Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 18 mai 2021, n° 19/19537

  • Amiante·
  • Cabinet·
  • Sociétés·
  • Produit·
  • Assureur·
  • Rapport·
  • Préjudice·
  • Mutuelle·
  • Cession·
  • Liste

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 8, 18 mai 2021, n° 19/19537
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/19537
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 9 septembre 2019, N° 16/14514
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 8

ARRET DU 18 MAI 2021

(n° 99 , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/19537 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3AO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Septembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 16/14514

APPELANTE

SAS ILONAB Société agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[…]

[…]

N° SIRET : 488 030 313

Représentée par Me Anne ENGEL-LOMBET, avocat au barreau de PARIS, toque : E0905

Ayant pour avocat plaidant Me Claire VALENTIN, avocat au barreau d’AVIGNON, toque : D20

INTIMEES

SA MMA IARD venant aux droits de la SA COVEA RISKS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[…] et B C

[…]

N° SIRET : 440 048 882

SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la SA COVEA RISKS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[…] et B C

[…]

N° SIRET : 775 652 126

SAS Z prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

N° SIRET : 499 004 018

Représentées par Me Jérôme HOCQUARD de la SELARL ELOCA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0087

Ayant pour avocat plaidant Me Nicolas GANNEAU, même cabinet, même toque

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 02 Mars 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme F G-H, Présidente de chambre

Mme Sylvie CASTERMANS, Conseillère

M. Julien SENEL, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame F G-H dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par F G-H, Presidente de chambre et par Sixtine ROPARS, Greffière présente lors de la mise à disposition.

*******

EXPOSE DU LITIGE

La société Etablissement des Meubles CURI est propriétaire d’un ensemble immobilier à usage commercial, […].

Suivant protocole de cession de titres sociaux sous conditions suspensives du 16 avril 2014, les époux X ont cédé à la société ILONAB leurs 300 parts sociales de la société pour la somme de 580.000 euros. Un rapport de mission de repérage des matériaux et produits contenant de l’amiante, dressé le 21 mai 2012 par le cabinet D E, a conclu à l’absence de matériaux susceptibles de contenir de l’amiante le 7 mars 2012.

L’acte réitératif de cession a été signé le 20 février 2015. Un second rapport de mission de repérage, dressé le 28 mai 2015 par le cabinet Y, a conclu à l’existence d’amiante dans certains composants de la construction du bâtiment (notamment les faux plafonds).

Le cabinet D E étant mentionné comme «'entreprise cessée au répertoire Sirene

depuis le 24/06/2012'», par acte du 6 septembre 2016, la société ILONAB a assigné la société Z, considérée comme assureur du cabinet E, devant le tribunal de grande instance de Paris pour la voir condamner à réparer ses préjudices.

Cette société ayant fait valoir qu’elle n’exerce qu’une activité de courtage et ayant produit une attestation d’assurance indiquant que M. E était assuré auprès de la société COVEA RISKS pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, par actes du 25 avril 2018, ILONAB a assigné les sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, venant aux droits de COVEA RISKS, devant le même tribunal, qui, par jugement du 10 septembre 2019, l’a déboutée de ses demandes et condamnée à payer aux sociétés Z, MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration , reçue le 18 octobre 2019 et enregistrée au greffe le 4 novembre 2019, la SAS ILONAB a interjeté appel de cette décision et, aux termes de ses dernières écritures, notifiées le 20 octobre 2020, elle demande à la cour d’infirmer le jugement et de condamner solidairement MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à lui payer la somme de 205'800 euros TTC en réparation du préjudice matériel et celle de 10'000 euros en réparation du préjudice de jouissance, outre 5'000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières écritures, notifiées le 13 novembre 2020, les deux sociétés MMA et Z sollicitent la confirmation, outre 5.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

La clôture est intervenue le 16 novembre 2020.

CE SUR QUOI, LA COUR

Sur la responsabilité du cabinet E

Considérant que l’appelante soutient que des manquements tenant à l’insuffisance des repérages réalisés sont imputables au cabinet responsable du premier rapport et que ces manquements contreviennent aux articles L271-6 et R271-1 du code de la construction et de l’habitation';

Qu’en effet, l’amiante pouvait déjà être repérée par un professionnel dès 2012, le local étant inoccupé et la présence de meubles n’empêchant pas les vérifications des faux plafonds';

Qu’elle ajoute que le changement de règlementation intervenu entre les deux rapports est sans incidence sur l’obligation de repérage car, dès 2012, il y avait bien obligation d’effectuer des prélèvements en cas de doute';

Considérant que les sociétés MMA répliquent que leur assuré n’a commis aucune faute, le repérage ayant été effectué dans une surface occupée, le magasin étant, par ailleurs, toujours en activité en 2012';

Qu’en outre, un changement de réglementation est intervenu entre les deux rapports, renforçant l’obligation des cabinets vérificateurs';

Qu’à cet égard, une rénovation des lieux étant intervenue depuis 2012, il n’est pas possible de connaître les vérifications supplémentaires que le cabinet E aurait pu ou dû effectuer lors du premier rapport';

Qu’en outre, lors de la cession, une clause de réserve, signée par l’appelante et relative à l’amiante, était présente dans le contrat, précisant que des investigations étaient en cours à ce sujet';

Qu’enfin, la société SOPHIASUR rappelle que n’étant pas l’assureur du cabinet E, elle n’est débitrice d’aucune garantie à son égard';

Considérant qu’il n’est pas contesté que Z n’est pas l’assureur du cabinet E, que l’appelante ne réclame d’ailleurs pas sa condamnation,

Qu’en conséquence, le jugement à son égard’sera confirmé ;

—  examen des manquements allégués de fautifs

Considérant, s’agissant de la faute alléguée du cabinet E, que les assureurs de celui-ci ne sauraient opposer à l’appelante la clause de réserve par laquelle la société ILONAB a renoncé à réclamer quelque somme que ce soit s’il était révélé la présence d’amiante’car cette stipulation contractuelle ne saurait bénéficier à un tiers au contrat,'dont la responsabilité est recherchée';

Considérant qu’il convient donc d’examiner les griefs faits à l’intervention du cabinet E’et de rappeler préliminairement le cadre légal et réglementaire de cette intervention';

Considérant qu’aux termes de l’article L.271-4 du code de la construction et de l’habitation que «''I. ' En cas de vente de tout ou partie d’un immeuble bâti, un dossier de diagnostic technique, fourni par le vendeur, est annexé à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente. En cas de vente publique, le dossier de diagnostic technique est annexé au cahier des charges.

Le dossier de diagnostic technique comprend, dans les conditions définies par les dispositions qui les régissent, les documents suivants :

'

2o L’état mentionnant la présence ou l’absence de matériaux ou produits contenant de l’amiante prévu à l’article L. 1334-13 du (code de la santé publique) ''»';

Considérant que les articles R.1334-20 et 13334-21 du même code, en vigueur au jour de l’intervention le 21 mai 2012 et au-delà, disposent que':

«'Article R1334-20 (version en vigueur à compter du 1er février 2012, décret n°2011-629 du 3 juin 2011 – art. 1)

I.- On entend par « repérage des matériaux et produits de la liste A contenant de l’amiante » la mission qui consiste à :

1° Rechercher la présence des matériaux et produits de la liste A accessibles sans travaux destructifs ;

2° Identifier et localiser les matériaux et produits qui contiennent de l’amiante ;

3° Evaluer l’état de conservation des matériaux et produits contenant de l’amiante.

II.- Lorsque la recherche révèle la présence de matériaux ou produits de la liste A, et si un doute persiste sur la présence d’amiante dans ces matériaux ou produits, un ou plusieurs prélèvements de matériaux ou produits sont effectués par la personne réalisant la recherche. Ces prélèvements font l’objet d’analyses selon les modalités définies à l’article R.1334-24

III.-A l’issue du repérage, la personne qui l’a réalisé établit un rapport de repérage qu’elle remet au propriétaire contre accusé de réception.

IV.- En fonction du résultat de l’évaluation de l’état de conservation, le rapport de repérage préconise :

1° Soit une évaluation périodique de l’état de conservation des matériaux et produits contenant de l’amiante mentionnés au I ;

2° Soit une mesure d’empoussièrement dans l’air ;

3° Soit des travaux de confinement ou de retrait de l’amiante.

V.- Un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction, de la santé et du travail précise les critères d’évaluation de l’état de conservation des matériaux et produits et le contenu du rapport de repérage';

Article R1334-21 (version en vigueur à compter du 1er février 2012, décret n°2011-629 du 3 juin 2011 – art. 1)

I.- On entend par « repérage des matériaux et produits de la liste B contenant de l’amiante » la mission qui consiste à':

1° Rechercher la présence des matériaux et produits de la liste B accessibles sans travaux destructifs ;

2° Identifier et localiser les matériaux et produits qui contiennent de l’amiante ;

3° Evaluer l’état de conservation des matériaux et produits contenant de l’amiante et leur risque de dégradation lié à leur environnement.

II.- Lorsque la recherche révèle la présence de matériaux ou produits de la liste B et si un doute persiste sur la présence d’amiante dans ces matériaux ou produits, un ou plusieurs prélèvements de matériaux ou produits sont effectués par la personne réalisant la recherche. Ces prélèvements font l’objet d’analyses selon les modalités définies à l’article R.1334-24.

III.-A l’issue du repérage, la personne qui l’a réalisé établit un rapport de repérage qu’elle remet au propriétaire contre accusé de réception.

IV.- Si l’état de certains matériaux ou produits contenant de l’amiante est dégradé ou présente un risque de dégradation rapide, le rapport de repérage émet des recommandations de gestion adaptées aux besoins de protection des personnes.

V.- Un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction, de la santé et du travail précise les critères d’évaluation de l’état de conservation des matériaux et produits et du risque de dégradation lié à l’environnement ainsi que le contenu du rapport de repérage'»';

Considérant, par ailleurs, que l’annexe 13-9 du code de la santé publique (version en vigueur à compter du 1er février 2012, décret n°2011-629 du 3 juin 2011) détaille ainsi le programme des repérages à effectuer en application de ces deux articles':

«'Liste A mentionnée à l’article R. 1334-20

[…]

Flocages

Calorifugeages

Faux plafonds

Liste B mentionnée à l’article R. 1334-21

COMPOSANT DE LA CONSTRUCTION

PARTIE DU COMPOSANT À VÉRIFIER OU À SONDER

[…]

Murs et cloisons « en dur » et poteaux (périphériques et intérieurs).

Cloisons (légères et préfabriquées), gaines et coffres.

Enduits projetés, revêtements durs (plaques menuiserie, amiante-ciment) et entourages de poteaux (carton, amiante-ciment, matériau sandwich, carton + plâtre), coffrage perdu.

Enduits projetés, panneaux de cloisons.

2. Planchers et plafonds

Plafonds, poutres et charpentes, gaines et coffres.

Planchers.

Enduits projetés, panneaux collés ou vissés.

Dalles de sol.

3. Conduits, canalisations et équipements intérieurs

Conduits de fluides (air, eau, autres fluides…).

Clapets/ volets coupe-feu.

Portes coupe-feu.

Vide-ordures.

Conduits, enveloppes de calorifuges.

Clapets, volets, rebouchage.

Joints (tresses, bandes).

Conduits.

4. Eléments extérieurs

Toitures.

Bardages et façades légères.

Conduits en toiture et façade.

Plaques, ardoises, accessoires de couverture (composites, fibres-ciment), bardeaux bitumineux.

Plaques, ardoises, panneaux (composites, fibres-ciment).

Conduits en amiante-ciment : eaux pluviales, eaux usées, conduits de fumée. '»

Considérant que, se fondant sur ces prescriptions, l’appelante fait grief au cabinet E de ne pas avoir repéré de matériaux susceptibles de contenir de l’amiante, ce technicien n’ayant pas procédé au sondage des faux plafonds, étant précisé que la présence d’amiante était parfaitement décelable le jour de la visite du cabinet E';

Considérant que le repérage d’amiante doit réglementairement s’effectuer sans travaux destructifs';

Considérant, pour autant, que le diagnostiqueur ne peut pas limiter son intervention à un simple contrôle visuel, mais doit mettre en 'uvre les moyens nécessaires à la bonne exécution de sa mission et que s’il n’effectue de repérage que dans les parties visibles, il ne peut conclure à l’absence d’amiante dans les autres parties sans émettre de réserves';

Considérant que, si dans son rapport litigieux, M. E a bien, s’agissant des conditions de la réalisation du repérage, précisé que «'la responsabilité de notre société ne saurait être engagée en cas de découverte de matériaux contenant de l’amiante dans les endroits non accessibles ou hermétiquement clos le jour de la visite'»', il a cependant indiqué, dans ce même paragraphe, que si «'cette recherche ne doit comporter aucun démontage, (c’est) hormis le soulèvement de plaques de plafonds ou trappes de visites'» et qu’il en est de même de l’investigation de structures «'à l’exclusion de la réalisation de prélèvements ou de sondages de matériaux'»';

Qu’il ne fait, d’ailleurs, sur ce point, que reprendre les dispositions de l’annexe 19-3 ci-dessus reproduite';

Considérant toutefois qu’il n’indique aucunement avoir procédé au soulèvement de plaques de plafonds’ou quelles difficultés l’en auraient empêché';

Que si les intimées soulignent que le magasin était toujours exploité au moment où le repérage est intervenu, le 21 mai 2012, elles n’expliquent cependant pas en quoi cette circonstance aurait empêché l’expert de soulever les plaques des faux plafonds';

Que, par ailleurs, le constat fait tant par le rapport de l’ATGTSM du 24 février 2015 que par le rapport de l’Y du 28 mai 2015 repérant, après passation de l’acte réitératif de cession, la présence de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante, notamment dans des faux plafonds, de la colle de carrelage et des joints de mastic apparents ne saurait être critiqué pour son caractère unilatéral dès lors que ces rapports ont été soumis au débat contradictoire et qu’étant distincts, il ne saurait être dit que la cour s’appuie sur un seul élément de preuve pour valider le constat de manquement du cabinet E à ses obligations';

Qu’en outre, ces rapports contestés par les intimées sont bien conformes aux dispositions des articles R.1334-20 et R.1334-21 dans leur version applicable au 21 mai 2012, version, au demeurant, encore en vigueur';

Que le fait que les articles 4 et 5 de l’arrêté du 12 décembre 2012 aient notamment prévu, en cas de doute, que des échantillons soient prélevés pour analyse, n’enlève rien à la portée du repérage qui a conclu à la présence de matériaux et produits contenant de l’amiante comme à celle de matériaux et produits susceptibles d’en contenir , les prélèvements et analyses ayant été effectuées

postérieurement';

Que ces repérages effectués, dans le respect des mêmes dispositions réglementaires que l’intervention du cabinet E, sont cependant contraires quant à leurs conclusions par rapport à celles du cabinet E, pour lesquels le rapport écrit’qu’ «'il n’a pas été repéré de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante'»';

—  examen du lien de causalité

Considérant que les assureurs rappellent l’existence d’une condition suspensive n°4 de l’article 8 du protocole du 16 avril 2014, qui impose aux cédants de faire établir «'un état des risques naturels et technologiques daté de moins de huit jours par rapport à la DATE DE CESSION, ne révélant aucun fait de nature à compromettre la jouissance de l’immeuble propriété de la SOCIETE'»';

Qu’ils de fondent tant sur cette condition que sur l’acte réitératif de cession du 20 février 2015, par lequel la société ILONAB , reconnaissant avoir été informée d’une réserve apportée par le technicien chargé d’effectuer le contrôle de l’amiante et qu’une vérification était en cours, a accepté de renoncer à tout recours contre le cédant';

Mais, ainsi qu’il a été motivé ci-dessus, cette renonciation ne saurait bénéficier au tiers au contrat qu’est le technicien vérificateur et que devant le constat qui a été fait de ses manquements, il convient uniquement de se poser la question de savoir si cette faute a un lien de causalité direct avec le dommage';

Que, contrairement à ce que prétendent les intimées, la DTA avant-vente réalisée par M. E a faussement levé par sa réponse négative, en raison des manquements fautifs du technicien dans l’accomplissement de sa mission, une incertitude sur la présence de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante et ainsi incité la société ILONAB à poursuivre la procédure de cession';

Que ce n’est que, postérieurement à l’acte itératif du 20 février 2015, que les rapports successifs des cabinets ATGTSM et Y ont démenti les conclusions du rapport E, aux dépens de la société ILONAB, qui ne pouvait plus, dès lors, en raison de la clause de renonciation, se retourner contre le cédant';

Que le préjudice créé par cette situation à faire face à un désamiantage important est donc pleinement en relation directe avec la faute commise par M. E';

Sur la garantie des sociétés MMA

Considérant que les sociétés MMA ne contestent pas être les assureurs de responsabilité civile du cabinet E';

Que si elles estiment que les conditions de mise en 'uvre de leur garantie ne sont pas réunies, c’est sur le seul fondement de l’absence de faute de leur assuré';

Que la cour ayant retenu l’existence d’une faute en relation directe avec le préjudice subi, les MMA doivent leur garantie';

Sur les préjudices

Considérant que la société ILONAB fait valoir que la découverte de l’amiante en quantités très importantes après la cession a engendré pour elle des coûts supplémentaires et allongé la longueur des travaux de rénovation de l’immeuble';

Considérant que les assureurs contestent la réalité des préjudices';

Mais, considérant, avant d’évaluer chacun de ceux-ci au vu des arguments et pièces produites, qu’il convient de rappeler que l’assureur du diagnostiqueur, qui a réalisé un diagnostic en contravention avec les normes édictées et les règles de l’art et qui se révèle erroné, comme en l’espèce, doit sa garantie tant pour le préjudice matériel que pour le préjudice de jouissance subi par l’acquéreur du fait du diagnostic erroné';

—  préjudice matériel

Considérant que l’appelante demande aux assureurs le paiement de dommages intérêts à hauteur de 205'800 euros TTC en réparation du préjudice matériel subi et correspondant au coût du désamiantage ;

Considérant que les assureurs font valoir qu’en tout état de cause, le désamiantage était inéluctable';

Considérant, au vu de la motivation ci-dessus explicitée et rappelant que les locaux ont été acquis par l’appelante alors qu’en raison des fautes commises par le diagnostiqueur , elle a eu faussement l’assurance que ceux-ci ne contenaient pas d’amiante, que le préjudice causé est ainsi certain et que le coût du désamiantage étant la conséquence directe de la faute commise par le cabinet A, les assureurs de celui-ci devront lui verser à ce titre la somme de 205'800 euros TTC';

—  préjudice de jouissance

Considérant que la société ILONAB réclame 10'000 euros en réparation du préjudice de jouissance subi’en raison de l’allongement des travaux de rénovation, qui ont retardé l’ouverture du supermarché en cours d’installation dans les lieux devant être rénovés';

Considérant que les intimées estiment que le préjudice n’est pas démontré dès lors que le désamiantage a pu être intégré sans difficulté au programme de rénovation et n’est donc pas cause d’un rallongement des délais';

Mais, considérant que , nonobstant le fait que l’opération de désamiantage a pu être intégrée au programme de rénovation, il n’en ressort pas moins, notamment au vu de l’attestation du cabinet d’architecte AB, que le planning d’intervention de l’ensemble des professionnels a dû être revu afin de permettre à la société JRC DESAMIANTAGE d’intervenir en priorité à réception des autorisations de travaux';

Qu’il en est résulté, suivant l’attestation du cabinet d’architecte, un allongement de 11 semaines de l’ensemble des travaux, privant l’appelante de la possibilité d’ouvrir plus tôt le supermarché qui s’installait dans les locaux en cours de rénovation';

Qu’il sera, à juste titre, accordé la somme de 10'000 euros de ce chef à la société ILONAB';

Sur les frais irrépétibles

Considérant que l’équité commande de condamner in solidum les sociétés MMA IARD et MMA IARD MUTUELLES ASSURANCES à verser la somme de 3'500 euros, qu’en revanche, il n’ y a pas lieu de faire droit à la demande des intimées';

PAR CES MOTIFS

Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré à l’exception de la mise hors de cause de la société Z,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et, y ajoutant,

Condamne in solidum les sociétés MMA IARD et MMA IARD MUTUELLES ASSURANCES à payer à la société ILONAB la somme de 205'800 euros TTC’au titre du préjudice matériel, celle de 10'000 euros au titre du préjudice de jouissance, outre 3'500 euros au titre des frais irrépétibles,

Déboute les sociétés MMA IARD et MMA IARD MUTUELLES ASSURANCES de leurs demandes et les condamne, sous la même solidarité, aux dépens de première instance et d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 18 mai 2021, n° 19/19537