Cour d'appel de Versailles, 1 mars 2016, 14/08465

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Sommaire

Arrêt rendu le 1er mars 2016 par la 12e chambre section 2 de la cour d’appel de Versailles RG 14/08465

Saisie de l’indemnisation du vol des marchandises ayant fait l’objet d’un contrat de commissionnaire pour leur transport de Brest à Ndjamena (Tchad) via le Cameroun par mer, train et route, la cour a fait une application de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 23 octobre 2014 (n° C-305/13) pour dire que la loi applicable pouvait être recherchée sur le fondement de l’article 5 du règlement Rome I.

Saisie d’une demande d’application de limite de garantie du vol en vertu de la Convention inter-Etats de transport multimodal de marchandises de l’Union douanière et économique de l’Afrique Centrale du 5 juillet 1996, la cour a dit que cette convention était invocable, alors que le Cameroun, où ont été détournées les marchandises, et le Tchad étaient liés à cette convention.

La cour a cependant écarté le bénéfice de la garantie prévue par cette convention au motif qu’en produisant un simple enregistrement électronique des dates et lieux de transport des marchandises, le commissionnaire de transport ou son sous-commissionnaire n’apportaient pas la preuve d’avoir conclu un contrat unique de transport multimodal au sens de l’article 1 paragraphe 3 de la convention.

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 1er mars 2016, n° 14/08465
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/08465
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 14 octobre 2014, N° 2012F4448
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000032200032
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

DA

Code nac : 55B

12e chambre section 2

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 1er MARS 2016

R. G. No 14/ 08465

AFFAIRE :

SA CMA CGM venant aux droits de la Société DELMAS

C/

Compagnie HISCOX

Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 15 Octobre 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

No Chambre : 01

No Section :

No RG : 2012F4448

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Mélina PEDROLETTI

Me Bernard RIDET,

Me Patricia MINAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE PREMIER MARS DEUX MILLE SEIZE,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SA CMA CGM venant aux droits de la Société DELMAS

No SIRET : B 5 62 024 422

4, quai d’Arenc

13002 MARSEILLE

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626- No du dossier 23010

Représentant : Me Cyril DE SALINS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Compagnie HISCOX

1 Great St Helens

EC3A 6HX- LONDON

ROYAUME UNI

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

Compagnie AMLIN CORPORATE INSURANCE

Meir 48 B

ANTWERPEN-2000

BELGIQUE

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SAS SDMO INDUSTRIE

12bis rue de la Villeneuve

29200 BREST

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SAS SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE (SDV-IL)

No SIRET : 552 08 8 5 36

31 quai de Dion Bouton

92800 PUTEAUX

Représentant : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619- No du dossier 20140577- Représentant : Me Sylvie NEIGE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1771

SA GENERALI IARD

7 boulevard Haussmann

75009 PARIS

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SA Compagnie ALLIANZ GLOBAL § SPECIALITY FRANCE

Rue du général de Gaulle, Tour Opus

12-77 Esplanade de la Défense 9

92081 PARIS LA DEFENSE CEDEX

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SA Compagnie NANTAISE D’ASSURANCES MARITIMES ET TERRESTRES

46 bis rue des Hauts Pavés

44000 NANTES

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SA COVEA FLEET

160 rue Henri Champion

72035 LE MANS CEDEX

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SA Compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS

4 rue Jules Lefebvre

75009 PARIS

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

SA Compagnie GAN EUROCOURTAGE venant aux droits de GROUPAMA TRANSPORTS

8/ 10 rue d’Astorg

75008 PARIS

Représentant : Me Bernard RIDET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 178

Représentant : Me Pierre-olivier LEBLANC du LLP HOLMAN FENWICK WILLAN France LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J040

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 Janvier 2016 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Monsieur François LEPLAT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

FAITS  :

La société SDMO Industrie (¿ société SDMO'), établie à Brest, a conclu avec la société SDV logistique internationale (¿ société SDV'), établie à Rennes, un contrat de commission pour le transport maritime et terrestre par conteneur de pièces de rechange d’un groupe électrogène d’un poids de 5682 kilos et d’une valeur de 369 137, 10 euros au départ de Brest et à destination de Ndjamena (Tchad) via Douala (Cameroun). La société SDV a sous-traité l’organisation du transport maritime des marchandises depuis le Havre, puis terrestre de Douala jusqu’à Ndjamena à la société Delmas Cameroun (absorbée depuis par la société CMA-CGM), établie à Douala, laquelle, selon un connaissement combiné numéro FR3320123 du 17 juillet 2011, a pris en charge la marchandise jusqu’au port de Douala puis a confié à la société Getma Cameroun, établie à Douala, le déplacement des marchandises jusqu’à Ndjamena qui à son tour a confié le transport par train à la société de transport Camrail, établie au Cameroun.

Déchargé le 1er septembre au port de Douala où il est resté entreposé jusqu’au 22 octobre 2011, le conteneur a été contrôlé en gare de trains de N’Dgaoundéré (Cameroun) le 9 novembre 2011 par les autorités douanières qui ont dressé un procès-verbal constatant qu’il était dépourvu de scellé, qu’il était endommagé et que 2 cartons déchirés étaient vides. La société Milicom Tigo destinataire des marchandises établie à Ndjamena a réceptionné le conteneur qui a été dépoté entre le 30 novembre et le 12 décembre 2011, et les manquants ont été contradictoirement relevés par les représentants des sociétés SDV, CMA-CGM et Delmas et Atlantic Survey Co puis ont donné lieu à un rapport d’intervention du 24 octobre 2012 à la demande de la société SDMO et de son cabinet d’assurance Besse.

La valeur des marchandises manquantes a été fixée à 61 836, 81 euros et la société SDMO a supporté la prix de l’acheminement par voie aérienne des pièces manquantes pour 5 089, 80 euros.

Par acte du 7 novembre 2012, la société SDMO ainsi que les compagnies Generali Iard, Allianz global corporate & spéciality France, Nantaise d’assurances maritimes et terrestres, Covea fleet, Axa corporate solutions, Gan eurocourtage-venant aux droits de Groupama transforts, Hiscox et Amlin corporate insurance-venant aux droits de Fortis corporate insurance (¿ les assureurs') ont fait assigner la société SDV en vue de la voir condamner à leur payer pour les assureurs subrogés 61 836, 81 euros et pour la société SDMO 5 089, 80 euros, et par acte du 30 novembre 2012, la société SDV a appelé en garantie la société CMA-CGM venant aux droits de la société Delmas.

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par jugement du 15 octobre 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a  :

— joint les instances enrôlées sous les numéros 2012F04448 et 2013F00058,

— dit que les assureurs ont un intérêt à agir et débouté la société SDV et la société CMA-CGM de leur fin de non-recevoir,

— condamné la société SDV à payer aux assureurs la somme globale de 61 836, 81 euros majorée des intérêts calculés au taux légal à compter du 7 novembre 2012, avec anatocisme,

— condamné la société SDV Logistique Internationale à payer à la société SDMO la somme de 4 677, 92 euros majorée des intérêts calculés au taux légal à compter du 7 novembre 2012, avec anatocisme, déboutant pour le surplus,

— condamné la société CMA-CGM venant aux droits de la société Delmas à relever et à garantir la Société SDV de toutes les condamnations en principal, intérêts et frais prononcée à son encontre,

— condamné la société SDV à payer les assureurs à la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société CMA-CGM venant aux droits de la société Delmas à payer à la société SDV la somme 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire sans garantie,

— condamné la société CMA-CGM venant aux droits de la société Delmas aux dépens liquidé pour le greffe à 294, 36 euros, dont TVA 49, 06 euros.

* *

Vu l’appel interjeté le 26 novembre 2014 par la société CMA-CGM  ;

Vu les dernières conclusions remises par le RPVA le 4 septembre 2015 pour la société CMA-CGM aux fins de voir au visa des articles L. 133-1 et suivants du code de commerce, 1134 et 1147 du code civil, de la Convention Inter-Etats de transport multimodal de marchandises en UDEAC signée le 5 juillet 1996  :

— déclarer la société CMA-CGM venant aux droits de la société DELMAS recevable et bien fondée en son appel,

— infirmer le jugement en toutes ses dispositions, notamment en ce qu’il a considéré que la Convention Inter-Etats de transport multimodal de marchandises ne devait pas s’appliquer et a, en conséquence, condamné la société CMA-CGM à garantir la société SDV à hauteur des sommes de 61 836, 81 euros et 4 677, 92 euros,

Et statuant à nouveau :

— dire et juger la Convention Inter-Etats de transport multimodal de marchandises applicable à l’opération litigieuse,

— dire et juger que la société CMA-CGM est fondée à invoquer la limitation légale de responsabilité tirée de la Convention Inter-Etats de transport multimodal de marchandises en UDEAC à hauteur de la somme de 9 542, 01 euros,

— ordonner la restitution, par les sociétés SDV, SDMO et les assureurs, du trop-perçu, soit la somme de 60 093, 53 euros, à la société CMA-CGM,

— débouter les sociétés SDV, SDMO et les assureurs de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions contraires,

En tout état de cause :

— condamner tout succombant à payer la somme de 6 000 euros à la société CMA-CGM au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel dont le montant sera recouvré par Maître Pedroletti, Avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

* *

Vu les dernières conclusions remises par RPVA le 21 avril 2015 pour la société SDV logistique internationale aux fins de voir au visa des articles L. 133-1 et suivants du code de commerce, et L. 132-4 et suivants du code de commerce, des dispositions de la Convention Inter-Etats de transport multimodal de marchandises en UDEAC signée le 5 juillet 1996 :

— déclarer la société CMA-CGM recevable mais mal fondée en son appel principal,

— dire la société SDV recevable et bien fondée en son appel incident,

— confirmer le jugement en ce qu’il a dit et jugé la société SDV recevable et bien fondée à solliciter la condamnation de la société CMA-CGM à la relever et garantir de toute condamnation en principal, intérêts et frais qui pourraient être mise à sa charge,

— dire et juger que la responsabilité de la société CMA-CGM est pleine et entière,

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a écarté les limitations de responsabilité,

Et statuant de nouveau :

— dire et juger la Convention Inter-Etats de transport multimodal de marchandises en UDEAC signée le 5 juillet 1996 applicable à l’opération litigieuse

— dire et juger que la responsabilité de la société CMA-CGM est limitée à hauteur de 9. 542, 01 euros,

— dire et juger que toute condamnation ne peut excéder la somme de 9 542, 01 euros,

En tout état de cause :

— faire droit à la demande de la société SDV à l’encontre de société CMA-CGM,

— condamner cette dernière à la relever et garantir de toute condamnation qui viendrait à être prononcée à son encontre,

— condamner tout succombant à régler à la société SDV la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la société Minault, Avocat et ce conformément aux code de procédure civile.

* *

Vu les conclusions remises par RPVA le 30 juin 2015 pour la société SDMO industrie et les assureurs aux fins de voir au visa des articles L. 132-4 et L. 132-5 du code de commerce, 1165, 1250, 1149 à 1151 du code civil :

— confirmer le jugement du 15 octobre 2014,

— condamner la société SDV à régler à la société SDMO et aux assureurs la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ?

* *

Vu l’ordonnance de clôture du 10 novembre 2015.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux conclusions remises par les parties dans lesquelles elles ont développé leurs prétentions et leurs moyens.

SUR CE,

1. Sur le conflit de lois applicables au contrat de commission de transport et les conditions aux limites de garanties de la Convention ITM UDEA

Considérant que pour conclure que l’indemnisation des manquants ne peut excéder la somme de 9 542, 01 euros, les sociétés SDV et CMA-CGM relèvent que la perte des marchandises est imputable à la société Getma Cameroun à laquelle leur transport a été confié par voie ferrée et sur route depuis Douala jusqu’à Ndjamena, et revendiquent le bénéfice de la limitation de leur responsabilité prise en application de la Convention inter-Etats de transport multimodal de marchandises de l’Union douanière et économique de l’Afrique Centrale du 5 juillet 1996 (¿ convention ITM UDEA') qui dispose en son article 22, que « L’entrepreneur de transport multimodal n’est pas admis au bénéfice de la limitation de responsabilité prévue dans la présente Convention s’il est prouvé que la perte, le dommage ou le retard de la livraison résultent d’un acte ou d’une omission qu’il a commis, soit avec l’intention de provoquer cette perte, ce dommage ou ce retard, soit témérairement et en sachant que cette perte, ce dommage ou ce retard en résulteraient probablement »  ;

Qu’elles soutiennent que la convention ITM UDEA est applicable à la suite de l’article 5 du règlement (CE) no 593/ 2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (¿ règlement Rome I') suivant lequel « à défaut de choix exercé conformément à l’article 3 du règlement, la loi applicable au contrat de transport de marchandises est la loi du pays dans lequel le transporteur a sa résidence habituelle, pourvu que le lieu de chargement ou le lieu de livraison ou encore la résidence habituelle de l’expéditeur se situe aussi dans ce pays. Si ces conditions ne sont pas satisfaites, la loi du pays dans lequel se situe le lieu de livraison convenu par les parties s’applique » ;

Considérant que pour s’opposer à l’application de la clause limitative de la convention ITM UDEA, la société SDMO et ses assureurs se prévalent, en premier lieu, de l’article 2 de cette convention d’après lequel elle ne trouve à s’appliquer aux contrats de transport multimodal que si « le lieu de la prise en charge des marchandises par l’entrepreneur de transport multimodal, tel qu’il est prévu dans le contrat de transport, est situé dans un Etat contractant », et relèvent que la marchandise a été prise en charge en France et que l’Etat français n’est pas partie à cette Convention pour en déduire que le règlement Rome I relatif à la loi du conflit n’est pas applicable ;

Que cependant, et d’une première part, en disposant que la loi désignée par le règlement s’applique même si cette loi n’est pas celle d’un Etat membre, l’article 2 du règlement Rome I pose un principe d’universalité de la loi qui a pour effet d’enlever toute condition de réciprocité à l’application du règlement, sauf aux cas de lois de police, lesquelles sont sans application au litige, en sorte que le moyen doit être écarté ;

Que par ailleurs, et de seconde part au cas où les parties n’ont pas choisi la loi applicable au contrat, la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit dans son arrêt du 23 octobre 2014 (no C-305/ 13) que l’article 4, paragraphe 4 de la Convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980 (devenu article 5 du règlement Rome I) doit être interprété en ce sens que la loi applicable à un contrat de transport de marchandises doit, à défaut de pouvoir être fixée en application de la deuxième phrase de cette disposition, être déterminée en fonction de la règle générale prévue au paragraphe 1 de cet article, c’est-à-dire que la loi régissant ce contrat est celle du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits ;

Qu’il est constant que la société SDMO, la société SDV et la société Delmas ont convenu d’un contrat de commission de transport, de sorte que le conflit de lois doit être réglé en application de l’article 4 paragraphe 3 du règlement Rome I à la suite duquel il convient de procéder à une comparaison en fonction de l’ensemble des circonstances, des liens existant entre le contrat et la France, le Cameroun et le Tchad  ;

Qu’alors que la société SDMO s’est accordée avec la société SDV pour l’organisation du déplacement des marchandises par les voies terrestres sur les territoires du Cameroun et du Tchad, il convient de retenir la loi régissant la situation des marchandises au fur et à mesure de leur acheminement, et tandis qu’il est constant que les marchandises ont été détournées lors de leur transport par la voie ferrée sur le territoire du Cameroun, que suivant le connaissement de transport combiné par train et par route des marchandises entre le Cameroun et le Tchad émis par la société Delmas Cameroun, il est stipulé que pour la partie terrestre depuis Douala jusqu’à N’Djamena que « Tout litige ou réclamation naissant en vertu de ce connaissement, y compris les actions en garantie ou en cas de pluralité de défendeurs, seront régis (…) pour la partie non-maritime du transport : soit par les dispositions figurant dans toute Convention Internationale ou Loi Nationale obligatoirement applicable ou par la Loi Française applicable aux moyens de transport utilisés », et qu’enfin, le Cameroun est uni au Tchad par la convention ITM UDEA, il en résulte que les sociétés SDV et CMA-CGM sont bien fondées à invoquer son application  ;

Considérant en deuxième lieu, que la société SDMO et ses assureurs invoquent les articles 5 et 20 de la Convention ITM UDEA pour conclure que son application n’est pas impérative ;

Qu’au demeurant, les limites de garantie de la Convention ITM UDEA invoquées par les appelantes ne sont pas contredites par l’article 5, qui réserve la priorité de l’application des conventions internationales ou des législations nationales sur la Convention ITM UDEA aux seules lois de police relatives à la réglementation et au contrôle des opérations de transport et des entrepreneurs de transport multimodal, et tandis que l’article 20 de la Convention ITM UDEA se limite à préserver l’application de limites de responsabilité plus élevées qui seraient reconnues par conventions internationales ou des législations nationales par préférence aux limites fixées par la Convention ITM UDEA, ces dispositions ne sont pas de nature à exclure l’application de cette Convention dont la force obligatoire pour les contrats de transport multimodal est énoncée en ses articles 2 et 3  ;

Mais considérant en troisième lieu, qu’aux termes de son article 3 paragraphe 1, la Convention ITM UDEA est d’application obligatoire à la condition qu’ait été conclu un contrat de transport multimodal défini à l’article 1 paragraphe 3 de la Convention comme étant un « contrat unique par lequel un entrepreneur de transport multimodal s’engage, moyennant paiement d’un frêt, à exécuter ou à faire exécuter un transport multimodal international » ;

Que ni les courriels du 28 juillet 2011, ni les extractions de fichiers électroniques édités par la société Getma Cameroun que la société CMA-CGM a communiqués, ne sont de nature à établir la preuve que la société Delmas ou la société Getma Cameroun ont souscrit aux obligations attachées au contrat unique de transport multimodal, et alors au surplus, que les relevés du fichier électronique de la société Getma Cameroun ne sont pas même conformes aux conditions d’émission du document de transport multimodal devant être stipulées en application des articles 6 et 9 et de la Convention ITM UDEA, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a écarté l’application de la convention et, donc, du plafond de garantie, revendiquée par les sociétés SDV et CMA-CGM.

2. Sur la responsabilité des commissionnaires dans le détournement des marchandises

Considérant qu’aux termes de leurs conclusions, la société SDMO avec ses assureurs, et les sociétés SDV et CMA-CGM, se prévalent, chacun, de l’article 22 de Convention ITM UDEA précité, pour soutenir, les premiers, que les commissionnaires de transport n’ont pas pris les mesures élémentaires de sécurisation et de surveillance du conteneur lors de sa phase ferroviaire et en considération de la réputation difficile de la traversée du corridor trans-camerounais et des nombreux arrêts de train dont celle-ci est l’occasion  ; que les secondes prétendent que l’entrepreneur de transport multimodal est la société Getma Cameroun et que le commettant et ses assureurs ne démontrent pas que cette dernière aurait commis une faute intentionnelle en soutenant par ailleurs, que ni le moment ni le lieu de la disparition de marchandises ne sont déterminés  ;

Mais considérant en premier lieu, qu’à la suite du § 1 du présent arrêt, le bénéfice de la Convention ITM UDEA a été écarté, en sorte que les conditions attachées par cette convention à la déchéance du droit de limiter la responsabilité ne trouvent pas à s’appliquer à l’espèce  ;

Considérant en deuxième lieu, qu’il s’évince de articles L. 132-5 et L. 132-6 du code de commerce que le commissionnaire est garant des avaries ou pertes de marchandises et effets, s’il n’y a stipulation contraire dans la lettre de voiture, ou force majeure, et est d’autre part garant des faits du commissionnaire intermédiaire auquel il adresse les marchandises  ;

Et considérant en troisième lieu, que, sauf cas de force majeure, les responsabilités des sociétés SDV et société CMA-CGM sont encourues même si l’intermédiaire substitué n’a commis aucune faute ou si l’origine du dommage demeure inconnue, de sorte que par ces motifs, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a retenu leur responsabilité et les a condamnées à indemniser le préjudice résultant intégralement des détournements.

3. Sur les frais irrépétibles et les dépens

Considérant que la société SDV succombe en son appel en sorte qu’il est équitable de la condamner à verser à la société SDMO et à ses assureurs la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

Contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions  ;

Y ajoutant,

Condamne la sociétés SDV logistique internationale à verser à la société SDMO Industrie et aux compagnies d’assurance Generali Iard, Allianz global corporate & spéciality France, Nantaise d’assurances maritimes et terrestres, Covea fleet, Axa corporate solutions, Gan eurocourtage-venant aux droits de Groupama transforts, Hiscox et Amlin corporate insurance-venant aux droits de Fortis corporate insurance, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile  ;

Condamne in solidum la société SDV Logistique Internitonale et la société CMA-CGM aux dépens  ;

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur X…, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier f. f., Le président,

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