Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 3 avril 2014, n° 13/05691

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 16e ch., 3 avr. 2014, n° 13/05691
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 13/05691
Sur renvoi de : Cour de cassation, 2 juillet 2013
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 03 AVRIL 2014

R.G. N° 13/05691

AFFAIRE :

D X

C/

BANQUE CIC OUEST ANCIENNEMENT DENOMMEE CREDIT INDUSTRIEL DE L’OUEST …

Décision déférée à la cour : Décision rendu le 03 Juillet 2013 par le Cour de Cassation de PARIS

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : B 12-16655

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Chantal DE CARFORT de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, avocat au barreau de VERSAILLES -

Me Emmanuel JULLIEN de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE TROIS AVRIL DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

DEMANDEUR devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013 cassant et annulant partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel de PARIS le 1er mars 2012,

Monsieur D X

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

assisté de Me Chantal DE CARFORT de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 334, Me Xavier CAZOTTES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0473

****************

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI :

BANQUE CIC OUEST ANCIENNEMENT DENOMMEE CREDIT INDUSTRIEL DE L’OUEST (CIO)agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

2 avenue Jean-J Bonduelle

XXX

XXX

assistée de Me Jean François MOLAS de la SCP MOLAS LEGER CUSIN & ASSOCIÉS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0159, Me Emmanuel JULLIEN de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20130589

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 12 Février 2014, Monsieur Jean-Baptiste AVEL, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO ;

FAITS ET PROCEDURE,

Par acte du 21 décembre 1990, la banque CIC Ouest, anciennement dénommée le CREDIT INDUSTRIEL DE L’OUEST, a consenti un prêt de 2.500.000 francs sur sept ans à la société WEST COAST INVEST ;

Par acte du 7 janvier 1991, D X, associé majoritaire de la société WEST COAST INVEST, s’est porté caution solidaire à hauteur de 2.000.000 francs ;

Par acte du 21 janvier 1991, les parts de la société H I ont été acquises par la société WEST COAST INVEST, à l’exception de deux parts acquises par Monsieur Z et Monsieur X ;

Par avenant du 23 janvier 1993, la durée du prêt consenti par la banque à la société WEST COAST INVEST a été portée à 10 ans et le montant de l’engagement de caution de D X a été augmenté à 2.440.000 francs le 24 février 1993 ;

Le 24 mars 1997 Monsieur X et Monsieur Z ont conclu un accord de reprise des sociétés WEST COAST INVEST et H I avec la société SYNERGIE ;

Par acte du 3 avril 1997, D X a substitué à son engagement de caution du 24 février 1993 un engagement de caution solidaire de la société WEST COAST INVEST du remboursement d’un prêt de 1.826.969 francs pour une durée de cinq ans ;

La société WEST COAST INVEST a cessé de rembourser le prêt et la banque a prononcé la déchéance du terme et mis D X en demeure de respecter son engagement de caution, les 11 mars et 13 septembre 2002 ;

Par jugements du 13 septembre 2001et du 3 janvier 2002, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard, respectivement, de la société H I et de la société SYNERGIE, procédure étendue, le 11 juillet 2002, à la société WEST COAST INVEST ;

La banque a déclaré sa créance au passif de la société WEST COAST INVEST, et par acte du 3 juin 2003, a assigné D X en paiement ;

* **

Vu le jugement rendu le 28 septembre 2005 par le tribunal de grande instance de PARIS qui a condamné D X à payer à la banque Crédit Industriel de l’Ouest la somme de 98.252,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2002, a condamné la banque à payer à D X la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts, ordonné la compensation entre ces sommes, débouté les parties du surplus de leurs demandes, ordonné l’exécution provisoire et fait masse des dépens à supporter pour les deux tiers par la banque et pour un tiers par D X ;

Vu l’arrêt rendu le 5 avril 2007 par la cour d’appel de PARIS qui a confirmé le jugement en ce qu’il a condamné D X au paiement des sommes dues au titre de son engagement de caution, y ajoutant, ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du Code civil, infirmé le jugement en ce qu’il a condamné le Crédit Industriel de l’Ouest à des dommages et intérêts, statuant à nouveau, rejeté les demandes de D X, et l’a condamné à payer à la banque Crédit industriel de l’Ouest une somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel ;

Vu l’arrêt rendu le 19 juin 2008 par la Cour de cassation qui a annulé en toutes ses dispositions l’arrêt du 5 avril 2007 et renvoyé les parties devant la cour d’appel de PARIS autrement composée ;

Vu l’arrêt rendu le 1er mars 2012 par la cour d’appel de PARIS qui a confirmé le jugement déféré en ce qu’il a condamné D X à payer au Crédit Industriel de l’Ouest la somme de 98.252,83 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2002 et en ce qu’il a débouté la banque de sa demande en paiement de la somme de 6.583,76 euros, y ajoutant, ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, à compter du 3 juin 2003, dans les conditions de l’article 1154 du code civil, infirmé le jugement en ce qu’il a condamné la banque à des dommages et intérêts et en ce qu’il a partagé les dépens, statuant à nouveau, rejeté les demandes de D X, condamné celui-ci à payer à la banque Crédit Industriel de l’Ouest la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu l’arrêt rendu le 3 juillet 2013 par la première chambre civile de la Cour de cassation qui a cassé et annulé mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle de D X dirigée contre le Crédit Industriel de l’Ouest, l’arrêt rendu le 1er mars 2012 par la cour d’appel de PARIS, remis la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel de VERSAILLES ;

Vu la déclaration de saisine de la cour de renvoi du 19 juillet 2013 ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 24 décembre 2013 par lesquelles D X

— conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a considéré que le cautionnement qu’il a souscrit était largement disproportionné par rapport à son patrimoine,

— demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner le Crédit Industriel de l’Ouest à lui payer la somme de 98.252,83 euros, outre le paiement des intérêts qui seraient dus à la banque au titre de l’engagement de caution,

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il n’a pas considéré que le Crédit Industriel de l’Ouest avait commis des fautes lors de l’octroi du prêt à la SOCIÉTÉ WEST COAST INVEST le 7 mai 1998,

— statuant à nouveau, condamner le Crédit Industriel de l’Ouest à lui payer la somme de 60.000 euros à titre de dommages-intérêts,

— débouter le Crédit Industriel de l’Ouest de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

— condamner le Crédit Industriel de l’Ouest à lui payer la somme de 30.000 euros, TVA en sus, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 26 novembre 2013 par lesquelles la BANQUE CIC OUEST, anciennement dénommée le Crédit Industriel de l’Ouest, demande à la cour de :

— débouter D X de l’intégralité de ses demandes,

— réformer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamnée à payer à Monsieur X la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts, ordonné la compensation, et fait masse des dépens à supporter pour les 2/3 par la banque et pour 1/3 par Monsieur X,

— statuant nouveau, condamner Monsieur D X à lui payer 15.000 euros au titre des frais irrépétibles de lère instance et d’appel sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu l’ordonnance de clôture du 4 février 2014 ;

* **

Considérant qu’au soutien de ses demandes, l’appelant expose que le tribunal a parfaitement jugé que le cautionnement consenti par D X le 3 avril 1997 était disproportionné par rapport à son patrimoine et a tout naturellement condamné la banque CIC Ouest à lui verser des dommages-intérêts ; qu’il reproche toutefois au jugement d’avoir limité le montant des dommages-intérêts demandés sur le fondement de l’article 1147 du code civil et sollicite à ce titre l’octroi de la somme de 98.252,83 euros outre le remboursement des intérêts qui ont déjà été payés à la banque CIC Ouest au titre de l’engagement de caution ; qu’il reproche également au jugement de n’avoir pas admis que la banque avait commis des fautes lors de l’octroi du prêt à la société Synergie et à Monsieur Y, prêt formalisé le 7 mai 1998 et sollicite à ce titre, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, la somme de 60.000 euros de dommages-intérêts ; qu’il indique qu’il n’était plus, à la signature de l’engagement de caution du 3 avril 1997 et a fortiori lors de la conclusion du prêt le 7 mai 1998, ni associé ni dirigeant des sociétés West Coast Invest et H I et que dès lors, il ne peut en aucune manière être considéré comme une caution avertie, étant rappelé que le cautionnement qu’il a consenti a été considéré comme un cautionnement civil par le tribunal de commerce de Paris ;

Considérant que, sur le cautionnement disproportionné, D X expose que la Cour de cassation a souhaité, postérieurement à l’arrêt MACRON arrêt de principe du 17 juin 1997, cantonner l’application du principe de proportionnalité aux cautions non dirigeantes, la Cour considérant que ne peut être considérée comme caution avertie que la caution dirigeante ; que D X fait valoir qu’il n’était pas une caution avertie, et qu’en conséquence son engagement de caution du 3 avril 1997 était manifestement disproportionné avec ses biens et revenus ;

Qu’il indique avoir déclaré, en 1995 : 101.720 francs de revenus imposables, soit 15.507,11 €, en 1996 : 99.540 francs (15.174,77 euros), en 1997 : 140.176 francs (21.369,69 euros) et en 1998 : 249.229 francs (37.994,71 euros) ; que le seul bien qu’il ait détenu au 3 avril 1997 était un studio dans le 17e arrondissement à Paris, hypothéqué de surcroît au profit de l’établissement bancaire, et dont la cession en avril 1998 n’a permis que de retirer la somme de 378.900 francs (57.7621,93 €) ; que le prêt consenti à la société West Coast Invest, d’un montant de 1.826.969 francs (278.519,63 €), était remboursable en 84 mensualités de 21.749,63 francs chacune, soit 3.315,70 € par mois ; que, si l’on compare cette échéance de remboursement (3.315,70 €) aux revenus mensuels de D X en 1997 (21.369,69 € /12 = 1.780,80 €), on s’aperçoit que l’échéance de remboursement est deux fois supérieure à son revenu mensuel et qu’ainsi, chaque échéance de remboursement correspond à deux mois de revenus ;

Qu’en réponse aux arguments de la banque, D X fait valoir que :

— il n’était plus associé ni dirigeant des sociétés West Coast Invest et H I à la date du cautionnement du 3 avril 1997 ;

— le cautionnement donné en 1997 avait un caractère différent de ceux précédemment consentis et le prêt de 1998 s’analysait en un nouveau prêt ;

— n’étant pas une caution informée, ni une caution commerciale, ni une caution dirigeante, en d’autres termes, n’étant pas une caution avertie, il n’a pas à apporter la preuve que la banque CIC Ouest aurait eu sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l’état du succès de l’exploitation de la société, des informations que lui-même aurait ignorées ;

— le cautionnement du 3 avril 1997 était une condition suspensive de la reprise des sociétés West Coast Invest et H I signifie seulement que la banque doit accepter l’engagement sur cinq ans de D X et les conditions financières posées par la société Synergie ;

— le contrat de collaboration entre la société J K N et la société MBM n’impliquait pas que D X connaissait la situation de l’emprunteur ni qu’il avait un quelconque droit de regard sur leur gestion ;

— la diminution des engagements de D X est demeurée virtuelle ;

Considérant que, sur les fautes de la banque dans l’octroi du crédit à la société West Coast Invest, D X fait valoir que l’organisme bancaire a commis trois fautes à l’occasion de l’octroi du prêt :

— il n’a pas réalisé d’étude de faisabilité relatif au projet de Monsieur Y,

— il n’a pas conseillé D X lors de son engagement de caution,

— il n’a pas sollicité la caution de Monsieur Y ;

Considérant que la banque CIC Ouest, intimée, demande à la cour de débouter D X de l’ensemble de ses demandes ; que, sur la prétendue disproportion manifeste du cautionnement, elle expose que le protocole de cession du 24 mars 1997 était un acte établi sous différentes conditions suspensives et qu’ainsi, contrairement à ses affirmations, D X était toujours à la date de la signature de l’engagement de caution du 3 avril 1997, associé et dirigeant de droit des sociétés West Coast Invest et H I ;

Qu’elle considère que D X était une caution avertie en ce qu’il disposait de toutes les informations utiles pour apprécier la portée de son engagement dont il pouvait peser les risques dès lors que cet engagement se substituait à un précédent, eu égard aussi à sa profession, son âge, son expérience, étant lui-même coiffeur et chef d’entreprise, et à sa parfaite connaissance de l’activité et du patrimoine de la société cautionnée, étant fondateur et ancien associé majoritaire de la société West Coast Invest dont il connaissait l’exacte situation ;

Qu’elle ajoute que D X ne rapporte pas la preuve que la banque aurait eu sur ses charges, patrimoine, ressources et facultés de remboursement raisonnablement prévisibles, des informations qu’il aurait ignorées ;

Que finalement, la banque CIC Ouest considère que D X n’est pas fondé à rechercher sa responsabilité à raison de la disproportion entre le montant de l’engagement et sa capacité financière ;

Que, subsidiairement, la banque CIC Ouest fait valoir que le cautionnement en cause n’aggravait pas la situation de D X et ne saurait en conséquence être disproportionné ; qu’au contraire, il lui permettait de diminuer le montant de ses dettes ; que le protocole de reprise prévoyait la conclusion d’un contrat de collaboration entre la société J K N et, par le biais de MBM, Monsieur X ; que, contrairement à ce qu’il prétend, la réduction de ses engagements n’était pas virtuelle ; que la caution de 1997 permettait en fait à D X d’obtenir de nouveaux revenus qui n’ont été versés qu’en 1997 et de réduire le montant de ses engagements personnels, tels que la résiliation d’autres engagements de caution consentis à diverses banques pour un montant minimal de 600.000 francs ;

Que, plus subsidiairement, la banque CIC Ouest invoque l’absence de disproportion manifeste alors que le cautionnement de 1997 se substituait à celui de 1993 et que D X ne justifie pas de ses revenus et patrimoine en 1993 et n’explique pas pour quelle raison cette réduction de son engagement pourrait être disproportionnée ; qu’elle ajoute que D X était propriétaire de biens immobiliers à Paris dans le 17e arrondissement dont il estimait lui-même la valeur en 1990 entre 1,2 et 1,3 millions de francs, et qu’en 1998, ses revenus ont connu une forte augmentation ;

Que la banque allègue enfin que le préjudice de l’appelant n’est nullement démontré ;

Que, sur les prétendues autres fautes invoquées par D X, l’intimée fait valoir que le prêt cautionné ne bénéficiait pas à Monsieur Y mais à la société West Coast Invest, le prêt de 1998 était une restructuration du prêt de 1990 dont il a été établi une étude préalable, qu’il ne s’agissait que d’un rééchelonnement du prêt consenti à la demande de D X, que celui-ci était parfaitement informé de la situation des sociétés en cause et que le banquier ne disposait d’aucune information que D X aurait ignorée ; qu’enfin le choix des garanties appartient au créancier ;

* * *

Considérant que, par arrêt du 3 juillet 2013, la Cour de cassation, après avoir dit, d’une part, que la cour d’appel n’avait pas recherché si le montant des revenus et du patrimoine de la caution était proportionné à son cautionnement au jour où il s’était engagé, soit le 3 avril 1997, d’autre part, que la cour d’appel s’était abstenue de répondre au moyen propre à établir que le cautionnement était disproportionné par rapport aux revenus de Monsieur X dont il justifiait du montant et, d’une troisième part, que la cour d’appel n’avait pas expliqué en quoi le seul élément patrimonial constitué par l’appartement de M. X, évalué à 560.000 francs en 2008, ajouté aux revenus modestes déclaré par lui, n’était pas disproportionné par rapport à un cautionnement du triple de la valeur du bien, souscrit dix ans plus tôt, a cassé et annulé, 'mais seulement en ce qu’il rejette la demande reconventionnelle de M. X dirigée contre le CIO, devenu CIC Banque CIO', l’arrêt rendu le 1er mars 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Paris;

Considérant que, sur la disproportion du cautionnement, il convient d’apprécier cet élément à la date de son engagement de caution, soit le 3 avril 1997 ;

Qu’en effet, si D X s’est porté caution solidaire à hauteur de 2 millions de francs le 7 janvier 1991, du prêt consenti par le Crédit Industriel de l’Ouest à la société West Coast Invest le 21 décembre 1990, à une époque à laquelle il était associé majoritaire de cette société, le montant de sa caution a été augmenté le 24 février 1993, et c’est seulement le 3 avril 1997 qu’un nouvel engagement de caution, différent du précédent par sa nature, s’est substitué à l’ancien à hauteur de 1.826.969 francs pour une durée de cinq ans ;

Que le tribunal, par le jugement déféré à la cour, a justement apprécié que le 3 avril 1997 D X n’était plus gérant ni associé de la société West Coast Invest, bénéficiaire du prêt octroyé par le Crédit Industriel de l’Ouest- CIO- le 21 décembre 1990 ; que la banque fait valoir que D X était toujours le 3 avril 1997, associé et dirigeant de droit des sociétés West Coast Invest et H I ; que toutefois, D X n’était plus dirigeant de la société West Coast Invest, dont les cessions de part étaient intervenues le 24 mars 1997 ; que le 20 mars 2007, une assemblée générale de la société West Coast Invest a agréé la SARL Synergie en qualité de nouvel associé et qu’une assemblée générale de la société H I a agréé B Y en qualité de nouvel associé, et que le 24 mars 1997, D X et la SARL Synergie ont conclu un acte de cession de parts sociales des 400 parts détenues par D X dans la société West Coast Invest ; que l’article 2 de cet acte dispose que 'le cessionnaire sera propriétaire des parts cédées à compter de ce jour avec tous les droits y attachés’et que D X et M. B Y ont conclu un acte de cession de parts sociales concernant la part détenue par D X dans la société H I ; qu’il est stipulé, dans chaque cas que 'le cessionnaire sera propriétaire des parts cédées à compter de ce jour avec tous les droits y attachés’ ;que les statuts de la société West Coast Invest mis à jour le 7 avril 1997 mentionnent que les 500 parts constituant le capital social de la société sont divisées entre la société Synergie (400 parts) et B Y (100 parts) ; que l’engagement de caution était essentiellement destiné à obtenir des cessionnaires, les sociétés Synergie et Monsieur Y, la suppression des cautions de sa mère et de la famille Z de leurs engagements ; que D X ne disposait pas d’information sur la situation financière de la société Synergie, repreneur, dirigée par Monsieur Y ;

Que par de justes motifs, le jugement déféré à la cour a dit que s’il connaissait bien le passé de la société West Coast Invest dont il acceptait de supporter les impayés sur le prêt litigieux à la date de la cession, il n’en allait pas de même s’agissant des conditions de son exploitation pour la période postérieure et qu’il n’y avait dès lors pas lieu de considérer que D X était une caution informée ;

Considérant qu’il ressort des déclarations et avis d’imposition qui sont produits aux débats par l’appelant que son revenu brut global était de 99.540 francs (15.175 euros) pour l’année 1996, de 140.176 francs (21 369 euros) pour l’année 1997 et de 249.229 francs (37.994 euros) pour l’année 1998 ;

Que D X était propriétaire d’un appartement situé XXX dont il est justifié qu’il était hypothéqué au profit du CIC Banque CIO ; qu’en dépit de l’estimation de la valeur de ce bien qui a pu être faite avant la crise qui a frappé l’immobilier à la fin des années 1990, il est établi que la vente de cet appartement intervenue en avril 1998 pour un montant de 560.000 francs ne lui a permis que de récupérer un montant moindre compte tenu essentiellement du remboursement du prêt CIO (125.774 euros) et d’un prêt CAIXABANK (49.991 euros) ; que l’échéance mensuelle de remboursement du prêt (1.826. 969 francs) consenti à la société West Coast Invest était d’un montant mensuel de 21.749,63 francs ;

Qu’il s’ensuit que, quelle qu’ait pu être la cause du cautionnement pour la société Synergie et Monsieur Y et en dépit de l’existence alléguée d’un contrat de collaboration entre la société MBM et la société J K N inopérant en l’espèce, les revenus et le patrimoine de D X étaient, à la date de son engagement de caution le 3 avril 1997, largement disproportionnés à son cautionnement ;

Que la banque a manqué à son devoir de conseil occasionnant ainsi une perte de chance; que la cour est en mesure d’évaluer à la somme de 30.000 euros le montant des dommages-intérêts qui seront attribués à D X en réparation de son préjudice, venant en compensation de la somme due au titre des échéances impayées et du capital restant dû ;

Considérant que le tribunal a justement apprécié que les autres fautes reprochées à la banque sur le fondement des dispositions de l’article 1382 du code civil n’étaient pas justifiées; qu’il ne saurait être reproché une absence d’étude de faisabilité du projet de Monsieur Y s’agissant d’une caution solidaire de la société West Coast Invest dont il n’est nullement démontré que la situation était compromise alors que les premiers incidents de paiement ne devaient intervenir qu’à la fin de l’année 2000 ; qu’il ne peut être reproché à la banque de n’avoir pas mis en garde D X du risque de défaillance du débiteur qui n’était pas prévisible à la date du cautionnement ; qu’il ne peut davantage lui être reproché d’avoir 'manqué à tous ses devoirs’ envers D X en ne sollicitant pas Monsieur Y afin qu’il s’engage en qualité de caution ; que la banque n’avait aucune obligation particulière d’avoir recours de sa propre initiative à cette personne comme à quiconque d’autre ;

Que D X ne justifie d’aucun préjudice non réparé par la présente décision;

Considérant que l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que les dépens de première instance et d’appel seront partagés par moitié entre les parties;

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris à l’exception du montant de la condamnation de la banque Crédit Industriel de l’Ouest,

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Condamne la banque CIC Ouest, anciennement dénommée Crédit Industriel de l’Ouest, à verser à Monsieur X la somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts,

Rejette le surplus des demandes,

Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

Fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties ;

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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