Cour d'appel de Toulouse, 18 mars 2016, n° 14/02408

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 18 mars 2016, n° 14/02408
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 14/02408
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 23 mars 2014, N° F12/00783

Sur les parties

Texte intégral

18/03/2016

ARRÊT N°

N° RG : 14/02408

CD/MN

Décision déférée du 24 Mars 2014 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE F12/00783

M. Z

SAS STATITEC

C/

N O M

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e Chambre Section 2 – Chambre sociale

***

ARRÊT DU DIX HUIT MARS DEUX MILLE SEIZE

***

APPELANTE

SAS STATITEC, représentée par sa Présidente Mme Y

XXX

XXX

représentée par Me Jérôme MESSANT de la SELARL MESSANT ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Madame N O M

XXX

XXX

représentée par Me Nicole LAPUENTE de la SCP LAPUENTE PECYNA, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945.1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Janvier 2016, en audience publique, devant , C. KHAZNADAR et C. DECHAUX conseillers chargés d’instruire l’affaire, les parties ne s’y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

C. PARANT, président

C. DECHAUX, conseiller

C. KHAZNADAR, conseiller

Greffier, lors des débats : C. NEULAT

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

— signé par C. PARANT, président, et par C. NEULAT, greffier de chambre.

FAITS- PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme N O épouse M était embauchée le XXX, en qualité de statisticienne chargée d’études, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée par la SAS Statitec, le coefficient 355 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques lui étant reconnu.

Par avenant en date du 1er octobre 2002, elle était promue au statut cadre, coefficient 130 position 2.2, avec un salaire brut mensuel fixé à 2 531 euros pour un horaire mensuel de 161.67 heures.

Au titre de ses fonctions, elle devait prendre en charge l’ensemble des tâches liées à la bonne exécution de tout projet d’étude statistique qui lui était confié et

— coordonner et encadrer le travail des statisticiens, data-managers et opérateurs de saisie,

— superviser, contrôler et rendre compte de leurs résultats.

Par avenant en date du 16 juillet 2003, ses fonctions étaient complétées et elle devait également;

— maintenir à jour la documentation utilisateur de l’ensemble de la production,

— s’assurer de la correcte application des normes et réglementation applicable aux études à réaliser,

— préparer la planification et la répartition des travaux entre collaborateurs et les soumettre à l’aval de la direction,

— préparer la tenue des réunions de synthèse,

— établir un rapport d’avancement des travaux à la direction.

Le contrat demeurant pour le reste inchangé.

Par avenant en date du 2 janvier 2009, elle devenait responsable de production, et devait sous l’autorité de Mme Y assurer notamment:

— la gestion et la mise en place des études,

— coordonner et encadrer les équipes statisticiens, data-manager et assistantes de monitoring, opérateurs de saisie sur l’ensemble des projets,

— gérer le suivi des avancements et projets,

— gérer les plannings,

— organiser les points réguliers pour chacun des OJD,

— préparer les présentations,

— gérer le logiciel Data-management Capture system,

— superviser les DTM,

— assurer la maintenance informatique.

Son salaire brut mensuel était porté à 3900 euros pour un horaire mensuel de 151.67 heures.

A partir du 27 janvier 2012, elle faisait l’objet d’un arrêt maladie qui était prolongé à plusieurs reprises.

Le 16 mars 2012, son employeur lui notifiait un avertissement.

Le 11 mai 2012, le médecin du travail indiquait 'une inaptitude au poste de travail est prévisible. A revoir dans 15 jours. L’origine de l’inaptitude ne permet pas de se proposer des solutions de transformation de poste ou de mutation'.

Le 21 mai 2012, le médecin du travail la déclarait inapte à tout poste dans l’entreprise.

Sur interrogation de la société Statitec sur les postes susceptibles d’être proposés à Mme M dans le cadre de l’obligation de recherche de reclassement, le médecin du travail indiquait le 11 juin 2012 qu’elle était 'inapte définitif à son poste de travail, et à tous postes dans l’entreprise. L’origine de l’inaptitude ne permet pas de se proposer des solutions de transformation de poste ou de mutation'.

Le 13 juin 2012 elle était convoquée à un entretien préalable à licenciement en raison de son inaptitude, fixé au 22 juin.

Le 21 juin 2012 son employeur annulait cette convocation la convoquant à nouveau pour entretien préalable pour faute fixé au 12 juillet 2012, puis lui notifiait par lettre recommandée avec avis de réception en date du 25 juillet 2012 son licenciement pour faute grave.

Entre temps, Mme M avait saisi le Conseil de prud’hommes de Toulouse le 5 avril 2012, aux fins d’annulation de l’avertissement dont elle avait fait l’objet le 16 mars 2012.

Par jugement en date du 24 mars 2014, le Conseil de prud’hommes de Toulouse, après avoir rejeté les demandes de Mme M d’annulation de l’avertissement du 16 mars 2012 et de résiliation judiciaire du contrat de travail et considéré que le licenciement de Mme M était sans cause réelle et sérieuse, a :

— Condamné la société Statitec au paiement de 21 191, 09 euros au titre de l’indemnité de licenciement.

— Condamné la société Statitec au versement de 13 878,47 euros au titre l’indemnité de préavis et de 1 387,84 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.

— Condamné la société Statitec au versement de 60 000 euros au titre de dommages et intérêts.

— Débouté Mme M 'du surplus',

— Condamné la société Statitec au paiement d’une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Mme M interjetait régulièrement appel par lettre recommandée avec avis de réception parvenue au greffe le 2 mai 2014, de l’ensemble des dispositions de ce jugement qui lui avait été notifié le 18 avril 2014.

En l’état de ses conclusions faxées le 18 janvier 2016 et reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, Mme M demande à la Cour de :

A titre principal,

— Réformer le jugement en prononçant l’annulation de l’avertissement qui lui a été notifié pendant son arrêt maladie,

— Condamner la société Statitec à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 1 500 euros,

— Réformer le jugement en prononçant la résiliation judiciaire du contrat de travail et, ce pour les manquements importants commis par son employeur à son égard, à l’origine à l’évidence, de la dégradation importante de son état de santé,

— Condamner la société Statitec à lui payer :

* 13 878,47 euros à titre d’indemnité de préavis,

*1 387,84 euros au titre des congés payés y afférents,

* 21 191,09 euros (1/3 de mois de salaire par année d’ancienneté) au titre de l’indemnité de licenciement

* 111 727,76 euros à titre de dommages et intérêts à titre de dommages et intérêts,

* 27 556,94 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral particulier subi,

A titre subsidiaire, elle demande à la Cour de :

— Dire et juger que son licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse a fortiori sur une faute grave,

— Condamner la société Statitec à lui payer :

* 13 878,47 euros à titre d’indemnité de préavis, et 1 387,84 euros au titre des congés payés y afférents,

* 21 191,09 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 111 727,96 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

* 27 556,94 euros à titre de réparation du préjudice moral,

* 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile .

— Condamner la société Statitec aux dépens.

Au soutien de ses demandes Mme M développe essentiellement les moyens et arguments suivants :

*Concernant sa demande relative à l’annulation de l’avertissement notifié le 16 mars 2012:

— tous les manquements qui lui sont reprochés ont été stigmatisés lors de l’entretien annuel de Mme I mené le 13 mars 2012 par Mme Y, soit 3 jours avant la sanction qui lui est infligée. Or les réponses de Mme I, qui n’a pas établi d’attestation, ont été orientées par Mme Y,

— étant en arrêt maladie au moment de cet avertissement, il ne peut lui être reproché un comportement à l’égard de ses subordonnés,

— l’absence de mise à jour du logiciel capture system ne lui est pas imputable, dés lors que M. G responsable du logiciel data-management qui l’avait précédée avait été licencié, et Mme Y n’avait pas procédé aux mises à jour,

* Concernant sa demande relative à la résiliation judiciaire de son contrat de travail :

— elle a fait l’objet de propos et de réflexions dénigrantes, injurieuses et humiliantes, réitérées de la part de Mme Y sa responsable hiérarchique, alors qu’elle se retrouvait par ailleurs contrainte de gérer une situation de sous effectif et un surcroît de travail, ce qui a eu pour effet de dégrader son état de santé,

— pendant son arrêt de travail elle a fait l’objet de reproches et d’un avertissement,

— la procédure d’inaptitude a été remise en cause auprès du médecin du travail,

— elle a rencontré des difficultés avec l’organisme de prévoyance puisqu’à l’issue de la période de garantie de salaire, elle n’a pas été couverte de ses droits par le fait de son employeur qui n’effectuait pas les règlements des salaires dans les délais habituels, ni transmis à la Caisse primaire d’assurance maladie l’attestation de salaires correspondant à l’arrêt de travail,

— son employeur a déposé une plainte pénale contre elle,

— la procédure de licenciement pour inaptitude a été interrompue au profit d’un licenciement pour faute.

* Concernant sa demande relative au licenciement:

— la plainte pour vol déposée par la société Statitec a été classée sans suite, la perquisition effectuée à son domicile dans le temps de sa garde à vue n’ayant pas mis en évidence qu’elle aurait été en possession de données sensibles,

— elle était contrainte régulièrement de travailler à son domicile et Mme Y lui avait donné les droits informatiques pour accéder à son poste informatique professionnel qui se trouvait au siège de la société,

— son employeur se prévaut de faits (utilisation clé USB16 Go) dont il a eu connaissance postérieurement à la date de convocation à l’entretien préalable,

— par l’avertissement son employeur avait en tout état de cause épuisé son pouvoir disciplinaire pour tous les faits invoqués.

En l’état de ses conclusions déposées le 13 février 2015 et reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Statitec demande à la Cour de :

— Confirmer le jugement du 24 mars 2014 en ce qu’il a débouté Mme M de sa demande d’annulation de l’avertissement notifié le 16 mars 2012 et de sa demande en dommages et intérêts y afférente, et l’a déboutée de sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur,

— Réformer sur le reste de son dispositif et dire et juger que le licenciement pour faute grave notifié le 25 juillet 2012 est justifié,

— Débouter en conséquence Mme M de ses demandes indemnitaires,

— Condamner Mme M au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes la société Statitec développe essentiellement les moyens et arguments suivants :

* l’ensemble des griefs énoncés dans l’avertissement notifié le 16 mars 2012 étaient justifiés, et souligne que lorsque Mme M a saisi le Conseil de prud’hommes de sa contestation de l’avertissement, elle n’a pas sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail, ni fait état de difficultés dans la relation de travail.

* concernant la résiliation judiciaire du contrat de travail, et après avoir rappelé la nécessité pour le salarié d’apporter la preuve de manquements suffisamment graves empêchant la poursuite du contrat de travail, dont l’appréciation relève des juges du fond, mais qu’en cas doute celui-ci profite à l’employeur et qu’un manquement ancien jamais relevé par le salarié, qui n’a pas empêché la poursuite du contrat de travail ne peut fonder la résiliation judiciaire,

elle soutient que la seule production de certificats médicaux portant sur un état dépressif, même mentionnant un lien avec l’activité professionnelle, sont insuffisants à établir la matérialité d’un harcèlement justifiant la rupture aux torts de l’employeur, même en cas d’inaptitude du salarié à la reprise de son poste.

* concernant le licenciement, elle soutient que la faute grave est caractérisée dès lors que Mme M a sorti de l’entreprise des documents ou données confidentielles appartenant à l’employeur, sans justification professionnelle, alors qu’une obligation de confidentialité pesait sur elle, ces faits ayant été établis dans le cadre de l’enquête pénale consécutive à la plainte qu’elle avait déposée, peu important qu’il y ait eu un classement sans suite de la plainte décidée par le procureur de la République.

Le travail à distance que Mme M invoque pour le justifier est inopérant dès lors que la connexion à distance ne permet pas l’enregistrement de fichier sur l’ordinateur personnel de l’utilisateur, le travail effectué étant directement enregistré sur le serveur Exchange de l’entreprise. Elle soutient que le travail à distance n’explique ni ne justifie la copie de fichiers localisés sur le PC de l’entreprise vers le PC personnel.

MOTIFS

* Sur l’annulation de l’avertissement du 16 mars 2012 :

Dans le cadre de l’exercice de son pouvoir disciplinaire, l’employeur est fondé à sanctionner des fautes commis par son salarié.

Il résulte des dispositions de l’article L.1331-1 du Code du travail que constitue une sanction toute mesure autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Le contrôle de la matérialité des faits reprochés implique une appréciation de leur caractère objectif et de leur imputabilité au salarié.

Enfin l’article L.1332-4 du Code du travail dispose qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait n’ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

La lettre de notification de l’avertissement du 16 mars 2012 est ainsi rédigée :

'Votre absence, en nous contraignant à intervenir en vos lieu et place, aux fins de tenter d’assurer la continuité du service, me conduit à découvrir un ensemble de faits que je ne peux tolérer.

En effet, je suis contrainte de vous rappeler que vous occupez, au sein de la société, le poste de responsable de production depuis le 1er janvier 2009, votre contrat de travail, et la fiche de poste y annexée définissant précisément vos fonctions.

En particulier, entrent dans vos attributions la coordination et l’encadrement des équipes statisticiens, data-managers,…, afin d’assurer le respect des délais, et la qualité des données, ainsi que la formation des nouveaux opérateurs de saisie et data-managers, la participation à l’écriture des procédures opératoires standards….

Or, malgré les multiples observations que j’avais été conduite à vous faire depuis un an et demi, quant aux méthodes de travail que vous mettiez en 'uvre, je suis contrainte de relever l’absence totale d’amélioration : en particulier,

— l’absence d’homogénéisation des bases de données notamment notre client IFM pour lequel nous travaillons pourtant toujours sur une même pathologie, le myélome, des consignes diverses et variées ayant été données pour la réalisation de ses bases obligeant de ce fait les statisticiens travaillant dessus à passer un temps supplémentaire colossal afin de programmer leurs analyses sans pouvoir reprendre les programmes d’une étude précédente,

— la non validation des bases de données elles-mêmes lors de

l’activité de nettoyage de celles-ci :

avec, par exemple, dans la base de données 2007-02 des dates d’événement indésirables en 3009, dans la base de l’IRC 2005-02 des champs de saisie qui n’existent plus car vous avez demandé au collaborateur en charge de cette étude de supprimer des pages du masque de saisie sans vous soucier du paramétrage de l’exportation et donc des conséquences dans la base de données !!

— la non formation des data-managers sous leur logiciel principal de travail (Capture System) a persisté malgré les remarques précédentes qui vous ont été adressées avec un temps de travail

énorme du fait de leurs lacunes et des heures supplémentaires qui leur ont été payées afin de palier comme ils pouvaient au défaut de formation et de management,

— la non formation des data-managers permanente sous le deuxième logiciel utilisé (SAS), m’ayant obligée à programmer moi-même des listings d’incohérences afin de les aider lors de notre processus de nettoyage des bases de données.

— le désintérêt total des procédures de data-management dont vous aviez pourtant la charge avec uniquement quelques mots rajoutés par si par là depuis leur création en 2006.

— Au sujet de la gestion du logiciel Capture System et de l’éditeur du logiciel dont vous aviez la charge, il apparaît que le fournisseur vous envoyait lors de chaque mise à jour des documents à récupérer sur leur site ftp comportant les plans de validation à exécuter pour s’assurer du bon fonctionnement du logiciel conformément aux normes de validation des logiciels de data-management que nous suivons (norme FDA 21 part 11). Vous ne m’avez jamais informée de l’existence de ces documents pourtant essentiels en cas d’audit de nos clients et ces documents n’ont jamais été enregistrés dans le dossier Capture System créé à cet effet. D’autre part, nous ne retrouvons la clé USB de 16 Go contenant la sauvegarde de la base de données de nos études de data-management renvoyée par le fournisseur Ennov le 13 1.Comme vous le savez le règlement intérieur interdit de faire sortir des documents de l’entreprise merci donc de renvoyer cette clé si elle est en votre possession ou de nous indiquer où elle se trouve. Tout ceci témoigne de votre attitude de rétention d’information même par rapport à la Direction et même d’une certaine intention de nuire à l’entreprise.

Votre absence met en outre en évidence l’insuffisance de transmission des informations à d’autres collaborateurs: ainsi, nos services sont dans l’incapacité de poursuivre le travail à réaliser dans le cadre de la gestion des unités thérapeutiques pour l’étude AB SCICENCE ABO5039 : non seulement, ils n’ont pas reçu la formation nécessaire, mais, en outre, et votre courrier du 21 février nous l’a confirmé, vous n’avez jamais établi le document de travail relatif à l’exploitation du module CS Monitor dans le cadre de la gestion des unités thérapeutiques; en effet, si ce document existait, vous n’auriez pas manqué, compte tenu de l’obligation de loyauté qui persiste même en cas d’arrêt maladie, de nous indiquer où le trouver!

Ceci démontre, de votre part, une volonté de rétention des informations et du savoir faire de notre société, particulièrement nuisible à notre structure que notre client n’a pas manqué de déplorer.

Lors des diverses remarques que j’avais déjà été contrainte de vous adresser pour relever vos manquements, votre seule réponse a été 'je n’ai pas le temps'.

Vous aviez pourtant le temps pour réaliser l’avancement des études tous les mois afin de procéder à leur facturation, de faire passer les entretiens de recrutement d’opérateurs de saisie pour des contrat à durée déterminée de 3 mois puisque vous n’avez pas manqué de vous plaindre quand j’ai décidé de vous enlever ces tâches afin que vous puissiez vous concentrer sur l’essentiel, le travail de data-management et la qualité de nos bases de données, comme vous le savez absolument critiques dans notre métier.

On peut par ailleurs relever que l’essentiel de vos tâches à réaliser notées dans votre calendrier Outlook partagé sont des rendez-vous à 18h00, heure à ne pas dépasser afin de quitter les bureaux afin d’aller chercher vos enfants à l’école, alors que votre poste est un des plus hauts postes de l’entreprise et que tous les collaborateurs sont encore sur le site au moment où vous quittez les locaux à 17h45 et que certains ont d’ailleurs jugé très négativement le fait que le Responsable parte le premier !

Je viens en outre d’apprendre de par des entretiens avec des data-managers dont vous aviez la responsabilité que votre gestion de ceux-ci était plus que déplorable et certains de nos collaborateurs se sont sentis discriminés, rabaissés du fait du comportement que vous avez adopté à leur égard (agressivité, dénigrement …), vous aviez pourtant reçu en juin 2010 une formation en management d’équipe de 3 jours !

Je viens également d’apprendre que vous exerciez des pressions sur les data-managers afin qu’ils ne me fassent pas remonter les problèmes à chacune de mes demandes de peur des représailles que vous auriez pu exercer à leur encontre en mon absence.

Il apparaît également que certains ont eu le sentiment que 'vous vous preniez pour la patronne'.

Vous avez-d’ailleurs vous-même dit lors de notre réunion de direction du 24 janvier 2012 devant les différents chefs de service et moi-même que vous étiez responsable de site alors que votre contrat stipule clairement que vous n’étiez en charge QUE de la production.

Ceci démontre que vous n’avez pas compris, ou feignez de n’avoir pas compris votre poste (cf contrat ci-joint et fiche de poste).

Votre attitude lors de mes précédentes mises au point, au lieu d’être constructive, n’a été que de tenter de monter les data-managers contre moi en hurlant au téléphone 'nous les data-managers,

on est nul'.

Je me vois en conséquence contrainte, puisque vous n’avez pas cru devoir tenir compte de mes remarques précédentes, de vous adresser un avertissement écrit, et vous confirme que cette sanction présente un caractère disciplinaire.'

A la date de cet avertissement, Mme M était en arrêt maladie depuis le 27 janvier 2012.

Le contrat de travail de Mme M, recrutée initialement comme statisticienne, a fait l’objet de plusieurs modifications depuis sa conclusion le XXX, des responsabilités accrues lui étant confiées.

Lors de la dernière modification importante début janvier 2009, date à partir de laquelle sa supérieure hiérarchique Mme Y, gérante de la société Statitec, a pris en charge la structure sise à Mandelieu la Napoule (06), Mme M demeurée sur le site de Labège (31), était promue responsable de production.

Sa fiche de poste précise que 'Sous la responsabilité de la directrice de biométrie, les attributions de N M sont les suivantes :

* Coordonner et encadrer les équipes statisticiens, data-managers et assistantes de monitoring, opérateurs de saisie sur l’ensemble des projets (études épidémiologiques et études cliniques) afin de s’assurer du respect des délais et de la qualité des données en collaboration avec les responsables des services Monitoring, Data-Management et Statistiques en :

— assurant la mise en place des études (contact clients pour plannings, récupération documents d’étude),

— assurant le suivi des projets,

— gérant les plannings : modifications, adaptations,

— organisant des points réguliers avec chacun en collaboration avec les Responsables des Services: projets en cours, interactions avec les autres collaborateurs, difficultés rencontrées, définition de priorités,

— contrôlant et validant la bonne exécution des tâches (relecture des documents envoyés aux Promoteurs enmonitoring et DTM,

* Faire remonter les problèmes au Responsable Biométrie: problèmes de compétence des collaborateurs, problèmes de délais, conflits entre collaborateurs ,

* Assurer la maintenance de Capture System (centralisation des problèmes, interface ennov – Clinsight, mises à jour, rédaction des fiches d’exigence, fiches de non-conformité ..),

* Organiser et suivre la validation du logiciel Capture System ® auprès du technicien informatique ou de la personne chargée de la validation,

* Assurer la maintenance informatique (gestion des droits d’accès) en collaboration avec le Responsable Biométrie et en cas de problèmes,

* Assurer la formation des nouveaux opérateurs et data-managers,

* Participer à I’écriture des Procédures Opératoires Standards avec le Responsable DTM,

* Assurer la maintenance des dictionnaires de codage MedDRA et W-AA,

* Assurer la rédaction des propositions financières en l’absence du Responsable Biométrie, assurer la relecture des propositions financières rédigées par Responsable Biométrie',

L’organigramme de la société Statitec indique qu’à compter de 2009, des réunions quotidiennes auront lieu entre Mme Y et Mme M à 9 heures et fait dépendre de Mme M :

— le service data-management dont le responsable est M. G, dont dépendent les data-managers,

— le service Monitoring, dont la responsable est Mme J, dont dépendent les opératrices de saisie, – et le service Statistiques dont le responsable est M. P M, dont dépendent les statisticiens.

Mme M affirme, ce que confirme le registre du personnel, que M. G a quitté l’entreprise sans être remplacé au cours du deuxième semestre 2010 (en réalité le 17 septembre 2010) et que Mme A qui partageait depuis le départ de M. G avec Mme I le service data-management, est partie à son tour en décembre 2010 (le 17 décembre 2010), sans être remplacée.

Or la fiche de poste de Mme M prévoit que 'les fonctions de celle-ci sont de 'coordonner et encadrer les équipes statisticiens, data-managers et assistantes de monitoring, opérateurs de saisie afin de s’assurer du respect des délais et de la qualité des données en collaboration avec les responsables des services Monitoring, Data-Management'.

Par conséquent cette définition des attributions de Mme M sur sa fiche de poste n’indique pas qu’il lui incombe de se substituer au responsable du service data-management.

La société Statitec soutient avoir formulé des remarques dès 2010 à Mme M après avoir relevé plusieurs manquements professionnels, et confirme que ces remarques ont été formulées dans les deux mails des 18 juillet 2011 et 27 juillet 2011 versés aux débats par Mme M, laquelle considère avoir été confrontée à un surcroît de travail à la suite de départs non remplacés en 2010 et que le 24 janvier 2012, lors de la réunion organisée par Mme Y du service Data management en sa présence, madame Y formula des critiques et l’informa devant ses collaborateurs qu’elle était déchargée de l’activité statistique et du monitoring qui fonctionnaient parfaitement sans elle afin de lui permettre de se consacrer davantage au data-management. Ces affirmations de Mme M sur le déroulement de cette réunion du 24 janvier 2012 ne sont pas contredites par la société Statitec, la Cour constatant d’ailleurs qu’elles s’inscrivent dans la logique du mail du 27 juillet 2011 et que l’avertissement fait référence à cette réunion du 24 janvier 2012 à laquelle participaient d’autres salariés.

La société Statitec se prévaut également de la teneur de l’entretien d’évaluation de Mme R I, data-manager, en date du 13 mars 2012, laquelle apparaît dans l’organigramme de 2009 être placée sous la responsabilité du responsable DTM, M. G (poste vacant et non remplacé depuis 2010).

Les mails des 18 et 27 juillet 2011 confirment le ton dénigrant et les critiques violentes dénoncées par Mme M puisque

* le 18 juillet 2011, Mme Y lui écrit: 'Au vu de tout ce que j’ai pu voir depuis des mois (pbs 2005-02, pbs sur tous les creebses dans lesquels je mets mon nez, pb d’export, pbs de paramétrage des tests puisqu’au bout d’un an Eléna ne savait pas paramétrer correctement un test de base) je confirme que les data-managers sont extrêmement mal formés. Depuis un certain temps tu n’as que le mot embauche à la bouche. S’ils étaient mieux formés, ils perdraient moins de temps et en feraient moins perdre aux autres. Ta méthode de travail est donc à revoir et le 'je n’ai pas le temps’ n’est pas un argument. Le temps que tu passes avec eux n’est visiblement pas profitable. Tu attends le dernier moment pour passer les projets d’Elena, cad que je sois là pour faire remarquer qu’il manque un DTM, le dernier moment pour demander ce qu’on fait pour la BR 2009-02. Tu parlais d’immobilisme il y a qq temps, tu en es le parfait exemple aujourd’hui. J’espère vivement que tu vas te remotiver et arrêter ton petit jeu. Tu a pris le titre et le salaire, tu te débrouilles pour en assumer les fonctions'.

* le 27 juillet 2011 Mme Y lui écrit: 'je crois que tu n’as pas bien compris tes fonctions. Qu’est ce que ça veut dire ça’ 'Mon titre est aujourd’hui responsable opérationnelle et pas responsable DTM même si j’en assume l’activité'. Responsable opérationnelle signifie que tu es censée t’assurer que les projets avancent et sont faits comme ils doivent l’être! Tu t’occupes déjà pas du tout des stats puisque le service tourne sans que tu aies besoin d’y mettre le nez. C’est quoi ton poste alors’ Passer ton temps à suivre les projets de loin ou à palabrer au téléphone’ Etant donné qu’il n’y a pas de responsable DTM tu es donc censée valider leur travail et les former… tu n’as jamais validé un export au vu de toutes les conneries qu’il y a dans les BDD. Tu n’as donc que les DMP et encore il n’y a pas tous les labos.. Tu vas donc changer au plus vite ta méthode de travail car visiblement elle est mauvaise'.

La société Statitec n’est pas fondée alors que la teneur de ces deux mails démontre, comme le soutient Mme M, qu’elle a fait le choix de ne pas procéder au remplacement du responsable du service data-management, de reprocher dans le cadre de cet avertissement, à Mme M de ne pas avoir supplée à cette vacance de poste, ce qui ne relevait pas de ses attributions, que ce soit dans sa fiche de poste ou dans l’organigramme de 2009.

Elle ne peut pas davantage lui reprocher de ne pas avoir mené à bien les formations des data-managers, alors que Mme M lui avait écrit le 4 novembre 2010 'nous avons un volume de travail qui pour l’instant ne diminue pas, l’équipe fonctionne sans responsable data-management et est amenée encore à se réduire, je suis obligée aujourd’hui en effet de faire des choses que je ne faisais pas avant et je crois avoir dit à plusieurs reprises que je n’avais pas assez de temps pour former l’équipe sachant qu’ils sont nombreux à avoir besoin d’être formés’ et que la seule réponse de Mme Y avait été 'je sais tout ça. Il faut qu’ils aient de l’autonomie en ton absence et qu’ils arrêtent de se noyer dans un verre d’eau'.

En d’autres termes, la société Statitec n’est pas fondée dans le cadre de son pouvoir disciplinaire de reprocher à Mme M les conséquences de ses propres choix dans la direction et la gestion de l’entreprise.

Par ailleurs, s’il entre dans le pouvoir de direction de l’employeur de fixer des objectifs à son salarié, ceux-ci doivent être réalisables, et s’il lui appartient, également dans le cadre de ce même pouvoir, de formaliser des critiques sur la prestation accomplie par son salarié, de telles critiques doivent s’inscrire dans le respect de la dignité due à la personne du salarié.

Or le ton employé par Mme Y dans ces deux mails ne correspond pas à une telle définition, comme le fait de dénigrer un responsable de service devant ses collaborateurs ou d’utiliser un entretien d’évaluation d’un collaborateur pour motiver un avertissement.

L’entretien d’évaluation de Mme I paraît effectivement guidé puisqu’elle écrit à propos de Mme M 'depuis 2010, SM est de bonne humeur et très avenante quand tu es à Toulouse, et reprends son attitude débordée et indisponible quand tu t’en vas. Les semaines où tu es là elle arrive tôt le matin et reste tard le soir. Je pense qu’elle te passe de la crème dans le dos’ et qu’elle se contredit en se décrivant comme 'autonome dans mes projets, mes seules questions sont quelques conseils’ tout en écrivant 'absence d’encadrement, SM ne s’occupe pas de mes projets'.

De même pour justifier le reproche concernant le client IFM, la société Statitec se prévaut de mails de Mme J (responsable du service monitoring dans l’organigramme 2009) qui sont contradictoires puisque:

— le 13 février 2012 cette dernière écrit à Mme Y qui la questionne sur 'l’export IRC': 'excuse moi mais ce n’est pas moi qui est fait l’export. Je ne l’ai pas ouvert jusqu’à maintenant'

— pour écrire ensuite à la suite de nouvelles observations de Mme Y en date du 14 février se terminant par la question est donc 'où sont passées les pages 8 à 11'''''''' puisque l’export est truffé d’erreurs!!'

'je confirme que N m’a demandé de supprimer des pages vides concernant l’étude IFM-2005-02"

Enfin les reproches formalisés dans cet avertissement sur le relationnel entre Mme M et ses collaborateurs ne peuvent s’apprécier distinctement des termes mêmes employés par Mme Y dans ses mails adressés à Mme M concernant ces mêmes collaborateurs :

— ainsi le 29 novembre 2009 elle écrit à M. F auquel elle reproche des erreurs de dates saisies pour des patients : ' il n’y a rien de plus qui m’énerve que de perdre mon temps pour rattraper ces stupidités’ mais qui ensuite va adresser à Mme Y le 22 février 2012 un mail dénigrant Mme M commençant 'pour répondre à ta question, il faut que je t’explique des choses que je n’ai jamais dites…'.

— le 3 novembre 2010 elle écrit à Mme A 'merci donc de faire preuve d’un peu d’initiative au lieu d’attendre bêtement!!' et Mme A lui répond 'la tournure de tes mails est toujours agréable. Désolé d’être bête, stupide manquer d’initiative', de sorte que le long mail de Mme E en date du 14 mai 2012, faisant suite à l’envoi de trois mails de Mme Y depuis le 26 avril 2012, ne peut être considéré comme spontané.

Le fait que Mme M soit qualifiée de lunatique par certains de ses collaborateurs, dans des documents qui ne sont pas des attestations, ne peut être considéré, alors qu’elle était contrainte de gérer une situation de sous effectif impliquant des tensions, comme un fait fautif justifiant une sanction disciplinaire.

En l’état de ces éléments la Cour considère que les reproches formalisés dans cette lettre d’avertissement à l’encontre de Mme M ne sont pas justifiés et que cet avertissement doit être annulé.

En conséquence la décision du Conseil de prud’hommes doit être infirmée.

Cet avertissement a été notifié à Mme M alors qu’elle était en arrêt maladie depuis prés de deux mois, et alors que le médecin qui a signé l’arrêt de travail du 27 janvier 2012 a mentionné 'asthénie. Tr Sommeil. Anxiété en lien avec le travail'.

Si un avertissement est effectivement sans incidence sur la présence ou la rémunération de la salariée, comme le soutient la société Statitec, il ne peut qu’être observé qu’elle en rappellera néanmoins l’existence dans la lettre de licenciement pour faute grave envoyée le 25 juillet 2012, sans qu’il y ait eu entre temps repris du travail.

Cette sanction disciplinaire ne peut qu’être analysée comme procédant d’un abus du droit disciplinaire de l’employeur, s’inscrivant dans une démarche de dénigrement, puisqu’il a été précédé de cette réunion du 24 janvier 2012, au cours de laquelle Mme Y en critiquant Mme M devant ses collaborateurs et en lui apprenant en leur présence qu’elle était déchargée de l’activité statistique et du monitoring qui fonctionnaient parfaitement sans elle afin de lui permettre de se consacrer davantage au data management, a également eu un comportement de dénigrement.

Mme M est donc fondée à solliciter l’indemnisation du préjudice moral qui en est résulté, pour l’indemnisation duquel la Cour considère que la somme de 1 000 euros constitue une juste indemnisation.

* Sur la rupture du contrat de travail :

Lorsqu’un salarié sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur et que celui-ci le licencie ultérieurement, il y a lieu d’abord de rechercher si la demande de résiliation est justifiée, l’examen du bien fondé de la cause énoncée dans le licenciement ne devant intervenir qu’ultérieurement,

L’action en résiliation judiciaire du contrat de travail, fondée sur l’inexécution par l’employeur de ses obligations, ne peut aboutir que si la gravité de la violation par l’employeur de ses obligations contractuelles est incompatible avec la poursuite du contrat de travail.

La résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur produit alors les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, après avoir saisi le 5 avril 2012 le Conseil de prud’hommes d’une demande d’annulation de cet avertissement du 16 mars 2012, Mme M a sollicité dans le cadre des conclusions faxées le 21 juin 2012 la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur. Le licenciement de Mme M n’étant intervenu que postérieurement, il y a donc lieu d’examiner les faits invoqués.

En synthèse, Mme M reproche à son employeur :

* les dégradations dans ses conditions de travail et d’avoir été la cible de comportements humiliants de Mme Y à son égard, ayant engendré la dégradation de son état de santé, après avoir été témoin des mêmes faits à l’égard de collaborateurs, ,

* des reproches pendant son arrêt de travail en février 2012 et l’avertissement du 16 mars 2012,

* les difficultés rencontrées avec l’organisme de prévoyance,

* la remise en cause de la procédure d’inaptitude auprès du médecin du travail,

* le dépôt d’une plainte pénale,

* l’interruption de la procédure de licenciement pour inaptitude au profit d’un licenciement pour faute grave.

Les faits qu’elle décrit ainsi, en ce qu’ils sont répétés et injustifiés et qu’elle allègue qu’ils ont eu des conséquences sur son état de santé doivent être analysés à l’aune des dispositions de l’article L.1152-1 du Code du travail. Il résulte de ces dispositions qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Par ailleurs, l’article L.1154-1 dispose qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

* Sur les dégradations des conditions de travail et le fait d’avoir été la cible de comportements humiliants ayant engendré la dégradation de son état de santé:

Il résulte des développements précédents, et de l’examen du registre du personnel, qu’il y a eu comme le soutient Mme M plusieurs départs non remplacés de personnels au cours du deuxième semestre 2010, dont ceux de M. G et de Mme A, et que les embauches effectuées postérieurement l’ont été à deux exceptions près (Mme X et M. B) dans le cadre de contrats précaires, de très courtes durées.

Cette situation a indubitablement engendré pour Mme M une surcharge de travail, connue de Mme Y qui dans son mail du 18 juillet 2011, précédemment retranscrit, lui répondait 'Tu a pris le titre et le salaire, tu te débrouilles pour en assumer les fonctions', tout en lui faisant des reproches.

Puis le 28 décembre 2011, à l’occasion d’observations portant sur la gestion des mails, manifestement communes à tous les salariés du site de Labège, et donc adressés à ceux placés sous l’autorité de Mme M, Mme Y écrit en s’adressant à celle-ci 'tu fais du tri et tu ne balances pas tout dans les dossiers publics stp', la seule salariée à ne pas encourir de remontrances dans ce mail étant L dont le prénom est suivi de la phrase suivante 'bravo, il y en a au moins une qui applique les consignes à la lettre'.

Ce faisant Mme Y adopte effectivement à l’égard de Mme M, qui est confrontée à une situation de sous effectif se traduisant pour elle par une surcharge, un ton dénigrant, devant des collaborateurs placés sous son autorité.

Ces éléments établissent des conditions de travail dégradées, imputables aux agissements réitérés et aux propos dénigrants de Mme Y, alors qu’avant l’été 2010, les mails adressés par Mme Y à Mme M s’inscrivaient dans un cadre d’échanges normaux.

La teneur de ces messages est effectivement à rapprocher du comportement habituel de Mme Y à l’égard de ses salariés et interlocuteurs :

— à l’égard de M. F (contrat à durée déterminée) et Mme C (stagiaire), Mme Y écrit 'pas de pb ML et VP dégagent dans quelques temps’ (mail du 18 avril 2010),

— au sujet de Mme D (en contrat à durée déterminée) qui demande deux autorisations de congés fait l’objet de la réflexion 'elle a envie de travailler comme de se pendre celle là! '(Mail du 24 août 2010)

— à Mme

M (responsable statistiques), Mme Y écrit 'je ne dis pas que tes journées ne sont pas chargées, mais le nombre de fois où tu as donné un coup de main à qqun qui était en difficulté et que tu es sorti pour cette raison à plus de 20h se comptent sur les doigts d’une main. On va donc changer tout ça’ (mail du 8 septembre 2010),

— à M. K et Mme M au sujet de l’audit IPSEN, elle écrit 'ces emmerdeuses d’auditrices nous demandent une armoire fermée. On commande ça la semaine prochaine’ (mail du 8 septembre 2010),

— à Mme J et M. F elle écrit au sujet de dates mal saisies ' on ne saisit pas BETEMENT 1803 mais 18/03/2011 ça fait 50 fois que je le dis. ils sont débiles à la saisie ou quoi’ (Mail du 7 juin 2011),

— elle qualifie les DTM de 'psychorigides qui manquent de flexibilité. Il va falloir arrêter de se noyer dans un verre d’eau devant le client’ (mail du 21 décembre 2011)

— M. B est qualifié de 'brèle’ (mail du 5 janvier 2012),

— à propos d’un client elle écrit 'il sont de + en + bêtes dans ce labo’ (mail du 1er octobre 2010) et d’un autre 'je l’emmerde C Payen’ (mail du 28 mars 2011), ou encore 'il n’a qu’a se faire greffer un cerveau’ (mail du 30 mai 2011), et encore 'C d’une stupidité royale!!!' (Mail du 6 avril 2010), et aussi 'ils sont vraiment débiles! Il suffisait de quelques jours de plus. Bon courage, je ne peux pas t’aider je n’y comprends rien!'' (mail du 26 novembre 2010 adressé à 23 heures 05 à Mme M).

Mme M a été placée en arrêt de travail le 27 janvier 2012, après une réunion en date du 24 janvier 2012, évoquée dans l’avertissement, au cours de laquelle, il n’est pas contesté que Mme Y ait annoncé à Mme M devant ses collaborateurs que certaines de ses attributions lui étaient retirées.

Le certificat médical, compte tenu de ses mentions, mais aussi de la procédure d’inaptitude avec impossibilité de reclassement qui suivra, permettent à la Cour de considérer que le lien entre la dégradation de l’état de santé de Mme M et les faits qu’elle impute à Mme Y sont établis.

* Sur les reproches pendant son arrêt de travail en février 2012 et l’avertissement du 16 mars 2012:

Alors que Mme M est en arrêt maladie depuis le 27 janvier 2012, Mme Y lui écrit par mail le 1er février 2012 'encore une fois les explications données sur le projet lors de la prise en charge par les gens sont proches du néant et l’encadrement laisse largement à désirer. Sur chaque projet sur lequel je suis amenée à travailler, je trouve des choses qui ne vont pas. Je te conseille de te secouer un peu car ton travail est depuis plus d’un an absolument pas satisfaisant’ ,

puis à nouveau le 3 février 2012 :'avant de faire faire n’importe quoi aux gens, il aurait fallu me demander avant. Donc 2 solutions; soit elles re-saisissent tout dans MD soit je me perds du temps en programmation, ce qui est exclu car j’en ai marre de perdre du temps à rattraper les pbs dus à tes mauvaises consignes'.

Ces envois de mails sont suivis de l’envoi par Mme Y d’une lettre recommandée avec avis de réception le 16 février 2012 'je constate après échanges avec vos collègues que nos services ne sont pas en mesure d’assurer la poursuite du travail à réaliser dans le cadre de la gestion des unités thérapeutiques. En fait nous ne retrouvons pas parmi les procédures internes le document de travail que vous deviez rédiger relatives à l’exploitation du module CS Monitor. Ce document nous est indispensable (……) Nous vous demandons de prendre contact avec nos services ou moi même pour nous indiquer où trouver ce document ou nous communiquer les éléments que nous devrions y trouver concernant la méthode de travail'

Et un mois plus tard, la société Statitec notifie l’avertissement du 16 mars 2012, présentement annulé.

Ces actes répétés de la gérante de la société Statitec, qui ne peuvent pas être justifiés par l’exercice normal du pouvoir de direction de l’employeur, traduisent un acharnement certain de sa part sur Mme M, alors même qu’elle a connaissance de ses problèmes de santé, de sorte qu’il présentent un degré de gravité certain.

Force est de constater que cet acharnement va se poursuivre, comme le soutient Mme M, par la remise en cause de la procédure d’inaptitude, par une plainte pénale, par des obstructions au paiement des indemnités journalières.

* Sur la remise en cause par la société Statitec de la procédure d’inaptitude auprès du médecin du travail:

L’arrêt maladie de Mme M, prolongé à deux reprises, avait pour terme le 7 mai 2012.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 26 avril 2012, Mme M qui était alors en arrêt maladie depuis trois mois, avait fait connaître à la société Statitec qu’elle devait être examinée le 2 mai 212 par le médecin du travail dans le cadre d’une visite de reprise.

Alors qu’il résulte des dispositions de l’article R.4624-20 du Code du travail, applicables en l’espèce, qu’en vue de favoriser le maintien dans l’emploi des salariés en arrêt de travail d’une durée de plus de trois mois, une visite de pré reprise peut être organisée par le médecin du travail à l’initiative du salarié, et que le médecin du travail qui avait conclu à l’issue de cette visite qu’une 'inaptitude au poste de travail est prévisible. A revoir dans 15 jours. L’origine de l’inaptitude ne me permet pas de proposer des solutions de transformation ou de mutation de poste', avait transmis le 2 mai 2012 cette fiche à la société Statitec en indiquant 'je la reverrai dans 15 jours (art.R.4624-31). Une étude de poste est à prévoir', la société Statitec répondait le 4 mai 212 au médecin du travail 'la salariée devant reprendre son travail le 7 mai 2012 dans notre société, nous vous remercions de programmer sa visite de reprise, telle que prévue aux articles R4624-21 et 22 du Code du travail dans la version actuellement en vigueur au 9 mai 2012, sachant que nous sommes fermés pour le pont du 8 mai'.

Le 9 mai 2012 le médecin du travail informait la société Statitec que la visite de reprise après maladie de Mme M était fixée au 11 mai 2012, et faxait le même jour à la société Statitec un avis d’inaptitude identique à celui du 2 mai 2012, puis avisait le 11 mai 2012 la société Statitec de la nouvelle visite fixée au 25 mai 2012, en confirmant l’étude de son poste de travail et des conditions de travail convenue téléphoniquement pour le 24 mai 2012.

Le 21 mai 2015, le médecin du travail écrivait à la société Statitec avoir vu ce jour Mme M en deuxième visite et qu’elle était 'inapte définitif à son poste de travail et inapte à tout poste dans l’entreprise. L’origine de l’inaptitude ne me permet pas de proposer des solutions de transformation de poste ou de mutation'.

Le 25 mai 2012 la société Statitec répondait au médecin du travail qu’elle considérait que la visite du 2 mai ne valait pas 1re visite au sens de l’article R.4624-22, 'puisque notamment une telle visite ne pouvait pas avoir lieu qu’à partir du 7 mai. Par voie de conséquence le délai de deux semaines n’ayant pas été respecté, la déclaration inaptitude définitive en date du 21 mai ne peut produire aucun effet. Vous n’ignorez sans doute pas que Mme M a déjà engagé à notre encontre un contentieux prud’homal, vous comprendrez en conséquence que nous soyons parfaitement attentifs au respect des procédures. Nous vous remercions des lors de procéder à la deuxième visite prévue par l’article R 4624-31, laquelle ne peut intervenir, compte tenu de la première datant du 11 mai qu’à compter du 25 mai prochain'.

Le 25 mai 2012 la société Statitec écrivait par lettre recommandée avec avis de réception à Mme M, 'nous vous confirmons que nous vous considérons en congés payés le 21 mai dernier, date à laquelle vous auriez du reprendre votre poste, en suite de la fin de votre arrêt de travail. A défaut en effet, il y aurait lieu de considérer que vous êtes en absence injustifiée’ et sollicitait la remise des clés et badges en sa possession.

Le mari de Mme M répondait le 30 mai 2012 que ce courrier du 25 mai n’avait pas manqué de perturber encore plus son épouse qui n’entendait pas être en congés payés à compter du 22 mai 2012.

Le 4 juin 2012, par lettre recommandée avec avis de réception, le médecin du travail répondait à la société Statitec que la visite du 2 mai 2012 était bien une visite de reprise, puisque Mme M avait écrit en recommandé à son employeur en indiquant son souhait de reprendre, et que la première visite peut avoir lieu pendant un arrêt de travail dés lors que l’employeur a été préalablement informé de la teneur de cette visite, et que le salarié le lui a signifié, ce qui était le cas du courrier de Mme M en date du 26 avril 2012.

Le médecin du travail confirmait en conséquence que la visite du 21 mai était la deuxième visite effectuée dans le délai de 15 jours et avoir procédé à l’étude du poste de Mme M, la date convenue ayant été décalée en raison des contraintes de Mme Y.

Faisant suite à la demande de la société Statitec en date du 7 juin 2012, le médecin du travail lui confirmait son avis du 21 mai 2012 'd’inaptitude définitif de Mme M à son poste de travail et à tout poste dans l’entreprise, l’origine de l’inaptitude ne permet pas de proposer des solutions de transformations de poste ou de mutation'.

Mme M est ainsi fondée à soutenir que la société Statitec a indûment remis en cause la procédure d’inaptitude.

* Sur les difficultés rencontrées avec l’organisme de prévoyance:

Le 5 juin 2012, l’époux de Mme M écrivait à la société Statitec que la subrogation de salaire de sa femme n’était plus assurée depuis le 28 avril 2012 et lui adressait les copies des relevés d’indemnités journalières transmis par l’assurance maladie à transmettre à Uniprevoyance.

Le 26 juin 2012, la société Statitec écrivait par lettre recommandée avec avis de réception à Mme M 'nous vous rappelons que la fin de la subrogation et du maintien de votre salaire s’est arrêté au 26 avril 2012. Dés cette date nous n’avons plus eu accès à votre dossier social pour les remboursements que vous percevez de la sécurité sociale. Afin que vous puissiez percevoir le complément de revenu de notre organisme de prévoyance UNIP, nous vous demandons de nous transmettre au plus vite les IJSS qui sont en votre possession dans le but de ne pas vous mettre dans une situation financière difficile. En ce qui concerne les IJSS transmises le 7/06/2012 pour la période courant du 19/04/2012 au 20/05/2012 par M. M, le traitement est toujours en cours malgré nos multiples relances auprès de L’UNIP. Nous ne sommes par conséquent pas responsables du délai de traitement des indemnit2s de notre organisme de prévoyance'.

Mme M répondait le 3 juillet 2012 'je suis très surprise de votre demande étant donné que vous avez dénié adresser l’attestation de salaire à la la Caisse primaire d’assurance maladie suite à la réception de l’arrêt maladie pour la période du 22/05 au 22/06 et du 22/06 au 22/07. En conséquence je n’ai pas touché d’indemnités journalières depuis le 31/05. Les seuls relevés d’indemnités journalières en ma possession vous ont déjà été transmis par courrier du 7/06. Je vous remercie donc de remplir vos obligations auprès de la la Caisse primaire d’assurance maladie dans les plus brefs délais'.

La société Statitec ne justifie d’aucune démarche réelle envers l’organisme de prévoyance avant le 11 juin 2012, date du mail envoyé à Uniporevoyance, faisant suite à la réclamation formalisée par le mari de Mme M le 5 juin.

Dans ce mail M. K écrit 'voici les relevés ISJJ transmis par la salariée pour le maintien de son salaire. Attention; la fin du maintien chez nous était au 26/04/2012. Allez vous payer la salariée directement’ Avez vous besoin de nouveau élément pour finaliser le dossier''

La réponse de Uniprévoyance en date du 26 juin 2012 confirme que les décomptes de la Caisse primaire d’assurance maladie n’ont été transmis qu’avec l’envoi du mail du 11 juin 2012. Or ce n’est qu’après le 11 juin 2012 que la société Statitec fera par l’intermédiaire de M. K trois rappels à Uniprévoyance.

Mme M est donc fondée à reprocher à son employeur d’avoir fait preuve de carence à l’égard de l’organisme de prévoyance et d’avoir ainsi été à l’origine des difficultés financières rencontrées pour le paiement des compléments d’indemnités journalières auxquels elle avait droit.

* Sur le dépôt d’une plainte pénale:

Le 15 juin 2012, l’avocat de la société Statitec faxait une plainte au procureur de la République de Toulouse visant Mme M, aux termes de laquelle, après avoir rappelé que l’obligation de discrétion, de confidentialité et de non-divulgation à laquelle était tenue Mme M, il indiquait que celle-ci était en possession, de données commerciales et financières confidentielles sur lesquelles elle n’avait ni droit ni titre, qu’il s’agissait d’informations médicales substantielles, qu’une clé USB de l’entreprise avait disparu et pourrait être en sa possession et il déposait plainte contre elle pour vol et pour abus de confiance. Il soulignait qu’il serait opportun de ne pas alerter Mme M avant d’agir si une perquisition à son domicile était envisagée.

L’enquête pénale mettait en évidence, contrairement aux affirmations de la société Statitec, l’absence de données sensibles sur le disque externe saisi au domicile de Mme M dans lequel étaient retrouvés des fichiers informatiques de la société Statitec.

Elle établissait également qu’il existait un accès à distance mis en place par Mme Y permettant de travailler de son domicile, ce que Mme Y admettait dans son audition du 14 janvier 2013.

Elle déclarait en répondant à la question des enquêteurs concernant les nombre d’heures travaillées par Mme M depuis chez elle qu’elle n’en n’avait 'aucune idée. Elle avait un poste de responsable. Elle s’organisait comme elle voulait. Cet accès à distance je l’ai mis pour ça.(..) La seule chose qu’elle n’avait pas, c’est le droit de les copier sur son PC de la maison. Pour moi si elle travaillait depuis chez elle sur un fichier de Statitec, elle n’avait pas de copie de celui-ci le travail se faisant à distance'.

Du reste la Cour observe que Mme Y a reçu un mail de Mme M envoyé le 26 novembre 2010 à 22 heures 41, auquel elle a répondu en retour, élément qui démontre qu’elle avait parfaitement connaissance des conditions de travail de sa salariée (à laquelle elle reprochait néanmoins dans l’avertissement présentement annulé de partir à 17 heures 45).

Par ailleurs la perquisition du domicile de Mme M ne permettait pas d’étayer les accusations de vol de clé USB, et cette plainte était classée sans suite le 24 mai 2013.

La Cour relève que le règlement intérieur, dont se prévaut la société Statitec à l’appui de la clause de confidentialité invoquée, indique uniquement 'les salariés ayant accès à internet ou à la messagerie doivent veiller à ne pas diffuser d’informations sensibles ou confidentielles sur les activités de l’entreprise. Sont considérés comme confidentiels tous les documents de travail transmis par les clients, tous les documents en la possession de Statitec, notamment et sans que la liste soit limitative, les procédures opératoires standards, programmes SAS, macros commandes, documentation de logiciel, documentation générale'.

Ce règlement ne comporte aucune interdiction d’utilisation de clé USB, étant souligné que la société Statitec se contredit elle même au sujet de l’existence d’une clé USB que M. K atteste avoir achetée pour la société et l’avoir remise à Mme M pour qu’elle puisse l’utiliser pour les démarches professionnelles alors que son expert (rapport Forensics) écrit qu’elle lui a indiqué avant qu’il expertise le PC Yoda utilisé par Mme M qu’elle n’avait jamais acheté de clef USB de cette marque.

Ces éléments de l’enquête pénale, complétées par les échanges de mail versés aux débats par Mme M, mettent en évidence l’absence de bonne foi de la société Statitec lors de son dépôt de plainte, et caractérise également une faute d’une gravité particulière, compte tenu de l’atteinte ainsi portée à l’intégrité morale de Mme M, de surcroît à un moment où son état de santé est déjà atteint puisque le médecin du travail avait déjà conclu à une inaptitude professionnelle avec impossibilité de reclassement, ce dont la société Statitec avait connaissance.

* Sur l’interruption de la procédure de licenciement pour inaptitude au profit d’un licenciement pour faute grave:

Le 13 juin 2012, la société Statitec convoquait par lettre recommandée avec avis de réception Mme M à un entretien préalable à licenciement en raison de cet avis d’inaptitude et de l’impossibilité de reclassement, cet entretien étant fixé au 22 juin 2012.

Le 21 juin 2012, l’avocat de Mme M faxait au Conseil de prud’hommes et à l’avocat de la société Statitec, les conclusions prises dans le cadre de l’instance initiée le 5 avril 2012, formulant alors une demande nouvelle de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société Statitec.

Par lettre recommandée avec avis de réception datée du même jour, la société Statitec écrivait à Mme M qu’elle annulait l’entretien préalable fixé au 22 juin et la convoquait à un entretien préalable en raison d’un licenciement pour faute envisagé, fixé au 12 juillet 2012, puis lui notifiait par lettre recommandée avec avis de réception en date du 25 juillet 2012, son licenciement pour faute grave en raison de 'manipulations informatiques contraires à l’obligation de confidentialité', caractérisées par le fait d’avoir effectué 'plusieurs copies de sa boîte email', 'connecté sur son poste informatique une clé USB le 24 novembre 2011" et supprimé à partir du 20 janvier 2012 de nombreux fichiers.

La chronologie ci-dessus reprise met en évidence que cette modification apportée par la société Statitec dans la procédure de licenciement pour inaptitude est la conséquence de la demande formalisée le même jour devant la juridiction prud’homale dont son avocat avait été informé par le fax de conclusions qui lui avait été adressé.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que Mme M est fondée à reprocher à la société Statitec des comportements graves réitérés, caractérisant des faits de harcèlement, qui ont eu des conséquences sur l’état de santé de celle-ci, justifiant le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, l’effet de cette résiliation étant fixé à la date de la rupture du contrat par le fait du licenciement.

En conséquence, la décision des premiers juges doit être infirmée en ce qu’elle a rejeté la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et jugé le licenciement de Mme M dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Les sommes allouées par les premiers juges au titre des indemnités de préavis, et congés payés y afférent, et indemnité de licenciement ne sont pas contestées dans leur quantum, doivent être confirmées.

A la date de la rupture du contrat de travail Mme M, avait 14 ans d’ancienneté dans cette entreprise occupant plus de onze salariés, et était âgée de 38 ans.

Son salaire brut moyen pour l’année 2011 s’est élevé à 4 659.50 euros.

Elle justifie ne pas avoir retrouvé d’emploi ayant bénéficié jusqu’au 30 novembre 2015 des allocations chômage, et être prise en charge pour de graves problèmes de santé.

En l’état de ces éléments, la Cour estime que l’indemnisation du préjudice résultant de la rupture du contrat de travail, justifie de lui allouer la somme de 90 000 euros.

Mme M est fondée à faire état du préjudice moral particulier subi du fait des agissements relevant de la qualification de harcèlement de la part de la gérante de la société Statitec, singulièrement à partir de janvier 2012, justifiant l’octroi de dommages et intérêts distincts que la Cour chiffre à la somme de 20 000 euros.

L’équité commande par ailleurs qu’il soit fait application au bénéfice de Mme M des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

— Confirme le jugement du Conseil de prud’hommes de Toulouse, en date du 24 mars 2014 en ce qu’il a condamné la SAS Statitec à payer à Mme N O épouse M les sommes de:

* 21 191, 09 euros au titre de l’indemnité de licenciement.

* 13 878.47 euros au titre l’indemnité de préavis,

* 1 387.84 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.

— Infirme pour le surplus ce jugement, et statuant à nouveau:

— Annule l’avertissement en date du 16 mars 2012,

— Prononce la résiliation du contrat de travail aux torts de la société Statitec, avec effet au 25 juillet 2012,

— Condamne la SAS Statitec à payer à Mme N O épouse M les sommes de:

* 1 000 (mille) euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral lié à l’avertissement abusif,

* 90 000 (quatre vingt dix mille) euros à titre du dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail,

* 20 000 (vingt mille) euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral particulier,

* 3 000 (trois mille) euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

— Condamne la SAS Statitec aux dépens.

Le présent arrêt a étè signé par Caroline PARANT, président, et par

Chantal NEULAT, greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. NEULAT C. PARANT

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Cour d'appel de Toulouse, 18 mars 2016, n° 14/02408