Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 1er septembre 2020, n° 19/01776

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°

du 01 septembre 2020

R.G : N° RG 19/01776 - N° Portalis DBVQ-V-B7D-EXHB

S.C. CITY & PARK

c/

X

Formule exécutoire le :

à

:

Me Thierry GRIVIAU

Me Anne BAUDIER

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 01 SEPTEMBRE 2020

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 14 juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES

S.C. CITY & PARK

[…]

[…]

Représentée par Me Thierry GRIVIAU, avocat au barreau de l'AUBE

INTIMEE :

Madame Z A B C X

[…]

[…]

Représentée par Me Anne BAUDIER, avocat au barreau de l'AUBE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :

Madame LEFORT, conseiller a entendu les plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées ; en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre

Madame Catherine LE FORT, conseiller

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

GREFFIER :

Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 2 juin 2020, où l'affaire a été mise en délibéré au 1er septembre 2020,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 1er septembre 2020 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre, et Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date des 18 et 22 février 2016, Mme Z Y née X et la société civile de construction vente City & Park, exerçant sous l'enseigne Nouvel Habitat, ont conclu un compromis de vente portant sur les trois lots n°16, 32 et 125 (deux logements et un emplacement de stationnement) dans un ensemble immobilier sis à […], […], pour un montant total à financer de 184.353 euros TTC.

Un avenant a été signé le 3 mars 2016 modifiant la désignation des biens, un seul logement (lot n°32) devant être vendu, en plus du parking (lot n°125), pour un prix total de 111.765 euros.

Par exploit d'huissier du 5 avril 2017, Mme X divorcée Y a fait assigner la société City & Park aux fins d'obtenir la libération à son profit de la somme de 10.540 euros immobilisée et séquestrée en la comptabilité de la SCP Paupe, notaire.

La société City & Park a conclu au débouté.

Par jugement du 14 juin 2019, le tribunal de grande instance de Troyes a :

- dit qu'en l'absence de communication de l'état descriptif de division et du règlement de copropriété ni du modificatif intervenu depuis le compromis de vente, le délai de rétractation d'ordre public n'avait pu commencer à courir, de sorte que Mme X pouvait valablement se rétracter aux termes de son courrier en date du 9 mai 2016,

En conséquence,

- dit que la somme immobilisée et séquestrée en la comptabilité de la SCP Paupe pour un montant de 10.540 euros serait restituée à Mme X avec intérêts au taux légal à compter du l9 avril 2016 à compter de la signification du présent jugement,

- condamné la société City & Park au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal s'est fondé sur les dispositions de l'article L.721-3 du code de la construction et de l'habitation.

Par déclaration du 5 août 2019, la société City & Park a fait appel de ce jugement.

Par conclusions du 31 octobre 2019, la société City & Park demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

- débouter Mme X de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme X au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir en premier lieu que la lettre de rétractation ainsi que son accusé réception sont en date du 9 mai 2016, de sorte que le délai de rétractation prévu par l'article L.271-1 du code de la construction et de l'habitation était expiré. En second lieu, elle soutient que le défaut de communication des documents ne pouvait pas être retenu, puisque Mme X avait attesté avoir reçu et être en possession dès la signature du compromis de certains documents, notamment le règlement de copropriété et l'état descriptif, ce qui est conforme à l'article L.721-2 du code de la construction et de l'habitation.

Par conclusions déposées le 17 janvier 2020, Mme X demande à la cour de :

- confirmer en l'ensemble de ses dispositions du jugement entrepris,

Y ajoutant,

- condamner la société City & Park à régler au paiement d'une somme complémentaire de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance d'appel, avec droit de recouvrement au profit de son conseil.

Elle fait valoir que la loi Alur impose d'annexer à toute promesse de vente un certain nombre de documents dont le règlement de copropriété et l'état description de division, et qu'à défaut, le délai de rétractation de dix jours prévu à l'article L.271-1 du code de la construction et de l'habitation ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ces documents en application de l'article L.271-3 du même code ; qu'elle n'a reçu ni l'état descriptif ni le règlement de copropriété bien qu'il était expressément prévu que ceux-ci soient adressés plus tard dans le projet d'acte de vente, lequel n'a été adressé par le notaire que le 20 septembre 2016 ; que le délai de rétractation d'ordre public n'a donc pas commencé à courir, de sorte qu'elle pouvait valablement se rétracter aux termes de son courrier en date du 9 mai 2016. A titre subsidiaire, elle soutient que les procès-verbaux d'assemblée générale et les informations financières ne lui ont pas non plus été remis, de sorte que le délai de rétractation n'a pas commencé à courir.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 mai 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de remboursement du dépôt de garantie

Il résulte de l'article L.271-1 alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation que l'acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant la promesse de vente.

L'article L.271-2 du même code interdit tout versement de l'acquéreur non professionnel au profit du vendeur avant l'expiration du délai de rétractation.

Il résulte de l'article L.721-2, II du code de la construction et de l'habitation qu'en cas de promesse de vente, sont remis à l'acquéreur, au plus tard à la date de signature de la promesse, certains documents relatifs à la copropriété, notamment le règlement de copropriété et l'état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant s'ils ont été publiés, les procès-verbaux d'assemblée générale des trois dernières années et des informations financières.

Selon l'article L.721-3 alinéa 1er du même code, lorsque ces documents "ne sont pas remis à l'acquéreur au plus tard à la date de la signature de la promesse de vente, le délai de rétractation prévu à l'article L. 271-1 ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ces documents et informations à l'acquéreur", cette communication devant être réalisée selon les modalités de notification ou de remise de la promesse prévues à l'article L. 271-1, soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise.

En l'espèce, la promesse de vente du 18 février 2016 a été notifiée à Mme X divorcée Y par courrier recommandé avec avis de réception présenté le 25 février 2016.

L'avenant du 3 mars 2016 a lui-même été notifié par l'acquéreur par courrier recommandé avec accusé de réception présenté le 8 mars 2016.

Cet avenant fixait à 10.540 euros le montant du dépôt de garantie à verser par l'acquéreur dans un délai de huit jours à compter de l'expiration du délai de rétractation. Le 5 avril 2016, Mme Y a adressé au notaire chargé de la vente la somme de 10.540 euros.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 9 mai 2016, elle a indiqué à Nouvel Habitat ne pas donner suite à cet achat.

Le compromis de vente énumère les documents considérés par le législateur comme indispensables à l'information de l'acquéreur afin de lui permettre d'avoir une parfaite connaissance de l'état et de la situation financière de la copropriété, notamment le règlement de copropriété et l'état descriptif de division, les procès-verbaux d'assemblée générale des trois dernières années et des documents relatifs à la situation financière de la copropriété. Il rappelle les termes de l'article L.271-3 du code de la construction et de l'habitation et mentionne : "l'acquéreur atteste être en possession de l'ensemble des éléments ci-dessus listés et annexés au présent compromis de vente."

Mme X invoque en vain une mention, dans le compromis, selon laquelle l'état descriptif de division et règlement de copropriété sera joint au projet d'acte de vente qui sera adressé à l'acquéreur et cet acte et ses éventuels modificatifs seront adressés en copie à l'acquéreur dans la lettre recommandée avec accusé de réception ayant pour effet de purger le délai de rétractation. D'une part l'exemplaire de la promesse de vente qu'elle communique à la cour ne comporte pas cette mention. D'autre part, à supposer que cette mention se trouve sur une page manquante, l'annexion des documents au projet d'acte de vente et leur communication par lettre recommandée lors de la notification de la promesse de vente ne sont pas de nature à exclure la remise préalable à l'acquéreur au plus tard à la date de signature de la promesse, conformément aux dispositions de l'article L.721-2, II du code de la construction et de l'habitation, dès lors que le compromis mentionne que l'acquéreur reconnaît être en possession des documents.

C'est également à tort que Mme X soutient que le règlement de copropriété ne peut lui avoir été remis en février 2016 alors que selon le projet d'acte de vente l'état descriptif de division et le règlement de copropriété

ont été établis selon acte du 6 avril 2016. Le projet d'acte de vente, adressé par le notaire à Mme X, mentionne en réalité, s'agissant des lots 32 et 125 objets du compromis de vente, que l'ensemble immobilier a fait l'objet d'un état descriptif de division et règlement de copropriété établi par acte notarié du 27 mars 2012, publié au service de la publicité foncière le 17 avril 2012.

Enfin, c'est encore en vain que Mme X soutient subsidiairement que la société City & Park ne justifie pas de la remise des documents, notamment les procès-verbaux d'assemblée générale et les informations financières. En effet, la mention claire et apparente selon laquelle "l'acquéreur atteste être en possession de l'ensemble des éléments ci-dessus listés et annexés au présent compromis de vente" suffit à établir cette remise et est conforme aux dispositions de l'article L.721-2, II du code de la construction et de l'habitation. Ce n'est que si les documents ne sont pas remis au plus tard lors de la signature de la promesse de vente qu'ils doivent être communiqués par lettre recommandée avec accusé de réception.

Au surplus, Mme X n'a jamais fait état de l'absence de communication des documents dans son courrier du 9 mai 2016, ni dans ses autres correspondances.

Elle n'a d'ailleurs pas indiqué qu'elle se rétractait de son engagement, mais qu'elle ne pouvait pas donner suite à cet achat et qu'elle engageait une action en résiliation de cet engagement. Ainsi il apparaît clairement que le délai de rétractation était déjà dépassé dans l'esprit de Mme X lorsqu'elle a payé le montant du dépôt de garantie le 5 avril 2016 et lorsqu'elle a renoncé à la vente par courrier du 9 mai 2016. Il ne s'agissait donc pas d'une rétractation au sens de l'article L.271-1 alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, rien ne justifie de considérer que le délai de rétractation de dix jours n'aurait pas commencé à courir dès le 9 mars 2016, lendemain de la présentation de la lettre lui notifiant l'avenant au compromis, de sorte que ce délai a expiré le 19 mars 2016, soit avant le courrier de l'acquéreur. C'est donc en vain que Mme X se fonde sur une prétendue rétractation dans le délai légal pour réclamer le remboursement du dépôt de garantie.

Il convient dès lors d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter Mme X de toutes ses demandes.

Sur les demandes accessoires

Succombant, Mme X sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par ailleurs, il n'est pas inéquitable de la condamner à payer à la société City & Park la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Troyes,

Statuant à nouveau,

DEBOUTE Mme Z X divorcée Y de l'ensemble de ses demandes,

CONDAMNE Mme Z X divorcée Y à payer à la société civile de construction vente City & Park la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme Z X divorcée Y aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le greffier La présidente

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