Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 2 septembre 2020, n° 19/01046

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Me Elisabeth Graeve · consultation.avocat.fr · 8 avril 2021

Le barème « MACRON » issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017 est destiné à sécuriser les employeurs et à limiter, par un plafond lié à l'ancienneté du salarié et à la taille de l'entreprise, le montant des dommages et intérêts accordés par les juges en cas de licenciement jugé sans cause ou abusif. Ce barème MACRON fait encore polémique depuis son instauration, il y a un peu plus de 3 ans. Mesure phare de la réforme du droit du travail de 2017, il divise avocats, juges et universitaires. Le nouvel article L. 1235-3 L'ordonnance MACRON n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a mis en …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Reims, ch. soc., 2 sept. 2020, n° 19/01046
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 19/01046
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Reims, 4 avril 2019, N° F18/00278
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

Arrêt n°

du 2/09/2020

N° RG 19/01046

CRW/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 2 septembre 2020

APPELANT :

d’un jugement rendu le 5 avril 2019 par le Conseil de Prud’hommes de REIMS, section Industrie (n° F 18/00278)

Monsieur Y Z

51 rue de Saint-Etienne

[…]

Représenté par la SELARL LAQUILLE ASSOCIÉS, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

S.A.S.U. FICHET SECURITY SOLUTIONS FRANCE

anciennement dénommée GUNNEBO FRANCE

[…]

[…]

Représentée par la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD, avocats au barreau de REIMS et par la SELARL MONTECRISTO, avocats au barreau de PARIS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 3 juin 2020, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Christine ROBERT-WARNET, président de chambre, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 2 septembre 2020.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

Monsieur Olivier BECUWE, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Y Z a été embauché selon contrat à durée indéterminée à effet du 14 janvier 1980 par la société Fichet- Bauche, en qualité de monteur d’alarme.

Par l’effet d’avenants successifs, il a, dans le dernier état de la relation salariale, été confirmé dans ses fonctions de technicien de maintenance, positionné niveau IV, échelon 2, coefficient 270 de la convention collective des Industries Mécaniques et Connexes de la Région Parisienne.

Il percevait une rémunération brute mensuelle de 2 207,11 euros, calculée sur 13 mois, servie par la société Gunnebo France, dans le cadre des dispositions de l’article L.1224'1 du code du travail, après rachat de la société Fichet- Bauche

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 décembre 2017, la société Gunnebo France a convoqué Y Z à un entretien préalable à un éventuel licenciement, pour celui-ci se tenir le 3 janvier 2018.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 janvier 2018, la société Gunnebo France a notifié à Y Z son licenciement au motif de son insuffisance professionnelle.

Contestant notamment le bien-fondé du licenciement dont il a fait l’objet, Y Z a saisi, par requête enregistrée au greffe le 22 juin 2018, le conseil de prud’hommes de Reims prétendant, aux termes de ses dernières conclusions, à la condamnation, sous exécution provisoire, de son employeur au paiement des sommes suivantes :

—  1 650 euros au titre de la médaille d’honneur du travail,

—  2 571,62 euros à titre de rappel de majoration sur heures supplémentaires,

—  257,16 euros à titre de congés payés afférents,

—  4 739,08 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut d’information et de notification des droits à repos obligatoires,

—  5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des règles relatives aux durées maximales de travail et de droit à repos quotidien,

—  113'468,04 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

—  2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sollicitait également la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux et la remise des bulletins de salaire et de l’attestation Pôle Emploi, l’ensemble sous astreinte de 60 euros par jour de retard et par document à compter de la notification à l’employeur de la décision à intervenir.

Par jugement du 5 avril 2019, le conseil de prud’hommes de Reims a, sous exécution provisoire :

— condamné la SASU Fichet Security Solutions France, anciennement dénommée Gunnebo France à payer à Y Z :

. 1 430 euros au titre de la prime de médaille d’honneur du travail,

. 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté Y Z en l’ensemble de ses demandes et son employeur en sa demande reconventionnelle.

Y Z a interjeté appel de cette décision le 30 avril 2019.

Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 29 mai 2019 auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé des moyens et prétentions de la partie appelante par lesquelles Y Z, continuant de prétendre au bien-fondé des demandes dont il a été débouté, faisant notamment grief à son employeur d’avoir invoqué au soutien de l’insuffisance professionnelle qu’il allègue des griefs de nature disciplinaire, alors qu’il ne lui a assuré aucune formation lui permettant son adaptabilité à l’emploi qui lui était confié et n’a pas respecté sa qualité de senior, renouvelle des chefs qu’il critique, les demandes en paiement qu’il avait initialement formées, pour les sommes alors sollicitées, en faisant valoir que les plafonds d’indemnisation énoncés à l’article L.1235'3 du code du travail ne sont pas applicables au regard de leur inconventionnalité.

Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 28 août 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample informé des moyens et prétentions de la partie intimée par lesquelles la SASU Fichet Security Solutions France, anciennement dénommée Gunnebo France prétend, par infirmation partielle du jugement, au débouté de Y Z en l’ensemble de ses demandes, mais à sa condamnation paiement d’une indemnité de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur ce :

' Sur les demandes afférentes à l’exécution du contrat de travail

* Sur la demande en paiement de majoration pour heures supplémentaires

Pour prétendre au paiement d’une majoration pour heures supplémentaires, Y Z rappelle qu’en sa qualité de salarié itinérant, les dispositions dérogatoires de l’article L.3121'4 du code du travail ne lui sont pas applicables. En revanche, se prévalant de la directive n° 2003/88/CE du Parlement Européen et du Conseil du 4 novembre 2003, de son application par la Cour de Justice de l’Union Européenne, il soutient être bien-fondé à considérer que le temps qu’il a passé en trajet pour se rendre de son domicile chez un client correspond à du temps de travail effectif, devant être majoré comme tel, alors que ce temps de trajet, dont il a été rémunéré, n’a pas été majoré.

Au contraire, se fondant sur l’accord de substitution sur l’aménagement du temps de travail conclu dans l’entreprise le 19 juin 2009, déterminant pour la catégorie dont relève Y Z une moyenne hebdomadaire de 38,50 heures de travail, en contrepartie de laquelle, pour la partie excédant la durée légale, le salarié bénéficie de 23 jours de RTT par an, l’employeur soutient que son salarié ne justifie pas qu’il a pris en compte, pour le calcul de sa demande, ces règles applicables.

Il se prévaut également d’une décision rendue par la Cour de cassation le 30 mai 2018 pour conclure que les dispositions de l’article L3121'4 du code du travail sont applicables au salarié itinérant.

La directive n° 2003/88/CE du Parlement Européen et du Conseil du 4 novembre 2003 a pour objet de fixer des prescriptions minimales destinées à améliorer les conditions de vie et de travail des

travailleurs par un rapprochement des réglementations nationales concernant notamment la durée du temps de travail.

Il résulte de son interprétation par la Cour de Justice de l’Union Européenne, dans son arrêt du 10 septembre 2015, qu’elle vise à garantir une meilleure protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, en faisant bénéficier ceux-ci de périodes minimales de repos ' notamment journalier et hebdomadaire – ainsi que de périodes de pause adéquates et en prévoyant un plafond de 48 heures pour la durée moyenne de la semaine de travail. La notion de 'temps de travail', au sens de l’article 2, point 1, de la directive 2003/88, se définit comme toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l’employeur et dans l’exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou aux pratiques nationales. Cette notion doit être appréhendée par opposition à la période de repos, chacune d’elles étant exclusive de l’autre sans que la directive ne prévoit pas de catégorie intermédiaire entre les périodes de travail et celles de repos.

Dès lors, si les temps de trajet consacrés par les salariés itinérants aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par leur employeur constituent du temps de travail au sens du droit européen pour apprécier le respect des durées maximales de travail quotidien et hebdomadaire, des durées minimales de repos et des temps de pause, aucune disposition n’impose qu’ils doivent être rémunérés comme du temps de travail effectif et entrer en compte dans le périmètre des heures supplémentaires.

Ainsi, l’article L.3121-4 du code du travail conserve sa portée ' Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif'.

Dans ces conditions, Y Z ne peut prétendre que le temps passé pour se rendre depuis son domicile chez son premier client puis, en fin de journée, du dernier client à son domicile constituait des heures supplémentaires.

Y Z doit donc être débouté de ses demandes de rappel de majorations sur heures supplémentaires et congés payés afférents.

* Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour défaut d’information et de notification des droits à repos obligatoires

Y Z fonde cette demande sur les dispositions de l’article L3121'11 du code du travail.

L’employeur lui oppose que les temps de déplacement n’étant pas décomptés comme du temps de travail effectif ou considérés comme des heures supplémentaires, aucun manquement ne peut lui être imputé, qui ouvrirait droit à son salarié au bénéfice de dommages-intérêts. Il conclut, en conséquence, au débouté de Y Z en ce chef de demande.

Y Z intègre dans le contingent d’heures supplémentaires, le temps de trajet ci-avant revendiqué à titre d’heures supplémentaires. Dans la mesure où ce temps n’est pas qualifié de temps de travail effectif, il ne peut être pris en compte dans ce contingent. Après déduction de ce temps de trajet, il apparaît que le contingent d’heures supplémentaires n’a pas été dépassé.

Y Z est, par conséquent, mal fondé à solliciter le paiement d’une indemnité pour repos compensateurs non pris.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

* Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour violation des durées maximales de travail et le non-respect des droits à repos

Sur la base de ses relevés d’heures (pièces 28 à 39) pour l’année 2017, parce qu’il soutient que les dépassements de la durée maximale de travail quotidienne étaient réguliers, sans tenir compte des temps de déplacement, le privant ipso facto du bénéfice de son droit à repos quotidien, Y Z prétend à la condamnation de son employeur au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Continuant de soutenir que les temps de déplacement ne pouvaient être décomptés comme du temps de travail effectif, et donc ne devaient pas être pris en compte pour le calcul des durées quotidiennes et maximales de travail, l’employeur conclut au débouté de son salarié en ce chef de demande.

L’article L.3121-18 du code du travail fixe la durée maximale quotidienne de travail effectif à dix heures par jour.

Y Z justifie, pour l’année 2017, du dépassement de la durée journalière du temps de travail, hors temps de déplacement, à quatre reprises, pour une durée variant de 15 minutes à 1 heure.

L’article L.3131- 1 du code du travail fixe la durée minimale du repos quotidien à onze heures consécutives.

Les pièces versées aux débats établissent que le salarié a toujours bénéficié d’un repos supérieur à 11 heures à l’exception de trois jours en 2017, (entre le 3 et 4 janvier, le 5 et 6 avril et entre le 12 et 13 juillet) où son repos était compris entre 10 heures et 11 heures.

Y Z prétend à tort à un repos de 9 h 15 entre le 5 et 6 avril 2017 alors que celui-ci était de 10 h 15 (20 h 45-7 h).

Compte tenu du nombre de manquements au respect de la durée maximale journalière de travail, au temps de repos quotidiens, pour les durées ci-dessus relevées, le préjudice subi par le salarié sera indemnisé par la condamnation de son employeur au paiement de la somme de 200 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

* Sur la prime afférente à la médaille d’honneur du travail

N’ayant pas interjeté appel de cette disposition du jugement ayant fait droit à sa demande en paiement, Y Z n’a développé aucune argumentation quant au bien-fondé de cette demande dans le corps des conclusions qu’il a déposées à hauteur d’appel, pas même en réponse à l’appel incident formé de ce chef par la SASU Fichet Security Solutions France, anciennement dénommée Gunnebo France.

Pour s’opposer à la condamnation prononcée à son encontre, l’employeur fait valoir que Y Z ne justifie pas avoir reçu de la préfecture la notification de l’obtention des médailles du travail sollicité au cours de la relation contractuelle, sauf un courrier de la préfecture du 21 juin 2018, postérieur à son départ définitif de l’entreprise, effectif depuis le 12 mars 2018.

L’accord d’entreprise prévoit en son article 4 que : ' A chaque médaille du travail, il sera octroyé aux récipiendaires, dès la validation du dossier par l’Administration, une prime de 22 euros par année d’ancienneté au sein du groupe Gunnebo'.

En l’espèce, la validation du dossier par l’administration date du 21 juin 2018. A cette date, le contrat de travail de Y Z était rompu.

Dans ces conditions, Y Z ne peut prétendre au versement de cette prime.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

' Sur les demandes afférentes à la rupture du contrat

* Sur le bien-fondé du licenciement

Les termes de la lettre de licenciement fixent le cadre du litige soumis à l’appréciation des juges du fond.

Toutefois, l’insuffisance professionnelle invoquée dans la lettre de licenciement par l’employeur, auquel le juge ne peut substituer son appréciation, s’agissant notamment de l’appréciation des aptitudes professionnelles et de l’adaptation à l’emploi du salarié, bien qu’exclusive de toute notion de

faute, constitue une cause légitime de licenciement dès lors qu’elle repose sur des éléments concrets, vérifiables, perturbant la bonne marche de l’entreprise ou le fonctionnement du service.

En l’espèce, la lettre de licenciement adressée à Y Z le 11 janvier 2018 est ainsi libellée :

«' vous avez été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 14 janvier 1980 en qualité de Monteur. A ce jour, et suite à un avenant à votre contrat de travail dont la date d’effet était le 1er janvier 1990, vous exercez les fonctions de Technicien Maintenance.

À ce titre, vous devez notamment :

- Réaliser des visites de maintenance (curatives ou préventives)

- Mettre en service des installations

- Respecter les engagements clients,

- Être le représentant de Gunnebo chez le client, avoir un comportement en lien avec les valeurs de l’entreprise

- Respecter les délais, les temps d’exécution des interventions'

Or, nous constatons que vous êtes en complet décalage en termes de résultats, de comportement et d’implication avec les exigences liées à votre poste.

A ce jour, votre comportement s’avère être préjudiciable et met en danger la région. Nous sommes une société de service et vous n’exercez manifestement pas votre emploi de manière conforme à nos attentes et nous déplorons à nouveau-comme cela a malheureusement, déjà, été le cas-d’importants manquements, répétés, dans l’exercice de votre travail ainsi que des plaintes de nos clients qui ne souhaitent plus vous voir intervenir sur leurs sites à savoir :

- Le Crédit Agricole de Bar sur Seine : vous avez débuté une intervention le mercredi 8 novembre 2017 à 9h45 sans la finaliser. De ce fait, un technicien a dû intervenir à cette fin (le 16 novembre 2017) suite à votre manquement dans les travaux de mise à jour, non réussie, du logiciel et de la non communication pour nous en informer.

- La société Champagne Bollinger basée à Ay Champagne : vous avez débuté une intervention le 22 novembre 2017 à 9h30 puis indiqué que vous l’aviez terminée le 24 novembre 2017, ce qui était faux puisqu’en réalité une nouvelle intervention (le 5 décembre 2017) a dû être planifiée, avec un autre technicien afin de la finaliser.

- Le Crédit Agricole de Sens : vous débutez une intervention le 27 novembre 2017 à 8h15, puis finalement vous quittez le site en laissant une clef bloquée sur la porte forte mais en signalant « terminé » sur le bon. Un technicien physique est dans l’obligation d’intervenir par une nouvelle intervention d’une durée de 3 heures, le 28 novembre, pour remédier à la situation.

- La trésorerie de Chablis : vous êtes intervenu pour une maintenance sur site le 7 décembre 2017. A l’issue de votre intervention un dysfonctionnement de l’alarme est apparu, rendant le système inexploitable, ainsi que nous l’indique le Chef de Service Mr X dans son mail du 8 décembre 2017.

- La société Delpharm basée à Reims ne souhaite plus vous voir intervenir sur leur site suite à vos interventions des 14 et 19 octobre 2017.

- La préfecture de Meuse à Bar-le-Duc ne souhaite plus vous voir intervenir sur leur site suite à vos interventions des 19 et 27 octobre et 9 novembre 2017.

Nos clients vous reprochent votre travail insatisfaisant mais aussi et tout autant votre comportement, soit un réel manque d’écoute et de respect.

D’autre part, vous faites partie d’une équipe de 28 techniciens. Votre comportement affecte toute cette équipe et désorganise le service, malgré les mesures déjà prises.

En raison des plaintes de nos clients et afin de vous permettre de mieux réaliser vos prestations, le nombre de vos interventions avait été réduit et est donc inférieur à la moyenne de vos collègues. De même, votre zone géographique d’intervention a dû être adaptée au détriment de vos collègues.

Nous vous signalons que pour les collègues qui interviennent à ce jour sur ce qui devrait être votre secteur privilégié, nous n’avons aucune remontée de plaintes des clients cités ci-dessus.

Nous regrettons aussi que ces faits se soient répétés alors qu’une mesure d’indulgence avait été appliquée à votre égard ; pour rappel :

le 29 septembre 2015 nous vous convoquions à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à une mise à pied, fixé le 7 octobre 2015.

Puis le 7 avril 2016 nous vous convoquions à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à un licenciement.

A l’issue de cet entretien, un courrier détaillé, en date du 29 avril 2016, vous avait été adressé vous notifiant une mise à pied mais en vous signalant d’autre part que nous n’étions pas allés jusqu’à un licenciement-alors que l’ensemble des éléments était constitué au regard des nombreux clients qui ne souhaitaient plus travailler avec vous-eu égard aux 36 années passées au sein de Gunnebo.

L’ensemble de ces éléments nous conduit dès lors, à notre regret, à vous notifier par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle.' »

S’agissant du premier grief, il est reproché à Y Z de ne pas avoir finalisé son intervention et de ne pas en avoir avisé son employeur.

Y Z explique avoir eu des difficultés de connexion au réseau internet l’empêchant de télécharger une mise à jour et conteste le fait que l’employeur n’aurait pas été informé.

Il est produit les bons d’intervention de Y Z des 8 et 10 novembre 2017 dont il ressort qu’une mise à jour informatique était requise.

Le bon d’intervention du 10 novembre 2017 indique la nécessité d’une mise à jour 'à télécharger avant réintervention'. A défaut d’élément complémentaire, un doute subsiste, qui doit profiter au salarié, quant aux raisons de l’absence de mise à jour et donc de l’absence de finalisation de l’intervention.

En outre, l’employeur ne peut valablement soutenir de ne pas avoir été informé que l’intervention n’était pas finie alors que le bon de livraison du 10 novembre 2017, qu’il produit, porte la mention 'à suivre’ au niveau du statut de l’intervention et qu’il est expressément indiqué la nécessité d’une 'réintervention'.

Ce grief sera, dans ces conditions, écarté.

S’agissant du deuxième grief, l’employeur produit les bons d’intervention de Y Z des 22, 23 et 24 novembre 2017 au sein de la société Champagne Bollinger. Si ces documents font état d’une intervention’terminée’ aucun élément ne permet de constater que tel n’était pas le cas ni qu’une nouvelle planification a été nécessaire. Le grief n’est donc pas vérifiable.

Le troisième reproche n’est pas davantage vérifiable. La SASU Fichet Security Solutions France verse aux débats le rapport d’intervention du 27 novembre 2017 qui atteste uniquement de l’intervention de Y Z au sein du crédit agricole de Sens. Aucun élément ne fait état d’une clé bloquée suite à sa prestation sur le site ni d’une nouvelle intervention par un autre technicien.

S’agissant du dysfonctionnement de l’alarme à la trésorerie de Chablis après l’intervention de Y Z, la SASU Fichet Security Solutions France produit un mail du chef de service de la

trésorerie qui atteste de cette difficulté. Toutefois, Y Z fait valoir qu’il ne pouvait prévoir le dysfonctionnement après son départ et que la lettre de licenciement ne précise pas la nature de la panne ni les contrôles qu’il aurait dû effectuer. La SASU Fichet Security Solutions France n’explique pas plus dans ses écritures en quoi cette anomalie serait due à l’insuffisance professionnelle du salarié. Dans ces conditions, un doute subsiste qui profite au salarié.

Au soutien des reproches concernant les prestations de Y Z sur le site de Delpharm, la SASU Fichet Security Solutions France se fonde sur des bons d’intervention d’autres salariés sur ce site. Or, ces pièces ne sont pas de nature à démontrer le souhait de la société Delpharm de ne plus voir intervenir Y Z. Il n’est produit aucun autre élément de sorte que le grief n’est pas vérifiable. En outre, il ressort des documents 'Fimo’ des 14 et 19 octobre 2017 et des états de temps produits par Y Z, qu’il n’est pas intervenu pour cette société à ces dates.

Concernant la préfecture de la Meuse qui souhaiterait également ne plus voir intervenir Y Z dans ses locaux suite à ses prestations des 19 et 27 octobre et du 9 novembre 2017, la SASU Fichet Security Solutions France n’y consacre aucun développement dans ses écritures et ne produit aucune pièce. Ce reproche n’est donc pas, non plus, vérifiable.

La SASU Fichet Security Solutions France reproche enfin à Y Z son comportement envers les clients et ses collègues. Elle produit en ce sens, d’une part, les comptes rendus des entretiens annuels de 2015 et 2016 dans lesquels il lui est reproché un manque d’écoute envers les clients ainsi qu’un manque de communication avec ses collègues et, d’autre part, des courriers de plaintes de clients datant de 2014 à 2016. Toutefois, ces éléments ont donné lieu à des sanctions disciplinaires. Or, il est de jurisprudence constante que l’insuffisance professionnelle ne présente pas un caractère fautif. Dès lors, est inopérante pour démontrer l’insuffisance professionnelle de son salarié, la référence faite par la SASU Fichet Security Solutions France à des sanctions disciplinaires antérieurement infligées à Y Z.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que l’insuffisance professionnelle reprochée à Y Z dans la gestion des tâches qui lui étaient dévolues ne s’appuie sur aucun élément concret ou vérifiable.

L’insuffisance professionnelle alléguée à l’encontre de Y Z n’étant pas caractérisée, le licenciement doit être considéré sans cause réelle et sérieuse et le jugement déféré infirmé de ce chef.

* Sur les conséquences du licenciement

Y Z demande à la cour d’écarter l’application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail qui prévoient un plafonnement de l’indemnisation du licenciement abusif, soutenant que le barème contenu dans ce texte est contraire aux conventions internationales et que l’examen de sa demande relève du seul pouvoir du juge.

De son côté, la SASU Fichet Security Solutions France soutient que les dispositions critiquées ont été jugées conformes aux principes posés par les textes internationaux, tant par le Conseil d’État que le Conseil Constitutionnel, et qu’elles ne portent pas atteinte à l’office du juge.

A – Sur les textes invoqués

Y Z invoque les textes suivants :

- Article 10 de la convention n° 158 de l’OIT.

'Si les organismes mentionnés à l’article 8 de la présente convention [un tribunal] arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.'

- Article 24 de la charte sociale européenne révisée.

' En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s’engagent à reconnaître :

b. le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée.'

B – Sur l’invocabilité des textes :

Il est constant que les dispositions de l’article 10 de la convention n° 158 de l’OIT bénéficient d’un effet direct permettant à Y Z de s’en prévaloir dans le litige prud’homal qui l’oppose à la SASU Fichet Security Solutions France qui l’employait.

En revanche, les parties s’opposent sur l’applicabilité directe de l’article 24 de la charte sociale.

L’exception d’inconventionnalité suppose, pour être mobilisée, que les textes conventionnels soient d’effet direct.

L’effet direct dit horizontal traduit l’applicabilité directe entre les particuliers de normes invocables, en tant que telles, par eux devant le juge national.

De telles normes ne doivent pas avoir pour objet exclusif de régir les relations entre Etats.

L’absence d’un tel effet direct ne se déduit pas de la seule circonstance que la stipulation désigne les Etats parties comme sujets de l’obligation qu’elle impose.

L’effet direct dit horizontal d’un texte international résulte de son contenu.

Et, plus précisément, le caractère suffisamment précis de l’engagement conventionnel défini par le texte, l’objet de cet engagement qui doit consister en la création d’un droit au profit d’un particulier et le fait que ce droit puisse être assuré sans nécessité de l’intervention d’une législation nationale d’application confèrent au texte un tel effet.

Il résulte de la lecture de l’article 24 de la charte sociale européenne, rédigé de façon très proche de l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT, qu’il bénéficie d’un tel effet direct permettant à Y Z de s’en prévaloir dans le présent litige.

C – Sur le contrôle de conventionnalité :

Il existe deux types de contrôle de conventionnalité d’une règle de droit interne au regard des normes européennes et internationales.

Le contrôle de conventionnalité de la règle de droit elle-même et celui de son application dans les circonstances de l’espèce.

Ces deux contrôles peuvent se juxtaposer.

Le contrôle de l’application peut impliquer d’écarter une règle interne si celle-ci affecte de manière disproportionnée, dans un litige, un droit conventionnel relatif même si cette règle ne porte pas, en elle-même, une atteinte disproportionnée à un droit fondamental garanti.

Ces contrôles ne requièrent pas du salarié qu’il justifie au préalable d’un préjudice de perte d’emploi supérieur au plafond d’indemnisation correspondant à son ancienneté ou qu’il démontre avoir subi un tel préjudice qui ne serait pas réparé de façon 'adéquate’ ou 'appropriée'.

a) Sur l’applicabilité au litige des textes conventionnels :

En l’espèce, les faits allégués par Y Z entrent dans le champ d’application des textes conventionnels précités dès lors qu’il se prévaut principalement du droit pour tout salarié d’être protégé contre le licenciement, d’obtenir réparation de son licenciement injustifié en fonction de sa situation ainsi que de celui de pouvoir soumettre effectivement sa cause à un juge indépendant pour

obtenir la condamnation de l’employeur, et cela sans que son droit à indemnisation ne soit alors atteint dans sa substance même.

b) Sur l’ingérence :

La question est de déterminer si l’article L.1235-3 du code du travail est de nature à affecter les conditions d’exercice des droits reconnus par les textes conventionnels.

L’article L.1235-3 du code du travail prévoit que, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et en l’absence de réintégration du salarié dans l’entreprise, le juge octroie à ce dernier une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des minima et des maxima fixés par ce même article.

Ces minima et maxima varient en fonction de l’ancienneté du salarié.

Les minima diffèrent selon que l’entreprise emploie onze salariés ou plus ou moins de onze salariés.

Dans une entreprise employant au moins onze salariés, l’indemnité minimale va d’un plancher indéterminé ('sans objet') à trois mois de salaire brut et dans une entreprise de moins de onze salariés, elle est comprise entre ce plancher indéterminé ('sans objet') et deux mois et demi de salaire brut.

L’indemnité maximale est comprise entre un et vingt mois de salaire brut.

Ces indemnités sont cumulables avec les indemnités prévues en cas d’irrégularité de procédure dans la conduite du licenciement ou en cas de non-respect de la priorité de réembauche, dans la limite des maxima précités.

Pour déterminer le montant de l’indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l’occasion de la rupture, 'à l’exception de l’indemnité de licenciement mentionnée à l’article L.1234-9".

Le Comité européen des droits sociaux a, dans sa décision du 8 septembre 2016, condamné, au regard de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée, un plafond d’indemnisation des licenciements injustifiés de vingt-quatre mois de salaire, supérieur en l’occurrence à celui de l’article L.1235-3 du code du travail, mis en place par la Finlande.

Pour le Comité, la réparation appropriée doit tenir compte du manque à gagner subi par le salarié entre son licenciement et la décision octroyant l’indemnité et surtout garantir une indemnité 'd’un montant suffisamment élevé pour dissuader l’employeur et pour compenser le préjudice subi par la victime'.

Si l’autorité interprétative des décisions du Comité est incontestable, la cour ne saurait transposer au présent litige, et tenir pour acquise et certaine, l’interprétation qu’il apparaît avoir donné de l’article 24 dans une affaire qui ne concerne pas la France, et alors même qu’il pourra prochainement se prononcer sur la compatibilité du système français avec l’article 24.

Une indemnité dite adéquate ou une réparation appropriée n’implique donc pas, en soi, une réparation intégrale du préjudice de perte d’emploi injustifiée et peut s’accorder avec l’instauration d’un plafond.

Le préjudice de perte d’emploi englobe des aspects personnels et économiques de la perte d’emploi, il ne comprend pas la perte de tous les salaires espérés mais ne se juxtapose pas nécessairement avec la période sans activité.

Il dépend de l’impact de la perte d’emploi sur un salarié compte tenu certes de son ancienneté mais aussi de son âge, de sa qualification professionnelle ou encore de sa situation personnelle.

Et il se distingue d’autres préjudices liés à la rupture, comme le préjudice moral subi à la suite de circonstances vexatoires.

Hors réintégration, l’indemnité dite adéquate ou la réparation appropriée du préjudice de perte d’emploi s’entend ainsi d’une indemnisation d’un montant raisonnable, et non purement symbolique, en lien avec le préjudice effectivement subi et adapté à son but qui est d’assurer l’effectivité du droit à la protection du salarié.

Elle doit être suffisante pour rester dissuasive et ne pas vider d’effectivité l’exigence d’une cause réelle et sérieuse.

Or, ainsi qu’il l’a été exposé, l’article L.1235-3 du code du travail prévoit des plafonds d’indemnisation faibles pour les salariés de peu d’ancienneté.

Il impose des minima et des maxima uniquement fondés sur l’ancienneté pour réparer un préjudice qui s’apprécie en prenant en compte aussi d’autres facteurs.

Les plafonds cessent toutefois d’évoluer à compter d’une certaine ancienneté, et plus précisément à compter de la 29e année.

En outre, la progression des plafonds n’est pas linéaire.

Il en résulte une potentielle inadéquation de l’indemnité plafonnée, voire une possible forme de différence de traitement en raison de l’ancienneté.

Enserré entre un plancher et un plafond, le juge prud’homal ne dispose pas de toute la latitude pour individualiser le préjudice de perte d’emploi et sanctionner l’employeur.

Et l’article L. 1235-3 du code du travail impose, en son dernier alinéa, un cumul d’indemnités susceptible en certaines circonstances de compromettre l’indemnisation requise par les textes conventionnels de ce préjudice.

Il s’en déduit que le dispositif est de nature à affecter les conditions d’exercice des droits consacrés par ces textes.

c) Sur la justification de l’ingérence

Il est fondamental de souligner que l’ingérence dans un droit conventionnel relatif ne signe pas, en elle-même, son inconventionnalité.

En l’espèce, l’ingérence repose sur une ordonnance qui a été ratifiée par le Parlement.

Elle a donc une base légale et démocratique, étant rappelé que tout Etat contractant bénéficie d’une marge nationale d’appréciation.

Le gouvernement habilité par le Parlement a, dans l’exercice de ses prérogatives, organisé, par un texte de valeur législative accessible, clair et prévisible, l’indemnisation du licenciement injustifié.

Il a entendu renforcer la prévisibilité des conséquences qui s’attachent à la rupture du contrat de travail.

Il a ainsi poursuivi un objectif d’intérêt général qu’il n’appartient pas au juge judiciaire de discuter mais de concilier avec d’autres intérêts.

Les montants reposent, ainsi qu’il résulte des travaux préparatoires, sur 'des moyennes constatées’ des indemnisations accordées par les juridictions.

La méthode de travail est appropriée à l’objectif poursuivi et participe à asseoir la légitimité de celui-ci.

d) Sur la proportionnalité de l’ingérence

L’article L.1235-3 du code du travail établit moins un barème attachant telle indemnisation à telle ancienneté qu’une fourchette d’appréciation, ce qui est différent.

Cette fourchette reste soumise au pouvoir souverain du juge dans les limites légales qui sont issues 'des moyennes constatées’ qu’il n’appartient pas au juge judiciaire de remettre en cause.

L’amplitude entre les minima et les maxima ne saurait, en raison de sa progression réelle, être considérée comme incitant, en elle-même, au licenciement.

Le caractère dissuasif d’une indemnité dépend aussi de la taille de l’entreprise, ce qui introduit dans le débat une forme de relativité et même de subjectivité dans la mesure où la fourchette d’indemnisation reste soumise à l’appréciation du juge.

La condamnation de l’employeur peut s’accompagner de la sanction prévue à l’article L. 1235-4 du code du travail lorsque les conditions en sont réunies.

L’article L.1235-3 du code du travail permet au juge de moduler l’indemnisation en fonction de l’ancienneté, critère objectif en lien avec le préjudice subi, et de l’adapter, dans les limites légales, à la situation de chaque salarié selon des critères qui lui sont propres, ce qui est également de nature à contenir toute forme de discrimination ou d’atteinte au principe d’égalité en raison de l’ancienneté.

Ce texte aligne d’ailleurs la situation des salariés de faible ancienneté, ce qui n’était pas le cas auparavant pour ceux dont l’ancienneté était inférieure à deux années.

En outre, une possibilité de voies de droit alternatives non soumises à un plafond est ouverte pour demander la réparation de licenciements nuls et de préjudices distincts de celui tiré de la perte d’emploi.

Le champ de ces voies de droit alternatives est étendu.

Le plafonnement instauré par l’article L.1235-3 du code du travail présente des garanties qui permettent d’en déduire qu’au regard de l’objectif poursuivi, l’atteinte nécessaire aux droits fondamentaux n’apparaît pas, en elle-même, disproportionnée.

En d’autres termes, le contrôle de conventionnalité exercé de façon objective et abstraite sur l’ensemble du dispositif, pris dans sa globalité, et non tranche par tranche, conduit à conclure, peu important la situation de Y Z, à la conventionnalité de celui-ci.

Toutefois, l’intéressé a été licencié de façon injustifiée.

Le contrôle de conventionnalité ne dispense pas, en présence d’un dispositif jugé conventionnel, d’apprécier s’il ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits du salarié concerné c’est-à-dire en lui imposant des charges démesurées par rapport au résultat recherché.

La recherche de proportionnalité, entendue cette fois 'in concreto’ et non 'in abstracto', doit toutefois avoir été demandée par le salarié.

Elle ne saurait être exercée d’office par le juge du fond qui ne peut, de sa seule initiative, procéder à une recherche visant à écarter, le cas échéant, un dispositif dont il reconnaît le caractère conventionnel.

Or, Y Z, qui ne fait qu’exposer sa situation et son préjudice de perte d’emploi qu’il qualifie d’important, n’a sollicité qu’un contrôle de conventionnalité 'in abstracto’ et non 'in concreto'.

Il ne pourra, en conséquence, qu’être fait application de l’article L.1235-3 du code du travail.

D – Sur l’indemnisation

Au jour du licenciement, Y Z avait 37 ans d’ancienneté, était âgé de 58 ans et percevait un salaire mensuel moyen de 3.151,89 euros.

L’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse est comprise entre 3 et 20 mois.

Il justifie de sa qualité de demandeur d’emploi jusqu’au 27 mai 2019.

Le préjudice du salarié est évalué à 15 mois de salaire de sorte que la somme de 47. 278, 35 euros lui sera accordée.

Compte tenu des termes de la présente décision, il y a lieu d’ordonner à la SASU Fichet Security Solutions France de remettre à Y Z un bulletin de salaire, mentionnant les condamnations mises à sa charge, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail rectifiés, sans qu’il y ait lieu d’assortir cette mesure d’une quelconque astreinte.

La SASU Fichet Security Solutions France sera également condamner à régulariser la situation de Y Z auprès des organismes sociaux, sans qu’il y ait lieu d’assortir cette mesure d’une quelconque astreinte.

Il y a lieu de préciser que toute condamnation est prononcée sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables.

Les conditions s’avèrent réunies pour condamner l’employeur fautif, en application de l’article L.1235-4 du code du travail, à rembourser à l’organisme intéressé les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement au jour de la décision judiciaire, dans la limite de six mois.

- Sur les frais irrépétibles

Le jugement doit être confirmé du chef des dépens, de l’indemnité de procédure allouée à Y Z et du rejet de la demande la SASU Fichet Security Solutions France à ce titre.

Partie principalement succombante en cause d’appel, la SASU Fichet Security Solutions France doit être condamnée aux dépens d’appel, déboutée de sa demande d’indemnité de procédure et condamnée en équité à payer à Y Z la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

Par ces motifs :

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Y Z de ses demandes à titre de rappel de majoration sur heures supplémentaires, de congés payés afférents et de dommages-intérêts pour défaut d’information et de notification des droits à repos obligatoires, débouté la SASU Fichet Security Solutions France de sa demande d’indemnité de procédure et l’a condamnée au paiement d’une indemnité de procédure et aux dépens ;

L’infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Condamne la SASU Fichet Security Solutions France à payer à Y Z la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des règles relatives aux durées maximales de travail et de droit à repos quotidien ;

Déboute Y Z de sa demande au titre de la prime de la médaille d’honneur ;

Dit le licenciement de Y Z dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SASU Fichet Security Solutions France à payer à Y Z la somme de 47.278,35 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

Ordonne la remise, par la SASU Fichet Security Solutions France à Y Z, d’un bulletin de salaire, d’une attestation Pôle Emploi et d’un certificat de travail conformes aux termes de la présente décision ;

Ordonne la régularisation de la situation de Y Z vis-à-vis des organismes sociaux ;

Dit que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables ;

Condamne la SASU Fichet Security Solutions France à rembourser à l’organisme intéressé, dans la limite de six mois, les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement à celui de la présente décision ;

Condamne la SASU Fichet Security Solutions France à payer à Y Z la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

Déboute la SASU Fichet Security Solutions France de sa demande d’indemnité de procédure ;

Condamne la SASU Fichet Security Solutions France aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT



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Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 2 septembre 2020, n° 19/01046