Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre, 24 janvier 2012, n° 10/09766

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch., 24 janv. 2012, n° 10/09766
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 10/09766
Décision précédente : Tribunal de commerce de Chartres, 13 septembre 2010, N° 2008/39
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

MHP

Code nac : 39H

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 JANVIER 2012

R.G. N° 10/09766

AFFAIRE :

SA BIOCOOP, XXX

C/

SARL PLANETE BIO NATURE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 14 Septembre 2010 par le Tribunal de Commerce de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2008/39

Expéditions exécutoires

Me Claire RICARD

SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD

Expéditions

Copies

délivrées le :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE DOUZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SA BIOCOOP, XXX

ayant son siège XXX

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Rep/assistant : Me Claire RICARD (avocat au barreau de VERSAILLES – N° du dossier 2010765 )

APPELANTE

****************

SARL PLANETE BIO NATURE

ayant son siège XXX

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Rep/assistant : la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD (avocats au barreau de VERSAILLES – N° du dossier 1148530 )

Rep/assistant : Me Virginie BOGUSLAWSKI (avocat au barreau de PARIS) substituée par Jérome RENAUD

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Janvier 2012 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Mme Dominique ROSENTHAL, Présidente et Madame Marie-Hélène POINSEAUX, conseiller, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Dominique ROSENTHAL, Président,

Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,

Mme Marie-Hélène POINSEAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

Vu l’appel interjeté par la société Biocoop d’un jugement rendu le 14 septembre 2010 par le tribunal de commerce de Chartres, lequel :

* l’a déboutée de ses demandes,

* a débouté la société Planète Bio Nature de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et de ses autres demandes,

* l’a condamnée à payer à la société Planète Bio Nature la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction;

Vu les écritures en date du 11 octobre 2011, par lesquelles la société Biocoop demande à la cour d’infirmer partiellement cette décision et, outre divers Dire et juger, :

* d’ordonner sous astreinte à la société Planète Bio Nature de cesser l’utilisation de la police d’écriture Bradley Hand ITC en toutes ses déclinaisons, et notamment Bold, de la supprimer de l’ensemble de ses supports de communication, et de lui en interdire l’usage pour l’avenir,

* de la condamner à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du trouble commercial subi,

* de confirmer le jugement sur le rejet de la demande reconventionnelle et du surplus des demandes de la société Planète Bio Nature,

* de condamner la société Planète Bio Nature à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction;

Vu les dernières écritures en date du 8 décembre 2011, aux termes desquelles la société Planète Bio Nature prie la cour, au visa de l’article 1382 du code civil, outre divers Constater, Dire et juger, :

* de débouter la société Biocoop de l’ensemble de ses demandes et de confirmer le jugement entrepris,

* d’infirmer le rejet de sa demande reconventionnelle et de condamner la société Biocoop à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

* de la condamner à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, avec distraction pour ceux d’appel;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu’il convient de rappeler que :

* Le 6 décembre 2007, la société Planète Bio Nature a ouvert à Chartres un magasin de type supermarché à l’enseigne Natureo, commercialisant des produits issus de l’agriculture biologique et assurant la promotion des marchés équitables, en utilisant une signalétique, reconnue comme la police Bradley Hand ITC par la société coopérative Biocoop, exerçant la même activité dans trois cents boutiques, en faisant bénéficier ses membres d’une politique commune;

* le 25 avril 2008, un constat d’huissier, autorisé par ordonnance du 16 avril 2008, a été réalisé à la demande de la société Biocoop, au motif du risque de confusion, créé par l’utilisation de cette police, dans l’esprit de sa clientèle;

* le 26 avril 2008, la société Biocoop a mis en demeure la société Planète Bio Nature de cesser cette utilisation, ainsi que tout dénigrement à son encontre, refusée par cette dernière le 9 juillet 2008;

* par acte d’huissier de justice du 28 octobre 2008, la société Biocoop a assigné en référé la société Planète Bio Nature, afin de voir ordonner la cessation de l’utilisation de la police Bradley Hand ITC;

* le 13 janvier 2009, le président du tribunal de commerce de Chartres a dit n’y avoir lieu à référé et a renvoyé l’instance au fond en application de l’article 873-1 du code de procédure civile;

Sur la concurrence déloyale :

Considérant que la société Biocoop expose utiliser dans l’ensemble de ses magasins une charte graphique contenant la police Bradley Hand ITC, élément de communication visuelle qu’elle a personnalisée en la faisant épaissir par un graphiste professionnel et dénommée Bradley Black, soit un choix original destiné à attirer l’attention du consommateur;

qu’elle reproche à la société Planète Bio Nature l’usage de cette même police, à l’extérieur et à l’intérieur de son magasin, constitutif d’un acte de concurrence parasitaire, contraire à la loyauté commerciale, lui causant un préjudice direct;

qu’elle soutient l’imitation de ses signes distinctifs, d’une ressemblance suffisante pour créer une confusion dans l’esprit du public, reprochant au tribunal de commerce d’avoir apprécié cette similitude en fonction des différences, et non d’après les ressemblances;

qu’elle oppose, au reproche d’imprécision de la société Planète Bio Nature, sa demande portant sur la police Bradley Hand ITC, et non sur celle intitulée Bradley, et lui en demande la cessation, dans toutes ses déclinaisons, en gras et en italique;

qu’elle souligne l’antériorité de son usage, depuis 2005, et le choix de cette police peu usuelle, employée, non exclusivement mais sur l’ensemble de ses supports, par une démarche de stratégie de communication, afin de se différencier de ses concurrents sur un marché très concurrentiel, et en raison de son aspect manuscrit, modifié par épaississement, s’inscrivant dans la distribution de produits écologiques et éco-produits, et d’identification de sa marque Biocoop;

qu’elle fait valoir l’absence d’effets, en matière de concurrence déloyale, de son défaut de droits sur la police litigieuse, et le risque de confusion dans l’esprit du consommateur, par sa copie servile et son utilisation identique pour présenter l’activité des magasins et les catégories de produits;

qu’elle estime que ces faits sont nécessairement constitutifs d’un préjudice reflétant la faute, soit la remise en cause de ses efforts de communication et de la créativité de sa charte graphique, permettant son identification par les consommateurs, que l’évolution de son chiffre d’affaires ne caractérise pas;

qu’elle soutient la situation de concurrence des parties, commercialisant les mêmes produits en direction d’une clientèle identique, mais avec des circuits de distribution différents;

considérant que la société Planète Bio Nature relève l’imprécision des demandes adverses de cessation de l’utilisation des polices Bradley Black, puis Bradley, ITC Bradley Hand, enfin Bradley Hand Bold, caractérisant l’absence de signe distinctif, et aux fondements juridiques incertains;

que, soulignant que les magasins bio utilisent largement les polices manuscrites, elle soutient que le consommateur moyen, incapable de les distinguer entre elles, les identifie simplement au secteur bio, et conteste avoir fait sciemment usage d’une police à caractère propre et distinctif de la société Biocoop, rappelant que cette dernière utilise plusieurs types de police;

qu’elle fait valoir l’absence d’actes contraires à la loyauté commerciale qui lui sont reprochés, comme la reproduction d’un unique signe distinctif, alors que son utilisation de cette police banale est restreinte à des supports différents de ceux de la société Biocoop, excluant tout risque de confusion dans l’esprit d’un consommateur moyen;

qu’elle conteste la valeur probante de l’extrait de la charte graphique communiqué, mentionnant trois polices dont Bradley Black et non Bradley Hand ITC, souligne que tous les magasins Biocoop ne l’utilisent pas et que les logos et couleurs des deux sociétés sont différents;

qu’elle constate que la police ITC Bradley Hand Bold, communément employée comme figurant au pack office de la société Microsoft, revendiquée par la partie adverse mais ne figurant pas à sa charte, n’est que peu utilisée dans le magazine Biocoop, les plaquettes publicitaires et le site internet de la société Biocoop, est absente des dix marques enregistrées au nom de cette société ainsi que de ses enseignes, et ne peut être qualifiée de distinctive pour un consommateur d’attention moyenne;

qu’elle fait valoir la réalisation de ses propres investissements, notamment dans une charte graphique, comprenant la police ITC Bradley Hand Bold achetée pour réaliser des affiches de promotions internes, au contraire de la société Biocoop, laquelle a rémunéré à hauteur de 30 euros le graphiste ayant mis en gras la police, ne caractérisant pas une originalité de l’oeuvre et excluant le parasitisme;

qu’elle exclut toute confusion, par les modes distincts de distribution des produits, en magasins pour la société Biocoop et en supermarchés pour elle-même, l’adjonction systématique par la société Biocoop de son logo à la police manuscrite, introduite en 2005, après dix-huit ans d’exercice de la société Biocoop;

qu’elle conteste, outre l’existence d’un lien de causalité, celle du préjudice allégué mais non établi, en l’absence d’exploitation directe des magasins par une société coopérative ayant une activité de centrale d’achats, ainsi que la concurrence avec son magasin, à défaut de baisse de chiffre d’affaires, celui de la société Biocoop ayant augmenté depuis son ouverture en 2007;

considérant qu’il est acquis que la société Biocoop et la société Planète Bio Nature exercent toutes deux une activité en rapport avec la commercialisation de produits issus de l’agriculture biologique, et emploient sur leur signalétique et leur publicité une police d’écriture manuscrite;

que l’utilisation de la police Bradley Hand ITC par la société Biocoop n’est établie ni par le document produit au débat comme un extrait de sa charte graphique, lequel ne mentionne que Bradley Black, ni par le constat d’huissier, lequel n’y fait pas référence; que la demande en concurrence déloyale ne repose que sur les photographies, affiches, documents et site internet reproduisant une police d’écriture manuscrite et irrégulière, assortie de couleurs et logos distincts suivant les parties;

que l’épaississement, revendiqué par la société Biocoop comme une personnalisation de Bradley Hand ITC, apparaît en réalité comme son impression en caractères gras (Bold), ayant donné lieu à un investissement justifié à hauteur de 33,63 euros;

qu’un caractère distinctif résulte du choix et de la combinaison de plusieurs éléments, dont la calligraphie n’est qu’un composant; qu’en l’absence de réunion et d’ordonnancement de plusieurs signes distinctifs, l’unique utilisation d’une police manuscrite, commercialisée par son propriétaire, ne présente aucune originalité caractérisant un signe distinctif attaché aux produits et magasins Biocoop;

que l’impression d’ensemble, résultant d’un examen global, fait ressortir des formes, des supports et des coloris distincts et ne présente aucune ressemblance, autre que la seule utilisation d’une police manuscrite, laquelle n’est pas un élément significatif de reconnaissance de l’enseigne Biocoop, de nature à créer un risque de confusion dans l’esprit d’un consommateur d’attention moyenne;

que le rejet de la demande fondée sur la concurrence déloyale sera en conséquence confirmé, ainsi que le parasitisme, qu’au surplus, la faiblesse de l’investissement ne peut justifier;

Sur la demande reconventionnelle:

Considérant que la société Planète Bio Nature demande l’indemnisation de son préjudice causé par l’abus de procédure, constituant une tentative de déstabilisation et une attaque d’un concurrent nouvellement installé, caractérisant l’intention de nuire par la multiplication des procédures, en dernier lieu une assignation en référé en date du 4 mai 2011, afin d’obtenir le dépôt de ses comptes pour les exercices 2008 et 2009 et une poursuite de la société La Compagnie Bio & Nature, propriétaire de la marque Natureo, caractérisant un acharnement procédural;

considérant que la société Biocoop demande confirmation du rejet de la demande de la société Planète Bio Nature, contestant avoir cherché à éliminer un concurrent et soulignant ne pas avoir demandé la fermeture du magasin de Chartres, mais simplement le retrait des supports de la police Bradley, dont la société Planète Bio Nature a indiqué qu’ils ne constituaient pas un signe distinctif de son exploitation;

considérant que la multiplication des procédures et voies de recours établit à l’encontre de la société Biocoop l’intention de d’intimider un concurrent pour l’éliminer du marché et caractérise un abus de droit, ayant occasionné à la société Planète Bio Nature un préjudice excédant la nécessité d’assurer la défense de ses droits, lequel sera réparé par l’allocation de la somme de 10 000 euros;

Sur les autres demandes:

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la société Planète Bio Nature la charge de ses frais irrépétibles;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

— CONFIRME la décision déférée, à l’exception du rejet de la demande indemnitaire de la société Planète Bio Nature,

— STATUANT à nouveau sur ce point, condamne la société Biocoop à payer à la société Planète Bio Nature la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

— CONDAMNE la société Biocoop à payer à la société Planète Bio Nature la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— CONDAMNE la société Biocoop aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Dominique ROSENTHAL, président, et par Alexandre GAVACHE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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