Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 5 juillet 2019, n° 16/03261

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 2e ch., 5 juill. 2019, n° 16/03261
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 16/03261
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

2e Chambre

ARRÊT N°421

N° RG 16/03261

N° Portalis DBVL-V-B7A- M5V7

BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

M. Z X

SAS ENERGIA

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Benoît GEORGE

Me Christophe LHERMITTE

Me Eric DEMIDOFF

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 5 JUILLET 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN,

Assesseur : Madame Pascale DOTTE-CHARVY, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller, rédacteur,

GREFFIER :

Monsieur B C, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 7 mai 2019

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 5 juillet 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats, après prorogation du délibéré

****

APPELANTE :

La S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

dont le siège social est […]

[…]

venant aux droits de BANQUE SOLFEA

Représentée par Me Benoît GEORGE de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Monsieur Z X

né le […] à PONTIVY

[…]

[…]

Représenté par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUTIER/ LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Wilfried SCHAEFFER de la SELARL SCHAEFFER AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

La S.A.S. ENERGIA

dont le siège social est […]

[…]

[…]

Représentée par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN-DEMIDOFF, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Catherine ZVILOFF, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

EXPOSE DU LITIGE

A la suite d’un démarchage à domicile, M. Z X a, selon bon de commande du 5 février 2011, commandé à la société Energia la fourniture et l’installation de 16 panneaux photovoltaïques, moyennant le prix de 19 742 euros TTC.

En vue de financer cette opération, la société Banque Solfea (la société Solfea) a, selon offre

acceptée le même jour, consenti à M. X un prêt de 19 742 euros au taux de 5,25 % l’an, remboursable en 168 mensualités de 192,74 euros (assurance emprunteur comprise), après un différé d’amortissement de 11 mois.

Un second bon de commande, intitulé 'avenant’ et non daté a été établi pour la fourniture et la pose de 12 panneaux photovoltaïques, moyennant le prix de 16 858 euros TTC.

En vue de financer cette opération, la société Banque Solfea (la société Solfea) a, selon seconde offre acceptée le 28 février 2011, intitulée 'avenant au bon de financement', consenti à M. X un prêt de 16 858 euros au taux de 5,25 % l’an, remboursable en 168 mensualités de 164,86 euros (assurance emprunteur comprise), après un différé d’amortissement de 11 mois.

La somme de 16 858 euros a été versée à la société Energia au vu d’une attestation de fin de travaux du 12 avril 2011.

Par jugement du 5 octobre 2011 le tribunal de commerce de Nevers a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Energia, puis par jugement du 6 juin 2012, a prononcé l’adoption d’un plan de redressement pour une durée de 8 ans.

Prétendant que le bon de commande était irrégulier et que l’installation n’atteignait pas les performances promises, le privant ainsi des revenus espérés pour la financer au moyen de la revente de l’électricité produite, M. X a, par actes des 1er et 7 avril 2014, fait assigner devant le tribunal d’instance de Vannes Me Y ès-qualités d’administrateur judiciaire de la société Energia, la SELARL Lecaudey, son mandataire judiciaire, et la société Solfea, en annulation et subsidiairement en résolution des contrats de vente et de crédit, et en paiement de dommages-intérêts.

Par acte du 18 juin 2014, M. X a fait assigner en intervention forcée la SELARL Lecaudey en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de redressement de la société Energia.

Par jugement du 10 mars 2016, le tribunal d’instance a :

— mis hors de cause la SELARL Lecaudey commissaire à l’exécution du plan de la société Energia,

— prononcé l’annulation du contrat passé entre M. X et la société Energia,

— constaté l’annulation de plein droit du contrat passé entre M. X et la société Solfea,

— débouté la société Solfea de sa demande de remboursement de la somme de 16 858 euros formée contre M. X,

— condamné avec exécution provisoire la société Solfea à rembourser les échéances versées par M. X au titre du contrat de crédit outre les intérêts à compter du jugement,

— débouté M. X de sa demande de dommages-intérêts formée contre la société Solfea,

— condamné avec exécution provisoire in solidum la société Energia et la société Solfea à payer à M. X une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné avec exécution provisoire la société Energia à garantir la société Solfea de toute condamnation prononcée à son encontre, y compris les dépens,

— condamné avec exécution provisoire la société Energia à payer à la société Solfea la somme de 7 105,57 euros à titre de dommages-intérêts,

— condamné avec exécution provisoire la société Energia à payer à la société Solfea la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné in solidum la société Energia et la société Solfea aux dépens.

La société Solfea a relevé appel de cette décision le 28 avril 2016.

La société BNP Paribas Personal Finance (la BNP) est intervenue volontairement à l’instance d’appel en déclarant venir aux droits de la société Solfea en vertu d’un acte de cession de créances du 28 février 2017, et demande à la cour, aux termes de ses dernières conclusions du 13 février 2019, de lui donner acte de ce qu’elle vient aux droits de la société Solfea, d’infirmer le jugement et statuant à nouveau de :

a) sur le contrat principal :

— sur la demande d’annulation,

— dire que la preuve d’un dol n’est pas rapportée, et que la violation des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, de même que le dol, sont sanctionnées par une nullité relative,

— dire que l’acceptation sans réserve de la livraison puis de la pose des matériels commandés et la demande faite à la société Solfea de libérer le montant du crédit entre les mains de la société Energia par la signature de l’attestation de fin de travaux, établissent la volonté tacite mais non équivoque de M. X de confirmer le contrat conclu avec Energia,

— dire que la facturation de l’électricité produite après le 12 juin 2013, date à laquelle M. X avait la connaissance certaine du vice entachant le bon de commande, constitue un acte postérieur manifestant sa volonté de poursuivre l’exécution du contrat, couvrant ainsi la nullité encourue,

— en conséquence, déclarer M. X irrecevable, et en tout cas non fondé en sa demande de nullité du contrat conclu avec Energia,

— sur la demande de résolution,

— dire que la preuve n’est pas suffisamment rapportée d’un motif de résolution du contrat, et que les manquements allégués sont régularisables,

— en conséquence, débouter M. X de sa demande de résolution judiciaire du contrat principal,

— condamner éventuellement la société Energia à procéder à l’achèvement des travaux ou au paiement de dommages-intérêts,

b) sur le contrat de crédit :

— à titre principal,

— débouter par voie de conséquence M. X de toutes ses demandes à l’encontre de la société Solfea,

— condamner M. X au remboursement du crédit conformément au tableau d’amortissement,

— à titre subsidiaire, pour le cas où le contrat de crédit serait annulé ou résolu,

— condamner M. X à lui rembourser l’intégralité du capital restant dû à la date du jugement, soit la somme de 16 858 €, sous déduction des échéances déjà payées, mais avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds,

— dire que la société Solfea n’a commis aucune faute,

— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Energia à garantir la société Solfea de toute condamnation prononcée à son encontre, y compris les dépens, et versé avec exécution provisoire à la société Solfea des dommages-intérêts à hauteur de 7 105,07 euros,

— en conséquence, condamner la société Energia à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, y compris les dépens,

— condamner la société Energia à lui verser des dommages-intérêts à hauteur de 7 105,07 euros,

c) à titre infiniment subsidiaire si la cour estimait que la société Solfea a commis une faute susceptible d’engager sa responsabilité,

— dire que le préjudice de M. X ne peut correspondre au montant du capital emprunté et le rapporter à de plus justes proportions,

d) en toute hypothèse,

— condamner M. X à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens de première instance et d’appel.

Aux termes de ses dernières écritures du 19 septembre 2016, M. X conclut quant à lui à la confirmation du jugement attaqué dans son intégralité, et sollicite la condamnation de la société Solfea au paiement d’une indemnité de 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’instance et d’appel.

La société Energia, aux termes de ses dernières écritures du 20 février 2019, demande à la cour d’infirmer le jugement attaqué et statuant à nouveau de :

— déclarer M. X irrecevable, et en tout cas non fondé en sa demande de nullité du contrat conclu avec la société Energia,

— condamner M. X à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— subsidiairement, dire que le préjudice de M. X est justement fixé à 1 500 euros,

— condamner M. X aux dépens de première instance et d’appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 14 mars 2019.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur la nullité du contrat principal

Aux termes de l’article L.121-23 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion du contrat litigieux, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’un

démarchage au domicile d’une personne physique doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

• les noms du fournisseur et du démarcheur,

• la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés,

• les conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services,

• le prix global à payer, les modalités de paiement et, en cas de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur ce type de vente,

• la faculté de renonciation ouverte au client ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.

En outre, l’article L. 121-24 du code de la consommation précise que le contrat doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de cette faculté de renonciation et contenant les mentions décrites aux articles R. 121-3 à R. 121-6 de ce code, tous les exemplaires du contrat devant être signés et datés de la main même du client.

Enfin, selon l’article R. 121-4, le formulaire détachable de rétractation doit comporter, sur une face, l’adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé, et, sur son autre face, les mentions prévues à l’article R. 121-5 qui impose notamment l’indication de façon très lisible de la mention 'l’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception’ soulignée ou en caractères gras, ainsi que l’indication que le courrier doit être adressé à l’adresse figurant au dos.

Or, il ressort de l’examen du bon de commande, que celui-ci ne comporte pas la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés.

En effet, aucune indication n’est donnée à l’acquéreur sur la méthode de pose des panneaux solaires. La seule indication laconique que les panneaux seraient intégrés en toiture et implantés en 'format portrait', sans précision sur la surface de toiture affectée et les procédés qui seront mis en oeuvre pour assurer l’étanchéité de celle-ci, ne constitue pas une désignation précise de la nature et des caractéristiques de la prestation accessoire de pose fournie par le vendeur.

En outre, comme le souligne à juste titre M. X, le tribunal a retenu à bon droit que le bordereau de rétractation n’était pas conformes aux dispositions des articles R. 121-3 à R. 121-5.

En effet, comme l’a exactement relevé le premier juge, le bordereau ne comporte pas la mention réglementaire 'si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre', et il ne comporte ni au verso, ni au recto l’adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé, ce verso portant un slogan, un numéro de téléphone, l’adresse du site Internet et le logo de l’entreprise.

Ainsi, il est établi que le bon de commande et le bordereau de rétractation présentent diverses irrégularités sanctionnées par la nullité de la vente.

La BNP et le vendeur soutiennent que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que l’emprunteur aurait renoncé à invoquer en n’usant pas de sa faculté de rétractation, ne manifestant aucune opposition à la livraison du matériel ou lors de la réalisation des travaux, en mettant en service son installation et ayant, de surcroît, signé une attestation de fin de travaux donnant ainsi l’ordre à la banque de régler les fonds et ce, en toute conscience des causes de nullité affectant le bon de commande dans la mesure où étaient reproduites au verso de celui-ci les dispositions du code de la consommation relatives aux mentions obligatoires devant y figurer à peine de nullité.

Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

Or, en l’occurrence, aucun acte ne révèle que, postérieurement à la conclusion du contrat, M. X a eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation, l’absence d’opposition à la livraison du matériel et à la réalisation des travaux, de même que le non-exercice de la faculté de rétractation, ne suffisant pas à caractériser qu’il a, en pleine connaissance de l’irrégularité du bon de commande, entendu renoncer à la nullité du contrat en résultant et qu’il aurait de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.

De la même manière, la seule reproduction des dispositions du code de la consommation au verso du bon de commande énonçant les conditions générales de vente ne suffisent pas à démontrer que l’acquéreur avait pleine connaissance de cette réglementation et, de surcroît, que le contrat de vente la méconnaissait.

La signature de l’attestation de fin de travaux du 12 avril 2011 ne saurait davantage être regardée comme une exécution volontaire des obligations de M. X découlant du contrat principal, alors que l’acquéreur s’est plaint dès la première année par courrier UFC du mois de juin 2012 d’un manque de rentabilité de l’installation qui n’atteignait pas le niveau de performance annoncé par le fournisseur dans el bon de commande.

Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres motifs de nullité invoqués, ou encore sur le dol allégué ou la demande en résolution, de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre M. X et la société Energia.

Sur la nullité du contrat de prêt

Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société Solfea est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Energia emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu entre M. X et la société Solfea.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a constaté l’annulation de plein droit du contrat de crédit passé entre M. X et la société Solfea.

La nullité du prêt a pour conséquence de priver de fondement la demande de la BNP de condamner M. X au remboursement du contrat de crédit conformément au tableau d’amortissement.

Cette demande sera donc rejetée.

La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre, c’est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par l’emprunteur.

A cet égard, la BNP sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu des fautes la privant de

son droit à restitution du capital emprunté.

Elle soutient en effet qu’en signant l’attestation de fin de travaux, M. X a donné l’ordre à la société Solfea de débloquer les fonds après avoir confirmé que les travaux étaient terminés et conformes au devis, sauf le raccordement au réseau public de transport et de distribution d’électricité et les autorisations administratives qui n’étaient pas financés par son concours, et qu’il ne lui appartenait pas de s’assurer de la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation, d’autant que la banque n’a aucune obligation légale ou réglementaire de détenir le contrat principal dont elle n’est pas signataire, ni de conseiller l’emprunteur sur l’opération envisagée.

M. X fait de son côté grief au prêteur de s’être fautivement dessaisi des fonds en faveur de la société Energia sur la simple transmission d’une attestation de livraison ne lui permettant pas de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal, alors qu’à cette date la mise en service de l’installation n’était pas réalisée et que les autorisations administratives n’avaient pas été obtenues.

En outre, en citant une jurisprudence établie relative à la dispense de remboursement du capital par l’emprunteur lorsque le prêteur a versé les fonds au vendeur sans s’assurer que le contrat n’était pas affecté d’une cause de nullité, et en soulignant que la société Solfea a remis les fonds alors qu’elle ne pouvait ignorer le vice affectant le bon de commande, M. X fait ressortir que celle-ci a commis une faute en se libérant du capital entre les mains du vendeur sans vérifier que le bon de commande était régulier.

Il est à cet égard de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

En effet, s’agissant d’une offre de crédit destinée à financer une installation de matériel et pour laquelle elle donne mandat au vendeur de faire signer à l’acheteur l’offre préalable de crédit, la banque se doit de vérifier à tout le moins la régularité de l’opération financée au regard des dispositions d’ordre public de l’article L. 121-23 du code de la consommation, afin d’être en mesure d’aviser son client qu’il s’engage dans une relation pouvant lui être préjudiciable.

A défaut, le prêteur qui verse les fonds, sans procéder, préalablement, auprès du vendeur et de l’emprunteur, aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de démarchage à domicile était affecté d’une cause de nullité, est privé de sa créance de restitution du capital emprunté.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Energia, par l’intermédiaire de laquelle la société Solfea faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès de M. X qu’il entendait confirmer l’acte irrégulier.

Il en résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, alors qu’elle aurait dû connaître les irrégularités affectant le bon de commande, sans procéder à des vérifications complémentaires sur l’éventuelle confirmation de cet acte, la société Solfea a commis une faute la privant du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.

La dispense de remboursement du crédit par l’emprunteur étant fondée sur la faute du prêteur, la contestation relative à son préjudice, lequel résulte précisément de l’obligation de restitution des prestations reçues de part et d’autre du fait de l’annulation du contrat de prêt en dehors de toute faute de sa part est sans fondement.

En outre, ainsi que l’a décidé à juste titre le tribunal, M. X qui n’a commis aucune faute, est fondé à obtenir la restitution des échéances versées en exécution du contrat de prêt annulé.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la société Solfea de sa demande de restitution du capital prêté et, réciproquement, condamné ladite société aux droits de laquelle se trouve la BNP, à rembourser les échéances déjà versées par lui.

Dès lors que la BNP a été déboutée de sa demande de restitution du capital emprunté, sa demande accessoire tendant à voir la société Energia condamnée à garantir M. X de cette condamnation est sans objet, étant au surplus observé que la BNP ne reprend pas cette demande dans le dispositif de ses conclusions, qui seul saisit la cour.

En revanche, la société Energia a, en démarchant l’acquéreur sans lui soumettre un bon de commande conforme aux dispositions protectrices du code de la consommation, commis une faute en lien direct et certain avec le préjudice subi procédant, indépendamment de sa faute personnelle qui n’a eu pour conséquence que la priver de la restitution du capital, de ce qu’elle a aussi perdu son droit aux intérêts par le seul effet de l’annulation de plein droit du contrat de prêt subséquemment à l’annulation du contrat de vente.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a condamné la société Energia à payer à la société Solfea à titre de dommages-intérêts la somme de 7 105,07 euros correspondant à la perte des intérêts pendant la durée du contrat de prêt.

Pour les mêmes motifs, la BNP est fondée à obtenir la garantie de la société Energia au titre des condamnations prononcées à l’encontre de la société Solfea en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance.

En revanche, ayant pris l’initiative d’un appel injustifié, la BNP venant aux droits de la société Solfea supportera seule les dépens de second degré.

Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge de M. X l’intégralité des frais exposés par lui à l’occasion de l’instance d’appel et non compris dans les dépens, en sorte qu’il lui sera alloué une somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, toutes autres demandes d’application de ce texte étant rejetées.

Enfin, la demande de garantie des frais répétibles ou non, exposés à l’occasion de la procédure d’appel formée par la BNP venant aux droits de la société Solfea, initiatrice d’un appel injustifié, contre la société Energia sera rejetée.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme le jugement rendu le 10 mars 2016 par le tribunal d’instance de Vannes en toutes ses dispositions ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. Z X une somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens d’appel ;

Accorde le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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