Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 26 mars 2014, n° 12/04430

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

JPFB/KG

ARRET N° 193

R.G : 12/04430

Z

C/

SARL SAUM

SARL POIT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 26 MARS 2014

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/04430

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 17 décembre 2012 rendu par le Conseil de Prud’hommes de POITIERS.

APPELANT :

Monsieur Y Z

XXX

XXX

Représenté par Me Pauline BRUGIER, avocat au barreau de POITIERS

INTIMEES :

SARL SAUM

XXX

XXX

SARL POIT

XXX

XXX

Représentées par Me Valérie BREGER, avocat au barreau de LAVAL, substituée par Me Philippe GAND, avocat au barreau de POITIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 Février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Monsieur Jean-Paul FUNCK-BRENTANO, Conseiller

Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Annie FOUR

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président, et par Madame Christine PERNEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. Y Z a été engagé par la société Disso le 16 novembre 1993 en qualité de chef de magasin stagiaire. Son contrat de travail a été transféré à la société Groupe Atlantis puis à la société Saum à compter du 1er mai 1997. La société Poit et la société Saum exploitent chacune un commerce de détail non alimentaire sous l’enseigne Noz.

Elles sont membres du réseau de franchise Noz. M. Y Z a été nommé cogérant de la société Saum avec effet au 1er novembre 2005. Il est devenu associé de la société Saum. Sa rémunération en qualité de co-gérant a été portée à 21.444 € bruts par an. Il avait auparavant démissionné de ses fonctions de chef de magasin selon courrier du 31 octobre 2005. Un contrat de mandat de cogérant a été signé par M. Y Z le 16 novembre 2005. Par la suite, M. Y Z qui désirait se rapprocher géographiquement de Poitiers, a envisagé de quitter la cogérance de la société Saum pour devenir cogérant de la société Poit.

C’est ainsi que préalablement à la finalisation de l’opération, M. Y Z à partir d’avril 2009, s’est rendu dans le magasin exploité par la société Poit à Poitiers. A partir du 19 août 2009 M. Y Z a été en arrêt de travail pour maladie. Le 28 juin 2011, il a saisi le conseil de Prud’hommes de Poitiers d’une demande de requalification de son mandat de gérant en un contrat de travail et a demandé la régularisation de sa situation au titre de la prévoyance.

Par jugement rendu le 17 décembre 2012, le conseil de prud’hommes de Poitiers a jugé non fondées les demandes de M. Y Z hormis celles concernant la remise des bulletins de salaire et des relevés de prévoyance Capaves manquants, déboutant M. Y Z du surplus de ses demandes.

M. Y Z a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions déposées le 7 janvier 2014 et développées oralement à l’audience de plaidoiries, M. Y Z demande à la cour d’infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes le 17 décembre 2012 et, le réformant de :

* dire et juger que ses demandes sont recevables et bien fondées,

par conséquent,

* ordonner la transmission des bulletins de paie d’octobre et novembre 2011 sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir,

à titre principal de :

* condamner la société Saum à lui verser les indemnités dues au titre de la prévoyance Capaves à compter du mois de juin 2011,

* dire et juger que le contrat de mandat de cogérant conclu entre lui et la société Saum en novembre 2005 doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein,

par conséquent, condamner la société Saum à lui régler une somme de :

—  4 320 € bruts à titre de rappel de salaires,

—  432 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférente,

* prononcer la rupture du contrat de travail le liant à la société Saum aux torts de cette société,

par conséquent, condamner la société Saum à lui régler une somme de :

—  6.300 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

—  630 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférente,

—  8.225¿ nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

—  80 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  1.098 € à titre d’indemnité pour perte du droit individuel à la formation,

* dire qu’il pourra bénéficier de la prévoyance Capaves de la société durant 9 mois à compter de l’arrêt à venir,

* condamner la société Saum à lui remettre les bulletins de paie rectifiés conformément à son statut social, et à justifier de la régularisation de sa situation sociale auprès de l’ensemble des organismes sociaux notamment Urssaf, Cpam et caisse de retraite dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour de retard,

à titre subsidiaire :

* dire et juger qu’il est lié à la société Poit par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein depuis le 14 avril 2009,

par conséquent :

* condamner la société Poit à lui verser les indemnités dues au titre de la prévoyance Capaves à compter du mois de juin 2011,

* condamner la société Poit à lui régler une somme de :

—  4.320 € bruts à titre de rappel de salaires,

—  432 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférente,

* prononcer la rupture du contrat de travail le liant à la société Poit aux torts de cette société,

* condamner la société Poit à lui régler une somme de :

—  6 300 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que de 630 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférente,

—  8.225 € nets à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

—  80.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  1.098 € pour perte du droit individuel à la formation,

* dire qu’il pourra bénéficier de la prévoyance Capaves de la société durant 9 mois à compter du jugement à venir,

* condamner la société Poit à lui remettre les bulletins de paie rectifiés conformément à son statut social, et justifier de la régularisation de sa situation sociale auprès de l’Urssaf, de la Cpam et de la caisse de retraite dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour de retard.

en tout état de cause :

* condamner la société défaillante à lui verser une somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamner la société défaillante aux entiers dépens de l’instance,

* dire que la totalité des sommes qui lui seront allouées portera intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil le 28 juin 2011,

* débouter la société Poit et la société Saum de toutes demandes.

Par conclusions déposées le 28 janvier 2014 et développées oralement à l’audience de plaidoiries, la société Saum et la société Poit demandent à la cour de débouter M. Y Z de l’ensemble de ses demandes, de le condamner à verser 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions, il y a lieu de se référer au jugement du conseil de prud’hommes et aux écritures déposées, oralement reprises.

MOTIFS DE L’ARRÊT

M. Y Z réitère sa demande de requalification du contrat de gérance non salariée en contrat de travail faisant valoir qu’il ressort des tâches qu’il a accomplies au sein des différents magasins dans lesquels il a successivement travaillé pour des sociétés gérées par la société de franchise Futura Finances ainsi que des termes du contrat de cogérant qu’il a conclu qu’il ne s’est jamais départi de son statut de salarié. Il soutient qu’il n’a jamais eu les pouvoirs attachés à un mandat de co-gérant libre de société puisqu’il a poursuivi son activité de chef de magasin sans avoir aucune autonomie dès lors que son contrat de mandat prévoyait qu’il ne pouvait consentir tout contrat d’un montant supérieur à 750 €. Enfin à compter du 14 avril 2009, il entend démontrer par diverses pièces avoir travaillé en qualité de salarié au sein du magasin Noz de Poitiers.

La preuve de l’existence d’un contrat de travail est subordonnée à l’existence d’un lien de subordination caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Il est produit aux débats un contrat de mandat de co-gérant signé par M. Y Z le 16 novembre 2005.

Aux termes de l’article L.223-18, alinéa 2 du code de commerce dans les rapports entre associés, les pouvoirs des gérants sont déterminés par les statuts. Ce texte laisse donc aux associés le soin de fixer l’étendue des pouvoirs du gérant.

En l’espèce l’article 1er du contrat de mandat de cogérant signé par M. Y Z précise que le mandat social est exclusif de la qualité de salarié et il délimite en son article 2 les pouvoirs du cogérant à l’égard des tiers et des associés prévoyant notamment qu’il ne pouvait consentir tout contrat d’un montant supérieur à 750 €.

M. Y Z soutient qu’il n’aurait eu aucun pouvoir réel en se prévalant des clauses qui restreignent ses pouvoirs ou organisent des contrôles internes.

Les intimées font justement observer d’une part que l’assemblée des associés a les pouvoirs de limiter les pouvoirs des gérants, d’autre part que les contrôles internes en matière de gestion sont conformes aux exigences de l’exécution des contrats de franchise qui s’imposent à elles, enfin que M. Y Z a accepté ces limites, étant rappelé que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites en application de l’article 1134 du code civil.

M. Y Z ne justifie d’aucune consigne qu’il aurait reçue d’un employeur dans la limite des pouvoirs qui lui étaient conférés dans le cadre de son mandat de co-gérant.

Il convient également d’observer que M. Y Z a perçu des dividendes en 2005, 2007, 2008 et 2009 en sa qualité de cogérant ainsi que des primes exceptionnelles en mai 2008 et juin 2009 qui ont été décidées par l’assemblée générale des associés de la société Saum, qu’il s’est lui-même targué de la qualité de cogérant dans un courrier du 9 février 2009.

M. Y Z s’est borné à bénéficier de l’assistance de la société RA Expansion en matière de comptabilité et de gestion administrative en vertu d’un contrat passé entre celle-ci et la société Saum. Il est normal que cette société pour rédiger les contrats ait été informée des recrutements décidés par M. Y Z dans le cadre de son mandat dont il est justifié (pièces 18 à 25 des intimées), étant observé d’une part que si M. Y Z a pu également décider d’ embauches en qualité de salarié chef de magasin avant d’avoir le statut de cogérant, ce n’était pas en qualité de cadre, d’autre part qu’il ne justifie avoir reçu aucune consigne pour les embauches qu’il a effectuées en qualité de cogérant.

Les éléments produits aux débats (pièces 9 et 34 de M. Y Z) démontrent qu’à partir du 14 avril 2009, M. Y Z s’est rendu en sa qualité de cogérant de la société Saum dans la société Poit pour finaliser un projet de rentrer dans le capital de cette société et d’en devenir cogérant sans jamais y avoir travaillé en qualité de salarié.

Cela n’est pas contredit par le remboursement des notes de frais de déplacement de M. Y Z prévu par l’article 5 du contrat de mandat de co-gérance, ni par les relevés des horaires hebdomadaires de celui-ci effectués par la société Socad, simple société prestataire de services chargée notamment de l’établissement des bulletins de paie de la société Poit qui n’engage pas celle-ci.

La note de M. X (pièce n° 13 de M. Y Z) invoquée comme des consignes qui auraient été transmises par M. X, animateur de zone n’est qu’un document de travail élaboré conjointement par M. Y Z et M. X constatant des manquements à l’application du concept Noz par la société Poit dans son magasin de Poitiers, la société Sfn Consulting assistant les sociétés franchisées Noz parmi lesquelles se trouve la société Poit pour le respect du concept.

Enfin le recours à des contrats de travail de remplacement pour pourvoir le poste de cogérant de M. Y Z pendant ses arrêts de travail est licite et conforme à l’article L.1242-2, alinéa 4 du code du travail qui le prévoit à titre partiel pour un chef d’une entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, aucun effet ne pouvant être tirée de mentions erronées portées sur des demandes de Cdd (pièce 23 de M. Y Z).

En l’absence de preuve rapportée de consignes reçues par M. Y Z de la société Saum et de la société Poit dans le cadre de ses pouvoirs de cogérant, celui-ci sera débouté de sa demande de requalification en contrat de travail et des demandes qui s’y rattachent. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur le surplus :

Les bulletins d’octobre et novembre 2011 ont été remis à M. Y Z (pièces 31 et 32).

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

La charge des dépens incombe à la partie perdante en l’espèce M. Y Z.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris,

Déboute M. Y Z de l’ensemble de ses demandes,

Dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. Y Z aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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