Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 13 juin 2017, n° 15/00991

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Sur la décision

Référence :
CA Riom, ch. soc., 13 juin 2017, n° 15/00991
Juridiction : Cour d'appel de Riom
Numéro(s) : 15/00991
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

13 JUIN 2017

Arrêt n°

XXX

XXX

SARL Z

/

M. C DE XXX, Association URSSAF

Arrêt rendu ce TREIZE JUIN DEUX MILLE DIX SEPT par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d’Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Mme Hélène BOUTET, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de Madame BRESLE, Greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

SARL Z

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

XXX

XXX

Représentée et plaidant par Me Pauline TANGUY de la SELAFA SOFIRAL, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANT

ET :

M. C DE XXX

XXX

XXX

Non comparant ni représenté – Convoqué par lettre recommandée en date du 21 octobre 2016-

Accusé de réception signé le 24 octobre 2016

URSSAF

XXX

63054 CLERMONT-FERRAND

Représenté et plaidant par Me Olivier FRANCOIS de la SCP BERNARD-FRANCOIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMES

Madame BEDOS Conseiller, après avoir entendu, à l’audience publique du 10 Avril 2017, tenue en application de l’article 945-1 du code de procédure civile, sans qu’ils ne s’y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l’arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La SARL Z, entreprise de fumisterie industrielle, a pour activité l’entretien, la réparation et l’installation de fours industriels. Elle compte un établissement et travaille essentiellement sur deux chantiers : A et X à Saint Georges Les B (63) et Y à Issoire (63), et ponctuellement sur le chantier Y à Neuf Brisach (68). Elle emploie environ 24 salariés ainsi que des travailleurs saisonniers espagnols en contrat à durée déterminée pour les chantiers Y à Issoire et Neuf Brisach .

Au cours du mois d’octobre 2012, la SARL Z a fait l’objet d’un contrôle des services de l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) Auvergne, portant sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011.

Ce contrôle a donné lieu à un redressement et rappel de cotisations notifié par lettre d’observations du 31 octobre 2012 à la suite duquel la société a formulé ses observations par courrier du 5 décembre 2012, auquel l’inspecteur de l’URSSAF a répondu par lettre du 7 décembre 2012.

Le redressement de cotisations d’un montant de 29 369 €, outre 4 309 € au titre des majorations de retard, a finalement été notifié à la SARL Z par mise en demeure du 21 décembre 2012.

Par courrier du 25 janvier 2013, complété le 8 février 2013, la SARL Z, contestant les points n° 6 et 7 de la lettre d’observations, a saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF.

La commission, par décision du 25 novembre 2013, a rejeté sa contestation portant sur ces deux points concernant des observations pour l’avenir, à savoir :

— observation n°6 : frais professionnels non justifiés – restauration hors des locaux de l’entreprise;

— observation n°7 : frais professionnels non justifiés – indemnités de grand déplacement.

Par lettre recommandée du 27 mars 2014, la SARL Z a formé un recours à l’encontre de la décision précitée du 25 novembre 2013 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale du Puy-de-Dôme.

Par jugement du 12 mars 2015, le tribunal a débouté la SARL Z de son recours.

Suivant déclaration du 7 avril 2015, la SARL Z a relevé appel général du jugement susvisé qui lui avait été notifié le 17 mars 2015.

PRETENTIONS DES PARTIES

La SARL Z, par conclusions reprises oralement à l’audience, limitant son appel, demande à la cour de :

— réformer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale en ce qu’il a rejeté ses demandes contestant deux observations de la lettre d’observations de l’URSAFF du 31 octobre 2012, savoir:

* le point n° 6 de la lettre d’observations : frais professionnels non justifiés – restauration hors des locaux de l’entreprise,

* le point n°7 de la lettre d’observations : frais professionnels non justifiés – indemnités de grand déplacement,

— juger recevable sa réclamation bien que portant sur des observations pour l’avenir,

— condamner l’URSAFF Auvergne aux entiers dépens.

La SARL Z explique d’abord que pour répondre à une problématique de polyvalence des salariés, chacun peut intervenir en cas de besoin sur les trois chantiers actuels à Issoire, Colmar et aux B, que chacun doit être formé sur les trois sites afin d’éviter une carence complexe à résoudre en cas d’absence d’un salarié, et que cette condition est une condition sine qua non à la survie de l’entreprise, compte tenu de la spécificité de l’activité concernée et du défaut de main d’oeuvre.

Elle expose alors essentiellement que :

1) concernant la situation de déplacement des salariés,

— ses salariés n’étaient en rien sédentaires, puisqu’affectés à 'un chantier’ dans leur contrat de travail, mais bénéficiant d’une clause de mobilité dans ce dernier qui est une condition essentielle au fonctionnement de l’entreprise,

— le salarié est empêché de regagner sa résidence compte tenu de la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement, et est en mission ponctuelle de très courte durée,

— elle apporte la preuve que les salariés ne disposaient pas du temps nécessaire pour regagner leur résidence ou le siège de l’entreprise à l’heure du déjeuner.

2) concernant les indemnités de grand déplacement,

— la situation de grand déplacement résulte d’un usage dans la profession de fumiste qui se raréfie, les salariés qualifiés étant nécessairement dans l’obligation de délivrer des missions loin de leur domicile; le défaut de versement de ces indemnités entraînerait pour la SARL Z, l’impossibilité de trouver de la main d’oeuvre et donc la fermeture de l’entreprise;

— il est évident que, s’agissant de courtes périodes, les salariés embauchés sont obligatoirement hébergés aux frais de l’employeur; toutes les entreprises de ce secteur pratiquent le paiement de ces indemnités pour des chantiers dont la durée ne dépasse pas 12 semaines.

L’U.R.S.S.A.F, par conclusions reprises oralement, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter la SARL Z de l’intégralité de ses demandes, et de lui allouer la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que :

1) sur les frais de restauration hors des locaux de l’entreprise :

— l’inspecteur a constaté que les contrats de travail précisent que les fonctions des salariés 'sont exercées sur les chantiers’ à Issoire pour CONSTELLIUM pour les salariés intervenant sur Issoire ou aux B pour A et X pour les salariés travaillant aux B, ils sont donc continuellement sur ces chantiers et ont été considérés comme sédentaires;

— estimant que les salariés concernés ne sont pas en situation de déplacement professionnel et que les indemnités qui leur ont été versées ne peuvent être qualifiées de frais professionnels, l’inspecteur a donc réintégré dans l’assiette des cotisations et contributions l’ensemble des indemnités de repas perçues par ces salariés, quel que soit leur montant;

— seules les indemnités de repas versés à des salariés placés dans des conditions particulières de travail, c’est à dire des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires sont exonérés de cotisations, en application de l’article L242-1 du code de la sécurité sociale et de l’article 3 de l’arrêté du 20 décembre 2002 modifié par arrêté du 25 juillet 2005;

— l’employeur doit démontrer que le salarié est contraint de prendre son repas au restaurant et qu’il est donc exposé à des frais supplémentaires;

— selon une jurisprudence constante de la cour de cassation; dès lors que les salariés sont affectés exclusivement et définitivement sur le chantier ou le site extérieur à l’entreprise, ils doivent être considérés comme des salariés sédentaires;

— en revanche s’agissant d’éventuelles interventions sur d’autres chantiers que le chantier d’affectation permanent, le versement d’indemnités de repas en franchise de cotisations sociales pourrait être envisagé dès lors que les conditions d’attribution seraient effectivement remplies.

2) sur les indemnités de grand déplacement,

— l’article 5 de l’arrêté du 20 décembre 2002 modifié par arrêté du 25 juillet 2005 prévoit que le salarié est présumé être empêché de regagner sa résidence lorsque la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement est au moins égale à 50 km (aller) et que les transports en communs ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1H30 (aller);

— les dépenses engagées doivent être rendues nécessaires par l’accomplissement de la mission imposée par son employeur et ne pas résulter d’un choix personnel, notamment s’agissant de l’éloignement pouvant exister entre la résidence habituelle et le lieu de travail, ce qui n’est pas le cas lorsque cet éloignement résulte de l’embauche d’un salarié étranger par une entreprise en France et non de l’envoi d’un salarié en mission dans un lieu différent du lieu habituel de travail;

— le fait d’accepter des postes de courte durée éloignés de leur résidence principale résulte d’un choix personnel des salariés concernés.

MOTIFS DE LA DECISION

Il sera rappelé qu’une recommandation, exprimée pour l’avenir mais en termes impératifs, et confirmée ultérieurement par la commission de recours amiable, constitue une décision de l’union de recouvrement sur laquelle il convient de statuer, étant rappelé qu’en cas de contrôle ultérieur, une absence de mise en conformité à une observation pour l’avenir non contestée entraîne une majoration du redressement.

En application de l’article L242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur, tout avantage en espèces ou en nature versé en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations à l’exclusion des sommes représentatives de frais professionnels, dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel. Les frais professionnels s’entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi du salarié que celui-ci supporte au titre de l’accomplissement de ses missions.

Les conditions d’exonération des remboursements de frais professionnels sont fixées par l’arrêté du du 20 décembre 2002.

- Sur le point d’observation n°6 : frais professionnels non justifiés – restauration hors des locaux de l’entreprise :

L’article 3 de l’arrêté susvisé dispose :

' les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n’excède pas les montants suivants :

1° Indemnité de repas :

Lorsque le salarié est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas 15 € par repas

3° Indemnités de repas ou de restauration hors des locaux de l’entreprise :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l’entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu de travail habituel de travail pour le repas et qu’il n’es pas démontré que les circonstances et les usages de la profession l’obligent à prendre ce repas au restaurant, l’indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n’excède pas 7,5 € …'

En l’espèce, il n’est pas contesté que les salariés de la SARL Z n’exercent aucune activité au siège de l’entreprise et il est établi qu’ils sont affectés de façon habituelle sur deux principaux chantiers, dans les locaux de la société Y à Issoire et dans ceux de la société A et X aux B, même si à l’occasion, ils sont envoyés sur d’autres chantiers.

Comme l’a relevé le tribunal des affaires de sécurité sociale, leur lieu de travail habituel se trouve donc situé sur l’un ou l’autre site, précisé à leur contrat de travail.

Or, il est constant que dès lors que les salariés sont affectés exclusivement sur un chantier ou un site extérieur à l’entreprise, ils sont considérés comme salariés sédentaires, et ainsi ils ne peuvent pas être considérés comme en situation de déplacement, condition nécessaire pour autoriser la déduction de l’indemnité de repas.

En conséquence, les indemnités de repas versées par la SARL Z ne peuvent pas être qualifiées de frais professionnels et doivent être réintégrées dans l’assiette des cotisations, étant précisé que :

— d’une part, le contrôle URSAFF du 10 septembre 2014 concernant une société AE3 et produit par la SARL Z ne permet pas de dire que les salariés de cette société qui n’a pas fait l’objet d’un redressement était dans la même situation que ceux de la SARL Z;

— d’autre part, comme l’a expressément indiqué la commission de recours amiable de l’URSSAF, 's’agissant d’éventuelles interventions sur d’autres chantiers que le chantier d’affectation permanent, le versement d’indemnités de repas en franchise de cotisations sociales pourra être envisagé dès lors que les conditions d’attribution seront effectivement remplies.'

La décision critiquée sera donc confirmée sur ce point.

- Sur le point d’observation n°7 : frais professionnels non justifiés – indemnités de grand déplacement :

En application de l’article 5 1° alinéa 1 de l’arrêté du 20 décembre 2002, relatif aux indemnités forfaitaires de grand déplacement, en métropole le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel lorsqu’il empêché de regagner chaque jour sa résidence habituelle, les indemnités de missions destinées à compenser les dépenses supplémentaires de repas sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n’excède pas le montant prévu au 1° de l’article 3 du présent arrêté.

L’article 5 1° alinéa 3 prévoit que le travailleur salarié ou assimilé est présumé empêché de regagner sa résidence lorsque la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement est au moins égale à 50 kilomètres (trajet aller) et que les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1 h 30 (trajet aller).

L’arrêté précise que lorsque le travailleur salarié ou assimilé est empêché de regagner son domicile en fin de journée pour des circonstances de fait, il est considéré comme étant dans la situation de grand déplacement. Il appartient dans ce cas à l’employeur de faire la démonstration des circonstances de fait empêchant le salarié de regagner son domicile.

En l’espèce, bien que peu de documents précis soient produits à ce sujet, il est établi et non contesté que la SARL Z emploie des salariés étrangers, particulièrement des salariés espagnols, qui sont affectés sur les sites d’ISSOIRE ou de NEUF BRISACH, dans le cadre de contrats à durée déterminée de courte durée pour surcroît d’activité.

Toutefois, l’analyse des textes rappelés ci-dessus conduit à considérer que l’indemnité de grand déplacement, exonérée de cotisations, suppose que les dépenses engagées soient rendues nécessaires par l’accomplissement d’une mission professionnelle, contraignant l’employeur à envoyer son salarié en mission, dans un lieu différent de son lieu habituel de travail, et de ce fait éloigné de la résidence du salarié. L’empêchement pour le salarié de regagner son domicile doit être en lien avec son activité professionnelle, et ne peut résulter d’une simple convenance personnelle, sauf à priver d’effet le principe édicté par l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

Le tribunal a dès lors justement retenu qu’il ne peut être considéré qu’un salarié étranger, acceptant un contrat de travail en France, conserve son lieu habituel de résidence à l’étranger pour d’autres motifs que de pure convenance personnelle, et qu’une telle situation ne peut être analysée comme un grand déplacement. Le jugement doit ainsi être confirmé sur ce point.

- Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile:

La procédure devant les juridictions de sécurité sociale étant gratuite et sans frais, en vertu des dispositions de l’article R 144-10 du code de la sécurité sociale, il n’y a pas matière à dépens. Il sera précisé qu’il n’y a pas lieu à paiement du droit prévu par le deuxième alinéa du même article.

Il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit n’y avoir lieu à paiement du droit prévu par l’article R.144-10 du code de la sécurité sociale.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

D. BRESLE Y. ROUQUETTE-DUGARET

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