Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 25 octobre 2019, n° 18/02463
TASS Haute-Garonne 4 mai 2018
>
CA Toulouse
Infirmation 25 octobre 2019
>
CASS
Rejet 18 mars 2021

Arguments

Le contenu a été généré à l’aide de l’intelligence artificielle. Pensez à vérifier son exactitude.

Signaler une erreur.
  • Accepté
    Manquement à l'obligation de sécurité

    La cour a jugé que l'employeur avait manqué à son obligation de sécurité en ne respectant pas les restrictions imposées par le médecin du travail, ce qui a causé l'accident.

  • Accepté
    Droit à une majoration de la rente

    La cour a fixé la majoration du capital représentatif de la rente au maximum, en lien avec la reconnaissance de la faute inexcusable.

  • Accepté
    Nécessité d'une expertise médicale

    La cour a jugé que l'expertise médicale était effectivement nécessaire pour évaluer les préjudices de la salariée.

  • Accepté
    Responsabilité de l'employeur pour les frais d'expertise

    La cour a ordonné que la caisse primaire d'assurance maladie avance les frais d'expertise, qui pourront être récupérés auprès de l'employeur.

  • Accepté
    Droit à des frais de justice

    La cour a condamné l'employeur à payer des frais de justice à la salariée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 
murielle-cahen.fr · 19 janvier 2024
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4e ch. sect. 3, 25 oct. 2019, n° 18/02463
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 18/02463
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute-Garonne, 3 mai 2018, N° 21601058
Dispositif : Expertise

Sur les parties

Texte intégral

25/10/2019

ARRÊT N°360/19

N° RG 18/02463

N° Portalis DBVI-V-B7C-MKGJ

CD/ND

Décision déférée du 04 Mai 2018 – Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de HAUTE GARONNE (21601058)

X-E F

B G H. Y

C/

Association GROUPE EDENIS

CPAM DE LA HAUTE-GARONNE

INFIRMATION

EXPERTISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e chambre sociale – section 3

***

ARRÊT DU VINGT CINQ OCTOBRE DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANTE

Madame B G H. Y

[…]

[…]

représentée par Me Sophie MARION, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉS

Association GROUPE EDENIS

[…]

[…]

[…]

non comparante, ni représentée à l’audience

CPAM DE LA HAUTE-GARONNE

[…]

[…]

représentée par Me Sarah MORALO (Membre de l’entrep.) en vertu d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945.1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Septembre 2019, en audience publique, devant Mme C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président, chargée d’instruire l’affaire, les parties ne s’y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

C. DECHAUX, conseiller faisant fonction de président

A. BEAUCLAIR, conseiller

A. MAZARIN-GEORGIN, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRÊT :

— RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

— signé par C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président, et par N.DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DU LITIGE:

Mme B Y, employée depuis le 16 mai 2011 en qualité d’agent d’accueil polyvalent, puis de secrétaire administrative, par l’association groupe Edenis a été victime le 19 novembre 2013 d’un accident du travail, déclaré le jour même par son employeur et pris en charge au titre de la législation professionnelle.

La caisse l’a déclarée consolidée à la date du 4 mars 2015 en retenant un taux d’incapacité permanente partielle de 7% confirmé par jugement du tribunal du contentieux de l’incapacité de Toulouse en date du 9 février 2016.

Mme Y a été licenciée le 21 novembre 2014 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par arrêt en date du 18 mai 2018, la cour d’appel de Toulouse, infirmant à cet égard le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse en date du 8 novembre 2016, a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, condamné l’association groupe Edenis au paiement à Mme Y de diverses indemnités, et ordonné le remboursement à Pôle emploi des sommes versées à la salariée dans la limite de six mois.

Mme Y a saisi le 29 juin 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans son accident du travail .

La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapé lui a reconnu le 11 avril 2017 la qualité de travailleur handicapé.

Par jugement en date du 4 mai 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne a déclaré le recours de Mme Y recevable mais mal fondé et l’a déboutée de ses demandes.

Mme Y a interjeté régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

Par conclusions remises à la cour par voie électronique le 30 juillet 2019, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, Mme Y conclut à l’infirmation de ce jugement.

Elle demande à la cour de:

* juger que l’accident dont elle a été victime est dû à la faute inexcusable de l’association groupe Edenis,

* fixer au maximum la majoration du capital de sa rente,

* juger que la majoration de la rente suivra dans les mêmes proportions l’aggravation éventuelle du taux d’incapacité,

* ordonner avant dire droit sur l’indemnisation de ses préjudices une expertise médicale aux frais avancés par la caisse primaire d’assurance maladie,

* juger que la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne fera l’avance de l’ensemble des sommes allouées en réparation de ses préjudices consécutifs à la faute inexcusable de son employeur,

* condamner l’association groupe Edenis à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises à la cour par voie électronique le 21 juin 2019, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, l’association groupe Edenis conclut à la confirmation du jugement entrepris et au débouté de Mme Y de ses demandes. Elle sollicite sa condamnation au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 13 juin 2019, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne indique s’en remettre sur la reconnaissance de la faute

inexcusable de l’employeur.

Dans l’hypothèse où celle-ci serait retenue, elle demande à la cour de juger que l’arrêt à intervenir lui sera déclaré commun, qu’elle sera chargée de procéder auprès de la victime au paiement de la majoration de la rente et au versement des préjudices extra patrimoniaux, et de:

* fixer à son maximum la majoration de la rente, soit à 2 922.41 euros,

* lui donner acte qu’elle ne s’oppose pas à la réalisation d’une expertise médicale pour évaluer les préjudices qu’elle liste,

* accueillir son action récursoire à l’encontre de l’employeur, l’association groupe Edenis,

* dire qu’elle récupérera directement et immédiatement auprès de l’association groupe Edenis le montant des sommes allouées au titre de la majoration de la rente (soit la somme de 2 922.41 euros) et de la réparation des préjudices subis par Mme Y,

* rejeter toute demande visant à la voir condamner au paiement d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

* statuer ce que de droit sur les dépens.

MOTIFS

Dans le cadre de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur destinée, notamment, à prévenir les risques pour la santé et la sécurité des salariés, les dispositions des articles L.4121-1 et suivants du code du travail lui font obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

L’employeur a, en particulier, l’obligation d’éviter les risques et d’évaluer ceux qui ne peuvent pas l’être, de planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions du travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants.

Les articles R.4121-1 et R.4121-2 du code du travail lui font obligation de transcrire et de mettre à jour au moins chaque année, dans un document unique les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs.

Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il suffit que la faute inexcusable de l’employeur soit une cause nécessaire de l’accident du travail pour engager sa responsabilité.

C’est au salarié qu’incombe la charge de la preuve de la faute inexcusable, et par voie de conséquence d’établir que son accident présente un lien avec une faute commise par son employeur, dans le cadre de son obligation de sécurité.

La faute de la victime n’a pas pour effet d’exonérer l’employeur de la responsabilité encourue en raison de sa faute inexcusable, seule la propre faute inexcusable commise par le salarié au sens des dispositions de l’article L.453-1 du code de la sécurité sociale, c’est à dire une faute d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison son auteur à un danger dont il aurait dû avoir connaissance, pouvant permettre une réduction de la rente.

Mme Y expose que le 7 octobre 2013, le médecin du travail a émis un avis d’aptitude avec restrictions concernant les manutentions lourdes et répétées. Le 18 novembre 2013 il lui a été demandé d’installer une salle de réunion ce qui impliquait le port répété de chaises et le déplacement de tables lourdes en aggloméré qui roulaient mal. Bien qu’ayant indiqué à son employeur que ces tâches étaient incompatibles avec les préconisations du médecin du travail il lui a répondu qu’il lui appartenait de se faire aider et elle s’est blessée en déplaçant des chaises et des tables.

Elle soutient qu’en ne respectant pas les restrictions posées par le médecin du travail tant lors de son affectation à compter du 4 novembre 2013 sur un poste de secrétaire administrative avec des attributions impliquant des manutentions lourdes et répétées, que le 19 novembre 2013 en lui demandant de mettre en place la salle d’activité pour une réunion et à cet effet de déplacer chaises et tables, et en ne prenant pas de mesures de précaution pour préserver son état de santé, son employeur a commis un manquement à son obligation de sécurité constitutif d’une faute inexcusable et qu’il ne peut s’exonérer de sa responsabilité en soutenant qu’elle aurait elle-même commis une faute.

Son employeur lui oppose:

* d’une part avoir fait évoluer son poste de travail en fonction des restrictions posées par le médecin du travail, aucune des missions énumérées dans la fiche de poste de secrétaire administrative, changement de poste qu’elle avait accepté, ne contenant l’obligation d’effectuer des manutentions lourdes et répétées et avoir pris toutes les précautions pour aménager ses conditions de travail notamment en achetant un siège ergonomique,

* et d’autre part que si elle s’est blessée en manipulant des tables et des chaises de la salle de réunion c’est uniquement en raison de l’initiative qu’elle a prise seule et de son propre chef de soulever quatre chaises en même temps.

La déclaration d’accident du travail, en date du 18 novembre 2013, mentionne qu’en 'préparation de la salle d’activité avec manipulation et installation de tables et chaises avec l’aide d’un stagiaire', Mme Y 'aurait ressenti une violente douleur au niveau du dos et un craquement' et précise au titre des 'éventuelles réserves': 'la victime avait déjà signalé le matin même une douleur au dos avant de procéder à la manipulation des tables et des chaises'.

Le certificat médical initial du 18 novembre 2013 mentionne des 'dorsalgies pendant l’effort' et prescrit un arrêt de travail qui sera par la suite renouvelé.

Les circonstances de l’accident du travail ne sont pas discutées: Mme Y s’est blessée au dos, en déplaçant des chaises pour préparer, à la demande de son employeur, une salle et il résulte de l’attestation de Mme A, stagiaire, dont se prévaut l’employeur, que c’est après avoir manipulé quatre chaises empilées qu’elle a ressenti une douleur au dos.

Le 7 octobre 2013, le médecin du travail a déclaré Mme Y apte avec restrictions au poste de coordinatrice d’hébergement, les manutentions lourdes et répétées devant être évitées, étant observé que l’étude de poste réalisée par ce médecin du travail le 11 janvier 2013 listait parmi les contraintes liées à ce poste de travail 'une manutention occasionnelle sur certaines tâches: rangement des produits d’entretien livrés, manipulation des chariots de linge propres livrés, aide au transfert de résidents sur fauteuil, déplacement et rangement de mobilier'.

Le 4 novembre 2013, Mme Y a accepté une modification à son contrat de travail, occupant dès lors un poste de secrétaire administrative. La fiche de poste de secrétaire administrative datée du 1er septembre 2013, mentionne au nombre des attributions: 'la gestion des équipements, matériels, stocks et fournitures concernant l’administration'.

L’étude de poste réalisée par le médecin du travail le 14 août 2014 (après l’accident du travail) retient pour ce poste de travail occupé par la salariée la ' manutention de charges' en raison notamment les attributions suivantes:

— vérification de la distribution des petits déjeuners en chariot en l’absence d’ASH,

— vérification de la livraison de linge et tenues (deux fois par semaine),

— gestion des stocks (produits d’entretien, linge impliquant la manipulation de chariot type Rolls),

— réception de différentes livraisons, produits d’entretien, papeterie (cartons de 5 ramettes de papier),

— transfert ponctuel de mobilier (aménagement de salle de réunion, d’activité pour les résidents, salle cinéma les week-end),

— aide aux accompagnements de résidents en fauteuil roulant, préparation de salle de réunion (y compris mobilier),

— vérification de l’accompagnement / réaccompagnement des résidents en salle de repas,

— vérification de la distribution des goûters et du rangement de locaux de stockage.

Il résulte ainsi de l’examen de cette fiche de poste, que contrairement à ses affirmations, l’employeur n’a pas adapté le poste de travail de secrétaire administrative aux restrictions posées par le médecin du travail le 7 octobre 2013, et du reste dans la réponse en date du 21 janvier 2014 à la lettre du 19 novembre 2013 de la salariée se plaignant notamment de l’attribution de tâches non conformes aux préconisations du médecin du travail, la directrice de l’établissement reconnaît que 'perdurent' de telles attributions alors même qu’elles contreviennent aux restrictions du médecin du travail en ce qu’elles induisent nécessairement des manipulations lourdes (telles que les Rolls, les déplacements de résidents sur fauteuils roulants, les manipulations de cartons de fournitures, le transfert ou déplacement de mobilier) et répétées.

L’association groupe Edenis ne justifie nullement de l’existence d’un document unique d’évaluation des risques professionnels et a fortiori avoir défini des mesures de prévention pour préserver la santé de ses salariés des risques qu’elle aurait ainsi pu évaluer et la cour rappelle que l’article R.4541-3 du code du travail fait obligation spécifique à l’employeur de prendre les mesures d’organisation appropriées ou d’utiliser les moyens appropriés pour éviter le recours à la manutention manuelle de charges par les travailleurs et lorsque celle-ci ne peut être évitée, l’article R.4541-5 du même code dispose que l’employeur doit:

— évaluer les risques que font encourir les opérations de manutention pour la santé et la sécurité,

— organiser les postes de travail de façon à éviter ou à réduire les risques, notamment dorso-lombaires, en mettant en particulier à la disposition des travailleurs des aides mécaniques, ou à défaut de pouvoir les mettre en oeuvre, les accessoires de préhension propres à rendre leur tâche plus sûre et moins pénible.

Dans la déclaration d’accident du travail l’employeur a fait état de ce que la salariée s’était plainte le matin de son accident du travail de douleurs au dos, sans qu’il soit pour autant précisé, ni justifié, des mesures alors prises pour lui éviter une exposition aux risques spécifiques liés à la manutention manuelle de nature à induire des troubles musculosquelettiques alors même que le médecin du travail a proscrit les manutentions lourdes et répétées, gestes qui sont nécessairement induits par les déplacements de tables et chaises lors de l’aménagement d’une salle.

La circonstance que la salariée était ce jour là 'aidée’ par une stagiaire est inopérante pour établir que

l’employeur a organisé son poste et lui éviter l’exposition au risque, alors qu’en réalité l’instruction donnée à la salariée d’aménager la salle en pareilles circonstances caractérise le non respect des préconisations du médecin du travail et la violation fautive par l’employeur de son obligation de sécurité.

L’employeur ne pouvait pas ne pas avoir conscience du risque auquel il exposait ainsi sa salariée non seulement en raison de l’existence de ses obligations légales spécifiques de prévention des risques précédemment rappelées, mais aussi et surtout des restrictions posées par le médecin du travail, qu’il n’a en réalité jamais respectées faute d’aménagement réel de son poste de travail, et enfin de sa reconnaissance que le matin même la salariée lui avait fait part de douleurs au dos.

Ce manquement fautif de l’association groupe Edenis à son obligation sécurité est la cause de l’accident du travail du 19 novembre 2013 et il ne peut être considéré que Mme Y, en manipulant ce jour là simultanément quatre chaises pour les déplacer, a commis une faute d’une exceptionnelle gravité l’exposant à un danger dont elle aurait dû avoir connaissance.

Par infirmation du jugement entrepris, la cour juge que l’accident du travail de Mme Y en date du 19 novembre 2013 est imputable à la faute inexcusable de l’association groupe Edenis.

Lorsque l’accident du travail ou la maladie professionnelle est dû à la faute inexcusable de l’employeur, la victime a droit, en application des dispositions des articles L.452-1 et suivants du code de la sécurité sociale, à une indemnisation complémentaire de ses préjudices, et depuis la décision du conseil constitutionnel en date du 18 juin 2010, à une réparation de son préjudice au-delà des dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale, outre une majoration de la rente.

Mme Y est déclarée consolidée à la date du 4 mars 2015 avec un taux d’incapacité permanente partielle de 7%.

La cour fixe au maximum la majoration du capital représentatif de la rente soit à la somme de 2 922.41 euros, précisions faites que cette majoration de la rente suivra dans les mêmes proportions l’aggravation éventuelle du taux d’incapacité et que la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne doit en faire l’avance, en application des dispositions de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale.

L’expertise sollicitée est effectivement nécessaire à l’évaluation des préjudices.

Il résulte des dispositions des articles L.452-2 dernier alinéa et L.452-3 du code de la sécurité sociale, que la caisse récupère le capital représentatif de la majoration de la rente accident du travail ainsi que de la réparation des préjudices auprès de l’employeur, et il en est de même des frais d’expertise dont elle est amenée à faire l’avance.

L’équité commande qu’il soit fait application au bénéfice de Mme Y des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et l’association groupe Edenis qui succombe en ses prétentions doit être déboutée de ce chef de demande.

Enfin, compte tenu de l’expertise ordonnée, les dépens doivent être réservés en fin de cause.

PAR CES MOTIFS,

— Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

— Dit que l’accident du travail de Mme Y en date du 19 novembre 2013 est imputable à la faute

inexcusable de l’association groupe Edenis,

— Fixe au maximum la majoration du capital représentatif de la rente (soit 2 922.41 euros),

— Dit que la majoration de la rente suivra dans les mêmes proportions l’aggravation éventuelle du taux d’incapacité,

— Avant dire droit sur l’indemnisation des préjudices de Mme Y:

* Ordonne une expertise médicale,

* Commet pour y procéder:

le professeur Norbert Telmon, expert inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel de Toulouse, CHU Rangueil, unité médico-judiciaire

[…]

[…],

Tel : 05.61.32.30.70

et à défaut

le Docteur C D, expert inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel de Toulouse,

Hôpital Rangueil,

Service de médecine légale,

1 avenue X Pouilhès,

[…],

Tel : 05.61. 32.29.70

avec pour mission de:

— Convoquer, dans le respect des textes en vigueur Mme Y,

— Après avoir recueilli les renseignements nécessaires sur l’identité de Mme Y et sa situation, les conditions de son activité professionnelle, son statut et/ou sa formation s’il s’agit d’un demandeur d’emploi, son mode de vie antérieur à son accident du travail et sa situation actuelle,

— A partir des déclarations de Mme Y, au besoin de ses proches et de tout sachant, et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités de traitement, en précisant le cas échéant, les durées exactes d’hospitalisation et, pour chaque période d’hospitalisation, le nom de l’établissement, les services concernés et la nature des soins,

— Recueillir les doléances de Mme Y et au besoin de ses proches, l’interroger sur les conditions d’apparition des lésions, l’importance des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences,

— Décrire au besoin un état antérieur en ne retenant que les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles,

— Procéder, en présence des médecins mandatés par les parties avec l’assentiment de Mme Y à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par elle,

— Analyser dans un exposé précis et synthétique:

* la réalité des lésions initiales

* la réalité de l’état séquellaire

* l’imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales en précisant au besoin l’incidence d’un état antérieur,

— Tenir compte de la date de consolidation fixée par l’organisme social,

— Préciser les éléments des préjudices limitativement listés à l’article L452-3 du code de la sécurité sociale:

* Souffrances endurées temporaires et/ou définitives:

Décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant des blessures subies pendant la maladie traumatique en distinguant le préjudice temporaire et le préjudice définitif, les évaluer distinctement dans une échelle de 1 à 7,

* Préjudice esthétique temporaire et/ou définitif:

Donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique, en distinguant le préjudice temporaire et le préjudice définitif. Évaluer distinctement les préjudices temporaire et définitif dans une échelle de 1 à 7,

* Préjudice d’agrément:

Indiquer, notamment au vu des justificatifs produits, si la victime est empêchée en tout ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisir,

* Perte de chance de promotion professionnelle:

Indiquer s’il existait des chances de promotion professionnelle qui ont été perdues du fait des séquelles fonctionnelles,

— Préciser les éléments des préjudices suivants, non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale:

* Déficit fonctionnel temporaire:

Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, pour la période antérieure à la date de consolidation, affectée d’une incapacité fonctionnelle totale ou partielle, ainsi que le temps d’hospitalisation.

En cas d’incapacité partielle, préciser le taux et la durée,

* Assistance par tierce personne avant consolidation:

Indiquer le cas échéant si l’assistance constante ou occasionnelle d’une tierce personne (étrangère ou non à la famille) est ou a été nécessaire, avant consolidation, pour effectuer les démarches et plus

généralement pour accomplir les actes de la vie quotidienne, préciser la nature de l’aide prodiguée et sa durée quotidienne,

* Frais de logement et/ou de véhicule adaptés:

Donner son avis sur d’éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, à la victime d’adapter son logement, et/ou son véhicule à son handicap,

* Préjudices permanents exceptionnels:

Dire si la victime subit des préjudices permanents exceptionnels correspondant à des préjudices atypiques directement liés aux handicaps permanents,

* Préjudice sexuel:

Indiquer s’il existe ou s’il existera un préjudice sexuel (perte ou diminution de la libido, impuissance ou frigidité, perte de fertilité),

— Établir un état récapitulatif de l’ensemble des postes énumérés dans la mission,

— Dit que l’expert pourra s’adjoindre tout spécialiste de son choix, à charge pour lui d’en informer préalablement le magistrat chargé du contrôle des expertises et de joindre l’avis du sapiteur à son rapport, et que si le sapiteur n’a pas pu réaliser ses opérations de manière contradictoire, son avis devra être immédiatement communiqué aux parties par l’expert,

— Dit que l’expert devra communiquer un pré rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits auxquels il devra répondre dans son rapport définitif,

— Dit que la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne fera l’avance des sommes allouées à Mme Y ainsi que des frais d’expertise et pourra en récupérer directement et immédiatement les montants auprès de l’association groupe Edenis,

— Dit que l’expert déposera au greffe de la cour son rapport dans le délai de quatre mois à compter de sa saisine,

— Désigne le président ou le magistrat chargé d’instruire de la 4e chambre section 3 de la cour pour surveiller les opérations d’expertise,

— Dit n’y avoir lieu au bénéfice de l’association groupe Edenis à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne l’association groupe Edenis à payer à Mme B Y la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

—  Renvoie l’affaire à l’audience du 7 janvier 2021 à 14 heures,

- Dit que les parties devront déposer et communiquer leurs conclusions selon le calendrier de procédure suivant:

- 31 août 2020 pour la partie appelante,

- 30 novembre 2020 pour les parties intimées,

— Réserve les dépens en fin de cause.

Le présent arrêt a été signé par C. DECHAUX, conseillère faisant fonction de président et N.DIABY, greffier.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

N.DIABY C. DECHAUX

Extraits similaires à la sélection

Aucune décision de référence ou d'espèce avec un extrait similaire.

Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 3, 25 octobre 2019, n° 18/02463