Cour d'appel de Rouen, Chambre des etrangers, 15 décembre 2021, n° 21/04704

  • Métro·
  • Fichier·
  • Droit d'asile·
  • Réquisition·
  • Associations·
  • Procès-verbal·
  • Séjour des étrangers·
  • Éloignement·
  • Empreinte digitale·
  • Cameroun

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. des etrangers, 15 déc. 2021, n° 21/04704
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 21/04704
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Rouen, 13 décembre 2021
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 21/04704 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I6PF

COUR D’APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 15 DECEMBRE 2021

Nous, Jocelyne LABAYE, Conseillère à la cour d’appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la Première Présidente de ladite cour pour le suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,

Assistée de Jean-François GEFFROY, Greffier ;

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’arrêté du Préfet du NORD en date du 12 décembre 2021 portant obligation de quitter le territoire français pour Madame Z X Y

née le […] à […];

Vu l’arrêté du Préfet du NORD en date du 12 décembre 2021 de placement en rétention administrative de Madame Z X Y ayant pris effet le 12 décembre 2021 à 09 heures 00 ;

Vu la requête de Madame Z X Y en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative ;

Vu la requête du Préfet du NORD tendant à voir prolonger pour une durée de vingt huit jours la mesure de rétention administrative qu’il a prise à l’égard de Madame Z X Y ;

Vu l’ordonnance rendue le 14 Décembre 2021 à 13 heures 00 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l’encontre de Madame Z X Y régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours à compter du 14 décembre 2021 à 09 heures 00 jusqu’au 11 janvier 2022 à la même heure ;

Vu l’appel interjeté par Madame Z X Y, parvenu au greffe de la cour d’appel de Rouen le 14 décembre 2021 à 15 heures 29 ;

Vu l’avis de la date de l’audience donné par le greffier de la cour d’appel de Rouen :

— aux services de Monsieur le Directeur du centre de rétention d’Oissel,

— à l’intéressé,

— au Préfet du NORD,

— à Me Marie LEPEUC, avocat au barreau de ROUEN, choisi,

Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu la décision prise de tenir l’audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et

d’entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de OISSEL;

Vu la demande de comparution présentée par Madame Z X Y ;

Vu l’avis au ministère public ;

Vu les débats en audience publique, en l’absence du Préfet du NORD et du ministère public ;

Vu la comparution de Madame Z X Y par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de OISSEL;

Me Marie LEPEUC, avocat au barreau de ROUEN, étant présent au Palais de Justice ;

Vu les réquisitions écrites du ministère public ;

Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;

L’appelant et son conseil ayant été entendus ;

Décision : Prononcée par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

****

A l’appui de son appel, Mme Z X Y conclut à :

— L’irrégularité du contrôle d’identité dont elle a été l’objet : le procès-verbal indique que le contrôle a eu lieu 'métro Porte des Postes’ sans plus de précision, or, les réquisitions du procureur autorisaient les contrôles dans les stations de métro de la ligne I, elle soutient avoir été contrôlée en dehors de la station de métro, dans la rue, donc dans un lieu non visé aux réquisitions

— l’illégalité de la prise d’empreintes :

il ne ressort pas de la procédure que le procureur de la République ait été avisé de la prise d’empreintes conformément aux dispositions de l’article L 813-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mentions de trois des procès-verbaux du dossier sont contradictoires

— le défaut d’habilitation de l’agent de police judiciaire ayant consulté les fichiers Sbna et Visabio, même s’il est habilité pour le Faed, il résulte de la lecture même du procès-verbal qu’il ne l’est pas pour les deux autres fichiers

— la violation de l’article L 744-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : le numéro figurant sur la notification des droits comme étant celui de l’Ambassade du Cameroun n’est pas le bon, le numéro 'sonne dans le vide', peu important que le numéro soit attribué et qu’elle n’ait pas souhaité exercer le droit de téléphoner à l’Ambassade, il y a grief, ce n’est pas à l’association présente au centre de rétention administrative à pallier cette erreur, en outre, le numéro de l’association donné est celui du siège en région parisienne pas le numéro de l’antenne de Oissel,

— l’irrégularité de l’arrêté de placement en rétention lequel n’est pas suffisamment motivé au regard de sa situation : il ne mentionne notamment pas sa famille en France, le logement dont elle dispose, son entrée dans le processus OACAS, Organisme d’Accueil Communautaire et d’Activité Solidaire (type Emmaüs)

— la violation du principe général de l’Union européenne droit d’être entendue avant l’édiction d’une mesure défavorable, principe applicable du fait que la rétention est une mesure accessoire à la mesure d’éloignement : on ne lui a pas demandé si elle avait une adresse et où était son passeport

— l’absence d’examen de la possibilité de l’assigner à résidence : elle a une adresse certaine et des garanties de représentation même si elle ne peut pas présenter son passeport, sa demande d’asile a été rejetée mais aucune décision d’éloignement ne lui avait été notifiée.

Elle demande au premier président de :

— dire son appel recevable

— constater que la procédure ayant précédé le placement en rétention est irrégulière

— Dit l’arrêté de placement en rétention irrégulier

— infirmer l’ordonnance déférée

— la remettre en liberté

A l’audience, le conseil de Mme Z X Y développe les moyens soulevés dans la déclaration d’appel.

Mme X Y explique qu’elle a eu au téléphone l’association qui doit l’héberger le 20 décembre et où elle doit travailler. Elle a été sélectionnée avec d’autres femmes, elles seront huit à y travailler et y être hébergées trois ans. Elle s’inquiète de ne pas pouvoir y aller.

Son conseil ajoute que c’est une association type Emmaüs qui héberge des femmes qui y travaillent (selon certains critères). Une disposition du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile autorise les étrangers ayant travaillé dans ce type d’association trois ans de demander la régularisation de leur situation. La préfecture a agréé l’association en ayant le nom des femmes concernées donc celui de Mme X Y, elle aurait pu faire une assignation à résidence.

Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 14 décembre 2021, sollicite la confirmation de la décision.

SUR CE,

Sur la forme

Il résulte des énonciations qui précédent que l’appel interjeté par Madame Z X Y à l’encontre de l’ordonnance rendue le 14 Décembre 2021 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.

Sur le fond

Mme X Y a été contrôlée, à 10 heures, sur le fondement des articles 78-2 alinéa 7 et 78-2-2 du code de procédure pénale sur réquisitions du procureur de la République de Lille de procéder à un contrôle d’identité le 11 décembre 2021, entre 08 heures et 12 heures 30 aux fins de rechercher les personnes susceptibles de commettre certaines infractions listées aux réquisitions dans les lieux suivants : Roubaix centre, dans des secteurs déterminés, et métro ligne 1 dans un secteur déterminé par les stations de métro suivantes : (…) dont la station Porte des Postes, sans préciser contrôle à l’intérieur des stations de métro. Mme X Y a été contrôlée, selon le procès-verbal, 'métro Porte des Postes', station figurant dans le secteur délimité par les réquisitions. L’intéressée soutient,

sans le prouver, qu’elle était dans la rue, comme rappelé par le premier juge, les procès verbaux de police font foi jusqu’à la preuve contraire et les policiers notent qu’ils étaient à la station de métro.

L’article L 813-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

si l’étranger ne fournit pas d’éléments permettant d’apprécier son droit de circulation ou de séjour, les opérations de vérification peuvent donner lieu, après information du procureur de la République, à la prise d’empreintes digitales ou de photographies pour établir la situation de cette personne et selon l’article L 142-2, en vue de l’identification d’un étranger qui n’a pas justifié des pièces ou documents mentionnés à l’article L. 812-1 (….) , les données des traitements automatisés des empreintes digitales mises en 'uvre par le ministère de l’intérieur peuvent être consultées par les agents expressément habilités des services de ce ministère dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

En l’espèce, Mme X Y n’ayant pas de document lui permettant de circuler ou séjourner que le territoire national, elle a été placée en retenue administrative les fichiers Faed fichier automatisé des empreintes digitales, Sbna et Visabio ont été consultés. Le procès-verbal rédigé à 11 heures 45 (p. 10) mentionne les résultats de la consultation des fichiers, il précise que les policiers ont fait procéder à une prise d’empreintes et de photographie après information au procureur, dans que le procès-verbal n’indique à quelle heure le procureur a été informé. Le procès-verbal de fin de retenue (p. 22) rappelle les résultats de la consultation et indique que le procureur avait été informé à 10 heures 20, ce qui n’apparaît pas contradictoire avec le procès-verbal précédent, même si le procès-verbal rédigé’ à 10 heures 20 (p.5) avisant le procureur du placement en retenue ne mentionne pas expressément un avis sur la prise d’empreintes et de photographie. Même si le procureur n’a pas fait l’objet d’une information préalable, mais seulement à 11 heures 45, en l’absence de disposition légale permettant à ce magistrat de s’opposer à la mesure, aucun grief n’est caractérisé.

Les fichiers ont été consultés par Ghislain Coquerelle, agent de police judiciaire habilité pour les trois fichiers (p. 10), malgré la formulation maladroite de la phrase qui pourrait laisser penser à une habilitation pour seulement deux fichiers.

M. X Y soutient que le numéro du consulat qui lui a été donné n’est pas le bon, qu’elle n’avait pas la possibilité de le demander au centre, puisque le numéro de France Terre d’Asile qui lui a été donné est celui de Paris, non celui de Oissel et que de toute façon cette association n’est pas au centre de rétention administrative le dimanche. Pendant la procédure, l’intéressée a été avertie de la possibilité de saisir son consulat mais elle n’a pas souhaité faire prévenir les autorités consulaires de son pays. Il lui suffisait de demander, non pas nécessairement à une association d’aide, dont la présence ou non à ce moment au centre est indifférente pour la solution de l’espèce, au service compétent du centre, après avoir signalé que le numéro ne répondait pas, la vérification du numéro ou la recherche de celui-ci, aucun texte n’imposant, d’ailleurs, à l’administration de notifier le numéro du consulat par procès-verbal comme cela a été fait.

La décision de placement en rétention fait état des circonstances de droit et de fait qui la fondent, et notamment les circonstances liées à la situation personnelle de Mme X Y, sa situation de famille, sa situation quant à l’asile.

Si l’étranger a été entendu sur l’irrégularité du séjour ou la perspective de l’éloignement, le droit d’être entendu n’implique pas qu’il soit invité à présenter des observations spécifiques sur la décision de placement en rétention.

L’intéressée a pu faire état de sa situation lors de son audition devant les forces de l’ordre lorsqu’elle a été entendue sur son droit au séjour, la question lui a alors été posée quant à son passeport, ce à

quoi elle a répondu ne pas l’avoir, sur sa résidence chez quelqu’un en France, elle a répondu négativement, et le placement en rétention a été évoqué, Mme X Y indiquant ne pas vouloir retourner dans son pays. Elle a également déclaré que toute sa famille est au Cameroun, qu’elle est sans domicile fixe, qu’elle est en France depuis 2019, que sa demande d’asile a été rejetée. L’Office Français de Protection des Réfugiés et des Apatrides a en effet rejeté sa demande d’asile le 23 novembre 2020, décision notifiée le 25 janvier 2021, la Cour nationale du droit d’asile a confirmé le rejet le 19 juillet 2021, décision notifiée le 26 juillet, peu important que le préfet n’ait pas pris immédiatement une décision d’éloignement.

L’arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d’éléments factuels pertinents liés à la situation individuelle et personnelle de l’intéressé, connus au jour où l’autorité administrative prend sa décision, sans avoir à relater avec exhaustivité l’intégralité des allégations de la personne concernée. Mme X Y produit une attestation d’hébergement et un justificatif de domicile mais le préfet du Nord n’avait pas ces pièces en sa possession lorsqu’il a édicté sa décision de placement en rétention administrative, notamment l’intégration au dispositif de l’association Abej Solidarité n’était pas connue du préfet. Le préfet n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation sur la situation de l’intéressée.

Une demande de laissez-passer consulaire a été adressée à l’Ambassade du Cameroun le 12 décembre et une demande de routing transmise le même jour au Pôle Central d’Éloignement pour un premier départ à compter du 18 décembre. La préfecture a fait toutes diligences et la décision du premier juge sera confirmée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,

Déclarons recevable l’appel interjeté par Madame Z X Y à l’encontre de l’ordonnance rendue le 14 Décembre 2021 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN, déclarant la décision de placement en rétention prononcée à l’encontre de Madame Z X Y régulière, et ordonnant en conséquence son maintien en rétention pour une durée de vingt-huit jours ;

Confirmons la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Fait à Rouen, le 15 Décembre 2021 à 16 heures 25.

LE GREFFIER, LE CONSEILLER,

NOTIFICATION

La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Rouen, Chambre des etrangers, 15 décembre 2021, n° 21/04704