Cour d'appel de Rennes, 13 septembre 2016, n° 14/05464

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Sur la décision

Texte intégral

3e Chambre Commerciale

ARRÊT N°

R.G : 14/05464

XXX

C/

SAS AGENCE CONCEPT ESPACE INGENIERIE (ACE)

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 13 SEPTEMBRE 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Alain POUMAREDE, Président,

Mme Brigitte ANDRE, Conseiller, rédacteur

Madame Véronique JEANNESSON, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Béatrice FOURNIER, lors des débats, et Mme Julie ROUET, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 10 Mai 2016

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 13 Septembre 2016 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats.

Signé par Madame Brigitte ANDRE, Conseiller, par suite d’un empêchement du Président.

****

APPELANTE :

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Cécile DELVA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

SAS AGENCE CONCEPT ESPACE INGENIERIE (ACE) Pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Armel ANDRE de la SELARL ANDRE SALLIOU, Plaidant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jean-paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

La Société Cobi Engineering Réalisation (la société Cobi) exerce l’activité de maître d''uvre de conception et d’exécution pour le compte de maîtres d’ouvrages privés faisant édifier des centres commerciaux, des bâtiments industriels ou des locaux professionnels. Elle a obtenu de la Société JP 4, représentée par M. Y Z, une mission de maîtrise d''uvre complète de conception et de suivi d’exécution portant sur l’édification, à Noyal Chatillon sur Seiche, d’un bâtiment de logistique destiné à être loué à la société Gefco. La société ACE Ingénierie (la société ACE) a reçu, pour le même ouvrage, une mission de maître d’ouvrage délégué dite AMO (assistant maîtrise d’ouvrage). Le chantier a été réceptionné le 31 mars 2004.

Reprochant à la société ACE d’avoir présenté sur son site Internet l’ouvrage loué à la société Gefco comme étant sa propre réalisation, la société Cobi l’a, par lettre recommandée avec avis de réception du 4 octobre 2012, mise en demeure de cesser tout comportement parasitaire puis l’a fait assigner, le 22 avril 2013, devant le tribunal de commerce de Rennes aux fins de voir statuer sur les demandes suivantes :

— Dire et juger déloyale et parasitaire, l’appropriation par la société ACE INGÉNIERIE sur son site Internet de la réalisation du site GEFCO à NOYAL CHATILLON SUR SEICHE.

— Ordonner en conséquence la suppression du site Internet de la Société ACE INGÉNIERIE de toutes références à la réalisation de l’immeuble GEFCO à NOYAL CHATILLON SUR SEICHE, ce dans les huit jours de la décision à intervenir sous astreinte de 250 € par jour de retard pendant un mois, passé lequel délai il sera à nouveau fait droit.

— Condamner la société ACE INGÉNIERIE à payer une somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts pour sanction des conséquences dommageables des actes de concurrence déloyale.

— Condamner la société ACE INGÉNIERIE à payer la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

— Condamner la société ACE INGÉNIERIE aux dépens de l’instance.

Par jugement du 20 mars 2014, le tribunal de commerce de Rennes a débouté la société Cobi de toutes ses demandes, la condamnant à payer à la société ACE la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

La société Cobi a relevé appel de ce jugement, demandant à la cour de :

— DIRE ET JUGER déloyale, et parasitaire, l’appropriation par la Société ACE INGÉNIERIE sur son site internet de la réalisation du site GEFCO à NOYAL CHATILLON SUR SEICHE,

— CONSTATER que postérieurement à la délivrance de l’assignation, la Société ACE INGÉNIERIE a supprimé sur son internet la mention de la réalisation par elle-même de l’immeuble GEFCO à NOYAL CHATILLON SUR SEICHE,

— CONDAMNER la Société ACE INGÉNIERIE à lui payer une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour sanction des conséquences dommageables des actes de concurrence déloyale,

— DÉBOUTER la société ACE INGÉNIERIE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

— CONDAMNER la société ACE INGÉNIERIE à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En réponse, la société ACE demande à la cour de confirmer le jugement critiqué et en conséquence de :

— dire que la société Cobi Engineering Réalisation ne rapporte pas la preuve d’une faute, d’un lien de causalité et d’un préjudice indemnisable,

— la débouter de toutes ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance outre une somme supplémentaire de 3 500 euros.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour la société Cobi engineering réalisation le 2 janvier 2015 et pour la société Agence concetp espace ingénierie le 5 novembre 2014.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La société Cobi justifie avoir obtenu, du maître de l’ouvrage de la construction litigieuse, une mission de maîtrise d’oeuvre générale, sauf en ce qui concerne les lots techniques conçus et contrôlés par un bureau d’études choisi par le maître de l’ouvrage, en l’occurrence le Bureau Cepi, sa mission étant limitée pour les dits lots à la coordination.

La société ACE Ingénierie soutient que la seule mention, sur un panel très important de bâtiments, du bâtiment litigieux ne suffit pas à démontrer un acte de concurrence déloyal ou parasitaire ayant entraîné un détournement de clientèle.

Mais un fait, même isolé, peut constituer un acte de concurrence déloyale.

La société ACE souligne également qu’elle a largement participé à la réalisation du bâtiment en cause en sa qualité de maître d’ouvrage délégué et en déduit qu’elle n’aurait pas commis de faute en présentant l’ouvrage comme sa réalisation sous la rubrique 'référence’ et non pas sous celle 'maîtrise d’oeuvre'. Mais la pièce n° 14 de la société Cobi révèle que sous la rubrique 'Maîtrise d’oeuvre', la société ACE décrivait son activité de maître d’oeuvre, sans différencier celle-ci de celle d’assistant du maître de l’ouvrage qu’elle n’évoquait d’ailleurs pas sur son site, et sans expliquer les différents cadres juridiques possibles de son intervention. En particulier, l’acronyme AMO n’était pas expliqué de sorte qu’un amalgame était opéré entre les missions de maîtrise d’oeuvre et de maître d’ouvrage délégué. Dès lors, la rubrique de son site Internet intitulée 'Références', comportant des illustrations de ses réalisations classées par nature de bâtiments, ne pouvait se comprendre que comme des exemples des opérations de maîtrise d’oeuvre qu’elle avait elle-même réalisées. La photographie litigieuse, insérée parmi des exemples de réalisation de contrats de maîtrise d’oeuvre, était commentée de la manière suivante : 'Client GEFCO / Localité : NOYAL CHATILLON SUR SEICHE / Surface : 30 000 m² / Type : Réalisation d’un bâtiment de stockage / 'Spécificité : AMO ACE INGENIERIE'. Cette précision discrète et obscure ne permettait pas aux maîtres d’ouvrage potentiels consultant son site, de comprendre que la société ACE n’avait pas exercé une mission de maîtrise d’oeuvre pour l’édification de ce bâtiment mais uniquement une mission de maître d’ouvrage délégué. Cette présentation était dès lors de nature à induire en erreur la clientèle potentielle commune des deux parties, ce qui en usurpant le travail réalisé par la société Cobi, causait nécessairement un préjudice à cette dernière.

La société Cobi justifie de surcroît, par l’attestation de Mme X dirigeante de la société Eurocell Diagnostics, que la société ACE s’attribuait verbalement, dans les rapports avec la clientèle, la maîtrise d’oeuvre du bâtiment en cause.

C’est dès lors à tort que les premiers juges ont rejeté la demande présentée par la société Cobi.

Pour l’évaluation du préjudice subi par la société Cobi, il sera tenu compte du fait qu’après la délivrance de l’assignation, la société ACE a supprimé l’indication trompeuse publiée sur son site Internet de sorte que le trouble déploré n’a existé que pendant une durée limitée, qu’il s’agit en outre d’une information isolée dont l’impact a dès lors été circonscrit et qu’enfin, la société Cobi ne démontre pas avoir souffert d’une baisse de son activité ou de la perte d’un client potentiel en relation avec cette publication trompeuse. Le trouble commercial qui en est résulté sera en conséquence intégralement réparé par l’allocation d’une indemnité de 5 000 euros.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 20 mars 2014 par le tribunal de commerce de Rennes ;

Statuant à nouveau,

Condamne la SAS Agence Concept Espace Ingénierie à payer à la SAS Cobi Engineering Réalisation :

— la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice ;

— la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire ;

Condamne la SAS Agence Concept Espace Ingénierie aux dépens de la procédure de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER P/LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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