Infirmation 2 juin 2022
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Sur la décision
| Référence : | CA Paris, pôle 1 ch. 10, 2 juin 2022, n° 21/10644 |
|---|---|
| Juridiction : | Cour d'appel de Paris |
| Numéro(s) : | 21/10644 |
| Importance : | Inédit |
| Dispositif : | Autre |
| Date de dernière mise à jour : | 5 octobre 2024 |
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Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 10
ARRÊT DU 02 JUIN 2022
(n° , 4 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 21/10644 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CD2GU
Décision déférée à la cour :
jugement du 07 mai 2021-juge de l’exécution de NOGENT-SUR-MARNE-RG n° 1121000390
APPELANT
Monsieur [Z] [F]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055
Plaidant par Me Jérôme BOURSICAN, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉ
Monsieur [E] [F]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Julie CUKROWICZ ARFI, avocat au barreau de PARIS, toque : C703
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 21 avril 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseillère
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER
ARRÊT
— contradictoire
— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
— signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
Déclarant agir en vertu d’une ordonnance de non-conciliation rendue par le Juge aux affaires familiales de Créteil le 16 janvier 2020, [E] [F] a déposé une requête en saisie des rémunérations à l’encontre de [Z] [F] pour avoir paiement de la somme de 8 324 euros en principal, outre 184,70 euros au titre des frais, dépens et accessoires. Selon jugement en date du 7 mai 2021, le juge du Tribunal de proximité de Nogent sur Marne statuant en qualité de juge de l’exécution a autorisé la saisie des rémunérations de [Z] [F] à concurrence de 8 446,31 euros, après avoir relevé que les sommes versées à l’intéressé par la société Cuirco Diffusion constituaient bien en majorité, voire en totalité, une rémunération. En outre [Z] [F] a été condamné au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Selon déclaration en date du 7 juin 2021 [Z] [F] a relevé appel de ce jugement. Sa déclaration d’appel a été signifiée à la partie adverse le 12 octobre 2021. [E] [F] a ensuite été assigné devant la Cour le 15 novembre 2021 par [Z] [F].
En ses conclusions notifiées le 6 avril 2022, [Z] [F] a exposé :
— que l’ordonnance de non-conciliation avait mis à sa charge le règlement de la somme mensuelle de 8 500 euros au titre du devoir de secours, outre 3 x 1 500 euros au titre de la la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants, et les prêts, taxe foncières, charges de copropriété, frais inhérents aux séjours des enfants à l’étranger, à leurs études, à leurs frais extra scolaires, ainsi qu’aux frais de santé non remboursés ;
— que la somme à régler excédait largement ses revenus qui s’élevaient, en 2021, à 14 000 euros par mois ;
— qu’il était dans l’incapacité de régler ces sommes, le conseiller de la mise en état ayant selon ordonnance en date du 16 mars 2021 rejeté la demande de radiation de l’affaire qui avait été présentée par la partie adverse ;
— que [E] [F], de même que sa mère, avaient diligenté de nombreuses mesures d’exécution en sus de la saisie des rémunérations litigieuse (plusieurs saisies-attributions, tant à l’encontre de [Z] [F] que de la société Cuirco Diffusion, un paiement direct, et une saisie conservatoire) ;
— que par arrêt en date du 3 février 2022, la Cour d’appel de Paris avait infirmé l’ordonnance de non-conciliation susvisée et mis à sa charge un devoir de secours de 5 500 euros par mois, outre une contribution à l’entretien et l’éducation des enfants, rétroactive à dater du 16 janvier 2020, de 500 euros par mois pour [D] et de 2 x 700 euros par mois pour [E] et [H] ;
— que contrairement à ce qu’avait estimé le juge de l’exécution, il n’était pas salarié à ce jour mais percevait des gratifications en qualité de gérant, et ce, en une seule fois, même si dans le passé, jusqu’au 30 juin 2016, alors que la société Cuirco Diffusion était une société par actions, il l’avait été ;
— qu’il avait la qualité de co-gérant depuis le 1er juillet 2016 ;
— qu’il ne percevait pas de rémunération, et n’était pas inscrit dans les effectifs des salariés ;
— qu’il n’existait aucun lien de subordination entre la société Cuirco Diffusion et lui même ;
— que les sommes objet de la saisie des rémunérations étaient contestées, la somme de 5 653,40 euros devant être déduite ;
— que de plus, ensuite de l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 3 février 2022, il était dû à [E] [F] la somme de 6 661,50 euros sur la période allant du 16 janvier au mois d’octobre 2020, mais la somme de 7 075 euros ayant été payée, il existait un trop perçu ;
— que la somme éventuellement due serait celle de 2 670,91 euros en fonction de la quotité saisissable du salaire.
Il a demandé à la Cour d’infirmer le jugement, de déclarer irrecevable la requête en saisie des rémunérations, et subsidiairement de la rejeter, et très subsidiairement de cantonner la saisie des rémunérations à concurrence de 2 670,91euros en tenant compte de ses charges. Enfin [Z] [F] a réclamé la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées le 14 avril 2022, [E] [F] a exposé :
— qu’il existait un lien entre la société Cuirco Diffusion et [Z] [F] ;
— que ce dernier avait été embauché en 1989 en qualité de directeur des achats, fonction qu’il cumulait avec celle de Directeur général ;
— que lorsque la société Cuirco Diffusion était passée du statut de société par actions à société à responsabilité limitée, en 2016, [Z] [F] avait perdu ses mandats sociaux et avait été nommé co-gérant ;
— qu’il appartenait à [Z] [F] de rapporter la preuve de la cessation de son contrat de travail ,
— qu’il était bien salarié de la société Cuirco Diffusion au sens de l’article L 3252-1 du code du travail, exerçant ses fonctions techniques et commerciales dans le cadre d’une dépendance économique ;
— que la société Cuirco Diffusion avait d’ailleurs réglé certaines dettes dont il était redevable telles que des dettes alimentaires ;
— qu’elle n’avait pas donné suite au paiement direct qui avait été diligenté entre ses mains mais réglé à l’intéressé les sommes de 204 000 euros puis 168 000 euros ;
— qu’il ne pouvait pas lui être reproché d’avoir mis en place plusieurs saisies-attributions car l’issue de celles-ci était incertaine, alors que s’agissant du paiement direct qu’il avait mis en place, la société Cuirco Diffusion n’y avait pas donné suite ;
— que les frais de scolarité des enfants, les condamnations aux dépens et en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que la provision ad litem étaient bien des créances de nature alimentaire ;
— que c’était à ce titre que [Z] [F] avait été condamné à régler une contribution à l’entretien et l’éducation des enfants, en espèces, et en nature par la prise en charge directe de divers frais qu’il avait d’ailleurs accepté de prendre en charge, notamment en ce qui concerne des frais générés par les études que les enfants suivaient à l’étranger ;
— que la créance alimentaire en numéraire s’élevait à 6 661,29 euros du 16 janvier au mois d’octobre 2020, outre 17 236,83 euros au titre des frais de scolarité et de transports, soit au total 23 898,12 euros, de laquelle il y avait lieu de soustraire celle de 5 950 euros (réglée par [Z] [F] lui même) et celle de 347,66 euros (obtenue via une saisie-attribution, la somme ainsi saisie étant divisée entre les trois créanciers), la somme due à ce jour étant de 17 600,46 euros ;
— qu’il y avait lieu de calculer la quotité saisissable du salaire de l’appelant.
[E] [F] a demandé à la Cour de confirmer le jugement sauf en ce qui concerne le quantum de la créance et de le fixer à 17 600,46 euros, la saisie des rémunérations étant ordonnée pour ce montant, de fixer le montant de la quotité saisissable, et de condamner [Z] [F] au paiement de la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
L’article L 3252-1 du Code du travail prévoit que sont saisissables les sommes dues à titre de rémunération à toutes les personnes salariées ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, par un ou plusieurs employeurs, quels que soient le montant et la nature de la rémunération, la forme et la nature du contrat.
La notion de rémunération suppose l’existence d’un lien de subordination ou de dépendance entre le débiteur et le tiers saisi, le terme 'employeur’ figurant au texte susvisé étant à cet égard dénué d’ambigüité. Une saisie des rémunérations ne peut donc être ordonnée qu’en cas de relation salariale entre le débiteur et le tiers saisi se caractérisant par un tel lien, une simple dépendance économique étant insuffisante. Il incombe au créancier de rapporter la preuve y relative.
Il résulte des pièces produites que :
— la société Cuirco Diffusion avait la forme juridique d’une société par actions jusqu’au 30 juin 2016, date à laquelle elle a été transformée en SARL ;
— une assemblée générale extraordinaire en date du 30 juin 2016 a mis fin aux fonctions de M. [F] en tant que directeur général, l’intéressé étant nommé gérant, sa rémunération devant être fixée ultérieurement ;
— M. [F], devenu gérant majoritaire non salarié, n’était plus destinataire de bulletins de paie comme auparavant mais faisait l’objet d’une déclaration annuelle appelée 'DSI’ ;
— le 1er avril 2020, la société Cuirco Diffusion a fixé sa rémunération annuelle nette à hauteur de 204 000 euros ;
— le 1er avril 2021, la société Cuirco Diffusion a fixé la rémunération mensuelle nette de M. [F] à hauteur de 14 000 euros pour l’exercice allant du 1er avril 2021 au 31 mars 2022, soit un total de 168 000 euros sur l’année ;
— le 13 janvier 2021, le directeur administratif et financier de la société Cuirco Diffusion a attesté que ladite société emploie actuellement 42 salariés, que M. [F] en est le gérant et n’a pas d’autres fonctions dans la société, et que sa rémunération a été votée par l’assemblée générale de la société Cuirco Diffusion comme indiqué supra sur l’exercice allant du 1er avril 2020 au 31 mars 2021, tandis que sur l’exercice suivant, sa rémunération sera incertaine en raison du contexte économique actuel de la société (perte de chiffre d’affaires significative) et de l’épidémie de Covid 19.
Il apparaît ainsi que si avant le 30 juin 2016 M. [Z] [F] faisait partie des dirigeants assimilés salariés, après cette date il a été nommé co-gérant de la société et a relevé du régime de sécurité sociale applicable aux indépendants. D’autre part, il n’est nullement démontré que l’intéressé est titulaire d’un contrat de travail au côté de son mandat social, ni qu’il exerce des fonctions techniques distinctes dudit mandat, ni qu’il existe entre lui et la société Cuirco Diffusion un lien de subordination ; aucun bulletin de paie ou contrat de travail n’est versé aux débats et les sommes qui lui sont versées par ladite société le sont en une seule fois chaque année et non pas mois par mois, et surtout leur montant est fixé en fonction de la conjoncture économique et non pas d’un contrat de travail fixant un salaire.
Dans ces conditions, il est acquis que les sommes versées à M. [F] par la société Cuirco Diffusion ne sont pas des rémunérations payées dans le cadre d’un contrat de travail. Le jugement sera infirmé en l’ensemble de ses dispositions et M. [E] [F] débouté de sa demande.
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [Z] [F].
M. [E] [F] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Statuant dans les limites de l’appel,
— INFIRME le jugement en date du 7 mai 2021 en l’ensemble de ses dispositions ;
et statuant à nouveau :
— REJETTE la demande de saisie des rémunérations formée par M. [E] [F] à l’encontre de M. [Z] [F] ;
— REJETTE la demande de M. [Z] [F] en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
— CONDAMNE M. [E] [F] aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier, Le président,
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