Cour d'appel de Reims, Chambre premier président, 15 février 2023, n° 23/00317

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, ch. premier prés., 15 févr. 2023, n° 23/00317
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 23/00317
Importance : Inédit
Décision précédente : Juridiction de proximité de Sedan, 29 janvier 2023, N° 23/00017
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 20 février 2023
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Sur les parties

Texte intégral

N° RG : 23/00317

N° Portalis :

DBVQ-V-B7H-FJPJ

ORDONNANCE N° 2

du : 15 février 2023

C. H.

M. [X] [U]

et

Mme [Z] [U]

C/

M. [L] [I]

Formule exécutoire le

à :

Me Daouda Diop

Me Elodie Seurat

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 15 FÉVRIER 2023

À l’audience de la cour d’appel de Reims, où était présent et siégeait Mme Catherine Hologne, présidente de chambre à la cour d’appel de Reims faisant fonction de premier président, désignée par ordonnance organisant un service allégé en date du 2 février 2023, assistée de Mme Frédérique Roullet, greffier

Vu la saisine de Me Daouda Diop, avocat au barreau de Reims, enregistrée au répertoire général de la cour le 14 février 2023

À la requête de :

M. [X] [U]

[Adresse 1]

Comparant en personne, assisté de Me Daouda Diop, avocat au barreau de Reims

Mme [Z] [U]

[Adresse 1]

Non comparante, représentée par Me Daouda Diop, avocat au barreau de Reims

DÉFENDEURS en première instance

APPELANTS devant la cour d’appel de Reims d’un jugement rendu le 30 janvier 2023 par le juge de proximité de Sedan (RG 23/00017)

DEMANDEURS en réinscription devant la cour d’appel de Reims

les opposant à :

M. [L] [I]

[Adresse 2]

Comparant en personne, assisté de Me Elodie Seurat, membre de la SELAS ACG, avocat au barreau de Reims

DEMANDEUR en première instance

INTIMÉ devant la cour d’appel de Reims d’un jugement rendu le 30 janvier 2023 par le juge de proximité de Sedan (RG 23/00017)

DÉFENDEUR à la demande de réinscription devant la cour d’appel de Reims après cassation

Vu les avis téléphoniques donnés le 14 février 2023 à 17 h à Me Diop, avocat de M. et Mme [U], et à 17 h 07 à Me Elodie Seurat, avocat de M. [I], d’avoir à comparaître le mercredi 15 février 2023 à 13 h 30 devant le délégué du premier président de la cour d’appel de Reims, statuant en application des dispositions de l’article 1061-1 du code de procédure civile,

—  2 -

À ladite audience, Mme Hologne, conseiller faisant fonction de premier président, assistée de Mme Roullet, greffier, a entendu les avocats respectifs des parties en leurs conclusions et plaidoiries, puis M. [U] et M. [I], en leurs observations,

À l’issue des débats, il a été indiqué que le délibéré serait rendu le même jour à 15 h par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Et ce jour, 15 janvier 2023, a été rendue l’ordonnance suivante :

Mme [A] [U], née le 16 janvier 1981 à [Localité 4], est décédée le 23 janvier 2023 à [Localité 3].

Selon acte d’huissier du 26 janvier 2023, autorisé par ordonnance du même jour rendue par le juge du Tribunal de Proximité de Sedan, M. [L] [I] a assigné M. [X] [U] et Mme [Z] [U] devant la dite juridiction aux fins de contester le funérailles prévues le 27 février 2023 à Châtillon-sur-Bar.

Il fait valoir que sa compagne, avec laquelle il entretenait une relation depuis 15 ans, a toujours exprimé y compris devant des proches vouloir être incinérée aux fins que ses cendres soient dispersées sur le lac de Salagou, et ce qu’en bien même elle n’a pris aucune disposition testamentaire en ce sens.

Les parents de la jeune femme ont souligné que depuis le décès de leur fils en novembre 2022, leur fille était revenue vers sa famille, manifestant l’intention de changer de vie et de s’éloigner de son compagnon. S’ils ne s’opposent pas à la crémation, ils entendent que les cendres de leur fille rejoignent le caveau familial, au côté de son frère, ainsi qu’elle en avait clairement exprimé le souhait auprès de ses proches ses dernières semaines.

Par jugement du 30 janvier 2023, le juge des contentieux de la protection a indiqué que la dépouille de Mme [A] [U] serait incinérée après mainlevée de l’obstacle à crémation, et que les cendres réunies dans une urne seraient dispersées au lac de Salagou, à charge pour M. [L] [I] d’organiser les funérailles en conséquence et de supporter les frais de garde du corps.

Les consorts [U] ont interjeté appel de cette décision.

L’affaire a été examinée le 31 janvier 2023 à la Cour d’Appel de Reims, et l’ordonnance rendue le jour même frappée d’un pourvoi.

Par arrêt rendu par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation le 14 février 2023 a cassé et annulé l’ordonnance rendue, sauf en ce qu’elle dit que la dépouille de [A] [U] sera incinérée une fois la mainlevée de l’obstacle de crémation ordonnée.

Le jour même, la juridiction de céans était donc à nouveau saisie.

* * * *

—  3 -

SUR CE':

Selon l’article 3 de la loi du 15 novembre 1887 sur la liberté de funérailles, tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles. Sa volonté, exprimée dans un testament ou dans une déclaration faite en forme testamentaire a la même force qu’une disposition testamentaire relative aux bien.

En l’absence de manifestation expresse de la volonté du défunt, il convient de rechercher, par tous moyens, quelles ont été ses intentions en ce qui concerne ses funérailles et, a défaut, de designer la personne la mieux qualifiée pour décider de leurs modalités.

En l’espèce, il n’est pas contestée que Mme [A] [U] n’a laissé aucune disposition écrite et explicite sur les modalités de ses funérailles.

Au vu des pièces produites, il ressort que la famille de M. [I] rappelle l’attachement de la défunte au lieu dit le lac de Salagou, où elle a été photographiée avec son compagnon. Selon M. [W] [I], elle avait exprimé il y a deux ans son souhait de voir ses cendres dispersées en ce lieu. Mme [C] [I] atteste avoir reçu la même confidence. M. [O] [M] déclare que très récemment, suite à l’enterrement de son frère, elle avait renouvelé ce souhait, désignant ce lieu comme étant l’endroit où elle avait partagé des moments de bonheur. M. [T] et Mme [V] atteste avoir reçu les mêmes confidences relatives au choix du lac de Salagou pour que soient dispersées ses cendres.

Ainsi que l’a souligné le premier juge, il est indubitable que bien qu’ayant connu une vie marginale et des difficultés de couple, Mme [A] [U] a partagé une communauté de vie de 15 ans avec M. [I], en sorte que ce choix, répétés au cours du temps, marque une volonté ancrée et en lien avec des moments dont elle souhaitait préserver le souvenir.

À l’inverse, les consorts [U] produisent des attestations qui relatent le changement de vie récent de leur fille, en suite du bouleversement causé par le décès de son frère, avec l’intention de donner un cours nouveau à son existence. Elle a pu notamment exprimer auprès de deux praticiens, le docteur [Y] et Mme [E], des critiques à l’égard de son compagnon, stigmatisant sa violence et son souhait de s’installer désormais dans les Ardennes.

Pour autant, il n’en ressort pas que ce désir de changement ait eu pour conséquence de rejeter en bloc ces 15 ans de vie commune, et de remettre en cause son souhait de voir ses cendres dispersées dans un lieu qu’elle considérait comme le témoin de moments de félicité.

La force de ce lien conjugal est d’autant moins contestable qu’il résulte d’une attestation produite par les consorts [U] eux mêmes, (rédigée par M. [P] [B]) que séparée de son compagnon incarcéré, elle n’a jamais véritablement voulu le quitter.

S’il est produit d’autres attestations laissant penser à un changement d’opinion sur le lieu où devaient reposer ses cendres, force est de constater qu’elles semblent presque toutes se concentrer sur des confidences faites le jour de l’enterrement de son frère, soit dans un état de forte émotion. Ceci est

—  4 -

d’autant plus manifeste que dans de telles circonstances, c’est à plus de 20 personnes qu’elle aurait de façon répétée exprimé son souhait de rejoindre le caveau familial.

Or, ainsi que cela a déjà été indiqué, elle a le lendemain déclaré à M. [M], en rapportant les moments éprouvants qu’elle venait de connaître, que son souhait de retrouver le cadre paisible du lac de Salagou restait entier, ce qui atteste d’un désir ancré par delà les bouleversements induits par cette journée de deuil.

Ainsi, la volonté pérenne de Mme [A] [U] demeure bien celle défendue par M. [L] [I].

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, c’est à juste titre que le premier juge a estimé qu’en dépit des liens affectifs qui existaient indéniablement entre la défunte et ses parents, les dernières volontés de Mme [A] [U], exprimées de manière claire et univoque, dont M. [L] [I] demeure la personne la mieux qualifiée pour rendre compte, restent que ses cendres soient dispersées au Lac du Salagou.

La nature du présent litige commande que chaque partie conserve la charge de ses dépens d’appel.

* * * *

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

— Confirmons le jugement rendu le 30 janvier 2023 par le juge des contentieux de la protection de Sedan sur les modalités de dispersion des cendres de Madame [A] [U], sur l’organisation des funérailles et les frais de garde du corps ;

— Laissons a chaque partie la charge de ses dépens

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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