Cour d'appel de Poitiers, 2ème chambre, 23 octobre 2018, n° 17/03650

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, 2e ch., 23 oct. 2018, n° 17/03650
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 17/03650
Sur renvoi de : Cour de cassation, 10 octobre 2017
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°670

N° RG 17/03650

CC/KP

SA BANQUE CIC OUEST

C/

A

Association AIDE SOCIALE A L’ENFANCE DE LA HAUTE-VIENNE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2e Chambre Civile

ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2018

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/03650

Suivant arrêt rendu le 11 octobre 2017 par la Cour de Cassation, cassant et annulant l’arrêt rendu le 8 juillet 2015 par la Cour d’appel de LIMOGES, appel d’un jugement rendu le 11 septembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de LIMOGES.

DEMANDERESSE SUR RENVOI APRES CASSATION:

SA BANQUE CIC OUEST, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

2 Avenue Jean-Claude Bonduelle BP 84001

[…]

Ayant pour avocat postulant Me Frédéric MADY de la SCP MADY GILLET BRIAND, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Eric DAURIAC, avocat au barreau de LIMOGES.

DEFENDERESSE SUR RENVOI APRES CASSATION :

Madame C A épouse X

née le […] à […]

[…]

[…]

AIDE SOCIALE A L’ENFANCE DE LA HAUTE-VIENNE

[…]

[…]

Ayant pour avocat plaidant Me Elise FARINE, avocat au barreau de POITIERS.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 Septembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Béatrice SALLABERRY, Présidente de chambre

Monsieur Claude PASCOT, Conseiller

Madame Carole CAILLARD, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

—  PAR DEFAUT

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Madame Béatrice SALLABERRY, Présidente de chambre et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

M. E Y, père de l’enfant Z Y né le […], est décédé le […] et au titre de sa succession Mme C A veuve Y, mère de Z, agissant en sa qualité d’administratrice légale sous contrôle judiciaire, a placé le 22 mai 2006 la somme de 20.000 € sur un compte courant ouvert au nom de son fils à la Banque Crédit industriel et commercial (ci-après le CIC).

Par jugement en date du 11 janvier 2011, une tutelle aux biens a été ouverte pour l’enfant Z Y et l’Aide sociale à l’enfance a été désignée en qualité de tuteur aux biens.

Entre le 3 avril 2007 et le 23 février 2011, Mme C A a retiré par prélèvements ou virements une somme de 14.151,04 € depuis le compte de son fils ouvert au CIC.

Par ordonnance du 16 juin 2011, l’Aide Sociale à l’Enfance, en qualité de tuteur aux biens, a été autorisée à ester en justice pour engager la responsabilité du CIC et celle de Mme C A, mère du mineur.

Par acte d’huissier du 8 février 2012, l’Aide Sociale à l’Enfance de la Haute-Vienne, agissant en qualité de tuteur aux biens du mineur Z Y a fait assigner le CIC devant le Tribunal

d’instance de Limoges aux fins de la voir condamner au remboursement des sommes prélevées soutenant que la Banque avait commis une faute en remettant les fonds à la mère du mineur sans s’assurer de l’autorisation préalable que le Juge des Tutelles aurait dû donner en vertu des dispositions de l’article 389-2 du code civil.

Par jugement du 6 mars 2013, le Tribunal d’instance s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal de Grande Instance de Limoges auquel le dossier a été transmis. Le CIC a appelé en cause Mme C A remariée X (ci-après Mme A) aux fins d’être garantie par cette dernière en cas de condamnation.

Par jugement du 11 septembre 2014, le tribunal de grande instance de Limoges a statué comme suit :

— Dit que la société Banque CIC Ouest a commis une faute qui a favorisé le détournement par Mme A des fonds détenus sur le compte de son fils Z Y ;

— Condamne la société Banque CIC Ouest à payer à l’Aide Sociale à l’Enfance de la Haute-Vienne, agissant en qualité de tuteur aux biens de l’enfant mineur Z Y, la somme de 10.351,04 €, outre intérêts au taux légal à compter de la date de chaque retrait, correspondant aux sommes détournées sur son compte détenu à la Banque CIC Ouest ;

— Condamne Mme A épouse X à garantir la société Banque CIC Ouest de l’intégralité de la condamnation prononcée à son encontre ;

— Condamne Mme A épouse X à payer à la société Banque CIC Ouest, la somme de 3.800 €, outre intérêts au taux légal, correspondant aux sommes détournées et déjà remboursées par la Banque CIC Ouest ;

— Déboute la société Banque CIC Ouest de sa demande d’indemnité présentée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;

— Condamne Mme A épouse X aux entiers dépens qui seront recouvrés comme en matière d"aide juridictionnelle.

Le tribunal a retenu que les dispositions relatives aux pouvoirs de l’administrateur légal sous contrôle judiciaire obligeaient le banquier à exercer un contrôle sur les comptes ouverts par l’administrateur légal sous contrôle judiciaire au nom d’un mineur, puisque l’administrateur n’est autorisé à effectuer seul que les actes d’administration. Il a estimé que les retraits litigieux ayant conduit à vider le compte de la quasi totalité des fonds déposés, alors que le CIC ne pouvait ignorer la mesure d’administration légale sous contrôle judiciaire, sa responsabilité était engagée.

Par arrêt du 8 juillet 2015, la cour d’appel de Limoges, sur appel interjeté par le CIC, a statué comme suit :

Confirme le jugement rendu le 11 septembre 2014 par le tribunal de grande instance de Limoges, sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation du CIC et de la garantie subséquente de Mme A épouse X ;

Statuant à nouveau sur ces points,

Condamne le CIC à payer à l’Aide sociale à l’ enfance du département de la Haute-Vienne, prise en sa qualité de tuteur aux biens du mineur Marias Y, la somme de 4.200 € outre intérêts au taux légal à compter de chacun des détournements effectués par Mme A, épouse X, à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice subi par ce mineur ;

Condamne Mme A, épouse X, à garantir la SA Crédit industriel et commercial Ouest de cette condamnation ;

Condamne Mme A, épouse X, aux dépens d’appel ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, déboute la SA Crédit industriel et commercial Ouest de sa demande de ce chef.

La cour a estimé que la faute du CIC n’était pas caractérisée pour les trois premiers virements effectués les 3 avril 2007, 5 août 2009 et 26 novembre 2010 mais devait être retenue, s’agissant des quatre retraits effectués entre le 27 janvier 2011 et le 3 février 2011 pour un total de 4.200€.

Le CIC a formé un pourvoi en cassation.

Par arrêt du 11 octobre 2017, la Cour de cassation a :

Cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la cour d’appel de Limoges,

Remis la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, les a renvoyées devant la cour d’appel de Poitiers ;

Condamné Mme A aux dépens ;

Rejeté les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

La Cour de cassation a rendu sa décision au visa des articles 389-6 et 389-7 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2015-1288 du 15 octobre 2015, ensemble l’article 499 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 et a retenu qu’il résultait de ces textes, que l’administrateur légal, même placé sous contrôle judiciaire, a le pouvoir de faire seul les actes d’administration ; qu’il peut, à ce titre, procéder à la réception des capitaux échus au mineur et les retirer du compte de dépôt sur lequel il les a versés et que la banque n’est pas garante de l’emploi des capitaux. Elle en a déduit qu’en retenant que les trois retraits et le prélèvement effectués entre le 27 janvier 2011 et le 3 février 2011 pour un total de 4.200€ auraient dû par leur répétition, leur importance et la période resserrée d’une semaine sur laquelle ils ont eu lieu, attirer l’attention de la banque et entraîner une vigilance particulière de sa part, s’agissant d’un compte ouvert au nom d’un mineur soumis à une administration légale sous contrôle judiciaire, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

La banque CIC Ouest a saisi la cour d’appel de Poitiers par déclaration du 9 novembre 2017 et demande à la cour d’appel de Poitiers par dernières conclusions du 24 août 2018, au visa des articles 389-6, 389-7 et 488 du Code Civil, 510 et suivants du Code Civil, de :

Infirmer purement et simplement le jugement dont appel,

Statuant à nouveau,

Mettre purement et simplement hors de cause la Banque CIC Ouest.

Condamner in solidum Mme A épouse X et l’ASE 87 au versement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile au bénéfice de la Banque CIC Ouest ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Elle fait valoir qu’ainsi qu’il ressort de la motivation de la Cour de cassation, les actes de retrait effectués par le représentant légal ne sont pas des actes de disposition mais des actes d’administration

que Mme A pouvait accomplir seule ; que les retraits litigieux ont été effectués sur une période totale de quatre années pour des montants relativement modestes à chaque retrait ; qu’elle n’a eu connaissance du jugement du 11 janvier 2011 ordonnant la tutelle aux biens que par un fax arrivé le 4 février 2011 et a remboursé l’intégralité des sommes retirées à la suite de cette information pour un montant de 3.800€. Elle ajoute que la banque n’est pas garante de l’emploi des capitaux dans le régime de l’administration légale sous contrôle judiciaire, solution que la cour de cassation avait déjà affirmée en 1989.

S’agissant du moyen tiré du devoir d’alerte qui incomberait au CIC, elle invoque l’irrecevabilité de cette prétention soulevée pour la première fois en appel et subsidiairement, soutient que l’article 387-3 alinéa 2 du Code civil ne peut s’appliquer, le retrait de fonds étant un acte neutre en termes patrimoniaux car il ne peut être présumé de son caractère préjudiciable ou non pour le mineur. Elle ajoute que la Cour de cassation refuse que soit imposée à la banque une obligation de se renseigner sur la destination des fonds retirés, n’étant pas garante de leur emploi, et que l’établissement de crédit est soumis à une obligation de non-ingérence.

Elle indique enfin qu’il appartenait à Mme A de déposer annuellement ses comptes, ce qui aurait permis au juge des tutelles de vérifier l’emploi des fonds du mineur et qu’elle ne peut être condamnée à rembourser des prélèvements effectués avant le 4 février 2011.

L’Aide sociale à l’Enfance de la Haute Vienne, Département de la Haute Vienne, par dernières conclusions du 13 août 2018, demande à la cour, au visa des articles 385, 387-3 du Code civil et 564 du Code de procédure civile, de :

Déclarer recevable l’appel interjeté par le CIC.

Le déclarer particulièrement mal fondé.

Débouter le CIC de l’ensemble de ses demandes.

Vu les présentes écritures et leurs motivations en fait et en droit :

Confirmer en tout et pour tout le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Limoges en date du 11 septembre 2014.

Statuer ce que de droit sur les dépens.

Elle soutient que dans la mesure où les retraits effectués par Mme A ont consisté à vider le patrimoine de Z dans sa quasi totalité, il s’agit d’actes de disposition nécessitant l’autorisation du juge des tutelles. Elle indique que si le banquer est tenu d’un devoir de non-ingérance dans l’emploi des capitaux, il reste débiteur d’un devoir de vigilance lui imposant d’être attentif aux anomalies et irrégularités manifestes et cite un arrêt du 22 novembre 2011 dans lequel la chambre commerciale de la Cour de cassation a admis le manquement de la banque à son obligation de surveillance et de vigilance, en raison des anomalies de fonctionnement du compte. Elle en déduit qu’avant même d’avoir été informé de la mesure de tutelle aux biens, le CIC avait une obligation de vigilance renforcée s’agissant du compte d’un mineur, et qu’a fortiori sa responsabilité est engagée pour les retraits effectués après le 27 janvier 2011 date du courrier l’ayant informé de la mesure. Elle ajoute que ces retraits étaient fortement préjudiciables au patrimoine de Z et auraient dû déclencher de la part du CIC son devoir d’alerte en application de l’article 387-3 du Code civil.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.

Mme A, à laquelle la déclaration de saisine du 9 novembre 2017 auprès du greffe de la cour d’appel de Poitiers et l’avis de fixation ont été signifiés par acte du 29 novembre 2017 délivré par dépôt en étude, n’a pas constitué avocat.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 29 août 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au terme de l’article 389-6 ancien du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2015-1288 du 15 octobre 2015 : 'Dans l’administration légale sous contrôle judiciaire, l’administrateur doit se pourvoir d’une autorisation du juge des tutelles pour accomplir les actes qu’un tuteur ne pourrait faire qu’avec une autorisation. Il peut faire seul les autres actes'.

Selon l’article 389-7 ancien du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2015-1288 du 15 octobre 2015 : 'Les règles de la tutelle sont, pour le surplus, applicables à l’administration légale, avec les modalités résultant de ce que celle-ci ne comporte ni conseil de famille ni subrogé tuteur et sans préjudicier aux droits que les père et mère tiennent du titre De l’autorité parentale, notamment quant à l’éducation de l’enfant et à l’usufruit de ses biens'.

Au terme de l’article 499 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007,: 'les tiers peuvent informer le juge des actes ou omissions du tuteur qui leur paraissent de nature à porter préjudice aux intérêts de la personne protégée. Ils ne sont pas garants de l’emploi des capitaux. Toutefois, si à l’occasion de cet emploi, ils ont connaissance d’actes ou omission qui compromettent manifestement l’intérêt de la personne protégée, ils en avisent le juge. (…)'.

En application de ces dispositions et ainsi qu’il ressort de l’arrêt de la Cour de cassation du 11 octobre 2017, l’administrateur légal, même placé sous contrôle judiciaire, a le pouvoir de faire seul les actes d’administration et peut, à ce titre, procéder à la réception des capitaux échus au mineur et les retirer du compte de dépôt sur lequel il les a versés. En outre, la banque n’est pas garante de l’emploi des capitaux.

En l’espèce, il n’est pas contesté que Mme A mère de Z Y a effectué des prélèvements ou des virements sur son propre compte, depuis le compte ouvert au nom de son fils, à hauteur de 151,04€ le 3 avril 2007, 1.000€ le 5 août 2009, 5.000€ le 26 novembre 2010, 600€ le 27 janvier 2011, 600€ et 2.000€ le 1er février 2011, 1.000€ le 3 février 2011, 800€ le 11 février 2011, 1.000€ et 2.000€ le 23 février 2011, soit un total de 14.151,07€.

Il est aussi constant que le CIC a remboursé à l’Aide Sociale à l’Enfance, ès-qualités de tuteur aux biens, les 3 dernières opérations effectuées après le 4 février 2011, date à laquelle le jugement de tutelle aux biens lui a été faxé, ainsi qu’il ressort de sa pièce 2.

S’agissant des prélèvements et virements effectués par Mme A mère du mineur, en sa qualité d’administratrice légale sous contrôle judiciaire, elle pouvait les effectuer seule en application des dispositions susvisées, s’agissant d’actes d’administration. N’étant pas garante de l’emploi des capitaux, la banque n’avait pas à s’interroger spécifiquement sur la destination des sommes retirées ou virées à la demande de la mère du mineur, et sur leur usage par cette dernière.

L’Aide Sociale à l’Enfance invoque devant la cour le manquement de la banque à son devoir d’alerte résultant des dispositions de l’article 387-3 du Code civil au terme desquelles :

'A l’occasion du contrôle des actes mentionnés à l’article 387-1, le juge peut s’il l’estime indispensable à la sauvegarde des intérêts du mineur, en considération de la composition ou de la valeur du patrimoine, de l’âge du mineur ou de sa situation familiale, décider qu’un acte ou une série d’actes de disposition seront soumis à son autorisation préalable.

Le juge est saisi aux mêmes fins par les parents ou l’un d’eux, le ministère public, ou tout tiers ayant connaissance d’actes ou omissions qui compromettent manifestement et substantiellement les intérêts patrimoniaux du mineur ou d’une situation de nature à porter une préjudice grave à ceux-ci.

Les tiers qui ont informé le juge de la situation ne sont pas garants de la gestion des biens du mineur faite par l’administrateur légal'.

Contrairement à ce que soutient le CIC, il s’agit non d’une demande nouvelle mais d’un moyen nouveau, invoqué à l’appui des mêmes prétentions que celles formées par l’Aide Sociale à l’Enfance devant le tribunal, qui est recevable en application de l’article 563 du Code de procédure civile.

Néanmoins, ces dispositions sont issues de l’ordonnance n° 2015-1288 du 15 octobre 2015 et, conformément à l’article 17 de l’ordonnance, sont entrées en vigueur le 1er janvier 2016. Elles n’existaient donc pas au moment des faits litigieux et de la délivrance de l’assignation et ne peuvent recevoir application.

L’article 499 du Code civil applicable en l’espèce, en vertu de l’article 389-7 ancien du Code civil, imposait toutefois aux tiers, avant même la création de l’article 387-3 nouveau du Code civil, une sorte de devoir d’alerte puisqu’ils devaient aviser le juge si à l’occasion de l’emploi des capitaux dont ils ne sont pas garants, ils avaient connaissance d’actes ou omissions qui compromettent manifestement l’intérêt de la personne protégée.

Néanmoins, les opérations litigieuses se sont étalées sur plusieurs années et ont consisté pour la majorité d’entre elle en des retraits, d’un montant compris entre 600€ et 1.000€, outre trois virements sur le compte de Mme A à hauteur de 5.000€ le 26 novembre 2010, 2.000€ le 1er février 2011 et 2.000€ le 23 février 2011 (ce dernier virement ayant été remboursé par le CIC).

Mme A étant chargé de l’entretien de son fils, ces opérations, même pour celles qui ont été effectuées en l’espace d’une semaine pour un total de 4.200€, ne pouvaient être par avance considérées comme préjudiciables pour le mineur, et ne pouvaient l’être qu’en fonction de la connaissance de leur usage, si les sommes n’étaient pas utilisées dans l’intérêt du mineur, élément que la banque n’avait pas à rechercher en l’espèce et qui n’est d’ailleurs pas établi précisément. La cour observe au surplus que le solde du compte ouvert au nom du mineur, d’un montant initial de 20.000€ en 2006 puis de 1.116,40€ au 26 novembre 2010, restait créditeur à hauteur de 9.916,40€ après le retrait effectué le 3 février 2011.

Les opérations susvisées ne constituaient donc pas des actes ou omission compromettant manifestement l’intérêt de la personne protégée au sens de l’article 499 du Code civil obligeant la banque à alerter le juge.

Pour les mêmes raisons, la banque n’a pas manqué à son devoir général de vigilance étant rappelé qu’elle est aussi tenu d’un devoir de non ingérence dans les affaires de ses clients.

L’Aide sociale à l’enfance ne démontrant pas que le CIC a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, le jugement doit être infirmé de ce chef et en ce qu’il l’a condamné à payer à l’Aide sociale à l’enfance ès-qualités la somme de 10.351,04€.

Le CIC étant hors de cause, son appel en garantie contre Mme A est sans objet. Le jugement sera confirmé dans le surplus de ses dispositions qui ne sont pas contestées.

Il convient de condamner Mme A aux dépens d’appel. L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

—  Infirme le jugement déféré en ce qu’il a :

* dit que la société Banque CIC Ouest a commis une faute qui a favorisé le détournement par Mme A des fonds détenus sur le compte de son fils Z Y,

* condamné la société Banque CIC Ouest à payer à l’Aide Sociale à l’Enfance de la Haute-Vienne, agissant en qualité de tuteur aux biens de l’enfant mineur Z Y, la somme de 10.351,04 €, outre intérêts au taux légal à compter de la date de chaque retrait, correspondant aux sommes détournées sur son compte détenu à la Banque CIC Ouest,

* condamné Mme C A épouse X à garantir la société Banque CIC Ouest de l’intégralité de la condamnation prononcée à son encontre ;

Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,

— Met hors de cause la Banque CIC Ouest ;

— Déboute l’Aide sociale à l’enfance de la haute Vienne-Département de la Haute Vienne de toutes ses demandes formées contre la Banque CIC Ouest ;

— Dit que l’appel en garantie formé par le CIC contre Mme C A épouse X est en conséquence sans objet ;

—  Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Y ajoutant,

— Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamne Mme C A épouse X aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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