Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 18 janvier 2022, n° 20/03672

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 4

ARRÊT DU 18 JANVIER 2022

(n° , 5 pages)


Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/03672 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBQ6M


Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Janvier 2020 -Tribunal d’Instance de PARIS 17ème – RG n° 11-19-005235

APPELANTE

EPIC PARIS HABITAT OPH

agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur Général y domicilié

21 bis, rue Claude X

[…]

représentée par Me Sylvie KONG THONG de l’AARPI Dominique OLIVIER – Sylvie KONG THONG, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : L0069

ayant pour avocat plaidant Me Sandrine BELLIGAUD, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 25

INTIMEE

Madame Y X


Née le […] à SAIGON

[…]

[…]

représentée et ayant pour avocat plaidant Me Delphine LABOREY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0509

COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Décembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. François BOUYX, Conseiller, chargé du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Michel CHALACHIN, président de chambre

Mme Marie MONGIN, conseillère

M. François BOUYX, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRÊT : contradictoire


- par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.


- signé par M. Michel CHALACHIN, président et par Mme Cynthia GESTY, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

******

FAITS ET PROCÉDURE


Par acte sous seing privé du 27 octobre 1997, à effet au 15 novembre 1997, l’office public d’aménagement et de construction de Paris (ci après, l’OPAC), devenu l’office public de l’habitat de Paris (ci après, Paris Habitat OPH) a donné à bail à Madame Y X un local à usage d’habitation principale ainsi qu’un emplacement de stationnement situés dans l’immeuble sis […] dans le […] moyennant un loyer mensuel respectif de 5 286,12 et 450 francs hors charges.


Par acte d’huissier du 5 avril 2019, Paris Habitat OPH a fait assigner Mme X devant le tribunal d’instance de Paris afin d’obtenir la résiliation du bail pour manquements graves de celle-ci à ses obligations en raison de la sous-location illicite du logement, son expulsion immédiate et sa condamnation au paiement de 11 445 euros au titre des fruits civils indûment perçus, de 703,63 euros au titre de la dette locative, d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au double du loyer augmenté des charges jusqu’à la libération complète et effective des lieux et de 9 000 euros à titre d’amende civile.


Par jugement du 24 janvier 2020, cette juridiction a ainsi statué :

Prononce la résiliation du bail conclu entre l’OPAC, aux droits duquel vient Paris Habitat OPH, et Mme X en date du 27 octobre 1997, et portant sur un logement ainsi que sur un emplacement de stationnement situés dans l’immeuble sis […] dans le […], à la date de ce jour,

Déboute Paris Habitat OPH de sa demande de dispense du délai de deux mois,

Déboute Mme X de sa demande de délais pour quitter les lieux,

Dit qu’à défaut de départ volontaire et en tant que de besoin, il pourra être procédé à l’expulsion de Mme X et de tous occupants de son chef, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si nécessaire, à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L. 412-l et suivants, R. 411-1 et suivants, et R. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

Condamne Mme X au paiement à Paris Habitat OPH d’une indemnité d’occupation égale au montant des loyers et des charges qui auraient été dus en cas de non résiliation du bail, à compter de ce jour et ce jusqu’à complète libération des lieux se matérialisant par remise des clés ou procès verbal d’expulsion,

Dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-l et L. 433-2 du code des procédures civiles d’exécution,

Déboute Paris Habitat OPH de sa demande de condamnation de Mme X au paiement de la somme de 9 000 euros au titre de l’amende civile,

Déboute Paris Habitat OPH de sa demande de restitution des fruits civils indûment perçus,

Condamne Mme X à payer à Paris Habitat OPH la somme de 300 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme X aux entiers dépens de l’instance,

Rejette toute demande des parties plus ample ou contraire,

Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement.


Le 19 février 2020, Paris Habitat OPH a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe par la voie électronique.


Par conclusions notifiées par la voie électronique le 11 septembre 2020, Paris Habitat OPH demande à la cour de :

Débouter Madame Y X de son appel incident et de l’ensemble de ses demandes ;

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le rejet de la demande tendant à la condamnation de Madame Y X au paiement des fruits civils ;

Infirmant le jugement entrepris sur ce point et statuant de nouveau :

Condamner Madame Y X à payer à Paris Habitat OPH, la somme de 11 445 euros au titre des fruits civils indûment perçus ;

Ajoutant au jugement entrepris :

Condamner Madame Y X à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d’appel en ce compris le coût d’établissement du procès-verbal de constat.


Par conclusions notifiées par la voie électronique le 22 novembre 2021, Mme X demande à la cour de :


A titre principal

Le déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,

Infirmer le jugement rendu en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail et statuant à nouveau,


- Débouter Paris Habitat OPH de sa demande de prononciation de la résiliation du bail de Madame Y X et d’expulsion,
- Débouter Paris Habitat OPH de l’intégralité de ses autres demandes.


A titre subsidiaire si la cour devait confirmer le jugement rendu en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail :


- Accorder à Madame Y X un délai de trois ans pour être relogée dans un autre appartement et ne pas majorer, en cas d’expulsion, l’indemnité d’occupation,


- Débouter Paris Habitat OPH de l’intégralité de ses autres demandes,

Confirmer le jugement en que qu’il a débouté Paris Habitat OPH de sa demande de condamnation de Madame Y X à une amende civile de 9 000 euros sur le fondement de l’article L. 442-8 du code de la construction et de l’habitation,

Le confirmer en que qu’il a débouté Paris Habitat OPH de sa demande de condamnation de Madame Y X à lui régler la somme de 11 445 euros sur la somme indûment perçue par cette sous-location sur le fondement de l’article 547 du code civil,

Le confirmer en que qu’il a débouté Paris Habitat OPH de sa demande de condamnation de Madame Y X à lui régler en cas de résiliation de son bail une indemnité d’occupation du double de son loyer en cours,

Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Madame Y X à verser la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens et statuant à nouveau de laisser à chacune des parties la charge de ses frais de procédure.


Par ordonnance du 26 juin 2021, le magistrat chargé de la mise en état de cette chambre a rejeté la demande de communication de pièces sous astreinte formée par Paris Habitat OPH.


L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 novembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION


Sur la résiliation du bail


C’est par des motifs précis et circonstanciés, adoptés par la cour, que le premier juge, après avoir relevé l’existence de très nombreuses sous-locations illicites (313) sur une longue période (5 ans), a justement considéré que ces manquements aux obligations du bail et à l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 étaient d’une gravité telle qu’ils en justifiaient la résiliation nonobstant la situation difficile de la locataire au plan socioprofessionnel et le caractère partiel de la sous-location limitée à une chambre de l’appartement.


Devant la cour, Mme X invoque vainement le fait qu’elle n’a pas cherché à s’enrichir, que la sous-location n’a pas apporté de nuisances au voisinage, qu’elle attendait de percevoir sa retraite pour mettre un terme à cette pratique et que le bailleur n’a pas recherché la responsabilité de la plate-forme Airbnb, ces circonstances n’étant pas de nature à l’exonérer, non d’une simple erreur, mais d’un manquement à ses obligations d’une particulière gravité.


Contrairement à ce qu’elle soutient encore, les pièces produites par le bailleur montrent que son compte était encore actif postérieurement à la délivrance de l’assignation du 5 avril 2019, valant mise en demeure d’avoir à cesser les sous-locations illicites, et que des réservations ont été effectuées jusqu’en août 2019.


Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail, ordonné l’expulsion de la locataire et condamné cette dernière au paiement d’une indemnité d’occupation.


C’est encore à bon droit qu’il a rejeté la demande de délais pour quitter les lieux nonobstant la situation précaire de Mme X étant observé que les délais, dont elle a bénéficié de fait avant la décision du tribunal, se sont encore allongés pendant la procédure d’appel, alors que le bailleur social fait corrélativement face à une demande de logement très importante dans un contexte locatif particulièrement tendu à Paris.


Sur la restitution des sommes perçues par la locataire


La bailleresse justifie de sa qualité de propriétaire en produisant l’acte d’acquisition des terrains situés au 16 et au […] à Paris 20ème arrondissement sur lesquels est édifié l’immeuble dont dépend le logement litigieux, l’office public d’aménagement et de construction (OPAC) de Paris étant devenu l’office public de l’habitat (OPH) de Paris dit Paris Habitat OPH.


Contrairement à ce que soutient Mme X, la demande du bailleur n’est pas fondée sur l’existence d’un préjudice mais sur le droit d’accession de l’article 546 du code civil, l’article suivant précisant que les fruits civils appartiennent au propriétaire en vertu de ce droit, et le caractère illicite de la sous-location n’y fait pas obstacle.


En l’espèce, les pièces produites prouvent que la chambre a été sous-louée à 313 reprises au moins moyennant le prix de 35 euros la nuitée, soit un total de 10 955 euros.


Toutefois, il faut déduire de ce montant la valeur des frais exposés par la sous-locataire, c’est à dire, a minima, le montant du loyer acquitté par la locataire conformément à l’article 548 du code civil.


Le dernier loyer mensuel connu de l’appartement, hors place de stationnement, étant de 806 euros soit 26,86 euros par jour, on obtient la somme de 8 407,18 euros au titre des frais exposés par le locataire sur la période de location illicite.


Ainsi, c’est la somme de 2 547,82 euros à laquelle le bailleur a droit au titre des fruits civils.


Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile compte tenu de la situation économique réciproque des parties.

Mme X qui succombe en son appel incident sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS


La cour, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,


Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a débouté Paris Habitat OPH de sa demande de restitution des fruits civils indûment perçus,


Statuant à nouveau dans la limite de l’infirmation partielle et y ajoutant :


Condamne Mme X à verser à l’office public de l’habitat de Paris (Paris Habitat OPH) la somme de 2 547,82 euros au titre des fruits civils indûment perçus,


Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,


Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,


Condamne Mme X aux dépens d’appel en ce compris les frais du procès-verbal de constat d’huissier du 3 décembre 2018.


Le greffier, Le président,

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