Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 21 novembre 2018, n° 17/01848

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Riom, ch. com., 21 nov. 2018, n° 17/01848
Juridiction : Cour d'appel de Riom
Numéro(s) : 17/01848
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Moulins, 26 juin 2017, N° 15/00399
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 21 Novembre 2018

RG N° : 17/01848

FK

Arrêt rendu le vingt et un Novembre deux mille dix huit

Sur APPEL d’une décision rendue le 27 juin 2017 par le Tribunal de grande instance de MOULINS (RG n° 15/00399)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. François RIFFAUD, Président

M. François KHEITMI, Conseiller

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

En présence de : Mme Rémédios GLUCK, Greffier, lors de l’appel des causes et Mme Christine VIAL, Greffier, lors du prononcé

ENTRE :

M. Z X

[…]

[…]

Représentant : Me Joseph ROUDILLON, avocat au barreau de MONTLUCON

APPELANT

ET :

La société Y CLIM SYSTEM

SARL immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 491 636 742

[…]

[…]

Représentants : la SCP DEMURE GUINAULT AVOCATS, avocat au barreau de MOULINS (postulant) et Me David BENSAHKOUN, avocat au barreau de BORDEAUX (plaidant)

INTIMÉE

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 04 Octobre 2018, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Monsieur KHEITMI et Madame THEUIL-DIF, magistrats chargés du rapport, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 21 Novembre 2018 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. François RIFFAUD, Président, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure – demandes et moyens des parties :

M. Z X, alors qu’il se trouvait le 12 février 2014 sur la foire-exposition de Moulins, a signé, avec un représentant de la SARL Y CLIM SYSTEM (la SARL Y), un bon de commande portant sur l’installation d’un dispositif de chauffage avec pompe à chaleur air/eau, et sur des travaux d’isolation de combles, pour un prix de 16 970 euros.

Le même jour, M. X a envoyé par lettre recommandée à la SARL Y un bon d’annulation de la commande, bon qui figurait au bas des conditions générales de vente, jointes au bon de commande.

Cependant M. X a contracté le 20 février 2014, auprès de la société SOFINCO, un emprunt de 15 970 euros, qui devait servir au financement de l’installation susdite.

Et malgré l’envoi du bon d’annulation, la commande a reçu exécution partielle, puisque la SARL Y, après une visite technique des lieux le 16 février 2014, a réalisé les travaux d’isolation des combles dans la maison de M. X le 21 juin 2014, travaux réceptionnés sans réserve par M. X, puis a livré la pompe à chaleur le 18 septembre 2014.

En revanche, la SARL Y n’a pas réalisé les travaux d’installation de la pompe à chaleur : lors d’un déplacement sur les lieux le 25 septembre 2014, aux fins de procéder à cette installation, les salariés de cette société ont constaté que M. X n’avait pas fait réaliser une dalle de béton, nécessaire pour installer la pompe ; un nouveau rendez-vous a été pris pour le 3 novembre 2014, mais M. X l’a fait annuler, sans proposer de nouvelle date.

Et le même jour 3 novembre 2014, M. X a fait connaître à la SARL Y, par une lettre recommandée de son avocat, qu’il avait usé de son droit d’annulation du contrat, et que l’absence d’octroi du crédit rendait la commande nulle.

Par une lettre en réponse du 3 décembre 2014, la SARL Y a contesté les observations de M. X, et a proposé de prendre à sa charge les frais de réalisation de la dalle de béton.

Le 20 février 2015, M. X a fait assigner la SARL Y devant le juge de proximité de Moulins, en demandant qu’elle soit condamnée à lui restituer un acompte de 1 000 euros, et à lui payer une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts. Le juge de proximité, suivant mention au dossier du 4 mai 2015, a renvoyé d’office l’affaire devant le tribunal de grande instance

de Moulins.

Devant le tribunal, M. X a maintenu ses demandes, en portant à 2 500 euros la demande de dommages et intérêts. Il a notamment exposé qu’il avait régulièrement exercé son droit de rétractation, que le contrat qu’il avait conclu avec la SARL Y est de ce fait devenu caduc, il a demandé restitution d’un acompte de 1 000 euros qu’il avait remis à cette société en février 2014, que son consentement avait été vicié, et que le défaut de réalisation des travaux justifiait lui aussi la résolution du contrat.

Le tribunal de grande instance, suivant jugement contradictoire du 27 juin 2017, a rejeté les demandes de M. X et, sur une demande reconventionnelle formée par la SARL Y, a condamné M. X à payer à cette société une somme de 14 036,36 euros, pour prix des travaux.

Le tribunal a notamment énoncé, dans les motifs du jugement, que l’envoi du bon d’annulation par M. X n’avait eu aucun effet sur le contrat, dès lors que les commandes passées lors de foires-expositions ne peuvent être rétractées ; que M. X ne justifiait pas d’un défaut d’information qui aurait pu affecter la validité de son consentement ; qu’il ne justifiait d’autre part d’aucun préjudice résultant de l’action de son co-contractant, et qui lui ouvrirait droit à réparation ; que l’inexécution partielle des obligations de la SARL Y était résultée de l’attitude de M. X, de sorte que celui-ci restait débiteur du prix convenu.

M. X, par une déclaration reçue au greffe de la cour le 26 juillet 2017, a interjeté appel total de ce jugement.

L’appelant demande à la cour de réformer le jugement, et de constater que le contrat en cause s’est trouvé annulé, par suite d’une part de l’exercice de son droit de rétractation, et d’autre part du défaut d’information, par la société SOFINCO, de l’octroi du prêt devant servir au paiement du prix. À titre plus subsidiaire, M. X demande à la cour de constater que la SARL Y a manqué à son devoir d’information, et de prononcer l’annulation du contrat pour erreur ; de constater que cette société n’a pas respecté son délai d’installation, et qu’il a en conséquence valablement exercé son droit de dénonciation du contrat ; enfin, de constater qu’elle n’a pas satisfait à ses obligations de livraison et d’installation, et de prononcer par suite la résolution du contrat. Il demande que la société adverse soit condamnée à lui restituer l’acompte de 1 000 euros qu’il lui a versé, et à lui payer une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

M. X expose que, bien que le contrat ait été conclu sur une foire-exposition, la possibilité d’une rétractation lui était ouverte en application de l’article 9 des conditions générales du bon de commande, prévoyant cette faculté de rétractation. M. X invoque ensuite l’article L. 311-36 du code de la consommation, selon lequel le contrat ne devient parfait qu’à la condition, entre autres, que le prêteur ait fait connaître à l’emprunteur sa décision d’accorder le crédit, et il expose que la SARL Y ne rapporte pas la preuve que la société SOFINCO ait donné cette information à M. X dans le cas particulier.

Il fait valoir, sur l’erreur, que la SARL Y lui a fait souscrire le contrat sans même avoir visité les lieux, et qu’il s’est avéré par la suite que l’installation de la pompe à chaleur impliquait la réalisation des travaux supplémentaires non prévus : création d’une dalle et travaux d’électricité, et qu’il est évident que s’il avait eu connaissance de la nécessité et du coût de ces travaux supplémentaires, M. X n’aurait pas contracté. Il invoque, sur le défaut d’exécution dans le délai prévu, les dispositions de l’article L. 114-1 du code de la consommation. Et il fait valoir, au soutien de sa demande de résolution, que la pompe à chaleur n’a pas été posée, et que certains éléments qui devaient être mis en 'uvre lors de sa pose n’étaient pas conformes.

La SARL Y conclut à la confirmation du jugement. Elle expose que le bon de commande

mentionne expressément que les contrats conclus dans les foires et les salons ne comportent pas de droit de rétractation, et qu’à supposer même que M. X ait été titulaire d’un tel droit, il a en fait renoncé à l’exercer, en remettant un chèque d’acompte et en acceptant qu’une partie des travaux convenus fût réalisée, et la pompe à chaleur livrée à son domicile ; que M. X n’a d’ailleurs pas exercé le droit de rétractation qui lui était ouvert pour le contrat de crédit, et qu’il ne saurait soutenir qu’il n’a pas été informé de l’acceptation de la société SOFINCO, qui a notifié sa décision à la SARL Y dans le délai prévu à l’article L. 311-36 du code de la consommation ; que la conclusion du contrat n’a été affectée d’aucune erreur, un rapport de visite ayant clairement précisé que M. X devait faire réaliser une dalle en béton, sans aucunement prévoir de travaux électriques supplémentaires ; que la SARL Y a quant à elle parfaitement rempli ses obligations, que les travaux auraient normalement dû s’achever au cours du mois de septembre 2014 comme énoncé sur le bon de commande, et que leur interruption a pour seule cause l’attitude de M. X, qui n’avait pas fait réaliser la dalle de béton. La société intimée souligne qu’elle a pourtant fait preuve de bonne volonté, en offrant de prendre à sa charge les frais de réalisation de cette dalle,

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 20 septembre 2018.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des demandes et observations des parties, à leurs dernières conclusions déposées en cause d’appel, le 12 et 19 septembre 2018.

Motifs de la décision :

Ainsi que l’a énoncé le tribunal, et que le fait valoir la SARL Y, les contrats conclus dans les

foires et salons, tel celui en cause, ne sont pas soumis aux règles du démarchage à domicile, alors

contenues dans les anciens articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation ; il s’ensuit que

la faculté de rétractation, prévue à l’article L. 121-25 ancien du même code, n’est pas applicable, par

l’effet de la loi, à de tels contrats.

Cependant, les parties demeurent libres de soumettre, aux dispositions du code de la consommation

relatives au démarchage à domicile, des opérations de commercialisation d’un bien ou d’un service

qui n’en relèvent pas de plein droit, à la condition que leur volonté sur ce point soit exprimée sans

équivoque (en ce sens Cass. Civ. 1re – 7 décembre 2004, pourvoi n° 02-19570).

Le bon de commande que M. X a signé le 12 février 2014 comporte, en bas de l’une des

pages pré-imprimées de ce bon que produit M. X, une partie séparée par des pointillés,

intitulée « Annulation de commande », et contenant les mentions suivantes : « (Conformément aux

articles L. 125-25 et suivants du code de la consommation). Compléter et signer ce formulaire.

L’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception à l’adresse suivante : Y CLIM

[…] / L’expédier au plus tard le

septième jour à compter de la date de la commande. / Je soussigné M. […] déclare annuler la

commande ci-dessus en date du : […] ».

L’article 9 des conditions générales du contrat, figurant sur la même page du bon de commande, juste

au-dessus du formulaire d'« Annulation de commande », article intitulé « Résiliation du contrat de

vente – annulation de commande », contient la mention suivante :

« Il est rappelé :

- qu’une vente sur foire n’ouvre droit à aucun délai de rétractation au profit de l’acquéreur, sauf si

une opération de crédit est adossée à ladite vente et que le vendeur en est informé au jour de la

commande.

- qu’en cas de démarchage à domicile, un délai de rétractation de 7 jours est accordé à l’acheteur.

- que toute vente déclarée, au jour de la commande au vendeur, comme étant financée au moyen d’un

crédit à la consommation, ouvre droit au profit de l’acheteur un délai normal de rétractation qui est

de 7 jours à compter de l’acceptation ».

Par la stipulation contenue dans le premier alinéa de l’article cité, la SARL Y a explicitement

laissé apparaître qu’une vente sur foire ouvrait droit a contrario à rétractation, lorsque l’opération

convenue devait être financée par un crédit, et que le vendeur ou prestataire en était informé au jour

de la commande.

Cette stipulation, bien que présentée comme un simple rappel de dispositions légales en vigueur,

allait pourtant au-delà de la faculté de rétractation prévue à l’ancien article L. 311-36 du code de la

consommation, faculté qui ne peut s’exercer qu’à compter de l’acceptation du crédit, et qui était

rappelée distinctement dans le dernier alinéa cité : le premier alinéa ne peut avoir de sens et de portée

que si la société prestataire a entendu étendre le droit à rétractation de l’acquéreur à tous les cas

prévus par cette même clause, en lui accordant ce droit dès la conclusion du contrat principal.

Il en résulte, sans équivoque, que la SARL Y a entendu faire bénéficier M. X d’un

droit de rétractation de sept jours, si un crédit était adossé à l’opération principale, et si cette société

en était informée le même jour ; or ces deux conditions se sont trouvées réunies, puisque M.

X a coché, sur la première page de l’acte contractuel, une case « Financement », avec un

versement à la commande de 1 670 euros ' de sorte que la société prestataire a été informée, le jour

même de la commande, de l’existence d’une demande de crédit affecté.

Et il apparaît que M. X a régulièrement exercé son droit, en renseignant le formulaire de

rétractation, en le datant et en le signant, puis en l’envoyant par lettre recommandée à la SARL

Y, qui a signé l’avis de réception le 14 février 2014, donc avant l’expiration du délai de sept

jours, qui a couru à compter de la commande, faute d’indication contraire de la clause du contrat sur

ce point.

La SARL Y d’ailleurs, dans les échanges de lettres qu’elle a eus avec l’avocat de M.

X en novembre et en décembre 2014, n’a nullement contesté le droit pour M.

X de faire usage de son droit de rétractation : elle s’est limitée à faire état d’un repentir de

l’intéressé dans l’exercice de ce droit, et des difficultés survenues par la suite, attitude qui confirme

que cette société avait entendu faire bénéficier son co-contractant d’une faculté conventionnelle de

rétractation, et qu’il avait régulièrement exercé cette faculté.

L’exercice régulier du droit de rétractation a eu pour effet d’anéantir le contrat, qui ne pouvait

reprendre vie par l’effet d’un repentir de M. X, fût-il intervenu avant l’expiration du délai

de rétractation (en ce sens Cass. Civ. 3e 13 février 2008, Bull. 2008, III, n° 29).

C’est donc par erreur que le tribunal a refusé de faire droit à la demande de restitution de l’acompte

présentée par M. X, et a condamné celui-ci à payer à la SARL Y le solde du prix

convenu, outre une somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera réformé, il conviendra de constater l’anéantissement du contrat conclu entre les

parties, et de faire droit à la demande de restitution de l’acompte formée par l’appelant, sans qu’il soit

utile d’examiner les autres moyens d’annulation ou de résolution qu’il présente. La demande de

dommages et intérêts présentée par M. X sera en revanche rejetée, faute pour celui-ci de

rapporter la preuve des préjudices qu’il dit avoir subis, par le fait des manquements de la société

adverse.

Les demandes de cette société, en paiement du solde du prix des travaux, et de dommages et intérêts

au motif de retards et de difficultés dans la poursuite des opérations, seront elles-mêmes rejetées.

PAR CES MOTIFS :

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement déféré ;

Constate l’anéantissement du contrat conclu entre les parties sous la forme du bon de commande signé par M. Z X le 12 février 2014 ;

Condamne la SARL Y CLIM SYSTEM à payer à M. X une somme de 1 000 euros en restitution de l’acompte versé, avec intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2014 date de la mise en demeure, et une somme de 1 500 en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la SARL Y CLIM SYSTEM aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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