterait du jeu de l’offre et de la demande pour les parts sociales litigieuses et en tenant compte des contraintes juridiques les affectant,

— l’expert a eu recours à des méthodes d’évaluation grossièrement inadaptées à l’objet de son évaluation,

— l’expert n’a tenu aucun compte des conséquences de son évaluation sur le patrimoine ' et donc la valeur des parts sociales ' de la SCM,

En conséquence,

— annuler les rapports établis par M. H concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y,

En onzième lieu,

— dire et juger Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y mal fondés en leurs demandes en paiement d’intérêts moratoires et les en débouter,

A titre infiniment subsidiaire et reconventionnel,

— dire et juger que Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y ont méconnu leurs obligations contractuelles telles qu’elles résultent des statuts et du règlement intérieur de la SCM, et qu’ils ont ainsi engagé leur responsabilité contractuelle,

En conséquence,

— condamner Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y à payer à la SCM, par compensation, le montant des sommes qui leur seraient dues sur la base des rapports établis par M. H en vertu du jugement à intervenir,

— dire et juger que toutes les sommes qui seraient dues à Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y, en supplément des sommes qui leur ont d’ores et déjà été versées en remboursement de leurs parts sociales, constitueraient un enrichissement sans cause,

En conséquence,

— condamner Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y à payer à la SCM, par compensation, le montant des sommes qui leur seraient dues sur la base des rapports établis par M. H en vertu du jugement à intervenir,

En tout état de cause,

— dire et juger Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y mal fondés en leur demande de condamnation de la SCM à supporter la moitié des frais,

En conséquence,

— condamner Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y à prendre à leur charge la totalité des frais d’expertise de M. H,

— dire et juger Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y irrecevables et en tout état de cause mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions, et les en débouter,

— condamner Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y à payer chacun à la SCM la somme de 20 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme F, MM. I, E, D, X, A, Z, C, B et Y aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Marie-Laure Bonaldi-Nut, avocat au Barreau de Paris, par application de l’article 699 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur la validité des rapports du tiers évaluateur

Le tribunal retient que :

— est applicable au litige l’article 1843-4 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, qui ne subordonne pas le recours au tiers évaluateur en cas de contestation de la valeur de rachat des parts d’une société civile à capital variable, telle la SCM, en cas d’exclusion d’un associé, à ce qu’il soit prévu par la loi, ni n’impose au tiers évaluateur aucune méthode d’évaluation des droits sociaux,

— selon la jurisprudence afférente à cet article, seul le tiers évaluateur détermine les critères qu’il juge les plus appropriés pour fixer la valeur des droits, le choix de la méthode ne pouvant lui être imposé, et l’évaluation fixée par le tiers évaluateur s’impose aux parties à moins qu’il ne soit établi dans le rapport une erreur grossière d’appréciation,

— les dispositions d’ordre public de l’article 1843-4 ancien du code civil n’écartent pas l’application par le tiers évaluateur des méthodes d’évaluation arrêtées conventionnellement par les parties et ne confèrent pas à celui-ci, lorsqu’il est désigné par le juge, une mission différente de celle résultant du mandat qui lui aurait été confié par les parties elles-mêmes si elles étaient parvenues à s’accorder sur son nom,

— en devenant associés de la SCM, les consorts X ont expressément accepté qu’en cas d’exclusion, conformément à l’article 7 du règlement, le remboursement de la valeur de leurs parts se ferait au prix déterminable selon les modalités fixées par la convention des parties,

— leur contestation sur le prix des parts offert par la SCM en application de ces dispositions ne peut donc donner lieu, y compris sous l’empire de l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, qu’à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties,

— en outre, cette méthode est expressément imposée par les statuts de la SCM au tiers évaluateur à compter de 2002,

— M. H, dans ses rapports du 25 février 2011, a écarté la méthode d’évaluation statutaire pour chercher à établir la valeur économique réelle des parts sociales de la SCM,

— le constat de ce que le tiers évaluateur a retenu une valeur autre que celle fixée par les statuts et convenue entre les parties suffit à caractériser une erreur grossière d’appréciation, et justifier l’annulation des rapports.

Selon l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, 'Dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible'.

Il appartient à l’expert de déterminer lui-même, selon les critères qu’il juge appropriés à l’espèce, sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux.

En se remettant, en cas de désaccord sur le prix de cession d’actions, à l’estimation d’un expert désigné conformément à l’article 1843-4 du code civil, les parties font de la décision de celui-ci leur loi et, à défaut d’erreur grossière, il n’appartient pas au juge de remettre en cause le caractère définitif de cette décision.

Les parties ayant accepté de se soumettre à l’article1843-4 du code civil ne peuvent contester l’estimation de l’expert qu’en cas de dol, de violence ou si l’évaluation est entachée d’une erreur grossière.

L’erreur grossière est définie comme celle qu’un technicien normalement soucieux de ses fonctions ne saurait commettre, et est appréciée par rapport au 'comportement d’un appréciateur avisé et consciencieux'.

La société SCM fait valoir une succession d’erreurs grossières commises par l’expert justifiant l’annulation de ses rapports.

Sur l’impartialité de l’expert :

La SCM se prévaut la nullité des rapports sur le fondement de l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales en raison du défaut d’impartialité

subjective et objective de l’expert, qui :

— d’une part, a manifesté dans un article d’une revue professionnelle paru antérieurement à sa désignation, un parti pris sur la méthode de valorisation des parts incompatible avec sa mission,

— d’autre part, a cherché à limiter sa responsabilité au cas de faute lourde, a tenté d’obtenir l’accord de la SCM sur une 'évaluation économique', a accepté diverses missions similaires en opérant une confusion entre les dossiers et s’est empressé à déposer son rapport lorsque qu’elle lui a demandé de se déporter.

Les demandeurs à la saisine contestent le manque d’impartialité de M. H dès lors que :

— sa seule désignation dans un précédent dossier n’est pas de nature à remettre en cause son évaluation, qui procède d’un caractère objectif et se fonde sur des méthodes communément admises,

— à l’instar de M. H, d’autres experts ont écarté la méthode statutaire en raison de son absence de pertinence,

— M. H, dans l’article qu’il a co-signé et dont la SCM avait connaissance dès le début des opérations sans contestation de sa part, procède uniquement à la synthèse du droit positif.

L’article intitulé 'L’article 1843-4 du code civil : bombe à retardement lors de l’évaluation à dire d’expert de titres de société'', co-écrit par M. AF AG et M. AJ-AM H, et paru dans la revue professionnelle Experts en février 2009, antérieurement à la désignation de ce dernier par ordonnances des 1er février et 17 mai 2010, retrace un état de la jurisprudence et commente l’arrêt de la Cour de cassation du 4 décembre 2009 selon lequel l’expert n’est pas tenu par les clauses statutaires et a toute latitude pour déterminer la valeur des actions selon les critères qu’il juge opportuns. Les propos contenus dans l’article, selon lesquels 'l’existence de clauses statutaires fixant le pris de cession de manière déconnectée de la valeur réelle doit les inciter à une grande prudence car les conséquences économiques et financières peuvent à terme être de nature à remettre en cause l’économie du contrat', en particulier pour 'les sociétés (par exemple dans la grande distribution au capital desquelles les associés ont souscrit initialement à un prix volontairement bas et qui souhaitent sortir à la valeur économique vont devoir, soit trouver de nouveaux associés acceptant le nouveau prix, soit procéder à une réduction du capital avec une réduction de leurs capitaux propres' tout en précisant 'Afin de pallier ces difficultés, il est maintenant recommandé de valoriser statutairement les titres en cas de cession ou de retraite en respectant les règles usuelles d’évaluation. Ainsi l’estimation à dire d’expert ne devrait pas alors trop s’écarter de celle proposée par les statuts', relèvent de commentaires de la jurisprudence de la Cour de cassation et des conséquences économiques pouvant en résulter, sans témoigner un parti pris de l’expert quant à une méthode de valorisation des parts écartant d’emblée la valeur statutaire des titres, ni évoquer à mots couverts la situation de la SCM dont l’expert n’était pas encore saisi.

La circonstance que dans sa lettre de mission, l’expert indique que sa responsabilité ne pourra être recherchée que pour faute lourde de sa part, ne caractérise aucun manquement à son obligation d’impartialité. Le fait qu’il ait sollicité divers documents, y compris de nature économique, et recherché l’accord des parties quant à la méthode d’évaluation à retenir relève de l’accomplissement de sa mission.

L’acceptation par l’expert de missions similaires concernant la SCM est tout aussi inopérant à caractériser son défaut d’impartialité, dès lors qu’il a rendu des rapports de contenu distinct et qu’il n’est démontré aucune confusion entre les dossiers.

Aucun manquement à l’obligation d’impartialité ne ressort davantage du dépôt du rapport le 25 février 2011 en suite des dires adressées par les parties, dont celui de la SCM en date du 14 février

2011, auquel il a répondu, l’expert n’étant pas tenu de suspendre sa mission conformément à la demande de la SCM l’informant souhaiter obtenir sa récusation.

Il n’est donc caractérisé aucune erreur grossière de l’expert à ce titre.

Sur l’expiration des délais d’expertise :

La SCM fait valoir la nullité des rapports en raison de l’expiration des missions de M. H, les rapports ayant été déposés au delà des délais impartis sans qu’aucune demande de prorogation n’ait été formulée.

Les demandeurs à la saisine considèrent ce grief mal fondé motifs pris que :

— la SCM, qui n’a pas signé la mission de M. H, ne peut se prévaloir du dépôt du rapport au delà du délai imparti par le président du tribunal de grande instance au visa de l’article 1843-4 du code civil,

— l’expertise, qui a un caractère sui generis, n’est pas soumise aux dispositions du code de procédure civile édictées en matière d’arbitrage interne et d’expertise judiciaire.

En application des dispositions de l’article 1843-3 du code civil en vertu desquelles l’expert a été désigné, seul le président du tribunal, statuant en la forme des référés et sans recours possible, a le pouvoir de désigner un expert afin de déterminer la valeur des droits sociaux devant être rachetés par la société.

La SCM ne peut se contredire en faisant valoir que le délai imparti à l’expert, selon les ordonnances de commission d’expertise 'sauf prorogation après accord des parties' était expiré à la date du dépôt des rapports, le 25 février 2011, tout en soutenant que l’expert 'avait lui-même prévu dans sa lettre de mission une remise de rapport le 15 mars 2011, de sorte que ce dépôt anticipé était bien le résultat d’une hâte délibérée', ce qui constitue l’aveu que d’un commun accord des parties, le délai d’expertise était prorogé jusqu’au 15 mars 2011.

En outre, la poursuite de la mission d’expertise par l’expert au delà du délai imparti par le juge, à la considérer établie, ne caractérise pas une erreur grossière de l’expert.

Sur la nullité des contrats d’apports des associés :

La SCM fait valoir la nullité des rapports d’expertise concernant l’évaluation des titres de la SCM détenus par les consorts X en ce qu’ils sont fondés sur des contrats d’apports des associés entachés de nullité pour erreur sur les qualités substantielles, compte tenu de la volonté des associés de ne pas respecter les statuts, le règlement et les engagements qui en résultent, qui n’a été révélée qu’en 2002 à l’occasion de leur demande de paiement formée après leur exclusion, alors qu’il s’agit d’une condition déterminante pour devenir associé de la SCM. Elle fait valoir :

— sa recevabilité à agir, ayant formé sa demande dès la première instance, dans les délais de prescription du droit commun, et de surcroît par voie d’exception pour s’opposer à la demande de paiement des consorts X,

— l’absence de ratification par ses soins de la nullité par une quelconque décision d’assemblée générale,

— l’absence de méconnaissance d’une loi d’ordre public au travers des stipulations dont les demandeurs à la saisine ont bénéficié lors de la souscription de leurs parts, aucune décision de jurisprudence fondée sur les dispositions de l’article 1843-4 du code civil qui revêt un caractère

public n’ayant jamais annulé des clauses statutaires stipulant une méthode de valorisation, ni a fortiori des engagements personnels pris par les associés, comme en l’espèce, dans un règlement intérieur.

Les consorts X sollicitent le rejet du grief de nullité des contrats d’apports des associés, en ce que :

— la prescription triennale de droit commun de l’article 1844-14 du code civil est acquise,

— la SCM n’a pas intérêt à agir compte tenu de l’exclusion des associés, puisque de facto les assemblées générales extraordinaires qui ont prononcé leur exclusion et ordonné le remboursement des parts ont emporté ratification de la souscription au capital de la SCM,

— les manquements qui leur sont reprochés, soit la demande de remboursement à la valeur économique, constituent la stricte application de l’article 1843-4 du code civil d’ordre public, tel qu’interprêté de façon constante par la Cour de cassation et ne sauraient se situer qu’au stade de l’exécution du contrat et non de sa formation,

— la SCM n’a été ni induite en erreur ni trompée.

L’exception de nullité étant perpétuelle, la SCM est recevable à soulever par voie d’exception la nullité des contrats d’apports des associés dont il est sollicité l’exécution, sans que puisse lui être opposée la prescription. Elle a intérêt à agir dès lors que les associés exclus sollicitent la valorisation de leurs parts sociales sur le fondement de l’article 1843-4 du code civil.

Cependant, elle ne démontre aucune erreur sur les qualités substantielles causée par le comportement des associés qui se sont prévalus du caractère d’ordre public de l’article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2014-863 du 31 juillet 2014, qui est applicable aux cessions de droits sociaux imposées par les statuts ou le règlement intérieur de la société et en vertu duquel il appartient à l’expert de déterminer lui-même, selon les critères qu’il juge appropriés à l’espèce et sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux.

Aucune erreur grossière de l’expert n’est donc caractérisée de ce chef.

Sur la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales consacrée par la mise en oeuvre des dispositions de l’article 1843-4 du code civil :

La SCM invoque la nullité des rapports en raison de l’absence de procès équitable induite par le régime de l’article 1843-4 du code civil, à défaut de recours effectif ouvert à l’encontre de :

— la décision de nomination du tiers évaluateur, l’appel-nullité ne constituant pas un recours devant un juge investi d’un pouvoir de pleine juridiction,

— la décision de l’expert, qui s’impose aux parties et au juge, la faculté ouverte aux parties de saisir le juge en cas d’erreur grossière du tiers-évaluateur ne constituant pas un recours en pleine juridiction qui s’exercerait tant en fait qu’en droit sur l’ensemble des points du litige.

Elle soutient avoir d’ores et déjà été privée d’un recours effectif à l’égard de la décision de nomination de l’expert en méconnaissance de la procédure de conciliation préalable prévue à l’article 13 du règlement intérieur de la SCM, la Cour de cassation ayant jugé que ce grief ne caractérisait pas un excès de pouvoir.

Les intimés ne répliquent pas sur ce point.

L’article 1843-4 du code civil prévoit une procédure par laquelle en cas de désaccord sur la valeur des droits sociaux d’un associé qui doit les céder, le président du tribunal, statuant en la forme des référés, désigne un expert chargé d’en fixer la valeur, et cette décision est sans recours possible, hormis l’appel-nullité ouvert en cas d’excès de pouvoir.

Il résulte de ces dispositions que la décision par laquelle le président du tribunal de grande instance, statuant en application de ce texte, procède à la désignation d’un expert chargé de déterminer la valeur de droits sociaux, est sans recours possible et qu’il n’est dérogé à cette disposition d’ordre général qu’en cas d’excès de pouvoir.

De même, en se remettant, en cas de contestation sur le prix de cession de droits sociaux, à l’estimation d’un expert désigné conformément à l’article 1843-4 du code civil, les parties font de la décision de celui-ci leur loi et à défaut d’erreur grossière, il n’appartient pas au juge de remettre en cause le caractère définitif de cette décision.

Dans son arrêt du 8 avril 2011, la Cour de cassation, refusant de transmettre deux questions prioritaires de constitutionnalité fondées sur la méconnaissance, par les dispositions de l’article 1843-4 du code civil, du caractère contradictoire de la procédure et du droit d’accès à un tribunal, de la liberté contractuelle et des droits de la défense, a jugé que 'Les dispositions d’ordre public de l’article 1843-4 du code civil visent à garantir, dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux ou le rachat de ceux-ci par la société, et s’il y a désaccord sur leur valeur, la juste évaluation des droits du cédant par l’intervention d’un tiers chargé de fixer cette valeur pour le compte des parties sans être tenu de se plier à des clauses qui pourraient être incompatibles avec la réalisation de cet objectif'.

L’appel-nullité ouvert aux parties pour contester la désignation du tiers évaluateur et son estimation de la valeur des parts sociales, alors que les parties, en désaccord sur le prix de cession des parts sociales, ont fait le choix de recourir à la désignation d’un tiers-évaluateur afin d’en fixer la valeur, garantit un droit d’accès au juge au sens des dispositions de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, étant observé que la protection du droit d’accéder au juge n’exige pas un droit de recours ordinaire contre une décision d’un juge.

La circonstance qu’il ait été jugé que le non respect de la procédure de conciliation préalable prévu à l’article 13 du règlement intérieur de la SCM par le président du tribunal de grande instance n’est pas de nature à caractériser un excès de pouvoir entachant la décision de désignation de l’expert, n’établit pas l’absence de recours effectif, mais de bien fondé de celui-ci.

Ce grief n’est donc pas fondé.

Sur l’atteinte au droit au respect des biens consacrée par la mise en oeuvre des dispositions de l’article 1843-4 du code civil et sur la méconnaissance des dispositions d’ordre public de l’article L.231-1 d code de commerce :

La SCM fait valoir que le régime de l’article 1843-4 du code civil tel qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation porte une atteinte excessive au droit au respect des biens prévu à l’article 1er du protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, non justifiée par un objectif d’intérêt général et résultant :

— de l’évaluation des parts sans égard pour les droits de l’associé démissionnaire ou exclu, tels que résultant des dispositions spéciales et impératives de l’article L.231-1 du code de commerce qui fixe et limite les droits de l’associé retrayant d’une société à capital variable – dont la SCM – au remboursement de ses apports, l’article 1843-4 du code civil étant ainsi inapplicable au remboursement de parts sociales de la SCM ; à considérer que cet article puisse être appliqué concurremment avec l’article L.231-1 du code de commerce, le rôle de l’expert devait se limiter à

vérifier que l’associé sortant a bien reçu la somme représentant le remboursement du montant de ses apports, sans pouvoir substituer de son propre chef une valeur supérieure ; l’expert a dès lors commis une erreur grossière en fixant le droit au remboursement d’un associé d’une société à capital variable comme s’il s’agissant d’une société à capital fixe ;

— de l’évaluation des parts sans égard pour les dispositions statutaires prévoyant le mode de détermination de la valeur de remboursement, licites et conformes à l’article L.231-1 du code de commerce,

— de l’évaluation des parts sociales litigieuses à la date du rapport et non au jour où les demandeurs à la saisine ont cessé d’être associés, les faisant ainsi bénéficier des résultats de la société alors qu’ils n’étaient plus associés et n’en assumaient donc plus les risques.

Les demandeurs à la saisine répliquent que l’article 1848-3 du code civil, d’ordre public et qui procède d’un intérêt général de protection de tous les associés retrayants, ne présente aucun caractère anti-constitutionnel au vu des décisions de la Cour de cassation et du Conseil constitutionnel et que son application ne consacre aucune violation du droit au respect des biens ni des dispositions de l’article L.231-1 du code de commerce, étant observé que :

— établir une juste évaluation des droits du cédant relève de l’intérêt général,

— le remboursement des parts sociales demandé est celui qui serait revenu aux associés si, au fur et à mesure des exercices, les résultats consolidés du groupement avaient été distribués chaque année,

— la participation au résultat d’une société procède d’un droit fondamental touchant à la propriété et l’expert a recueilli l’accord des parties sur la date d’évaluation des parts, qui doit être fixée, à défaut de stipulation contraire, au jour du remboursement de la valeur des droits,

— les statuts de la SCM prévoient le recours au tiers-évaluateur de l’article 1843-4 du code civil,

— le Conseil constitutionnel a jugé que l’interprétation jurisprudentielle de l’article 1843-4 du code civil qui considère que les droits sociaux doivent être évalués à la date la plus proche du remboursement de la valeur des droits, est conforme à la constitution,

— l’article L.231-1 du code de commerce est rédigé pour les coopératives, ce que la SCM n’est pas ; cet article, qui mentionne la reprise des apports uniquement au titre de la variabilité du capital social, ne s’intéresse pas aux rapports entre associés eux-mêmes ou encore entre les associés et la société à l’occasion du rachat des parts consécutif à un retrait ou une exclusion ; cet article ne limite donc pas le remboursement de l’associé retrayant à son seul apport et ne prive pas le retrayant de l’évaluation à dire d’expert, la mise en 'uvre d’une clause de variabilité du capital et le rachat de titres qu’elle nécessite constituant bien une hypothèse visée par l’article 1843-4 du code civil.

Selon l’article 1er du protocole additionnel, intitulé 'Protection de la propriété', dont se prévaut la SCM, 'Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes'. Cet article est directement rattaché au droit de propriété.

Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la constitution garantit de l’article 1843-4 du code civil dans sa

rédaction antérieure à l’ordonnance n°2014-863 du 31 juillet 2014 en ce que, selon le requérant, il résulterait une méconnaissance du droit de propriété et du principe d’égalité devant la loi des dispositions de l’article 1843-4 du code civil telles qu’interprêtées par la jurisprudence de la Cour de cassation et aux termes desquelles la date d’évaluation des droits sociaux est fixée, en l’absence de dispositions statutaires sur ce point, à la date la plus proche du jour de leur remboursement et non à la date de la perte de la qualité d’associé. Dans sa décision du 16 juin 2016, il a jugé que :

— les dispositions contestées, telles qu’interprétées par la jurisprudence, ne prévoient pas, en elles-mêmes, la possibilité d’exclure un associé ou de le forcer à céder ses titres ou à se retirer. Elles se bornent à déterminer la date d’évaluation de la valeur des droits sociaux. Elles n’entraînent pas en conséquence de privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789. Le grief tiré de la méconnaissance de cet article doit donc être écarté,

— le délai qui peut s’écouler, en application de la disposition contestée telle qu’interprétée par la jurisprudence, entre la décision de sortie de la société et la date de remboursement des droits sociaux est susceptible d’entraîner une atteinte au droit de propriété de l’associé cédant, retrayant ou exclu. Toutefois, pendant cette période, l’associé concerné conserve ses droits patrimoniaux et perçoit notamment les dividendes de ses parts sociales. Par ailleurs, cet associé pourrait intenter une action en responsabilité contre ses anciens associés si la perte provisoire de valeur de la société résultait de man’uvres de leur part. Au regard de leur objectif, qui est de permettre une juste évaluation de la valeur litigieuse des droits sociaux cédés, les dispositions contestées ne portent donc pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété. Le grief tiré de la méconnaissance de l’article 2 de la Déclaration de 1789 doit être écarté,

— les dispositions contestées fixent dans tous les cas, et quelle que soit la nature des sociétés concernées, la date de l’évaluation à celle qui est la plus proche du remboursement des droits sociaux de l’associé cédant, retrayant ou exclu, sauf disposition contraire des statuts. Elles n’introduisent en conséquence aucune différence de traitement. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.

— l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1978, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution.

Au vu de cette décision, la SCM, qui n’apporte aux débats aucun élément nouveau et pertinent, ne caractérise aucune méconnaissance de l’article 1er du protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui consacre le droit au respect de ses biens, lui-même inclus dans le droit de propriété.

En outre, dans son arrêt du 8 avril 2011 évoqué supra, la Cour de cassation, refusant de transmettre deux questions prioritaires de constitutionnalité fondées sur la méconnaissance, par les dispositions de l’article 1843-4 du code civil du caractère contradictoire à la procédure, du droit d’accès à un tribunal, de la liberté contractuelle et des droits de la défense, a jugé que 'Les dispositions d’ordre public de l’article 1843-4 du code civil visent seulement à garantir, dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux ou le rachat de ceux-ci par la société, et s’il y a désaccord sur leur valeur, la juste évaluation des droits du cédant par l’intervention d’un tiers chargé de fixer cette valeur pour le compte des parties sans être tenu de se plier à des clauses qui pourraient être incompatibles avec la réalisation de cet objectif'.

L’objectif d’intérêt général dont le législateur entend assurer la sauvegarde s’agissant de l’article 1843-4 du code civil, dans sa version applicable aux faits, est la recherche d’un juste prix quand celle-ci pourrait être compromise par l’application, spécialement en cas de retrait ou d’exclusion d’un associé minoritaire, de clauses relatives à l’évaluation des droits sociaux initialement conçues par le groupe majoritaire ou modifiées par lui en cours de vie sociale Il n’est donc porté aucune atteinte à la liberté contractuelle qui ne soit justifiée par l’intérêt général.

Selon l’article L.231-1 du code de commerce, inséré dans le chapitre 1er 'Du capital variable’ du Titre 3 intitulé 'Dispositions communes aux diverses sociétés commerciales', 'Il peut être stipulé dans les statuts qui n’ont pas la forme de société anonyme, ainsi que dans toute société coopérative que le capital social est susceptible d’augmentation par des versements successifs des associés ou l’admission d’associés nouveaux et de diminution par la reprise totale ou partielle des apports (…)'.

Cet article, applicable à la SCM qui est une société à capital variable, prévoit la reprise des apports par l’associé, mais ne précise pas sur quelle base doit être effectué le remboursement des droits sociaux du retrayant. Il revient donc aux statuts de fixer les règles d’évaluation qui s’appliquent.

A défaut de modalités statutaires ou en cas de contestation de la valeur de rachat, l’article 1843-4 du code civil, dans sa version applicable aux faits, a vocation à s’appliquer et confère à l’expert la faculté de déterminer librement les critères qu’il juge les plus appropriés, sans être tenu, lorsqu’elles existent, par les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts ou les conventions liant les parties.

Le même objectif d’intérêt général de recherche de juste prix des dispositions de l’article 1843-4 du code civil, ci-avant rappelé, justifie l’articulation entre les articles 1843-4 du code civil et L.231-1 du code de commerce, et qu’il soit fait application de l’article 1843-4 du code civil en cas de contestation de la valeur de rachat en matière de société à capital variable, sans porter une atteinte injustifiée au droit au respect des biens.

Les rapports d’expertise n’encourent donc aucune nullité pour violation de ce droit, ni pour une application injustifiée de l’article 1843-4 du code civil en violation des dispositions de l’article L.231-1 du code de commerce.

Sur la méconnaissance de l’engagement contractuel préalable des demandeurs à la saisine sur le prix :

La SCM soutient que :

— l’article 1843-4 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, est inapplicable en cas d’engagement d’un associé sur le prix de ses parts sociales, peu important l’acte matériel matérialisant ce consentement,

— l’engagement antérieur pris par chaque associé en vertu de l’article 7 du règlement intérieur de la SCM, est de nature à exclure l’application de l’article 1843-4 du code civil, dans la mesure où l’associé a ainsi pris un engagement sur un prix dans un acte extra-statutaire tout en renonçant à la liberté de négocier le prix, cette solution étant conforme à celle adoptée par le jugement déféré,

— les demandeurs à la saisine ont voté la valeur annuelle des parts sociales et la valeur de remboursement des parts sociales d’autres associés conformément aux articles 6 et 7 du règlement de la SCM,

— même à ignorer l’inapplicabilité pure et simple de l’article 1843-4 du code civil en présence d’un engagement contractuel préalable, l’expert a commis une erreur grossière en retenant une valeur différente de celle qui résultait de l’engagement contractuel des consorts X et qui s’imposait à lui en application de l’article 1134 du code civil.

La SCM, qui se réfère à la jurisprudence de la Cour de cassation ayant exclu l’application des dispositions de l’article 1843-4 du code civil en cas de promesse de vente librement consentie, ne rapporte pas la preuve d’un tel acte conclu entre elle et les demandeurs à la saisine, ni d’un pacte extra-statutaire, ni d’une levée d’option aménagée à son profit au titre de la cession des parts sociales par les demandeurs à la saisine.

Son moyen tend à remettre en cause la cassation de l’arrêt de la cour d’appel de Paris ayant justifié le renvoi de l’affaire devant la cour, et fondée sur les motifs suivants 'Pour statuer comme il fait, l’arrêt retient qu’en devenant associés de la SCM, les consorts X ont souscrit aux règles des statuts et du règlement intérieur qui stipule, en son article 7, le remboursement de la valeur des parts au prix déterminable selon les modalités qu’il prévoit. Il en déduit que la contestation par les consorts X du prix des parts offert par la SCM en application de ces stipulations ne peut donner lieu, y compris sous l’empire de l’article 1843-4 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, qu’à une évaluation conforme aux dispositions contractuelles librement consenties. En statuant ainsi, alors que l’article 1843-4 du code civil est applicable aux cessions de droits sociaux imposées par les statuts ou le règlement intérieur de la société, la cour d’appel a violé le texte susvisé'.

En l’absence de tout élément pertinent avancé par la société SCM, la cour fait sienne la motivation de l’arrêt de renvoi, en sorte qu’il n’est caractérisé aucune erreur grossière de l’expert à ce titre.

Sur la violation par l’expert de l’accord de MM. E, Z, B, C et Mme F sur le montant du remboursement de leurs parts et la méconnaissance de la vente parfaite des titres :

La SCM fait valoir que l’expert a méconnu l’accord des associés sur le montant du remboursement de leurs parts, qu’ils ont accepté en application de l’article 7 du règlement intérieur et qui leur a été réglé en sorte que la mutation de leurs titres était parfaite et a été réalisée, aucune contestation du calcul du montant du remboursement des parts sociales ne pouvant intervenir après son paiement conformément à l’article 16-4 des statuts afférent au 'remboursement des parts des associés retrayants ou exclus' qui stipule qu''En cas de contestation, survenant avant que la valeur de remboursement des parts soit entérinée par le paiement, partiel ou total des sommes dues à l’associé démissionnaire ou exclu, ce dernier pourra convenir avec la société de la désignation d’un expert ou, à défaut d’accord sur le choix de l’expert, solliciter cette désignation auprès du président du tribunal de grande instance du siège social conformément aux modalités prévues par l’article 1843-4 du code civil. En tout état de cause, l’expert désigné déterminera la valeur de remboursement dans le respect des statuts et du règlement intérieur'.

Les demandeurs à la saisine contestent l’existence d’une vente parfaite s’évinçant du remboursement des parts, en ce que les dispositions de l’article 16-4 des statuts contreviennent aux dispositions d’ordre public de l’article 1843-4 du code civil, lesquelles ne prévoient pas de date à laquelle doit survenir la contestation, sauf à se heurter à la prescription, et que l’article 16-4 des statuts ne vise que les contestations sur le calcul du montant versé, et non les contestations sur la valeur de la part sociale remboursée, objet de la présente action.

Ainsi que le font pertinemment valoir les demandeurs à la saisine, aucune vente parfaite entre les parties ne s’infère du défaut de contestation dans les délais impartis par les statuts, les dispositions statutaires étant en contradiction avec les dispositions d’ordre public de l’article 1843-4 du code civil qui ne posent aucune restriction à la faculté de contestation du montant du remboursement des parts sociales.

L’article 1843-4 du code civil étant applicable aux cessions de droits sociaux imposées par les statuts ou le règlement intérieur de la société et permettant à l’expert de déterminer lui-même, selon les critères qu’il juge appropriés à l’espèce, sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux, aucune violation par l’expert des dispositions de l’article 16-4 des statuts ni d’un prétendu accord des parties sur le prix n’est caractérisé.

Ce moyen est donc inopérant.

Sur la date à laquelle l’expert a évalué les parts sociales :

La SCM, soutenant qu’aucun accord n’est intervenu entre les parties quant aux dates du 31 décembre 2008 et 31 décembre 2009 respectivement retenues par l’expert pour évaluer les parts sociales de M. Y, d’une part, et les consorts X et autres, d’autre part, prétend que l’expert a commis une erreur grossière en évaluant les parts sociales à une date postérieure à la perte de la qualité d’associé des demandeurs à la saisine, ce :

— en méconnaissance du principe d’égalité entre associés,

— en violation du droit de propriété, protégé par l’article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et du principe d’égalité entre associés,

— en procédant à une interprétation erronée de la jurisprudence de la Cour de cassation (arrêt chambre commerciale du 4 mai 2000 pourvoi n°08-20693), qui pose une double condition à l’évaluation au jour ou à la date la plus proche du rapport, soit l’absence de remboursement des parts de l’associé et l’application des règles statutaires s’il en existe, lesquelles conditions ne sont pas réunies en l’espèce puisque, d’une part, les demandeurs à la saisine ont obtenu le remboursement de leurs parts, d’autre part, les statuts ainsi que le règlement intérieur fixent la date à laquelle est déterminée la valeur à verser aux associés démissionnaires ou exclus.

Les demandeurs à la saisine répliquent que :

— en l’absence de clause statutaire fixant la date d’évaluation des parts, seule dérogation au principe de valorisation au jour du remboursement, l’expert qui a retenu la date de valorisation la plus proche du remboursement s’est conformé aux règles d’évaluation de la profession, aux principes d’évaluation fixés par la DGFI ainsi qu’à la jurisprudence de la Cour de Cassation,

— l’expert a constaté l’accord des parties pour déterminer au 31 décembre 2009 la valeur des parts.

Les règles statutaires et réglementaires dont se prévaut la société SCM ne justifient que les demandeurs à la saisine ont d’ores et déjà obtenu le remboursement de leurs parts sociales, puisqu’ils en ont contesté le montant tout en sollicitant le bénéfice des dispositions de l’article 1843-4 du code civil.

Il résulte des développements ci-avant que les dispositions de l’article 1843-4 du code civil telles qu’interprêtées par la jurisprudence de la Cour de cassation (arrêt du 4 mai 2000 dont se prévaut la SCM rendu au visa des articles1843-4 et 1869 du code civil) et aux termes desquelles la date d’évaluation des droits sociaux de l’associé qui se retire est fixée, en l’absence de dispositions statutaires sur ce point, à la date la plus proche du jour de leur remboursement et non à la date de la perte de la qualité d’associé, ne portent pas atteinte au droit de propriété ni au droit aux biens, ni au principe d’égalité entre associés.

L’expert a retenu comme date d’évaluation des parts les 31 décembre 2008 et 31 décembre 2009 en mentionnant expressément dans ses rapports que ces dates ont été retenues d’un commun accord par les parties lors de la réunion du 20 avril 2010, dont le compte rendu, adressé aux parties, indique, pour M. Y, que 'Les parties, après exposé de leurs points de vue, arrêtent avec l’expert la méthode de travail, à savoir la période concernée, les documents à retenir et la méthode utilisée. Les parties conviennent tout d’abord que les documents à retenir sont les comptes arrêtés et certifiés au 31 décembre sur la période 2006-2008. La valorisation se fera au 31 décembre 2008", et pour les consorts X et autres la même formule hormis le fait que 'la valorisation se fera au 31 décembre 2009".

Le rappel par l’expert de l’accord des parties sur la date d’évaluation des parts n’a fait l’objet d’aucune contestation de la part de la SCM à l’issue de l’envoi des comptes rendus de réunion du 20 avril 2010, mais seulement dans le dire adressé à l’expert du 14 février 2011 en sorte que les dates retenues par l’expert ne sont pas utilement discutées.

Même à considérer qu’aucun accord sur la date de valorisation des parts n’ait été recueilli par l’expert comme le prétend la SCM, il lui appartient d’établir ses allégations selon lesquelles l’expert a commis une erreur grossière en ne déterminant pas la valeur des droits sociaux à la date prévue par les dispositions statutaires et réglementaires.

Pour ce faire, elle se fonde sur :

— l’article 16-2 des statuts qui prévoit, pour les associés démissionnaires, que 'le retrait est effectif à la date de réception par le gérant de la lettre de retrait',

— l’article 16-3 des mêmes statuts qui précise, pour ce qui concerne les associés exclus, que 'l’exclusion prendra effet à l’issue de l’assemblée qui l’a prononcée'.

— l’article 6 du règlement intérieur qui, par renvoi de l’article 16-4 des statuts, prévoit que le remboursement des apports interviendra à la valeur suivante 'Celle de l’année d’avant, majorée d’un pourcentage représentant une plus value de dix pour cent plus l’inflation. (…)', cette référence à l’ 'année d’avant', sur renvoi de l’article 16-4 des statuts, désignant, selon elle, l’année qui précède l’exclusion ou la démission de l’associé.

Elle déduit de ces dispositions que les statuts et le règlement intérieur de la SCM fixent bien tout à la fois la date à laquelle l’associé exclu ou démissionnaire perd sa qualité d’associé, et la date d’évaluation du montant dû à l’associé en remboursement de ses parts et que c’est à la date de l’exclusion ou du retrait d’un associé de la SCM, différente pour chaque demandeur, et non uniformément au 31 décembre 2009, que l’expert aurait dû se placer.

Les demandeurs à la saisine répliquent que :

— seule une stipulation expresse s’adressant au tiers évaluateur en cas de contestation peut être retenue comme une dérogation au principe de valorisation au jour du remboursement,

— si l’article 16-4 des statuts renvoie à la désignation d’un tiers évaluateur au visa de l’article 1843-4 du code civil, et à l’obligation pour ce dernier de déterminer la valeur de remboursement dans le respect des statuts et du règlement intérieur, ni lesdits statuts, ni le règlement intérieur ne fixent une date d’évaluation, se bornant à traiter de la contestation de la valeur des parts et de la désignation d’un expert,

— tenter d’interpréter les statuts constituerait une dénaturation du contrat de société et remettrait en cause la volonté des parties exprimée lors des opérations d’expertise,

— l’article 6 du règlement intérieur, au regard de la condition posée par l’article 16-4 alinéa 2 des statuts, ne fixe pas la date à laquelle seront arrêtés les comptes servant de base au remboursement des parts de l’associé retrayant, mais détermine le montant de la valeur de souscription pouvant servir de valeur de remboursement, sans renvoi aux hypothèses de contestation, ni de désignation d’un tiers évaluateur.

L’article 6 du règlement de la SCM prévoit que 'Pour l’application de l’article 9-2 des statuts [relatif à l’augmentation du capital], chaque année, au moment de la réunion de l’assemblée générale annuelle, la gérance proposera à l’assemblée générale une valeur de souscription des parts de la SCM qui pourra également être retenue par l’assemblée générale conformément à l’article 16-4 des statuts [relatif au remboursement des parts des associés retrayants ou exclus] , comme valeur de remboursement des parts des associés démissionnaires ou exclus.

La valeur proposée par la gérance sera :

- celle de l’année d’avant, majorée d’un pourcentage représentant une plus value de 10% plus l’inflation. Pour ce faire, l’indice retenu sera celui des prix à la consommation des ménages urbains dont le chef est ouvrier ou employé 'alimentation et boissons’ base 100 en 1998 publié pour le mois de décembre chaque année par l’INSEE. Il est rappelé pour mémoire que l’indice de décembre 1998 s’élève à 100,1.

Toutefois, cette majoration n’interviendra que dans la mesure où le résultat net cumulé et/ou consolidé d’ITM Entreprises et de ses filiales sera au moins égal, en valeur absolue, à l’augmentation des parts née de l’application de la formule ci-dessus.

L’assemblée générale extraordinaire pourra toujours modifier cette disposition et choisir d’autres modalités. Elle devra alors modifier le présent article'.

L’article 16-4 des statuts, s’il indique les modalités du remboursement des parts sociales en renvoyant notamment à l’article 6 du règlement intérieur, prévoit expressément la possibilité, en cas de contestation, de saisir un expert en application de l’article 1843-4 du code civil sans fixer la date d’évaluation des parts par l’expert ainsi saisi.

L’expert n’a donc commis aucune erreur grossière en évaluant, en l’absence de date définie par les dispositions statutaires et réglementaires, les parts aux 31 décembre 2008 et 31 décembre 2009, conformément à l’accord qu’il indique avoir recueilli des parties et qui consiste en la date la plus proche du remboursement des parts.

Sur l’erreur grossière de l’expert dans la fixation du prix :

La SCM soutient que l’expert a commis une erreur grossière dans la fixation du prix:

— en croyant déterminer une valeur au lieu de rechercher le prix qu’auraient fixé les parties, à supposer qu’il ne l’ait pas déjà été, en tenant compte de leur volonté exprimée dans les statuts et des contraintes qui se seraient imposées aux parties, soit l’engagement de celles-ci sur un prix déterminé par les statuts et l’application de la même méthode de valorisation à la souscription et au remboursement,

— en considérant être tenu par la jurisprudence de la Cour de cassation, de rechercher une valeur économique sur la base d’une analyse multicritères, alors qu’aucune méthode n’est imposée à l’expert, qui est libre de son évaluation et peut parfaitement retenir la valeur statutaire,

— en ne retenant pas la valeur réelle, c’est à dire vénale et statutaire, prenant en considération l’état du bien et toutes les contraintes pesant sur lui, alors qu’aucun acquéreur potentiel ne pourra avoir un intérêt quelconque à acquérir ces parts sociales à une valeur supérieure à la valeur statutaire, et en ne tenant pas compte des mutations comparables, seule méthode de valorisation adaptée au cas d’espèce,

— en adoptant des méthodes comptables d’évaluation complètement inadaptées à l’objet de l’évaluation, comme s’il s’agissait de droits sociaux librement négociables,

— en refusant de prendre en considération les conséquences que sa propre évaluation aurait sur les comptes sociaux.

Les demandeurs à la saisine répondent qu’aucune erreur grossière du tiers évaluateur désigné en application de l’article 1843-4 du code civil n’est caractérisée, dès lors que :

— le tiers évaluateur adopte, dans le respect du contradictoire et avec impartialité, la méthode qu’il estime la plus appropriée pour fixer la valeur de remboursement des parts ou des apports réactualisés au jour du retrait de l’associé, et ce sans aucune contrariété avec les statuts de 1997 concernant MM. I, A, D, X,

— M. H a, à juste titre, écarté la méthode statutaire au regard de critères objectifs relevant des principes exposés par la DGFI, des recommandations de la Cour de cassation et des règles d’évaluation établies par la profession,

— la valeur de souscription ne peut être retenue comme valeur de remboursement que si elle est plus favorable que le remboursement de l’apport majoré de la quote-part de bénéfices de la société mise en réserve, telles que figurant dans le bilan consolidé du groupe, d’autant que l’article 6 du règlement renvoie expressément, pour la variation du prix de souscription, au résultat net consolidé d’ITM Entreprise et de ses filiales,

— M. H était dans l’impossibilité de déterminer la valeur dans le cadre fixé par les parties qui n’ont pas défini les modalités, l’article 16-4 des statuts ne constituant et ne formalisant que le droit au remboursement tel que prévu par l’article 1869 du code civil sans fixer une quelconque méthode de valorisation et les articles 6 et 7 du règlement ne fixant que la valeur de souscription en numéraire.

Il sera rappelé qu’en se remettant, en cas de désaccord sur le prix de cession d’actions, à l’estimation d’un expert désigné conformément à l’article 1843-4 du code civil, les contractants font de la décision de celui-ci leur loi et, à défaut d’erreur grossière, il n’appartient pas au juge de remettre en cause le caractère définitif de cette décision, l’expert étant libre de déterminer lui-même, selon les critères qu’il juge appropriés à l’espèce, sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux.

Le moyen soulevé par la SCM vise à remettre en cause la méthode d’évaluation des parts sociales choisie par l’expert, alors qu’il n’est pas tenu par les dispositions statutaires ni par la prétendue volonté des parties -au demeurant non démontrée- de fixer la valeur du remboursement des parts à leur valeur de souscription, ni par les directives des parties.

Aucun élément n’établit que l’expert ne se serait pas conformé aux règles d’évaluation de la profession et aux recommandations en la matière.

Seul l’expert détermine les critères qu’il juge les plus appropriés pour fixer la valeur des droits, aucun choix de méthode ne pouvant lui être imposé. En outre, le choix de la méthode multi-critères, outre qu’il est conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation, ne caractérise pas une erreur grossière de l’expert, qui a fixé les critères qu’il jugeait appropriés en l’espèce tout en s’expliquant sur ce choix auprès des parties qui ont pu exposer leur point de vue sur les méthodes de valorisation des parts et lui ont adressé des dires auxquels il a répondu en indiquant pour quelles raisons il écartait la valeur 'statutaire’ alléguée par la SCM au bénéfice de la valeur réelle tenant compte de tous les éléments dont l’ensemble permet d’obtenir une évaluation aussi proche que possible de celle qu’aurait entraîné le jeu de l’offre et de la demande, sur un marché réel. Aucun élément pertinent n’est donc de nature à remettre en cause la méthode choisie par l’expert.

En outre, et ainsi que le relèvent les demandeurs à la saisine, la valeur retenue par l’expert H est similaire à celle retenue par son homologue AG sur les comptes arrêtés au 31 décembre 2009 et au moyen de méthodes différentes, ce qui confirme l’absence d’erreur grossière d’évaluation.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’expert n’a pas méconnu l’étendue de ses pouvoirs dans

l’exercice de sa mission au titre des dispositions de l’article 1843-4 du code civil.

La demande de nullité des rapports doit être rejetée en infirmation du jugement entrepris.

Sur la demande de remboursement des parts sociales :

Les conclusions des rapports d’expertise s’imposant aux parties et au juge, les demandeurs à la saisine sont fondés à solliciter le remboursement de leurs parts sociales au montant fixé par l’expert, déduction faite des fonds déjà perçus, soit les sommes suivantes :

M. I …….. 60 parts ………………………………………….. 3 056 827,66 euros

M. A …………60 parts ………………………………………….. 3 071 188,53 euros

M. D ………….27 parts ………………………………………….. 1 375 572,00 euros

M. X ……… 32 parts ………………………………………….. 1 630 308,22 euros

M. E ……….. 24 parts ………………………………………….. 1 216 108,28 euros

Mme F … 60 parts ………………………………………….. 2 989 465,AI euros

M. J …………..AI parts ………………………………………….. 1 992 976,60 euros

M. C ……….. 20 parts …………………………………………….. 996 488,80 euros

M. Z ……. 29 parts ………………………………………….. 1 444 908,46 euros

M. Y ……….. 18 parts …………………………………………….. 929 192,74 euros

Il y a lieu d’assortir ces sommes des intérêts moratoires non pas à compter du 25 février 2011, date du dépôt des rapports d’expertise, mais du 13 mai 2011, date à laquelle les demandeurs à la saisine ont assigné la SCM devant le tribunal de grande instance de Paris en paiement, sur le fondement des articles 1153, 1154 et 1843-4 du code civil, de la valeur de leurs participations respectives dans le capital de la SCM telle que fixée par M. H, déduction faite des sommes déjà acquittées par la SCM, cette assignation valant mise en demeure.

Sur la responsabilité contractuelle des demandeurs à la saisine du fait du non-respect des statuts :

La SCM recherche la responsabilité contractuelle des consorts X en raison de la violation de leur engagement contractuel tel que ressortant des statuts et de l’article 7 du règlement intérieur contenant, selon elle, l’engagement irrévocable des associés à l’égard du prix de leur futures transactions sur les parts sociales, tant avec la société qu’avec d’autres associés.

Les demandeurs à la saisine contestent pertinemment cette demande en faisant valoir que l’invocation des dispositions protectrices d’ordre public de l’article 1843-4 du code civil ne peut en soi caractériser une faute contractuelle ou une inexécution de la convention liant les parties, les statuts prévoyant au demeurant le recours à ces dispositions.

La demande indemnitaire formée de ce chef par la SCM est donc infondée et doit être rejetée.

Sur l’enrichissement sans cause :

La SCM prétend que les demandeurs à la saisine ont bénéficié d’un enrichissement sans cause à son

détriment, sans que cet appauvrissement corrélatif ne soit causé, dès lors qu’ils obtiennent sous impulsion d’un tiers à la convention, soit l’expert saisi sur le fondement de l’article 1843-4 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 31 juillet 2014, une indemnisation d’un montant supérieur à celui auquel ils pouvaient prétendre, se limitant au remboursement de leurs apports en application de l’article L.231-1 du code de commerce et des dispositions statutaires.

Les demandeurs à la saisine objectent que la construction prétorienne de l’action de in rem verso au visa de l’article 1371 du code civil, suppose, pour être mise en 'uvre, que l’enrichissement ne provienne pas de la loi. Ils ajoutent que la cause de leur enrichissement se trouve dans leur contrat d’associé, en ce qu’il provient de leur participation au capital social de la SCM suite à leurs apports, laquelle a généré des profits très importants qui ont augmenté les capitaux propres et l’actif de la SCM, et qu’ils obtiennent le remboursement de leurs parts à concurrence de sa participation.

La valeur des parts sociales des demandeurs à la saisine au sein de la SCM ayant été fixée en application des dispositions légales de l’article 1843-4 du code civil, il ne s’infère aucun enrichissement sans cause des intéressés.

La demande indemnitaire de ce chef doit donc être rejetée.

Sur les dépens, les frais d’expertise et l’article 700 du code de procédure civile :

La société SCM sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel avec les modalités de recouvrement prévues à l’article 699 du code de procédure civile, hormis les frais des expertises, ordonnées en application des dispositions de l’article 1843-4 du code civil et dans l’intérêt commun des parties, dont les premiers juges ont dit à bon droit qu’ils seront supportés par moitié par les anciens associés, d’une part, et la SCM, d’autre part.

Les dispositions du jugement entrepris relatives à l’article 700 du code de procédure civile sont infirmées, l’équité commandant de condamner la SCM à payer aux demandeurs à la saisine une indemnité de 4 000 euros chacun.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a condamné MM. L X, N Y, P Z, R I, T A, AA B, AC C, AJ-AK D, N E et Mme V F, d’une part, et la société civile des Mousquetaires, d’autre part, à supporter par moitié les frais d’expertises judiciaires,

Statuant de nouveau,

Déboute la société civile des Mousquetaires de sa demande d’annulation des rapports d’expertise,

Condamne la société civile des Mousquetaires à payer les sommes suivantes, déduction faite des fonds déjà perçus :

M. I …….. 60 parts …………………………………………..3 056 827,66 euros

M. A …………60 parts ………………………………………….. 3 071 188,53 euros

M. D ………….27 parts ………………………………………….. 1 375 572,00 euros

M. X ……… 32 parts ………………………………………….. 1 630 308,22 euros

M. E ……….. 24 parts ………………………………………….. 1 216 108,28 euros

Mme F … 60 parts ………………………………………….. 2 989 465,AI euros

M. J …………..AI parts ………………………………………….. 1 992 976,60 euros

M. C ……….. 20 parts ………………………………………….. 996 488,80 euros

M. Z ……. 29 parts ………………………………………….. 1 444 908,46 euros

M. Y ……….. 18 parts …………………………………………….. 929 192,74 euros

Dit que ces sommes seront chacune assorties des intérêts au taux légal à compter du 13 mai 2011,

Y ajoutant,

Déboute la société civile des Mousquetaires de ses demandes indemnitaires,

Condamne la société civile des Mousquetaires à payer à MM. L X, N Y, P Z, R I, T A, AA B, AC C, AJ-AK D, N E et Mme V F une somme de 4000 euros chacun au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société civile des Mousquetaires aux dépens de première instance et d’appel avec les modalités de recouvrement de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 13, 9 novembre 2021, n° 21/02545