Cour d'appel de Poitiers, 2ème chambre, 5 septembre 2017, n° 16/02208

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, 2e ch., 5 sept. 2017, n° 16/02208
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 16/02208
Décision précédente : Tribunal de commerce de La Rochelle, 26 mai 2016
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

ARRET N°450

R.G : 16/02208

BS/KP

SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE – DCF -

C/

B

Y EPSE X

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2e Chambre Civile

ARRÊT DU 05 SEPTEMBRE 2017

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/02208

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 27 mai 2016 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.

APPELANTE :

SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE – DCF -

[…]

[…]

Ayant pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON – YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS.

Ayant pour avocat plaidant SELARLCLERGUE ABRIAL, avocat au barreau de SAINT ETIENNE.

INTIMES :

Monsieur C B

né le […] à BORDEAUX

[…]

[…]

Madame Z Y veuve X née le […] à […]

[…]

[…]

Ayant tous les deux pour avocat postulant Me Brice DE BEAUMONT de la SCP BEAUMONT-FREZOULS, avocat au barreau de POITIERS

Ayant tous les deux pour avocat plaidant Me Jean-Christophe BONFILS, avocat au barreau de DIJON.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 29 Mai 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Béatrice SALLABERRY, Présidente de chambre

Madame Carole CAILLARD, Conseiller

Monsieur Laurent WAGUETTE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Madame Béatrice SALLABERRY, Présidente de chambre et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

OBJET DU LITIGE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 4 novembre 2011, M. C B et Mme Z Y ont conclu avec la SAS Casino un contrat de co-gérance d’une supérette Petit Casino ( E3096) située à Aizenay, avec mandat de gestion et d’exploitation, soumis aux dispositions des articles L 7322-l et suivants du code du travail , ainsi qu’à l’accord collectif national du 18 juillet 1963 modifié.

A la même date, a également été signé entre les parties un avenant définissant les modalités de rémunération, ainsi que les avantages liés à la fonction de mandataires non-salariés, notamment le versement de commissions sur le chiffre d’affaires de la supérette.

Lors de la conclusion du contrat le 4 novembre 2011, un inventaire contradictoire a été réalisé à la supérette en présence des co-gérants, dont il ressortait un stock de marchandise d’une valeur de 88.727,04 € et un stock d’emballages de 894,81 €.

Durant la période du 12 décembre 2011 au 18 décembre 2012 cinq inventaires ont été établis contradictoirement, ces résultats ont été inscrits sur le compte général de dépôt des co-gérants, notifiés par courrier après chaque inventaire.

Le 15 novembre 2012, la SAS Casino a signifié par courrier remis par voie d’huissier aux consorts Y / B qu’ils étaient relevés provisoirement de leurs fonctions au vu du dernier inventaire. Le même jour a été effectué un inventaire de reprise définitif de la supérette devant huissier, qui a fait ressortir un stock réel de marchandises de 77.482,05 € et un stock réel d’emballages de 1.143,26 €. En comparaison avec l’inventaire du 18 octobre 2012, a été constaté un manquant en marchandises de 1.796,58 €, et un excédent d’emballages de 139,51 €. Ces éléments ont été inscrits au débit du compte de dépôt général des consorts Y / B , et notifiés par courrier du 26 novembre 2012.

Le 3 décembre 2012, la SAS Casino a adressé un courrier recommandé avec accusé de réception aux consorts Y / B, les convoquant à un entretien préalable à une éventuelle rupture de leur contrat.

Le 2 janvier 2013, la SAS Casino a rompu le contrat de co-gérance des consorts Y / B, faisant état d’un compte de dépôt général débiteur de 23.601,48 €. Ces derniers ont contesté devoir ces sommes qu’ils n’ont pas payées.

Par acte d’huissier en date du 21 janvier 2015, la SAS Casino assigné les consorts Y / B en paiement devant le tribunal de commerce de La Rochelle.

Par jugement en date du 27 mai 2016, le tribunal de commerce de La Rochelle a :

— Reçu la SAS Distribution Casino France en ses demandes, les dit mal fondées,

— Débouté la SAS Distribution Casino France de l’ensemble de ses demandes,

— Condamné la SAS Distribution Casino France à payer aux consorts Y / B, la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu’au paiement des entiers dépens de l’instance comprenant les frais du greffe recouvrés en application de l’article 696 du même code.

Par déclaration du 14 juin 2016, la SAS Distribution Casino France a relevé appel de cette décision et selon ses dernières conclusions notifiées le 5 mai 2017 demande à la cour de :

Au visa l’article 1134 ,des articles 1932 et suivants, 1993 et suivants du Code Civil,

Au visa des dispositions de l’accord collectif national des maisons d’alimentation du 18 juillet 1963 modifié et en particulier les articles 21 et 23,

— Infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris

— Rejeter l’intégralité des demandes, fins et prétentions des consorts B/ Y,

— Retenant que le solde débiteur du compte général dépôt des consorts B / Y, s’élève à la somme de 23.601.48 €.

— Condamner solidairement M. C B et Mme Z Y à lui payer les sommes de :

* 23.601,48 € outre intérêts de droit à compter du 29 mai 2013, date de la première mise en demeure,

* 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile

— Ordonner la capitalisation des intérêts à compter de l’assignation,

— Condamner solidairement les consorts B / Y, aux entiers dépens de l’instance, ceux d’appel distraits au profit de la SCP Tapon Michot, Avocats, sur son affirmation de droit.

Elle fait essentiellement valoir que :

— les gérants de supérette ne sont que dépositaires de la marchandise qui leur est confiée en début de contrat, puis par le canal des commandes de réapprovisionnement passées en cours d’exécution du contrat

— elle conteste le reproche qui lui est fait par les consorts Y / B d’avoir porté atteinte à leur liberté de gestion nécessaire à l’exécution du contrat

— elle admet que les gérants aient pu recevoir des marchandises non commandées ( erreur commise par l’entrepôt), il appartient aux gérants de faire les vérifications entre leurs commandes et les livraisons et de faire les réclamations qui s’imposent

— le reproche sur le comportement du manager est inopérant car les consorts Y / B se plaignent en même temps de son ingérence et du fait qu’ils n’ont pas été assistés

— ils n’ont pas été encadrés hiérarchiquement contrairement à ce qu’ils veulent faire croire, elle n’a commis aucune inexécution contractuelle

— le reproche fondé sur l’ absence de rupture de contrat au premier déficit constaté est absurde, car si elle avait agi ainsi les intimés le lui auraient reproché, l’article 8 du contrat invoqué à cet égard lui donne la faculté de résiliation du contrat elle peut y renoncer

— les erreurs d’encaissement de CB ne se sont produits que sur une très courte période et c’est avec l’accord des gérants que dans l’attente d’obtenir leur propre carte d’initialisation TPE que celle du magasin du Château d’Olonne a été utilisée , des remboursements ont été effectués de sorte qu’il n’y a aucun impact sur les comptes

— sur les emballages elle rappelle que contrairement à ce que soutiennent les intimés les emballages sont compris dans l’inventaire voir art 21 de l’accord collectif du 18 juillet 1963

— la responsabilité pécuniaire des gérants est prévue par l’art 23 accords collectifs elle exclut la responsabilité en cas de vol de marchandises ou d’espèces sauf en cas de vol par effraction ou de vol lors du transport des fonds pour versement à Casino, à charge pour le gérant de prévenir la société et de faire établir aussitôt un inventaire et en cas de perte ou avaries de la marchandise, pour le reste il appartient aux gérants de prendre soin des marchandises et de prévenir les vols à l’étalage

— concernant son obligation de formation, il appartenait aux co-gérants de faire toute demande de formation s’ils l’estimaient utile , ils ne démontrent pas avoir fait cette demande

— sur les contestations des gérants et le bien fondé de ses réclamations (comptes), elle considère avoir répondu point par point à celles-ci formulées après la rupture du contrat, c’est aux intimés qu’incombe la charge de la preuve , d’autant que les pièces comptables sont établies sur la base de leurs déclarations (commandes et recettes)

> les relevés de compte leur ont été transmis chaque fin de mois en application de l’article 12 du contrat, ils ne l’ont pas contesté dans le délai de 8 jours comme exigé, ils ne plus recevables à le faire

> les inventaires ont été dressés conformément à l’art 21 des accords collectifs et n’ont pas été contestés dans le délai de 15 jours ,ils ne plus recevables à le faire

> sa demande en paiement est fondée dès lors qu’elle repose sur l’arrêté de compte et le compte général de dépôt approuvés par les cogérants, les documents comptables mensuels qui leur sont transmis et non contestés, enfin les inventaires contradictoires de la supérette.

> il ressort des pièces versées aux débats que les Consorts B / Y ont signé et approuvé les attestations d’inventaires de la supérette jusqu’à l’inventaire de reprise du 15 novembre 2012 que leur ont été notifiés les comptes d’inventaires successifs et notamment pour l’inventaire de reprise du 15 novembre 2012

— elle dénie s’être immiscée dans la gestion des gérants par par le biais du logiciel GOLD qui lui permet de contrôle l’évolution du stock ce système informatique mis à la disposition des gérants par la société leur permet de vérifier les changements de prix, les gérants ne peuvent pas lui reprocher de garder le contrôle des prix car c’est une faculté inhérente à la nature du contrat

— c’est à tort que sur la liste des manquants le tribunal a suivi l’argumentation des intimés, il n’est matériellement pas possible d’établir une liste des marchandises manquantes.

> selon l’accord collectif il appartient aux cogérants et d’apporter la preuve de la reddition de leur mandat, ainsi que cela est clairement et systématiquement souligné par la Jurisprudence.

— Sur les prétendus frais et intérêts indûment perçus, aucune preuve n’est rapportée par les intimés de ce qu’ils avancent sur ce point

Selon leurs dernières conclusions notifiées le 24 avril 2017, M. C B et Mme Z Y demandent à la cour de :

Au visa des articles L.7322-1 et suivants du code du travail, et des accords collectifs du 18 juillet 1963,

— Confirmer le jugement entrepris,

— Débouter la SAS Distribution Casino France de toutes ses demandes fins et conclusions.

— Condamner la SAS Distribution Casino France à leur payer une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre l’indemnité accordée en première instance, ainsi qu’aux entiers dépens.

Ils font essentiellement valoir que

— la SAS Casino fonde ses demandes sur l’article 1134 du code civil, occultant les articles L.7322-1 et suivants du code du travail, et celles de l’accord collectif du 18 juillet 1963 étendue au plan national par arrêté du Ministre du Travail, qui constituent les seules normes applicables à ce statut autonome, ils ne sont pas commerçants mais mandataires,

— leur responsabilité personnelle est définie par l’article 23 des accords collectifs limitée aux manquants de marchandises ou d’espèces provenant des ventes, c’est à dire au contrat de dépôt lui même.

— les comptes sur la base desquels la SAS Casino fonde sa réclamation ont été faussés par des irrégularités relevant du fait de Casino :

> leur terminal CB (carte bleue) été initialisé par Casino avec la carte d’un autre magasin (Château d’Olonne), ce qui a entraîné un mauvais report des paiements CB enregistrés pour le magasin d’Aizenay, ils ont perçu des remboursements en compensation de cette situation sans possibilité de vérification

— la SAS Casino a commis des fautes dans l’exécution de ses obligations contractuelles et ne justifie pas des éléments à l’appui de sa réclamation

> malgré 5 inventaires déficitaires successifs, elle n’a pas rompu le contrat ni pris aucune mesure d’assistance, or l’article 16-1° du contrat prévoit une rupture immédiate sans indemnité ni préavis dès l’apparition d’un premier déficit, étant précisé qu’ils étaient de jeunes gérants débutant dans ce type d’activité

> ils n’ont approuvé aucun des arrêtés de comptes, contestant ainsi l’exactitude des comptes tenus par l’entreprise propriétaire de la succursale dès le premier inventaire, la société ne leur a jamais répondu de manière précise, se contentant de rejeter en bloc leurs contestations

> il n’existe dans le statut aucune responsabilité des gérants pour les emballages , or la SAS Casino forme des réclamations de ce chef comme pour les manquants de marchandises ou d’espèces (voir art 23 des accords collectifs et l’article 6-2 du contrat de gérance )

> ils ont dû assumer l’impact des vols à l’étalage sans que Casino ne leur ait fourni les moyens de s’en prémunir et les prévenir (pas de système de vidéo surveillance pas de portique de détection )

> Casino n’a pas respecté son obligation de formation à leur égard alors que l’article 3 des accords collectifs impose à la société des obligations d’assistance et de formation renforcées à l’égard des jeunes gérants , s’ils ont eu un stage de formation ( en l’espèce être en doublon pendant 2 semaines avec les gérants d’une autre supérette ) ce n’était pas une véritable formation en outre ils n’ont pas eu l’assistance spéciale à la gestion prévue par l’art 3-B des accords collectifs

> Casino a la maîtrise par le biais du logiciel de gestion GOLD, des prix au passage en caisse par l’intermédiaire du lecteur optique des codes barres, les prix ont été modifiés entre le prix fixé lors de l’inventaire mensuels et le prix au passage en caisse , ceci provoquant des écarts et des déficits faute de pouvoir faire les corrections sur le compte de dépôt au fur et à mesure des changements de prix, les dysfonctionnements sont imputables à Casino qui fournit et impose les moyens d’exploitation mais ne donne pas aux gérants un logiciel leur permettant de vérifier les descentes de prix en caisse ni d’effectuer les corrections comptables.

— il a été porté atteinte à leur liberté de gestion , le manager qui surveillait leur gestion s’est immiscé dans leur gestion au point de passer lui même des commandes en leur lieu et place

— Casino n’a pas fourni la liste des marchandises manquantes alors qu’elle en a l’obligation art 8 du contrat

— Casino n’a pas notifié dans le délai imparti les comptes d’inventaire alors que l’article 21-B des accords collectifs du 18 juillet 1963 prévoit qu’ils doivent être notifiés au plus tard dans le délai de 2 mois de la date d’inventaire , ceci est différent de l’attestation d’inventaire dont se prévaut Casino qui indique simplement que le jour du comptage physique des marchandises le gérant était présent, le résultat d’inventaire par rapprochement avec le compte de dépôt n’étant pas encore connu.

— Casino ne justifie pas des éléments exigés par les accords collectifs c’est sur elle que pèse la charge de la preuve

— des frais indus, et intérêts débiteurs ont été illégitimement prélevés voir art 23 à 26 des accords collectifs (23, la société doit rembourser aux gérants les vols, ainsi que les pertes relatives aux périmés, 24, la société assume les chèques impayés, 25, elle fournit et entretient un magasin équipé qui doit être totalement prêt pour la vente, 26 la société doit rembourser les pertes sur produits frais) Casino se fonde sur l’article 8 du contrat de gérance ' Le solde sera producteur d’intérêts au taux fixé par la société' or elle n’a jamais fait connaître le taux effectif global des intérêts, dont on ignore le taux et les modalités de calcul.

Il sera pour le surplus expressément référé aux écritures respectives des parties.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 mai 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il ressort des débats et des pièces produites que la société Casino a prononcé le 2 janvier 2013 la rupture du contrat de gérance conclu le 4 novembre 2011 avec les consorts Y / B faisant le constat de leur incapacité de gérer la supérette dans des conditions normales de rentabilité, ceci résultant de 5 inventaires successivement déficitaires. Elle fonde ses demandes à leur encontre sur les articles 1134 , 1932 et suivants (relatifs au contrat de dépôt) et 1993 et suivants du code civil (relatifs au mandat) en se basant sur l’arrêté de compte du compte de dépôt général des co-gérants établi à la suite du dernier inventaire du 15 novembre 2012, au vu duquel elle a décidé de les suspendre de leurs fonctions avant de résilier le contrat. Elle réclame à ce titre un solde débiteur à hauteur de 23.601,23 €.

Les consorts B / Y contestent devoir ces sommes estimant que le décompte a été faussé dès le départ compte tenu des conditions précipitées du démarrage de leur activité sans carte de commerçant pour le terminal de CB avec utilisation de celle d’un autre magasin. Ils reprochent également à la société Casino à la fois une ingérence du manager dans leur gestion et une absence de soutien et de formation au démarrage de leur activité de gérance.

Il est établi que le contrat conclu entre la société Casino et les consorts Y / B obéit aux règles fixées par les articles L.7322-1 et suivants du code du travail et celles issues des accords collectifs du 18 juillet 1963. Il en découle un statut dérogatoire dans le cadre duquel la responsabilité des gérants est définie par l’article 23 des accords collectifs selon lequel ' Le titulaire d’une gérance est responsable des marchandises qui lui sont confiées ou des espèces provenant de leur vente. '

Il appartient à la société Casino de rapporter la preuve des 'manquants’ qu’ils soient en marchandises ou en espèces , susceptibles d’engager la responsabilité des co-gérants, elle produit à cet égard le compte général définitif de dépôt établi sur la base des documents comptables mensuels dressés par les gérants et des inventaires contradictoires.

En effet les cogérants étant dépositaires des marchandises confiées par l’enseigne Casino , des inventaires réguliers ont été effectués tout au long de l’exercice, en présence du manager Casino, afin de reconstituer le solde théorique de la marchandise en stock , en fin de mois ce solde devait être égal au stock théorique du début de mois, augmenté des commandes reçues et diminué des ventes sur la même période. La comparaison des stocks permettant de définir l’arrêté de comptes entre les parties.

C’est ainsi qu’ont été établis les 5 inventaires produits aux débats le dernier étant l’inventaire définitif du 15 novembre 2012, les arrêtés de compte établis à leur suite et inscrits au compte général de dépôt des gérants faisant apparaître :

— le 12 décembre 2011 un manquant en marchandises de 16.025,68 €, et un manquant d’emballages de 2.684,67 € (pièces 11 et 12 appelante)

— le 16 janvier 2012 pour un manquant 912,37 € de marchandises et un excédent en emballages de 563,16 € (pièces 13 et 19 appelante)

— le 19 avril 2012 un manquant de marchandises de 6.570,60 € et un manquant d’emballages de 412,90 € (pièces 21 et 33 appelante)

— le 28 juin 2012 un manquant de marchandises de 227,22 € et 174,70 € de manquants d’emballages (pièces 35 et 44 appelante)

— le 18 octobre 2012 un manquant de marchandises de 10.374,09 € et un manquent d’emballages pour 299,17 €, (pièces 46 et 64 appelante)

— le 15 novembre 2012, un manquant de marchandises de 1 .796,58 € un excédent d’emballages de 139,51 €, ( pièces 67, 73 et 74 appelante)

Les gérants ont contesté les comptes à la suite de la rupture de leur contrat (pièces 5, 6 et 7 intimés), la signature apposée par eux sur les comptes d’inventaires n’attestant que du fait qu’ils y ont participé à l’inventaire , ceci ne leur ôtant pas la possibilité de contester les chiffres ultérieurement.

Il est établi qu’au démarrage de l’activité des consorts Y / B , dans l’attente de l’attribution par la société Casino de leur carte commerçant, les paiements par Carte Bleue ont été faits par l’intermédiaire de la carte commerçant TPE d’un autre magasin, en l’espèce celui du Château d’Olonne (pièce 9 intimés) et ce durant les mois de novembre, décembre 2012 et janvier 2013. Il n’est pas sérieusement contesté par la SAS Casino que ceci a été fait à l’initiative du manager assurant le suivi de la gestion du magasin d’Aizenay.

Si des remboursements ont été faits par le magasin du Château d’Olonne , il est impossible au vu des pièces produites (pièce 154 appelant) de savoir si les reversements effectués correspondent à toutes les ventes réalisées par le magasin d’Aizenay sur la période considérée et enregistrées sur le TPE CB du magasin du Château d’Olonne.

Or la totalité des décomptes et inventaires produits par la société Casino a été basée sur l’inventaire contradictoire de prise de possession de la supérette le 4 novembre 2011, faisant ressortir un stock réel de marchandises de 86.004.83 € et un stock réel d’emballages de 894.81 € (pièce 3 appelant) , et sur les inventaires postérieurs (ci-dessus mentionnés), inscrits sur le compte de dépôt général des gérants. Ces décomptes ont repris chaque mois les chiffres résultant de l’inventaire initial et ceux établis notamment en novembre et décembre 2012 et janvier 2013 alors que pour au moins ces trois premiers mois, les paiements par carte bleue étaient comptabilisés non sur le magasin d’Aizenay co-géré par les consorts Y / B mais sur le compte de dépôt général des gérants du magasin du Château d’Olonne.

Il s’ensuit que depuis le départ les décomptes n’ont pas été établis sur des bases certaines et fiables, puisque les ventes des consorts Y / B ont été pour au moins ces trois mois créditées sur le compte d’un autre magasin mais mises au débit de leur compte général.

Il appartenait à la société Casino d’assurer aux co-gérants en vertu notamment de l’article 25 des accords collectifs, les moyens nécessaires à l’exécution de leur mandat et à leur exploitation, à cet égard les moyens de paiements et notamment l’ouverture individualisée du terminal de paiement CB était un préalable au démarrage de la gérance. L’utilisation de la carte TPE CB d’un autre magasin sur une période d’environ trois mois ainsi qu’en atteste le gérant du magasin du Château d’Olonne, a été un facteur déterminant qui a faussé les comptes.

La charge de la preuve du solde débiteur du compte général de dépôt incombe à la société Casino, malgré les nombreuses pièces versées aux débats, elle ne rapporte pas la preuve du montant exact des sommes qui pourraient être dues, dans la mesure où les décomptes valablement contestés par les intimés, étant erronés (novembre , décembre 2012, janvier 2013), à défaut de preuve de leur régularisation, ils ne peuvent être retenus de sorte que le décompte final du compte général de dépôt s’en trouve affecté et par voie de conséquence dénué de force probante.

Il sera relevé en outre que les conditions particulières du démarrage de l’activité des consorts Y / B, ajoutées à leur inexpérience totale, devait conduire la société Casino à assurer leur formation préalable de façon particulièrement vigilante.

A cet égard, l’article 3, B, b des accords collectifs impose après la signature du contrat une assistance commerciale spéciale durant le premier mois de gestion, devant se poursuivre jusqu’au premier arrêté de compte et donner lieu à un rapport d’évaluation adressée au gérant. Il n’est pas rapporté la preuve d’une telle assistance d’autant plus nécessaire s’agissant de gérants novices et compte tenu de la complexité du maniement du logiciel GOLD assurant tant la gestion des stocks, la fixation des prix que la comptabilité.

Il sera remarqué que le déficit très important constaté sur le premier mois d’exercice résultant du premier inventaire , – 18.710,35 €, aurait dû alerter la société Casino sur des anomalies de comptes et/ou des carences de gestion.

Pour le surplus la cour se réfère aux motifs des premiers juges qu’elle adopte pour confirmer le jugement entrepris ayant débouté la société Casino de ses demandes formées à l’encontre des consorts Y / B.

Il sera fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au profit de ces derniers auxquels sera allouée la somme de 3.000 € de ce chef.

La société Casino qui succombe en son appel sera en outre condamnée à en supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 mai 2016 par le tribunal de commerce de La Rochelle

Y ajoutant

— Condamne la SAS Distribution Casino France à payer à M. C B et à Mme Z Y, ensembles, la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamne la SAS Distribution Casino France à supporter les dépens d’appel

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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