Cour d'appel de Versailles, 4 novembre 1993, n° 3502/92

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 4 nov. 1993, n° 02/00092
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 3502/92

Sur les parties

Texte intégral

ED JUR D’APPEL Extrait des minutes de Gretta de la Cour d’appel de Versailles DE

REPUBLIQUE FRANCAISE VERSAILLES

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

13ème CHAMBRE

Arrêt n° 554

Le QUATRE NOVEMBRE MIL NEUF CENT QUATRE VINGT TREIZE du 4 NOVEMBRE 1993

la Cour d’Appel de Versailles, 13ème Chambre R.G. n° 3502/92

a rendu l’arrêt contradictoire

suivant, prononcé en audience publique la cause ayant été débattue AFFAIRE :

Sté S.W.A.

en audience publique

Sté SUPREX le SEPT OCTOBRE MIL NEUF CENT QUATRE VINGT TREIZE devant :

Madame MONTEILS, Président
Monsieur BESSE, Conseiller
Madame BARDY, Conseiller

assistés de Madame LEVESQUE, Greffier. Appel d’un jugement et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la loi, du 12 novembre 1991 du

Dans l’AFFAIRE T.C. NANTERRE

(2ème Chambre) ENTRE

La société THE SCOTCH WHISKY ASSOCIATION dite

S.W.A., dont le siège social est 20 Atholl

[…]

GRANDE BRETAGNE

APPELANTE

CONCLUANT par la société KEIME-GUTTIN, Avoués près la Cour d’Appel de VERSAILLES

PLAIDANT par Maître BORYSEWICZ Avocat au 1

Barreau de PARIS

Copie certifiée conforme

Expédition exécutoire délivrée le -f NOV 093 амбер Каїни а

Не дирін



ET

La société SUPREX, dont le siège social est […]

[…]

INTIMEE

CONCLUANT par Maître JUPIN, Avoué près la Cour d’Appel de

VERSAILLES

PLAIDANT par Maître HAYAT-SORIA, Avocat au Barreau de

PARIS (D1174)

**



La société SCOTCH WHISKY ASSOCIATION (S.W.A.) est

une société de droit Ecossais dont l’objet est d’assurer la protection et la promotion des producteurs de whisky écossais.

La société SUPREX distribue un whisky d’origine française

sous le nom « X Y ».

La société S.W.A. considérant que le nom et la présentation de

la bouteille sont susceptibles de créer une confusion dans l’esprit du consommateur avec le whisky écossais, a assigné le 1er août 1990 la société SUPREX aux fins d’entendre condamner la société SUPREX

à lui payer la somme de 100.000 Francs à titre de dommages intérêts et à cesser tout usage des étiquettes litigieuses sous astreinte de 1.000 Francs par jour de retard.

par jugement du 12 novembre 1981 le Tribunal de Commerce

de NANTERRE a débouté la société S.W.A. de toute ses demandes.

La société S.W.A. a interjeté appel du jugement dont elle

poursuit l’infirmation.

Elle demande à la Cour de dire et juger que le nom "X

Y" attribué à un whisky français et l’étiquette utilisée sont de nature à créer une confusion dans l’esprit des consommateurs, entre ce whisky et ceux d’origine écossaise, qu’en commercialisant un

whisky d’origine non écossaise sous le nom de X Y la

société SUPREX a commis des actes de concurrence déloyale dont elle demande réparation dans les termes de son exploit introductif

d’instance.

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La société S.W.A. soutient que le mot « X » est écossais et

évoque indubitablement l’Ecosse pour le consommateur, que la société

SUPREX n’est pas novice en la matière ayant usé de mêmes procédés en distribuant précédemment un whisky français sous le nom de MAC

BRAYNE, qu’elle a d’ailleurs été condamnée à ce titre, que l’étiquette elle-même est de nature à entretenir la confusion, avec au centre le

blason représentant le lion écossais stylisé portant une bannière dorée, cet emblème figurant sur la plupart des whiskies écossais, que la mention élaboré en France « ne suffit pas à détruire le risque de confusion, l’étiquette figurant au dos de la bouteille n’étant pas visible et comportant en outre la mention »alcool de grain malt écossais".

La société SUPREX a conclu le 23 février 1993 à la

confirmation du jugement entrepris.

Elle fait valoir qu’elle a, au lendemain de l’assignation, fait supprimer le mot « X » de l’étiquette, que faute d’intérêt à agir,

l’action est irrecevable, que le whisky est maintenant distribué sous le

nom de « L Y », que le mot X de toute façon n’est pas exclusivement écossais, qu’il désigne en néerlandais un appareil de navigation maritime, qu’on le retrouve en Bretagne, que le mot

Y est purement français et compte tenu de la signification fait ressortir l’origine française du whisky, que l’étiquette n’est nullement tendancieuse, que le lion est inspiré de l’art héraldique, que le lion est présenté non une bannière à la patte mais tenant un glaive, que la mention « élaboré en France » en caractères d’imprimerie est beaucoup plus précise que « fabriqué » en France, que l’étiquette à l’arrière de la

bouteille a pour objet de renseigner le consommateur sur la composition du produit, qu’enfin la forme de la bouteille ne peut prêter à confusion, n’existant pas un nombre infini de formes.

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Elle fait grief à la S.W.A. de pratiquer une véritable

discrimination judiciaire à son encontre en ne poursuivant pas d’autres distributeurs français dont la présentation des produits serait également

critiquable.

Elle fait appel incident et, considérant l’action engagée contre elle particulièrement abusive et préjudiciable, n’étant qu’une entreprise familiale, sollicite la condamnation de la société appelante à lui payer toutes causes de préjudices confondues une somme de 500.000

Francs à titre de dommages-intérêts outre 30.000 Francs au titre de

l’article 700 du NCPC.

La société S.W.A. réplique qu’elle a intérêt à agir, la preuve incontestable de la suppression des étiquettes litigieuses n’étant qu’alléguée, qu’en toute hypothèse, les bouteilles portant l’étiquette ont été écoulées et rien n’indique que la société SUPREX n’utilisera

pas à nouveau cette présentation ; que le fait qu’elle n’ait pas agi

contre d’autres marques françaises est indifférent au présent litige, que

la forme de bouteille adoptée par la société SUPREX est la même que celle du whisky « JOHNY WALKER » et contribue à entretenir la

confusion.

SUR CE, LA COUR :

Considérant que la distribution par la société SUPREX de

bouteilles de whisky sous le nom « X Y » et avec

l’étiquette incriminée n’est pas contestable ni contestée du moins jusqu’à l’assignation, la société SUPREX affirmant avoir dès le

lendemain de l’assignation fait modifier le nom en supprimant le mot

X pour diffuser sous l’appellation « L.Y »;

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Considérant que la société SUPREX qui conclut à

l’irrecevabilité de la demande, pour défaut d’intérêt à agir, produit un courrier adressé à l’imprimeur sollicitant la suspension de l’impression

des étiquettes ;

Considérant que ce courrier n’établit pas que la société

SUPREX ait renoncé à utiliser le nom de « X Y », que

l’argus de l’Intermarché de novembre et décembre 1990 versé aux

débats, postérieur de plusieurs mois à l’assignation fait référence au whisky « X Y » ;

Considérant que l’intérêt à agir de la société S.W.A. qui existe

à tout le moins pour la période antérieure à l’assignation, subsiste; que

l’exception d’irrecevabilité doit être rejetée ;

Considérant que l’argument retenu par les premiers juges et repris en cause d’appel par l’intimé, de l’attitude discriminatoire de la

société S.W.A. qui n’agirait pas contre d’autres distributeurs usant de noms à consonance écossaise, doit être écarté, que sous réserve de la

preuve de la réalité d’un tel comportement judiciaire, qui reste à démontrer, cet élément ne saurait en droit comme en fait faire obstacle

à l’action engagée ;

Considérant que la société SUPREX distribue son whisky dans une bouteille de forme carrée haute qui sans être totalement identique

ressemble à celle d’un whisky écossais de renommée, "le JOHNY

WALKER", que la société SUPREX ne saurait arguer de ce qu’il

n’existe pas un choix infini de forme de bouteilles, la nature du

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produit qui y est distribué ne permettant pas d’écarter que ce choix

n’est pas dû au seul hasard ;

Considérant que la marque utilisée « X Y » et

notamment l’usage du nom « X » typiquement et notoirement écossais ne peut que créer dans l’esprit du consommateur une confusion sur l’origine du produit ;

Considérant à cet égard que la société SUPREX ne peut

sérieusement prétendre que le mot X est ainsi et surtout d’origine néerlandaise pour représenter dans cette langue un instrument de navigation maritime ; que la signification néerlandaise de ce nom est beaucoup plus confidentielle que celle écossaise ; qu’enfin la référence au mot breton qui n’a pas la même orthograph e n’est pas sérieuse;

Considérant que si le mot « Y » est un mot français et

n’a en anglais aucune signification, il reste que l’ASSOCIATION

« X Y » qui conduit à donner au mot Y une consonance anglaise, entretient la confusion incriminée pour la

distribution d’un produit dont l’origine écossaise est notoire ;

Considérant que sur l’étiquette figure l’emblème du lion reproduit presque à l’identique à celui de l’Ecosse, que la société

SUPREX ne saurait plaider qu’un tel emblème se retrouve sur les véhicules Peugeot ou les armes de Gascogne, le risque de confusion résultant là encore de l’association avec le whisky;

Considérant que le terme « élaboré en France » qui fait plus

référence à la notion de préparation ou composition que le terme

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fabriqué qui introduit la notion de transformation de matières en un

produit ne suffit pas à effacer la confusion résultant pour le consommateur de l’association des éléments ci-dessus mentionnés, pas

plus que les indications figurant sur l’étiquette au dos de la bouteille, et, en conséquence moins visible, étant relevé qu’il y est fait mention de « malt écossais »;

Considérant dès lors que la présentation générale, le nom de la marque donnée à ce whisky, l’étiquette, sont des éléments dont

l’association est de nature à créer une confusion dans l’esprit du

consommateur en lui laissant croire à l’achat d’un produit d’origine

écossaise;

Considérant que le prix auquel ce produit est offert à la vente

n’ôte pas tout risque de confusion dès l’instant que des whiskies

d’origine écossaise sont vendus à un prix similaire et tout aussi

attractif ;

Considérant que les agissements de la société SUPREX sont

constitutifs d’actes de concurrence déloyale et préjudiciables à la société S.W.A. dont l’objet est d’assurer la protection et la promotion

des whiskies écossais;

Considérant qu’il convient d’infirmer le jugement entrepris et faisant droit à la demande de dommages-intérêts de condamner la

société SUPREX à lui payer une somme de 30.000 Francs ;

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Considérant qu’il sera fait droit aux demandes de publication de la présente décision et d’interdiction d’utilisation des étiquettes de

marque « X Y » ;

Considérant que l’appel incident de la société SUPREX doit être rejeté comme non fondé;

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la société

S.W.A. la totalité des frais irrépétibles exposés, qu’il lui sera alloué une indemnité de 10.000 Francs au titre de l’article 700 du NCPC.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Constate que la société SUPREX a commis des actes de concurrence

déloyale en commercialisant sous l’appellation « X Y » des

whiskies de fabrication française,

Condamne la société SUPREX à payer à la société à la société

SCOTCH WHISKY ASSOCIATION la somme de TRENTE MILLE

FRANCS (30.000 Francs) à titre de dommages-intérêts,



Autorise la société SCOTCH WHISKY ASSOCIATIONS à publier le

présent arrêt dans 5 journaux de son choix à concurrence de la somme de CINQ MILLE FRANCS (5.000 Francs) par insertion au frais de

la société SUPREX,

Fait défense à la société SUPREX d’apposer les étiquettes de marque

« X Y » sur le whisky fabriqué en France à peine

d’astreinte de CINQ CENTS FRANCS (500 Francs) par infraction

constatée,

Déboute la société SUPREX de son appel incident,

Condamne la société SUPREX à payer à la société SCOTCH

WHISKY ASSOCIATIONS la somme de DIX MILLE FRANCS

(10.000 Francs) au titre de l’article 700 du NCPC,

Condamne la société SUPREX aux dépens de première instance et

d’appel et autorise la SCP KEIME-GUTTIN, Avoués, à les recouvrer

conformément aux dispositions de l’article 699 du NCPC,

Et ont signé le présent arrêt :

Madame MONTEILS, Président

POUR COPIE CERTIFIEE CONFORME
Madame LEVESQUE, Greffier. LE GREFFIER EN CHEF ma

L DE

LE GREFFIERعص Moutails LE PRESIDENT

مت 10

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Cour d'appel de Versailles, 4 novembre 1993, n° 3502/92