Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 25 mai 2020, n° 18/00449

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Chronologie de l’affaire

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Cabinet Neu-Janicki · 21 juin 2020

En sa qualité de négociateur professionnel, l'agent immobilier engage sa responsabilité délictuelle envers l'acquéreur et contractuel envers le vendeur dès lors qu'il n'informe pas les parties sur la situation exacte du bien et notamment, il doit aviser les candidats acquéreurs des vices du bien vendu dont il a pu avoir connaissance et aurait dû s'enquérir auprès des vendeurs de l'origine des désordres. En l'occurrence, l'immeuble, situé dans une zone ayant connu plusieurs cas de catastrophes naturelles dues à la sécheresse, est affecté de traces de reprises de fissures par agrafage, …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 25 mai 2020, n° 18/00449
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 18/00449
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Montauban, 18 décembre 2017, N° 17/00253
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

25/05/2020

ARRÊT N°

N° RG 18/00449 – N° Portalis DBVI-V-B7C-MCWZ

JCG/CP

Décision déférée du 19 Décembre 2017 – Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN – 17/00253

M. X

SARL LCN CONCEPT

C/

I Y

D E épouse Y

F Z

G H épouse Z

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1re Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT

***

APPELANTE

SARL LCN CONCEPT exerçant sous le nom commercial CLAIRIMMO MAXIHOME, poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP DESSART-DEVIERS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur I Y

[…]

[…]

Représenté par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL – DE MALAFOSSE – STREMOOUHOFF – GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

Madame D E épouse Y

[…]

[…]

Représentée par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL – DE MALAFOSSE – STREMOOUHOFF – GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

Monsieur F Z

[…]

[…]

Représenté par Me Thierry EGEA de la SELARL LEVI – EGEA – LEVI, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

Madame G H épouse Z

[…]

[…]

Représentée par Me Thierry EGEA de la SELARL LEVI – EGEA – LEVI, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 09 Mars 2020 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. BELIERES, président

JC GARRIGUES, conseiller

JH DESFONTAINE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : C. ROUQUET

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par C. BELIERES, président, et par C. GIRAUD, directrice des services de greffe judiciaires.

FAITS ET PROCEDURE – MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

M. et Mme Y ont acquis le 10 mai 2011 de M. et Mme Z une maison d’habitation sise sur la commune de Vazerac (82) par l’intermédiaire de l’agence immobilière LCN Concept.

En raison de l’apparition de fissures courant 2011 et après arrêté de catastrophe naturelle du 11 juillet 2012 au titre de la sécheresse pour la période du 1er au 30 juin 2011, ils ont déclaré le sinistre auprès de leur assureur, la société Areas Dommages.

Ce dernier a diligenté une expertise dont il est résulté que les désordres résultaient de tassements différentiels des sols d’assise dus à la sécheresse, mais a dénié sa garantie le 12 décembre 2014, au motif de leur antériorité à la date d’effet du contrat d’assurance, les précédents propriétaires ayant déjà déclaré et réparé un sinistre de sécheresse en 2009.

Une expertise judiciaire a été confiée à M. C par ordonnance de référé du 21 juillet 2016.

Par actes d’huissier de justice des 7, 8 et 9 mars 2017, M. et Mme Y ont fait assigner M. et Mme Z, la société d’assurances Areas Dommages et la société LCN Concept devant le tribunal de grande instance de Montauban aux fins d’indemnisation.

Le rapport d’expertise judiciaire a été déposé le 4 juillet 2017.

Par jugement contradictoire du 19 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Montauban a :

— dit n’y avoir lieu à mobilisation de la garantie décennale ;

— condamné la compagnie Areas Dommages à payer aux époux Y la somme de 137.863,03 € TTC au titre des travaux de reprise ;

— dit que cette somme sera actualisée en fonction de la variation de l’indice BT01 de la date du rapport d’expertise à celle du règlement intervenu selon les règles professionnelles des avocats ;

— dit que la compagnie Areas Dommages pourra en déduire la franchise réglementaire de 1520 € ;

— condamné la compagnie Areas Dommages à payer aux époux Y la somme de 12.407,67 € TTC au titre des frais de maîtrise d’oeuvre ;

— condamné la compagnie Areas Dommages à payer aux époux Y les frais de l’assurance dommage-ouvrage supportés par eux sur présentation d’une attestation d’assurance valant quittance de paiement de la prime ;

— condamné les époux Z d’une part à payer aux époux Y les sommes de 4380 € et de 19900 € au titre de leurs préjudices ne relevant pas de la garantie légale de la catastrophe naturelle ;

— condamné la société LCN Concept d’autre part, à supporter cette condamnation in solidum avec les époux Z, mais à concurrence de 3942 € et de 17910 € ;

— débouté les époux Z de leur demande à être eux-mêmes relevés et garantis par la société LCN Concept ;

— condamné in solidum la compagnie Areas Dommages, les époux Z et la société LCN Concept à payer aux époux Y la somme de 6000 € en application de l’article 700, 1° du code de procédure civile ;

— rejeté les autres demandes au titre des frais irrépétibles ;

— condamné in solidum la compagnie Areas Dommages, les époux Z et la société LCN Concept aux dépens, en ceux compris les frais de référé et d’expertise, et accordé le droit de recouvrement direct à la SCP Cambriel qui en a fait la demande, conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire.

Pour statuer ainsi il a retenu que l’expertise avait mis en évidence d’une part, un défaut constructif de l’immeuble tenant à la qualité de ses fondations sur des sols d’assise sensibles aux variations hydriques et d’autre part, le fait que l’immeuble vendu avait été antérieurement sinistré par l’effet de la sécheresse sur le sol d’assise et que des réparations insuffisantes, voire inutiles, avaient été réalisées par les vendeurs, ce qui caractérisait le vice de la chose vendue qui présente tous les caractères exigés par l’article 1641 du code civil ; il a considéré que la clause de non garantie par les vendeurs était sans application dès lors que les époux Z avaient une connaissance, même incomplète, du vice puisqu’ils ne contestaient pas avoir réparé des fissures apparues en 2009, ni les avoir imputées à la sécheresse pour les avoir eux-mêmes signalés en mairie, le seul fait d’avoir posé une longrine de fondation suffisant à démontrer leur connaissance de la faiblesse des fondations de l’immeuble en cas de sécheresse ; il a également estimé que la présence visible de certaines fissures réparées au moment de la vente ne suffisait pas à établir que les époux Y, acheteurs profanes, avaient connaissance du vice des fondations dans son exacte nature et toute son ampleur, alors surtout que dans l’acte de vente, les vendeurs ont déclaré n’avoir réalisé aucune construction ou rénovation, ni aucun élément constitutif d’ouvrage, ce qui était manifestement inexact ; il a souligné que l’action en réparation des préjudices subis du fait des vices cachés pouvait être engagée de manière autonome et indiqué que le vice de la chose n’étant pas à l’origine de tous les désordres actuels constatés par l’expert, l’obligation indemnitaire des époux Z serait limitée à la prise en charge des seuls préjudices qui ne peuvent être réparés par l’application de la garantie résultant de la mise en oeuvre des dispositions légales relatives aux catastrophes naturelles.

Il a retenu la responsabilité délictuelle de la société LCN Concept vis à vis des acquéreurs aux motifs qu’en sa qualité de professionnel de l’immobilier, elle avait pu constater que des fissurations avaient été réparées par le vendeur, qu’elle avait alors l’obligation de renseigner l’acheteur sur le risque particulier tenant aux phénomènes de mouvements de sols en raison d’épisodes de sécheresse, largement connus de tous les professionnels de la région, qu’en ne le faisant pas, et en ne délivrant pas la moindre mise en garde, alors qu’il ne pouvait lui échapper que ces fissures étaient susceptibles de dériver de ces phénomènes et pouvaient donc se reproduire, elle a manqué à son obligation d’information ; il a considéré que cette faute avait fait perdre aux acquéreurs une chance sérieuse de ne pas acquérir ou d’acquérir à moindre prix et de ne pas subir les différents préjudices non couverts par la garantie légale au titre de la catastrophe naturelle et a apprécié l’indemnisation de la perte de cette éventualité favorable à concurrence de 90 % de ces préjudices ; il a estimé en revanche que les

vendeurs, qui connaissaient le vice de l’immeuble et avaient tenté d’en réparer les conséquences, n’étaient pas fondés à demander à être relevés et garantis par l’agent immobilier.

La SARL LCN Concept a relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 5 février 2018 en ce qu’il a :

— condamné les époux Z d’une part à payer aux époux Y les sommes de 4380 € et de 19900 € au titre de leurs préjudices ne relevant pas de la garantie légale de la catastrophe naturelle,

— condamné la société LCN Concept d’autre part, à supporter cette condamnation in solidum avec les époux Z, mais à concurrence de 3942 € et de 17910 €,

— condamné in solidum la compagnie Areas Dommages, les époux Z et la société LCN Concept à payer aux époux Y la somme de 6000 € en application de l’article 700 ainsi qu’aux dépens, en ceux compris les frais de référé et d’expertise,

— ordonné l’exécution provisoire.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 20 septembre 2018, la SARL LCN Concept, appelante, demande à la cour, au visa de l’article 1240 du code civil, de :

— infirmer le jugement en ce qu’il a retenu sa responsabilité et l’a condamnée in solidum avec les consorts Z à payer les sommes de 3942 € et de 17910 € aux consorts Y ainsi qu’à la somme de 6000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens ;

— juger qu’elle n’a commis aucune faute, ni manquement à son devoir de conseil de nature à engager sa responsabilité ;

— débouter les consorts Z et les consorts Y de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions en ce qu’elles sont dirigées à son encontre ;

— débouter les consorts Z de leur appel incident ;

A titre subsidiaire, si sa responsabilité était retenue,

— condamner en toutes hypothèses solidairement M. et Mme Z à la relever et garantir de l’intégralité des condamnations qui pourraient intervenir à son encontre ;

— condamner tout succombant à lui payer la somme de 1800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La SARL LCN Concept reproche au tribunal d’avoir fait une présentation erronée du champ de compétence de l’agent immobilier et du périmètre du devoir d’information et de conseil de ce dernier. Elle fait observer qu’elle n’est pas expert d’assurance ou judiciaire et qu’elle n’avait aucune compétence particulière pour apprécier la nature des fissures affectant un bien immobilier qui ne présentaient au moment de la vente aucun caractère d’anormalité apparente et dont le caractère évolutif n’a été mis en évidence qu’à l’issue des expertises.

Elle indique également que le risque particulier tenant aux phénomènes de mouvement de sols en raison d’épisodes de sécheresse a bien été porté à la connaissance des acquéreurs par l’état des risques sanitaires et technologiques qui a été annexé au compromis de vente.

Elle soutient qu’en réalité la difficulté du dossier tient au fait que M. et Mme Z n’ont quant à eux pas donné une information complète et loyale, notamment sur la nature exacte des travaux

réalisés par eux en raison de précédents épisodes de sécheresse.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 12 juin 2018, M. et Mme Y, intimés, demandent à la cour de :

— confirmer la décision entreprise en l’ensemble de ses dispositions ;

Rejetant les conclusions d’appel comme infondées en droit comme en fait,

— juger que la SARL LCN Concept a commis une faute en manquant à son obligation d’information et de conseil et engagé sa responsabilité quasi-délictuelle à leur égard ;

— confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a retenu la responsabilité de la SARL LCN Concept et l’a condamnée in solidum avec les consorts Z à leur payer les sommes de 3942 € et de 17910 €, ainsi que la somme de 6000 € sur le fondement de l’article 700, 1° du code de procédure civile et aux entiers dépens de référé, de première instance en ceux compris les frais d’expertise judiciaire ;

— y ajoutant, condamner la SARL LCN Concept au règlement d’une indemnité de 4000 € sur le fondement de l’article 700, 1° du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Cambriel – Stremoouhoff – Gerbaud – Couture – Zouania en vertu des dispositions de l’article 699 du même code.

M et Mme Y rappellent que le devoir de conseil de l’agent immobilier l’oblige à recueillir toutes indications sur tout ce qui peut influer sur le consentement des parties ou faire obstacle à la vente, et notamment, en matière de construction, à informer les futurs acquéreurs des vices du bien vendu dont il a pu avoir connaissance en sa qualité de professionnel de l’immobilier et/ou qu’il ne peut ignorer.

Ils font observer qu’en l’espèce, selon l’expert, les traces de reprises de fissures par agrafage ne pouvaient, même repeintes, échapper à un professionnel de l’immobilier en janvier 2011, et que ce dernier ne pouvait ignorer l’état endémique de la sécheresse à Vazerac et aurait dû interroger M et Mme Z sur l’origine de ces désordres et les réparations effectuées.

Ils en concluent que la faute de l’agent immobilier est ainsi parfaitement établie et ils sollicitent la confirmation pure et simple de la décision entreprise.

Ils précisent qu’ils ne reprochent pas à la SARL LCN Concept de ne pas avoir mené des investigations pour connaître l’origine des désordres, mais de ne pas avoir attiré l’attention des futurs acquéreurs sur le risque qu’ils encourraient compte tenu du lien possible entre les désordres dont les spectres étaient constatables et un risque endémique connu dans la région.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 21 juin 2018, M. et Mme Z, intimés, demandent à la cour, au visa des articles 1231-1 et 1240 du code civil, de :

— réformer le jugement dont appel en ce qu’il les a déboutés de leur demande à être relevés et garantis par la société LCN Concept ;

— condamner la société LCN Concept à les relever et garantir des condamnations prononcées à leur encontre et ce à concurrence de 90 % ;

— confirmer le jugement dont appel dans toutes ses autres dispositions ;

— condamner la société LCN Concept au paiement de la somme de 3000 € au titre de l’article 700 1° du code de procédure civile à leur profit ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

M. et Mme Z affirment que lors de la visite de l’immeuble au mois de janvier 2011 par M et Mme Y et l’agent immobilier, ils ont fait état de l’ensemble des travaux effectués sur l’immeuble depuis son acquisition en novembre 1996, dont notamment ceux effectués après l’apparition des fissures en 2009, et qu’ils ont réitéré ces observations lors d’une seconde visite.

Ils soutiennent que compte tenu des informations dont elle disposait, la vigilance de la SARL LCN Concept aurait à toute le moins dû être éveillée sur les risques présentés par les sols de l’immeuble, mais que l’agent immobilier n’a formulé aucune mise en garde à M. et Mme Y et à eux-mêmes alors qu’ils avaient procédé à la réalisation de travaux de reprise qui se sont révélés inutiles, ce qu’ils ignoraient, et que si une mise en garde leur avait été adressée, ils auraient pu renoncer à la vente de l’immeuble.

Ils demandent en conséquence à être relevés et garantis des condamnations prononcées à leur encontre, à hauteur de 90 % .

MOTIFS

En raison du caractère limité de l’appel tant vis à vis des chefs du jugement que des parties intimées, seule l’action indemnitaire des acquéreurs vis à vis du seul agent immobilier au titre des préjudices ne relevant pas de la garantie légale de la catastrophe naturelle et les actions récursoires de l’agent immobilier et des vendeurs dans leurs rapports entre eux au titre de ces mêmes dommages rentrent dans la saisine de la cour.

Sur la responsabilité de la SARL LCN Concept

Il est de principe que l’agent immobilier, en sa qualité d’intermédiaire, est responsable du dommage subi par toutes les personnes parties à l’opération dont l’échec est imputable à ses fautes professionnelles, le fondement de cette responsabilité étant contractuel à l’égard de ses clients et délictuel à l’égard des autres parties.

En sa qualité de négociateur professionnel, il a l’obligation de renseigner les parties sur la situation exacte du bien qu’il est chargé de vendre, sur les modalités de l’opération et sur les difficultés éventuelles.

Il doit notamment informer les futurs acquéreurs des vices du bien vendu dont il a pu avoir connaissance en sa qualité de professionnel de l’immobilier et/ou qu’il ne peut ignorer.

En l’espèce, l’expert C considère que les traces de reprises de fissures par agrafage ne pouvaient, même repeintes, échapper à un professionnel de l’immobilier en janvier 2011, et que ce même professionnel de l’immobilier ne pouvait ignorer l’état endémique de la sécheresse à Vazerac et manquer d’interroger les consorts Z sur l’origine de ces désordres et les réparations effectuées. Cet avis est conforté par les photographies des murs de la maison après travaux versées au dossier par M. et Mme Z (pièces n° 2).

Au vu de ces fissures repeintes, un professionnel de l’immobilier normalement diligent, même s’il n’est pas un spécialiste des techniques de la construction, se devait de s’informer sur l’origine de ces fissures et sur les conditions dans lesquelles celles-ci avaient été réparées.

Il devait à tout le moins faire part de ses réserves aux acquéreurs en les informant d’un possible lien entre les travaux entrepris par les vendeurs, dont la trace était visible, et les phénomènes de catastrophes naturelles sévissant dans la région et en les invitant en tant que de besoin à approfondir cette question en effectuant des investigations complémentaires, notamment en leur conseillant de se faire assister d’un professionnel de la construction, et ce d’autant plus que la réalisation de travaux de réparation par les vendeurs n’était évoquée ni au compromis de vente ni à l’acte notarié, notamment

au titre des désordres ayant précédemment affecté l’immeuble et/ou au titre des travaux relevant de la garantie décennale effectués par le vendeur.

La SARL LCN Concept se contente de faire valoir qu’elle n’a rien constaté d’anormal, ce qui est contraire aux éléments objectifs du dossier, et que l’état des risques sanitaires et technologiques a été annexé au compromis de vente, ce qui informait les acquéreurs de l’existence d’épisodes de sécheresse dans le secteur mais ne saurait l’exonérer de son obligation d’information concernant plus particulièrement l’immeuble vendu.

Elle ne soutient et a fortiori ne démontre ni avoir informé M. et Mme Y d’un lien possible entre les spectres de fissures visibles et les arrêtés de catastrophe naturelle précédents pris sur la commune, ni même avoir interrogé M. et Mme Z sur les travaux réalisés et leur cause.

Dans ces conditions, elle a engagé sa responsabilité délictuelle envers M. et Mme Y.

Le premier juge a fait une juste appréciation des faits de la cause et du droit des parties en analysant le préjudice subi en une perte de chance de ne pas acquérir ou d’acquérir à moindre prix et en la condamnant à supporter à hauteur de 90 % les condamnations au paiement des sommes de 4380 € et 19900 € prononcées à l’encontre de M et Mme Z, in solidum avec ces derniers, soit 3942 € et 17910 € .

Sur les recours entre M et Mme Z et la SARL LCN Concept et la charge définitive des dommages

Le premier juge a débouté M. et Mme Z de leur demande de garantie formulée à l’encontre de la SARL LCN Concept. Celle-ci, non comparante en première instance, n’avait quant à elle pas formé de recours à l’encontre de M. et Mme Z.

M. et Mme Z ne rapportent pas la preuve, à leur charge, d’avoir informé leur mandataire, la SARL LCN Concept, des différentes fissures apparues sur l’immeuble et des circonstances dans lesquelles elles avaient été réparées par leurs soins.

Cela étant, dès lors qu’il était apparent que des fissures avaient été réparées, il incombait à l’agent immobilier de les interroger pour s’informer sur l’origine de ces fissures et sur les conditions dans lesquelles celles-ci avaient été réparées afin d’assurer la sécurité juridique de la transaction immobilière devant intervenir en informant les parties et en faisant insérer le cas échéant des clauses adéquates dans le compromis et l’acte de vente.

En s’abstenant de toutes diligences sur ce point, la SARL LCN Concept a engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard de M. et Mme Z.

Dans ces conditions, il y a lieu de juger que la charge définitive des condamnations au paiement in solidum des sommes de 3942 € et 17910 € doit être supportée à hauteur de 50 % par M. et Mme Z et par la SARL LCN Concept et de faire droit dans cette proportion à leurs recours respectifs, un tel partage apparaissant proportionnel à l’importance des fautes commises et à leur rôle causal respectif dans la survenance des dommages subis.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

La décision dont appel doit être confirmée vis à vis des vendeurs et de l’agent immobilier en ce qui concerne les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

La SARL LCN Concept, partie principalement perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.

M. et Mme Y sont en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens qu’ils ont dû exposer à l’occasion de cette procédure. La SARL LCN Concept sera donc tenue de leur payer la somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de M et Mme Z les sommes non comprises dans les dépens exposées à l’occasion de la présente procédure. Leur demande formée en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile doit être rejetée.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Montauban en date du 19 décembre 2017, sauf en ce qui concerne le rejet du recours formé par M et Mme Z à l’encontre de la SARL LCN Concept ;

Statuant à nouveau sur le point infirmé et y ajoutant,

Juge que la charge définitive des condamnations au paiement in solidum des sommes de 3942 € et 17910 € au profit de M. et Mme Y doit être supportée à hauteur de 50 % par M. et Mme Z et par la SARL LCN Concept ;

Fait droit dans cette proportion aux recours respectifs de M. et Mme Z et de la SARL LCN Concept ;

Condamne la SARL LCN Concept aux dépens d’appel ;

Condamne la SARL LCN Concept à payer à M. et Mme Y la somme de 2000,00 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute M. et Mme Z de leur demande formée en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Accorde à la SCP Cambriel – Stremoouhoff – Gerbaud – Couture – Zouania, avocats, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT



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