Cour d'appel de Toulouse, 30 avril 2008, n° 07/00659

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 30 avr. 2008, n° 07/00659
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 07/00659
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 19 octobre 2006, N° 04/02985

Texte intégral

30/04/2008

ARRÊT N°

N° RG: 07/00659

Décision déférée du 20 Octobre 2006 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE – 04/02985

Melle X

L’UMT – MUTUALITE FRANCAISE

représentée par la SCP RIVES-PODESTA

C/

B Z épouse Y

représentée par la SCP B. CHATEAU

XXX

représentée par la SCP MALET

Réformation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE AVRIL DEUX MILLE HUIT

***

APPELANT(E/S)

L’UMT – MUTUALITE FRANCAISE

XXX

XXX

représentée par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour

assistée de la SELARL PILLARD ET ASSOCIES, avocats au barreau de ROUEN

INTIME(E/S)

Madame B Z épouse Y

XXX

XXX

représentée par la SCP B. CHATEAU, avoués à la Cour

assistée de Me Gabriele SANS, avocat au barreau de CASTRES

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP MALET, avoués à la Cour

assistée de Me Elisabeth GRAUJEMAN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Mars 2008, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant V. SALMERON, conseiller, et C. COLENO, conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BELIERES, président

V. SALMERON, conseiller

C. COLENO, conseiller

Greffier, lors des débats : A. THOMAS

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par C. BELIERES, président, et par A. THOMAS, greffier de chambre.

Mme Z épouse Y a été embauchée le 5 septembre 1988 par la société Les fermiers Occitans en qualité d’ouvrière polyvalente.

Le 3avril 1999 la société les fermiers Occitans a souscrit auprès de l’institution AG2R Prévoyance un contrat d’assurance groupe à effet du 1er janvier 1999 couvrant les risques décès, incapacité, invalidité et frais d’obsèques.

Ce contrat a été résilié le 30 décembre 2000 et a été remplacé par une assurance groupe UMT Mutualité Française à effet au 1er janvier 2001.

Mme Z épouse Y a été victime d’une hémorragie cérébrale le 23 novembre 1999. A compter de cette date elle a été en arrêt de travail jusqu’au 22 novembre 2002 et a bénéficié durant cette période d’indemnités journalières au titre de la garantie incapacité versée par la compagnie AG2R Prévoyance.

Le 4 décembre 2002 elle a été placée en invalidité 2e catégorie par la Mutualité sociale Agricole, avec effet au 23 novembre 2002.

L’institution AG2R Prévoyance a refusé de prendre en charge le versement de la rente invalidité au motif que le contrat était résilié au jour du placement en invalidité.

Par jugement du 20 octobre 2006 le tribunal de grande instance de Toulouse saisi par Mme Z épouse Y a

* mis hors de cause la compagnie AG2R prévoyance,

* condamné l’UMT Mutualité Française à payer à Mme Z épouse Y la somme de 7.058,28 euros pour la période du 23 novembre 2002 au 23 juillet 2004 avec intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 2002 et la somme de 352,91 euros par mois à compter du 30 août 2004

* débouté Mme Z épouse Y de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires

* condamné l’UMT Mutualité Française à payer à Mme Z épouse Y la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile

* rejeté la demande de AG2R Prévoyance fondée sur l’article 700 du nouveau code de procédure civile

* condamné l’UMT Mutualité Française aux dépens.

Pour statuer ainsi le tribunal a considéré que l’incapacité et l’invalidité constituaient deux atteintes distinctes donnant lieu à deux garanties différentes et que le risque d’invalidité trouvait son origine juridique non dans la maladie, mais dans la consolidation.

Par déclaration du 5 février 2007 l’UMT Mutualité Française a relevé appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

L’UMT Mutualité Française par conclusions notifiées le 4 juin 2007 auxquelles il est fait expressément référence pour l’exposé du détail de l’argumentation conclut à l’infirmation de la décision, au rejet des demandes dirigées contre elle, à la condamnation de Mme Z épouse Y et de la compagnie AG2R Prévoyance à lui payer la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et à la condamnation de Mme Z épouse Y aux dépens.

Se prévalant de différentes jurisprudence, elle soutient que le service de la rente invalidité constitue une prestation différée au sens de l’article 7 de la loi du 30 décembre 1989 (loi Evin), puisque cette invalidité trouve son fait générateur dans la maladie qui a d’abord donné lieu au versement des indemnités journalières d’incapacité, puis au classement en invalidité après consolidation, la consolidation n’étant qu’une étape administrative et non la réalisation d’un nouveau risque.

Elle conclut en conséquence que c’est le premier assureur l’institution AG2R Prévoyance qui doit assumer la charge de la prestation différée d’invalidité.

Mme Z épouse Y par conclusions notifiées le 10 octobre 2007 auxquelles il est fait expressément référence pour l’exposé du détail de l’argumentation conclut à titre principal à la condamnation des deux assureurs, l’UMT et la Compagnie AG2R Prévoyance à garantir son invalidité et à lui verser la somme de 33.101,36 euros au titre de la rente invalidité de novembre 2002 à octobre 2007 outre la somme de mensuelle de 561,04 euros à compter d’octobre 2007 avec réévaluations contractuelles ainsi que 10.000 euros de dommages et intérêts et 4.000 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Subsidiairement elle formule les mêmes demandes d’abord à l’égard de l’institution AG2R prévoyance, puis à défaut à l’égard de l’UMT Mutualité Française.

Elle souligne que l’hémorragie cérébrale à l’origine de son invalidité est intervenue pendant la durée de validité du contrat souscrit avec l’institution AG2R Prévoyance, que celle ci doit sa garantie, et qu’en tout état de cause tant AG2R Prévoyance que la société UMT ont bénéficé des cotisations couvrant son invalidité de sorte qu’elles sont obligées à la même chose.

Elle souligne en outre que les deux assureurs lui ont opposé des considérations purement mercantiles pour refuser de prendre en charge son invalidité alors que sa situation financière est très obérée.

L’institution de prévoyance AG2R Prévoyance par conclusions notifiées le 11 octobre 2007 auxquelles il est fait expressément référence pour l’exposé du détail de l’argumentation conclut à la confirmation de la décision au rejet des demandes dirigées contre elle et à la condamnation de la mutuelle UMT Mutualité Française à lui payer 3.000 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle rappelle que le placement en invalidité est intervenu alors que le contrat d’assurance groupe conclu avec elle était résilié, que seule la reconnaissance de l’invalidité par la sécurité sociale fait naître le droit à prestation, et qu’il ne s’agit pas d’une prestation différée au sens de la loi Evin.

Se prévalant à son tour de différentes jurisprudence, elle soutient que l’approche juridique doit être privilégiée par rapport à l’approche médicale et que seule doit être retenue la survenance des éléments constitutifs du risque assuré tels que définis par le contrat soit en l’espèce la consolidation.

Elle conclut en conséquence que l’invalidité, survenue pendant l’exécution du contrat souscrit auprès de l’UMT doit être prise en compte par cette dernière

L’ordonnance de clôture est intervenue le 5 mars 2008.

MOTIFS DE LA DECISION

Le contrat souscrit auprès de l’institution AG2R Prévoyance prévoit une garantie en cas d’invalidité et dispose :

'a l’expiration de la période d’incapacité et dès la reconnaissance par la Sécurité Sociale de l’état d’invalidité ou d’incapacité permanente professionnelle il est prévu le versement d’une rente mensuelle'.

L’article 19 des conditions générales prévoit qu’en cas de résiliation ou de non renouvellement du contrat l’AG2R Prévoyance poursuivra le versement des prestations périodiques, acquises ou nées durant l’exécution du contrat, à leur niveau atteint à la date de résiliation ou de non renouvellement

* les dispositions légales

L’article 7 de la loi du 31 décembre 1989 (Loi Evin) dispose :

'lorsque des assurés ou des adhérents sont garantis collectivement contre les risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité le risque décès ou les risques d’incapacité ou d’invalidité, la résiliation ou le non renouvellement du contrat ou de la convention est sans effet sur le versement des prestations immédiates ou différées acquises ou nées durant son exécution.

* l’application au cas d’espèce

Mme Z épouse Y été victime d’une hémorragie cérébrale le 23 novembre 1999 et placée en arrêt de travail.

Les arrêts de travail qui se sont succédés ont donné lieu à indemnisation de la part de l’institution AG2R au delà de la résiliation du contrat qui était intervenue le 30 décembre 2000. En effet la maladie à l’origine de ces arrêts de travail s’était manifestée avant la résiliation du contrat de prévoyance complémentaire et la prise en charge au titre de ce contrat au titre du maintien des garanties acquises ne fait l’objet d’aucune discussion.

La discussion porte seulement sur la prise en charge de l’invalidité.

Selon notification intervenue le 4 décembre 2002 Mme Z épouse Y a été placée en invalidité 2e catégorie par la MSA du Tarn Aveyron à compter du 23 novembre 2002.

Sur le plan de l’origine médicale, le placement en invalidité découle directement de la maladie dont était atteinte Mme Z épouse Y et qui avait donné lieu à la prise en charge au titre de l’assurance incapacité. Cet état de fait est admis par toutes les parties.

La période d’incapacité temporaire selon les principes applicables et qui résultent des articles L 341-3 et R341-8 du code de la Sécurité Sociale se termine soit par la guérison, soit par le décès soit par la consolidation qui détermine une invalidité permanente.

L’invalidité permanente correspond donc à l’incapacité dans lequel se trouve l’assuré après que son état ait été consolidé, la consolidation ne constituant que le constat de la stabilisation dans le temps de l’état d’incapacité, ce qui démontre que l’invalidité et l’incapacité sont indissociablement liées lorsqu’elles ont la même origine médicale.

La maladie est donc le fait générateur d’abord de l’incapacité, puis de l’invalidité constatée après consolidation.

La consolidation ne correspond pas à la réalisation d’un risque nouveau ou différent. Il n’y a en effet ni altération de la pathologie, ni intervention d’une cause extérieure entraînant une modification dans la situation médicale de l’intéressé, la consolidation a en réalité seulement pour effet de consacrer le droit à une nouvelle prestation, (la prestation invalidité) au titre de la maladie considérée.

Le fait générateur qui est constitué par la survenance de la maladie, est intervenu pendant la durée de validité du contrat souscrit auprès de l’institution AG2R Prévoyance. L’invalidité entraînée par cette maladie constitue par voie de conséquence une prestation différée au sens de l’article 7 de la loi du 30 décembre 1989 (loi Evin) mais dont le principe de garantie était déjà né pendant la durée de validité du contrat.

Elle doit être prise en charge par AG2R Prévoyance au titre des garanties souscrites.

La décision déférée sera infirmée, et l’institution AG2R Prévoyance sera condamnée à payer les arrérages de la rente échus depuis novembre 2002 outre le versement mensuel du complément rente invalidité pour les échéances à venir

Par voie de conséquence la demande à l’égard de la mutuelle UMT sera écartée, le fait générateur étant intervenu avant la date d’effet du contrat souscrit auprès de cette mutuelle.

En ce qui concerne le quantum de la rente,

S’agissant d’une invalidité 2e catégorie, Mme Z épouse Y a droit à une rente représentant 80% de son salaire.

Mme Z épouse Y chiffre sa demande à la somme de 561,04 euros par mois sur la base d’un salaire brut de 961.62 euros et d’une rente MSA brute de 400.58 euros.

Ces indications chiffrées ne sont ni contestées ni critiquées, mais ce calcul n’applique pas le coefficient de 80% contractuellement prévu, et retient le coefficient revalorisé de la rente Sécurité sociale tel qu’il s’établissait en février 2004, alors qu’il s’établissait en réalité à 388,07 euros au 4 décembre 2002 selon attestation de la MSA du 4 décembre 2002.

Après correction de ces paramètres il convient de fixer la rente mensuelle ainsi qu’il suit, sur la base d’un salaire annuel de 9313,64 euros soit 776,14 euros par mois :

(961,62 x80%) – 388,07 = 381,23 euros par mois soit un total de 7624,60 euros pour la période du 23 novembre 2002 au 24 juillet 2004 avec intérêts de droit au fur et à mesure des échéances et le bénéfice des réévaluations contractuelles pour la durée de la garantie.

Sur la demande de dommages et intérêts

L’institution AG2R Prévoyance n’a pas exécuté son obligation contractuelle et ne justifie d’aucune cause étrangère.

Le non paiement de cette rente a contribué à détériorer la situation financière de Mme Z épouse Y qui n’a disposé que de ressources minimes pendant plusieurs années, rendant difficile le règlement de ses charges, et la privant de toute dépense d’agrément ou de confort.

Il convient de lui allouer pour le préjudice ainsi subi la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts.

Il lui sera en outre alloué la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la Mutuelle UMT Mutualité Française.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

infirme la décision déférée

statuant à nouveau

Condamne l’institution AG2R Prévoyance à garantir Mme Z épouse Y au titre de la garantie invalidité.

Condamne en conséquence l’institution AG2R Prévoyance à payer à Mme Z épouse Y la somme de 7624,60 euros au titre des mensualités échues du 23 novembre 2002 au 23 juillet 2004 avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance, et la condamne à payer mensuellement la rente invalidité d’un montant 381,23 euros pour la période ultérieure avec le bénéfice des réévaluations contractuelles pour la durée de la garantie.

Condamne en outre l’institution AG2R Prévoyance à payer à Mme Z épouse Y la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaire et la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Rejette les demandes dirigées contre la Mutuelle UMT Mutualité Française.

Rejette la demande de l’UMT Mutualité fançaise.

Condamne l’institution AG2R aux entiers dépens, avec pour les dépens d’appel application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Chateau Passera et de la SCP Rives Podesta avoués.

Le greffier, Le président,

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