Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 8 décembre 2021, n° 20/03834

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Cabinet Neu-Janicki · 9 janvier 2022

En matière de baux commerciaux, si après délivrance d'un congé par le locataire au bailleur, le sous-locataire se maintient dans les lieux alors le locataire principal est tenu de payer au bailleur une indemnité d'occupation jusqu'au départ des lieux du sous-locataire. Ce dernier doit garantir de le locataire principal de toutes condamnations. Récemment encore, la jurisprudence a considéré que si contractuellement le locataire principal est le seul et unique redevable des loyers et de l'exécution des stipulations du bail commercial et que les locaux sont indivisibles, même après la …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 8 déc. 2021, n° 20/03834
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/03834
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Évry, 6 novembre 2019, N° 17/06079
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 08 DÉCEMBRE 2021

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/03834 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBRLJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance d’EVRY
- RG n° 17/06079

APPELANTE

[…]

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 339 967 473

[…]

[…]

représentée par son gérant la SA FIDUCIAL GERANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 325 475 971

[…]

[…]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, avocat postulant

Assistée de Me Nelson SEGUNDO de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301, avocat plaidant substitué par Me Andréa LAYANI de la SELARL RACINE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0301, avocat plaidant

INTIMEE

S.A.S. CARREFOUR PROXIMITE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

immatriculée au RCS de CAEN sous le numéro 345 130 488

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assistée de Me Mathieu JACOB de la SELAS CABINET CONFINO, avocat au barreau de PARIS, toque : K0182, avocat plaidant substitué par Me Florence BONS de la SELAS CABINET CONFINO, avocat au barreau de PARIS, toque : K0182, avocat plaidant

PARTIE INTERVENANTE

SARL AUX DELICES DU FOURNIL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS d’EVRY sous le numéro 419 724 687

[…]

Centre commercial La Moinerie

[…]

n’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 02 Novembre 2021, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Gilles BALA', président de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Elisabeth GOURY, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRET :

— rendu par défaut

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Gilles BALA', président de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS ET PROCEDURE

Par acte en dates des 22 et 25 octobre 1993, la société civile de placement collectif immobilier

Buroboutic a donné à bail à la société Europa Discount Île de France Sud, devenue par la suite Erteco France et aux droits et obligations de laquelle vient désormais la société Carrefour Proximité France (CPF), des locaux à usage commercial dépendant d’un ensemble immobilier sis à Brétigny-sur-Orge, pour une durée de 9 années entières et consécutives. Le bail a été renouvelé à effet du 1er janvier 2006 pour une durée de 9 années devant se terminer le 31 décembre 2014, moyennant un loyer annuel HC/HT de 91.620,84 €.

La société CPF a sous-loué une partie de ses locaux à la société Aux Délices du Fournil.

Par acte extrajudiciaire en date du 6 février 2014, la société CPF a donné congé à la société Buroboutic pour le 31 décembre 2014. Par acte extrajudiciaire du 7 février 2014, elle a notifié ce congé à la société Aux Délices du Fournil et lui a également donné congé pour le 31 décembre 2014.

La société CPF ayant libéré les lieux fins 2014, a souhaité procéder à un état des lieux contradictoire avec le bailleur qui s’y est opposé au motif que la société sous-locataire se maintenait dans la partie des lieux, objet du bail de sous-location ; cette dernière prétendait se maintenir dans les lieux pour obtenir une indemnité d’éviction.

Par ordonnance en date du 6 novembre 2015, le Juge des référés a ordonné l’expulsion de la société CPF et de la société Aux Délices du Fournil. Après octroi du concours de la force publique, l’expulsion est intervenue le 22 juin 2016. Par arrêt en date du 23 février 2017, la Cour d’appel de Paris a confirmé l’ordonnance de référé du 6 novembre 2015 en ce qu’elle avait ordonné l’expulsion de la société CPF et de la société Aux Délices du Fournil et, ajoutant à celle-ci, les a condamnées à payer par provision à la société Buroboutic la somme de 11.000 € au titre des loyers, indemnités d’occupation, taxes et charges dues jusqu’au 22 juin 2016, outre une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, et dit n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes de la société Buroboutic.

Par acte introductif d’instance en date du 11 septembre 2017, la société Buroboutic a fait assigner la société CPF, ainsi que la société Aux Délices du Fournil, devant le Tribunal de grande instance d’Évry.

Par jugement du 7 novembre 2019, le Tribunal de grande instance d’Évry a condamné in solidum la société CPF et la société Aux Délices du Fournil à payer à la société Buroboutic la somme de 3.971,33 € HT et HC par an à compter du 1er janvier 2015 et jusqu’au 22 juin 2016, à titre d’indemnité d’occupation et il les a condamnées à lui payer en outre la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’auxdépens ; le tribunal a ordonné l’exécution provisoire.

Par déclaration au greffe en date du 20 février 2020, la société Buroboutic a interjeté appel de ce jugement à l’encontre de la société CPF.

Par exploit du 30 juillet 2020 pour tentative et du 3 août 2020, la société CPF a assigné la société Aux Délices du Fournil aux fins d’appel provoqué, lui notifiant les conclusions au fond préalablement notifiées à la société appelante le 27 juillet 2020.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 septembre 2021.

MOYENS ET PRETENTIONS

Vu les dernières conclusions notifiées le 26 octobre 2020, par lesquelles la société Buroboutic demande à la Cour d’infirmer le jugement entrepris sur le montant de l’indemnité d’occupation et de condamner la société CPF à lui payer la somme de 256.716,44 € au titre des loyers, indemnités d’occupation, taxes et charges dues jusqu’au 22 juin 2016 avec intérêts au taux légal à compter de la

délivrance de l’assignation, outre lasomme de 6.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 27 juillet 2020, par lesquelles la société Carrefour Proximité France demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Buroboutic de ses demandes formées au titre des loyers, charges et taxes et de l’infirmer pour le surplus, de débouter la société Buroboutic de ses demandes, de la condamner à lui restituer la somme de 11.000 euros, payée à titre provisionnel en exécution de l’arrêt du 23 février 2017 statuant en référé, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 ; elle demande la condamnation de la société Buroboutic à lui payer les sommes de 7.824,79 € ou, à titre subsidiaire, la somme de 2.621,53 euros, au titre des charges 2013, 7.035,89 € au titre des charges 2014, 3.691,99 € au titre de la taxe foncière 2014, avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 et capitalisation annuelle. A titre subsidiaire, elle demande à la Cour de Condamner la société Aux Délices du Fournil à la garantir et relever indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, en principal, intérêts, frais et accessoires. Elle demande en toute hypothèse la condamnation in solidum de la société Buroboutic et de la société Aux Délices du Fournil à lui payer une somme de 15.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

L’appelante sollicite le paiement d’une indemnité d’occupation entre le terme du bail et le départ effectif de la société Aux Délices du Fournil, considérant que le preneur qui sous-loue les locaux doit faire son affaire personnelle de l’éviction du sous-locataire et demeure solidairement responsable avec ce dernier, du préjudice subi par le bailleur du fait de son maintien dans les locaux. Elle évalue l’indemnité d’occupation à 256.716,44 € car elles considère que la clause d’indivisibilité a vocation a produire ses effets lors de la résiliation, et précise qu’à défaut, elle n’aurait jamais autorisé une sous-location partielle des locaux loués, ajoutant que par sa présence dans les locaux, le sous-locataire a rendu l’ensemble des locaux indisponibles, dès lors qu’ils ne font l’objet d’aucune séparation physique, et ne disposent que d’un seul compteur électrique et d’un seul compteur d’eau, ce qui ne permet pas d’envisager un fonctionnement indépendant d’une partie de ces surfaces, qui ont toujours formé un tout indivisible.

L’appelante affirme que le bail faisait obligation au preneur de restituer l’intégralité des locaux loués à son bailleur, libres de toute occupation et de tout objet mobilier, ce qu’elle n’a pas fait.

Elle conteste avoir refusé de reprendre possession des locaux et précise qu’elle n’était pas tenue d’accepter une restitution partielle, reprochant à l’intimée son inaction pour obtenir le départ du sous locataire.

L’intimée prétend qu’elle n’a pas commis de faute car seul le sous-locataire s’est maintenu dans les locaux. Elle explique ne pas avoir eu la possibilité de restituer les clés a l’appelante du fait de son refus de procéder à un état des lieux en raison du maintien du sous-locataire dans les locaux, observant que le sous-bail ne concerne pourtant que 70 m² sur les 1.614,94 m² loués au titre du bail principal. Elle prétend que l’indivisibilité des locaux a pris fin au terme du bail, que les locaux sont matériellement divisibles et disposent d’une entrée distincte, que les conditions particulières du contrat de sous-location contenues dans le bail mettaient à la charge du sous-locataire l’installation de compteurs séparés pour les fluides. Elle soutient qu’après son départ, elle était sans droit ni titre et n’avait ni qualité ni pouvoir pour engager une quelconque procédure d’expulsion à l’égard du sous-locataire et elle reproche à l’appelante de s’être abstenue d’agir en expulsion à l’encontre du sous-locataire de janvier à août, tout en refusant de lui confier un mandat pour diligenter cette procédure à sa place. Elle lui reproche également son manque de diligence dans la recherche d’un nouveau locataire, ce qui a contribué à son propre préjudice, alors que le congé avait été délivré avec un préavis de 11 mois.

Elle prétend que le bailleur n’a subi aucun préjudice, soutient que le préjudice tiré de l’indisponibilité des locaux s’analyse en une perte de chance de relouer les locaux, qui n’est pas établie, ni l’impossibilité de les relouer isolément. Elle observe que si les locaux avaient été intégralement libérés le 1er janvier 2015, l’appelante ne démontre pas qu’elle aurait eu la possibilité de refacturer les charges et un loyer trimestriel à hauteur de 24.430 € à un nouveau locataire. Considérant que seule la surface des locaux objets de la sous-location doit être prise en compte, elle évalue l’indemnité d’occupation à 10.824,23 €. Elle prétend aussi que son préjudice est dû à la défaillance de l’Etat qui n’a pas accordé immédiatement le concours de la force publique et non à la faute du preneur.

La société Buroboutic soutient que les charges de syndic pour l’année 2013 concernaient bien les lots loués. Elle affirme que les menus travaux intervenus sur la toiture et la toiture terrasse incombaient au preneur au titre de son obligation d’entretien et que les travaux intervenus sur le bâtiment E, ainsi que les travaux spécifiques, d’élagage et d’aires de jeux qui sont compris dans les charges communes générales de l’immeuble. Sur le règlement du solde terme 4ème trimestre 2014, elle prétend que si l’intimée soutient s’être acquittée de cette dernière le 31 octobre 2014, elle fait valoir qu’à défaut d’indication par le débiteur, ce montant s’est imputé sur une dette de loyers et de charges plus ancienne. Sur la taxe foncière pour 2014, elle demande à la Cour de débouter l’intimée de sa demande en paiement d’un avoir prétendu consenti au titre de la taxe foncière en raison d’un manque évident de preuve et de clarté.

À l’inverse, la société CPF explique que l’appelante avait initialement émis un avoir le 4 juin 2015, au titre des charges 2013, d’un montant de 7.824,79 euros en sa faveur et soutient que l’appelante ne justifie pas son annulation alors que la régularisation opérée par la bailleresse au titre des charges pour 2013 est injustifiée. Sur les loyers et charges 2014, elle soutient s’être acquittée de l’intégralité de l’avis d’échéance du 4e trimestre de l’année 2014 le 31 octobre de la même année et prétend que l’appelante ne pouvait pas procéder à l’imputation de cette somme sur d’autres loyers et charges sur le fondement de l’article 1342-10 du code civil, tel qu’il résulte de la réforme du 10 février 2016, qui ne s’applique pas au présent litige. Sur les charges de copropriété, elle soutient que les travaux entrepris sont à la charge du bailleur et prétend que l’appelante ne justifie pas de la nature et de l’importance des travaux qu’elle invoque. Elle considère que l’appelante est débitrice envers elle de la somme de 7.035,89 €. Sur la taxe foncière pour 2014, elle fait valoir que l’appelante a reconnu avoir émis un avoir à ce titre en sa faveur.

La société Aux Délices du Fournil n’a pas constitué avocat.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur la demande d’indemnité d’occupation

Il est constant que le bail liant la société Buroboutic et la société CPF a pris fin le 31 décembre 2014 par l’effet du congé signifié à la requête de la société locataire.

A cette date, il est constant que la société CPF avait libéré les lieux partiellement, en ce que s’est maintenue dans les lieux la société Aux délices du Fournil, société sous-locataire.

Le bail commercial consenti a la société CPF par la société Buroboutic les 22 et 25 octobre 1993 précise que ' Toute sous-location partielle devra préciser que l’ensemble des locaux, objet du bail principal, forme un tout indivisible dans la commune intention des parties. Par dérogation expresse a l’article 22 alinéa 2 du décret n°53-960 du 30 septembre 1953, il est précisé qu’a l’expiration du bail principal, le bailleur ne sera pas tenu au renouvellement des contrats de sous-location partielle ou totale, le preneur devant faire son afaire personnelle de l’éviction de tout sous-locataire'.

Il n’a pas été dérogé à cette stipulation contractuelle à l’occasion du contrat de sous-location partielle

consenti au profit de la société Aux délices du Fournil portant sur un local de 70 m² environ pour l’exercice d’une activité de terminal de cuisson, pâtisserie, viennoiserie. Ce contrat a d’ailleurs rappelé les dispositions du bail principal citées plus haut.

Il en résulte qu’à l’expiration du bail principal, le société locataire devait faire son affaire personnelle de l’éviction de son sous-locataire; elle lui a signifié congé mais n’a pas obtenu son expulsion, laquelle fut ordonnée par ordonnance de référé en date du 6 novembre 2015, confirmée par arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 23 février 2017, à l’encontre de la société CPF et de la société Aux Délices du Fournil.

Or, l’expulsion est intervenue le 22 juin 2016. La société Buroboutic est donc bien fondée à exiger une indemnité d’occupation du 1e janvier 2015 au 22 juin 2016.

Cette indemnité est due par la société CPF, dès lors que les lieux n’ont pas été totalement restitués ; la société CPF n’est pas fondée à s’exonérer de sa responsabilité du fait de l’occupation sans droit ni titre de la société sous-locataire qui occupait les lieux de son chef, et dont elle devait obtenir elle-même l’éviction.

De même, elle n’est pas fondée à s’exonérer de sa responsabilité en invoquant la faute du bailleur qui aurait tardé à engager la procédure d’expulsion, alors que le seul fait d’occuper les lieux de manière illicite suffit à justifier le paiement d’une indemnité d’occupation, sans que le propriétaire ne soit tenu de demander expressément le départ des occupants sans droit ni titre. D’ailleurs, le bailleur a obtenu l’expulsion dans des délais raisonnables après avoir constaté que la société CPF était défaillante dans son obligation d’obtenir l’éviction de la société sous-locataire.

De même la responsabilité de l’Etat qui aurait tardé à accorder le concours de la force publique n’est pas exonératoire de sa propre responsabilité .

L’indemnité d’occupation doit réparer le prejudice subi par le propriétaire du fait de l’indisponibilité des locaux et doit correspondre au prejudice effectivement subi par le bailleur.

Le bailleur est fondé à prétendre à une indemnité équivalente a la valeur locative de l’ensemble des locaux objets du bail principal dans la mesure ou le défaut de libération des 70 m2 occupés par la sous-locataire l’a empéché de disposer de l’ensemble des locaux. En effet, il est constant que le bail principal precise que ' Toute sous-location partielle devra préciser que l’ensemble des locaux, objet du bailprincipal,forme un tout indivisible dans la commune intention des parties ».

L’indivisibilité conventionnelle s’impose aux parties, et ne permettait pas à la société locataire d’imposer une restitution partielle des lieux ; elle interdit d’exiger du bailleur qu’il reloue partiellement les locaux.

Le tribunal a jugé que la clause d’indivisibilité avait pris fin à l’expiration du bail. Or malgré l’expiration du bail, toutes les obligations du contrat peuvent être invoquées jusqu’à la libération des lieux, car c’est l’objet même de la clause d’indivisibilité que de stipuler que l’ensemble des locaux forme un tout indivisible, ce qui a pour effet que l’ensemble doit être restitué en fin de bail.

Le fait que les locaux soient matériellement divisibles, à certaines conditions, ne peut être invoqué pour limiter le préjudice subi par le bailleur, lequel est fondé à ne relouer les lieux qu’en un seul ensemble indivisible, de sorte que le préjudice, qui était prévisible pour la société locataire en l’état de la clause d’indivisibilité, correspond bien à l’indisponibilité de l’ensemble du bien loué.

En l’absence d’élément démontrant un préjudice supérieur, l’indemnité d’occupation qui a une double nature compensatoire et indemnitaire doit être fixée au montant du dernier loyer, charges et taxes en sus.

Sur le montant de l’indemnité d’occupation

la demande de la société Buroboutic peut être récapitulée selon le décompte suivant:

1. Indemnités d’occupation

— Indemnité d’occupation 1 er trimestre 2015 : 44.316,32 €

— Indemnité d’occupation 2 ème trimestre 2015 : 35.316,32 €

— Indemnité d’occupation 3 ème trimestre 2015 : 35.316,32 €

— Indemnité d’occupation 4 ème trimestre 2015 : 35.316,32 €

— Indemnité d’occupation 1 er trimestre 2016 : 44.316,32 €

— Indemnité d’occupation 2 ème trimestre 2016 : 40.420,38 €

(au prorata du 01/04/2016 au 22/06/2016)

sous-total des indemnités d’occupation principales : 235.001,98 €

2. charges et taxes à compter du 1er janvier 2015 :

— Taxe foncière 2015 : 22.737,12 €

— Taxe foncière 2016 (au prorata du 01/01 au 22/06/2016) : – 1.457,05 €

— Régularisation des charges 2015 : – 4.375,16 €

— Régularisation des charges 2016 : – 2.185,55 €

sous-total des indemnités d’occupation accessoires (charges et taxes): 14.719,36 €

3. Loyers et charges antérieurs

— Régularisation des charges 2013 :- 2.621,53 €

— Taxe foncière 2013 : 1.874,96 €

— Annulation régularisation des charges 2013 : 7.824,79 €

— Solde terme 4 ème trimestre 2014 : 8.568,41 €

— Régularisation des charges 2014 : 5.816,16 €

— Taxe foncière 2014 : – 3.691,99 €

sous-total des loyers et charges dus au titre du bail expiré: 17 770,80 €

4. Apurement des comptes

— Règlement Carrefour Proximite France du 23.05.2017 : – 10.775,70 €

SOLDE : 256.716,44 €

Le montant de l’indemnité d’occupation qui est demandé varie selon que l’appel de fonds inclut ou non une provision sur l’impôt foncier (7.500 €) et inclut la TVA.

Or, s’agissant d’une indemnité d’occupation de droit commun, elle n’est pas soumise à TVA. Il est donc nécessaire d’établir le compte des indemnités d’occupation hors TVA comme suit :

La créance d’indemnités d’occupation s’établit en rapportant le loyer trimestriel à 90 jours (soit 360 jours par an) et en calculant la durée de l’occupation selon la même méthode (jours 360), soit une indemnité de base du 1er janvier 2015 au 22 juin 2016, pour 531 jours :

24 430,27/90 x531= 144.138,59 €.

Les taxes et charges, au vu des pièces produites (pièces n° 27,10, 9, 18, 33, 34, 39 à 41, 43 à 47) , complètent l’indemnité d’occupation comme suit:

— La taxe foncière 2015 est due pour un montant de 21.832,89€.

— La taxe d’ordures ménagères 2015 est due pour un montant de 5.537,65 €.

— La taxe foncière 2016 est due au prorata pour un montant de 11.027,05 €.

— La taxe d’ordures ménagères 2016 est due pour un montant de 2.519,28 €.

— Les charges 2015, en sortie de trésorerie pour la société Buroboutic, sont dues pour un montant de 19.624,84€.

— Les charges 2016 au prorata, en sortie de trésorerie pour la société Buroboutic, sont dues pour un montant de 9.286,98€.

Au total l’indemnité d’occupation doit être fixée au montant de 213.967,28 €

(144.138,59 + 21.832,89 + 5.537,65 + 11.027,05 + 2.519,28 + 19.624,84 + 9.286,98)

Sur les autres sommes dues et l’apurement des comptes

— Régularisation des charges 2013 :

• Les travaux de toiture pris en compte pour 4.669,84€ correspondent à 4 trimestres de 1167,46 € et sont relatifs à des travaux de toiture terrasse, et correspondent à des travaux d’entretien à la charge du locataire. Il est justifié de travaux d’élagage facturés par le syndicat à la société Buroboutic pour 244,81€ ; et ces travaux ont fait l’objet d’appels de fond en plus des charges générales du syndic d’un montant de 20.388,13€. De ce fait, la société Buroboutic était fondée à exiger de la société locataire le remboursement de la somme totale de 25.302,78 € au prorata des tantièmes (1037/1213) affectés aux lots 423-430, 658 à 673 et 690 à 700 , soit pour le montant de 21.631,48 € ;

• le coût de l’assurance payé par la société Buroboutic pour 1790,62 € pouvait être exigé de la société locataire à concurrence de 1614/1875 millièmes pour un montant de 1541,37€

• En revanche les travaux Gouvinhas (fourniture et pose d’un couvercle de regard en fonte) pour 235,40 €, et la facture Repisol (pour des travaux sur couverture passerelle pour la création de nouvelles évacuations d’eaux pluviales) selon factures au nom du syndic du 8 février 2013 et du 31 janvier 2013 correspondent certainement à des charges de copropriété mais il n’est pas justifié d’un appel de charges du syndic spécifique permettant d’exiger le

• remboursement pour un montant de 2601,63€. Compte tenu des provisions à déduire d’un montant de 28.396 €, l’apurement des charges 2013 au profit de la société locataire n’est pas de -2621,53 mais de -5223,15 €.

— Taxe foncière 2013 : 1.874,96 € ; ce montant n’est pas contesté.

— Annulation régularisation des charges 2013 : 7.824,79 € ; le détail des charges récupérables 2013 a été estimé ci-dessus, cette somme ne peut pas être prise en compte.

Les sommes dues en 2014 s’établissent ainsi:

• loyer (24.430,27 x 12) : 97721,08 € HT soit 117.265,30 € TTC

• Taxe foncière 2014 : – 3.691,99 € TTC ; ce montant n’est pas contesté

• Il est justifié des appels de provisions du syndic pour les charges générales, les travaux d’entretien des toitures terrasses, les travaux d’élagage et d’aménagement des aires de jeux soit un total de 33 849,53 € dont le remboursement est exigble de la société locataire au prorata de 1037/1213 tantièmes, soit 28.938,14 € TTC

• le coût de l’assurance payé par la société Buroboutic pour 1020 € pouvait être exigé de la société locataire à concurrence de 1614/1875 millièmes pour 878,02 € TTC

En déduction de ces sommes, suivant le relevé de compte produit, doivent venir en déduction les paiements figurant au crédit (à l’exception des différents avoirs puisque les charges exigibles sont prises en compte en totalité) soit les sommes de 42718,60 + 13.961,56 + 44.316,32 + 44316,32 + 44.316,32 + 3399,60 + 10775,70= 203.804,42 € TTC.

L’apurement des comptes entre les parties s’établit ainsi:

• indemnité d’occupation du 1er janvier 2015 au 22 juin 2016, charges et taxes incluses : 213.967,28 € HTVA

• apurement des charges 2013 : -5223,15 € TTC

• solde taxe foncière 2013 : 1.874,96 € TTC

• loyer 2014 : 117.265,30 € TTC

• Taxe foncière 2014 : – 3.691,99 € TTC

• charges générales et travaux 2014 : 28.938,14 € TTC

• charges d’assurance 2014 : 878,02 € TTC

• paiements en déduction : -203.804,42 €

• provision allouée en référé : -11.000 €

Le solde des sommes dues au titre des loyers, charges et indemnites d’occupation, après déduction de la condamnation provisionnelle, s’établit en conséquence au montant de : 139.204,14 €.

Il est précisé que l’indemnité d’éviction s’entend hors TVA et que les autres sommes dues au titre des loyers et charges antérieurs au 31 décembre 2014 s’entendent TTC, mais que les sommes venant en déduction sont prises pour leur montant en trésorerie, soit TVA incluse dont la Cour, notamment pour les chèques émis, ne peut pas connaître le montant.

La somme ci-dessus portera intérêts au taux légal à compter de l’assignation introductive d’instance.

La société CPF n’est pas fondée en ses demandes en restitution de sommes indûment payées au titre de loyers et charges dès lors que l’apurement des comptes ci-dessus a pris en considération la totalité des sommes dues et des paiements intervenus, pour les périodes en litige. De même n’est pas fondée sa demande de restitution de la somme payée en exécution d’une ordonnance de référé, dont le montant a été déduit du montant de la condamnation.

Sur l’appel en garantie

Il convient d’observer qu’après l’appel provoqué par assignation du 3 août 2020, la société Buroboutic,dans ses dernières conclusions notifiées le 26 octobre 2020, n’a pas demandé l’infirmation du jugement dans ses dispositions relatives à la condamnation de la société Aux Délices du Fournil et ne forme à son encontre aucune prétention en cause d’appel.

En revanche, la société CPF, par ses conclusions du 27 juillet 2020, demande l’infirmation du jugement, sauf en ce qu’il avait débouté la société Buroboutic de ses demandes formées au titre des loyers, charges et taxes.

La société intimée sur appel provoqué n’a pas comparu et la société CPF ne développe aucune argumentation pour critiquer les dispositions du jugement prononçant des condamnations à l’encontre de la société aux Délices du fournil.

Il résulte des constatations qui précèdent que les dispositions du jugement entrepris, par lesquelles la société Aux Délices du Fournil a été été condamnée à payer diverses sommes à la société Buroboutic, ne peuvent être que confirmées.

Mais, en raison de l’appel provoqué, la société CPF est en revanche fondée en sa demande de garantie.

En effet, la société CPF a quitté les lieux au 31 décembre 2014, date pour laquelle elle avait délivré congé à la société sous-locataire ; le maintien dans les lieux de la société Aux Délices du Fournil, sans droit ni titre, après l’expiration de son bail a causé à la société CPF un préjudice égal au montant des indemnités d’occupation dont le locataire principal a été reconnu redevable, du seul fait de la présence dans les lieux de la société sous-locataire.

Pour statuer dans les limites de la demande, la société Aux Délices du Fournil doit être condamnée à garantir la société CPF des condamnations qui seront prononcées à son encontre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La condamnation prononcée par le jugement entrepris à l’encontre de la société CPF au titre des dépens et frais irrépétibles doit être confirmée.

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, en équité et compte tenu de la situation des parties, la société CPF doit aussi être condamnée aux dépens et à payer à la société Buroboutic une somme de 5000 € en indemnisation de ses frais irrépétibles exposés à l’occasion de l’instance d’appel. Pour les motifs ci-dessus exposés, elle sera relevée et garantie par la société Aux Délices du Fournil.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par défaut,

Infirme partiellement le jugement rendu le 7 novembre 2019 par le tribunal de grande instance d’Evry,

Le confirme en ses dispositions de condamnation de la société Aux Délices du Fournil et en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles,

Le réforme en ses autres dispositions et statuant à nouveau,

Condamne la société Carrefour Proximité France à payer à la société Buroboutic, après déduction de la condamnation provisionnelle par ordonnance de référé du 6 novembre 2015, la somme de 139.204,14 €, avec intérêts au taux légal à compter du 1er septembre 2017

La condamne à lui payer en outre la somme de 5000 € en indemnisation de ses frais irrépétibles exposés en cause d’appel,

La condamne aux dépens.

Condamne la société Aux Délices du Fournil à relever et garantir la société Carrefour Proximité France de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT



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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 8 décembre 2021, n° 20/03834